Pronom impersonnel

De Arbres
(Redirigé depuis Personne zéro)

Il existe en breton plusieurs pronoms impersonnels distincts.


  • un pronom vide déclenchant une marque particulière de l'accord verbal (-er au présent), comme dans les autres langues celtiques
  • un pronom impersonnel créé à partir d'une grammaticalisation du groupe nominal [un humain]: an nen ou an den, comme le on en français ou man dans les langues germaniques
  • les pronoms de seconde personne, qui peuvent aussi avoir des lectures impersonnelles, comme en français


Chacune de ces formes est concurrentielle avec les formes passives.

A signaler aussi que le préfixe em- a parfois le sens de 'facile à V' (emsav, emwerzh, Kervella 1947:§882), une lecture compatible avec une lecture impersonnelle.


La marque d'accord -er, -ed

Comme les autres langues celtiques, le breton a un sujet vide impersonnel. Ce pronom vide impersonnel déclenche typiquement la marque de conjugaison -er sur le verbe au présent.


(1) Pa vezer en dour ne soñjer e mann ebet, se a ra vad d'ar spered.
quand1 est.on dans le eau ne1 pense.on dans rien aucun cela R fait 1bien à1 le esprit
'Quand on est dans l'eau, on ne pense à rien, cela fait du bien à l'esprit.'
Standard, Kazetenn Ya 944, [11/07/2023]


(2) Lavaret e vije ez eur bet o c'hoari got dre aman.
d.it R serait R+C est.on été à4 jouer billes par ici
'On dirait qu'on a joué aux billes, par ici.'
Léonard, Kerrien (2000:6)


 Hewitt (2002:30):
 "Les formes impersonnelles en -er et -ed, typiques des langues celtiques, constituent une septième forme dans les paradigmes de conjugaison. Elles réfèrent à un être humain potentiel dont l'identité n'est pas spécifiable, ou dont le locuteur ne veut pas spécifier l'identité. Le sens est donc très proche du français on." 


morphologie

paradigme verbal défectif

L'impersonnel n'existe que dans les paradigmes verbaux du présent sous la forme -er, et de l'imparfait sous la forme -ed.


(3) Evit kargañ e ranked kaout unan vras, sur 'hat !
pour charger R4 devait.on avoir un 1grand sûr !
'Il en fallait une grande pour charger, sûr !'
Cornouaillais (Plogonnec), Kergoat (1976:112)


variation dialectale

(4) [ ˈvelɛa ked døˈzutə gwɐl ɐˈleːs]
' weler ket deusouto gwall alies. Graphie standard
ne1 voit.on pas de.de.eux très souvent
'On ne les voit pas très souvent.'
Cornouaillais (Briec), Noyer (2019:240)


(5) / ar 'blø:d a 'bre:nar /
ar bleud a brener
le farine R1 achète.on
'la farine que l'on achète'
Cornouaillais (Douarnenez), Denis (1972:148)

En (6), la concordance des temps nécessiterait une forme impersonnelle du paradigme passé -ed, mais c'est la forme -er qui apparaît.


(6) / pa 'viɛ 'ɑ̃mzar 'val: a 'lak:ɛr ɔ̃n 'tre:nur /
pa vihe amzer fall a lakaer un trenour.
pa veze amzer fall e lakaed un trenour. Équivalent standardisé
quand1 était temps mauvais R met.on un train.eur
'Quand il faisait mauvais temps, on mettait une ancre flottante.'
Cornouaillais (Douarnenez), Denis (1972:148)


  • Ne gaver tu vad ebed d'e-z-han.
'On ne sait comment le prendre.'
Léonard pré-moderne, Moal (1890:405)
  • Ne ouzor dioc'h pe henn he gemeret.
'On ne sait comment le prendre.'
Léonard pré-moderne, Moal (1890:405)

répartition dialectale

L'impersonnel -r est globalement connu dans la plupart des dialectes, vannetais (Guillevic & Le Goff 1986:47) comme KLT, mais il n'est pas toujours productif.


(5) N'heller ket dastum rac'h parlant un den ha nebeutoc'h c'hoazh ur boblañsad tud.
ne1 peut.on pas rassembler tout parlé un personne et moins.plus encore un 1populat.ion gens
'On ne peut pas collecter tout le parlé de quelqu'un, et encore moins celui d'une population.'
Vannetais (Kistinid), Nicolas (2005:7)


Certaines variétés de breton n'utilisent jamais le pronom vide impersonnel. En vannetais, Guillevic & Le Goff (1902:47) donnent un paradigme entier mais le signalent comme archaïsant. Crahe (2013:223) ne signale que la forme larer encore présente dans les chansons. En cornouaillais de l'Est intérieur, on en trouve encore dans Martin (1929), mais Naoned (1952) y note que les formes impersonnelles sont inexistantes.


(6) Ne gaver klao ebet warnan.
ne1 trouve.on point.faible aucun sur.lui
'On n'a pas prise sur lui.'
Cornouaillais de l'Est intérieur, Martin (1929:180)


Plourin (1982:664) signale ainsi qu'à Langonnet, la conjugaison impersonnelle est inconnue.


 Humphreys (1990:142)
 "in Le Vieux-Marché in the northeast their active presence is dependably reported for a speaker born as late as 1956, while in the northwest they occur for prepositions as well as for verbs. In contrast, ALBB (353-355) noted no such forms in a continuous area the shape of an inverted Y fringeing the Median Zone to the southeast and the central part of the Breton-French divide. In the remaining half of Breton territory, various transitional stages may be found with the -r forms resisting most strongly: in Plougrescant, which has a full paradigm - albeit with syncretism of the present habitual and future /-er/ - the conditionals now end in /fɔr/, /ʒɔr/, leaving /-d/ only in the past habitual /-εd/; in the northwest central Breton of Berrien only the present habitual and future are found, in the island of Groix, only the present. Lexical restriction is the final stage in the process of obsolescence."
 

A Berrien, Ploneis (1983:165) signale une restrition des formes en -r au temps présent, comme semble être le cas à Plozévet (Goyat 2012). Selon Wmffre (1998:36), l'impersonnel est restreint dans le paradigme verbal du breton central aux formes monosyllabiques du temps habituatif de certains verbes, comme 'être' ou l'auxiliaire 'faire'.


(7) [ pe vɛɤ l̥abuˑɤǝ ] / [ pe ɤɛɤ laˑbǝɤ ] Breton central
pa vezer o labourat pa reer labour Standard
quand1 est.on à4 travailler quand1 fa.it.on travail
'Quand on travaille. / Quand on fait du travail.'
Breton central, Wmffre (1998:36)


Les cartes de l'ALBB qui concernent des impersonnels montrent une tendance à user de stratégies alternatives (surtout le passif) dans une aire Est/Sud-Est. Une même aire géographique peut avoir l'impersonnel au présent mais pas au futur, ou sur un verbe mais pas sur les autres.

 traduction de on est en train, carte 076 et on était en train, carte 077
 traduction de on sera, carte 078 
 traduction de si on était (potentiel), carte 079 
 traduction de on ne sait pas, carte 250 et on ne saura pas, carte 251
 traduction de on fait, carte 269; et de on fera, carte 270 
 traduction de quand on chante, carte 353; ~ on chantait, carte 354; ~ on chantera, carte 355 

Les variations dans les réponses aux traductions sur ces deux phrases pourraient aussi être dues aussi à une intonation ou une structure informationnelle différente dans la phrase donnée en français, car l'impersonnel y est très sensible.

pronom objet des prépositions

La marque pronominale impersonnelle en breton n'est pas restreinte aux paradigmes verbaux (contra Ledunois 2002:136). Une marque -er ou -or peut apparaître incorporée comme pronom objet d'une préposition:


(1) dirazer, /devant.on/, 'devant soi' (Trépos 1980:§343,224)

warner, /sur.on/, 'sur soi' (Trépos 1980:§343)

(2) ahanor, /de.on/, 'de soi'

deor (an-unan), /de.on réfléchi/, 'à soi(-même)'
evidor, /pour.on/, 'pour soi'
diragor, dirazer, /devant.on/, 'devant soi' (Favereau (1997:§767)

(3) warnor, /sur.on/, 'sur soi'

emezor, /dit.on/, 'dit-on' (Ledunois 2002:190)


Ce pronom impersonnel incorporé dans les prépositions est indépendant du temps de la phrase, et il n'a pas de correspondances dans les autres temps, contrairement à la marque de l'impersonnel –er dans les paradigmes verbaux.


variation dialectale

Les occurrences de formes impersonnelles dans les paradigmes pronominaux incorporés aux prépositions sont plus rares que dans les paradigmes verbaux. On en trouve en Léon et en Cornouaille de l'Ouest jusqu'en pays bigouden.

Selon Favereau (1997:§767), l'impersonnel:

 "...peut s'utiliser après une préposition, selon certains écrivains (tels Yeun ar Gow) ou grammairiens (Trépos, Falc'hun, Favé), qui relèvent son emploi en Léon (V. Favé -or) comme en Cornouaille centrale ou méridionale (-er PT 198)."
 [la référence PT est à un ouvrage de Trépos que Favereau (1997:14) dit avoir été publié en 1962 et 1994, ouvrage qui n'existe à aucune de ces dates en bibliographie]. 

Favereau (1997:§767) identifie la marque -er avec la Cornouaille centre et Sud. Selon Trépos (1980:§343), la terminaison -or de l'impersonnel est une variante léonarde. Ces formes sont souvent dites archaïques, mais Rezac & Jouitteau (2012) relèvent des formes -or relativement productives en léonard actuel à Lesneven. Rezac & Jouitteau (2012) notent un croisement morphologique des formes /-or/ (marque impersonnelle léonarde) et /-oX/ (marque 2PL -oc'h, qui a indépendamment une lecture impersonnelle). Ils documentent un cas de locuteur produisant productivement le premier, compris par l'interlocuteur comme produisant le second.

syntaxe du pronom vide impersonnel

sujet de verbes fléchis

Le pronom vide impersonnel existe dans les paradigmes verbaux à tous les temps et tous les modes sauf au mode impératif (Kervella 1947:§190).

Les paradigmes complets se trouvent dans les dialectes du Nord: se reporter pour le trégorrois à Le Clerc (1986:68,4°), pour le Goélo à Koadig (2010:30), pour Saint-Pol-de-Léon à Sommerfelt (1902:170).

ne rèar ket, 'On ne fait pas'
ne rèor ket, 'On ne fera pas' Saint-Pol-de-Léon, Sommerfelt (1921:170)


restrictions verbales

Les verbes à la forme impersonnelle peuvent être aussi bien transitifs, inergatifs ou inaccusatifs. Le seul verbe qui n'aie pas la possibilité d'apparaître avec la marque de l'impersonnel est le verbe kaout, 'avoir' (Le Clerc 1986:75).

Ernault (1888:202) relève une forme en ameur en moyen breton, cependant l'exemple est isolé et étrange, car la marque impersonnelle apparaîtrait deux fois. Ernault met cette donnée en rapport avec une forme en ameur cruciffiet, "archaïsme" pour le moyen breton, dont il ne donne pas de source précise.

  • Me en heny ameur cruciffiat
'C'est moi qui ai été crucifié...
Moyen breton, (J.:178)


co-référence

Le sujet d'un impersonnel peut co-référer avec un nom de groupe.


(1) Neuze veze eun ekip hag a teue hag e tased nompaz ma ouezfe re an ti.
alors était un groupe que R1 venait et R4 tâche.on ne.pas que4 saurait ceux le maison
'Alors un groupe venait et on tâchait que ce soit en douce de ceux de la maison.'
Léonard (Ouessant), Gouedig (1982)


analyse

Selon Even (1978:104), la marque -er est la marque du passif dès le vieux breton. Selon Guillevic & Le Goff (1986:47), il s'agit toujours en breton moderne d'un pronom personnel spécifique à la voix passive.

 "Anciennement, la langue bretonne avait des formes personnelles spéciales pour le passif. De ces formes il ne reste que celle de la troisième personne du singulier de chaque temps, la forme impersonnelle passive. On l'emploie pour rendre l'idée du pronom français on."


Cependant, au contraire des passifs, les verbes à la forme impersonnelle peuvent être aussi bien transitifs, inergatifs ou inaccusatifs (Belvins 2003). Le verbe genel 'naître', inaccusatif, serait par exemple impossible à mettre au passif.


(2) An oll badeziantou a veze greet en devez war-lerh ma vezed ganet.
le tous1 baptême.s R1 était fa.it en.le journ.ée après que4 était.on n.é
'Tous les baptêmes étaient faits le lendemain de la naissance.'
Léonard (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:5)


horizons comparatifs

Les langues celtiques ont toutes des stratégies impersonnelles qui diffèrent du passif:


(3) Táthar cairdiúil anseo.
est.on accueillant ici
'Les gens sont accueillants ici.', 'On est accueillant ici.'
Irlandais, Noonan (1994:288)


(4) Cuirfear amárach í i reilg Chill Bhriocáin th'éis Aifreann a haon a chlog.
enterrera.FUT.AUT.on demain 3SGF dans cimetière Cill Bhriocáin après messe une heure
'Elle sera enterrée demain dans le cimetière de Cill Bhriocáin après la messe.'
Irlandais moderne, 'The Graveyard Corpus', Bennet, Dowd, Elfner, McCloskey (2010)


Les pronoms impersonnel sujets qui déclenchent un paradigme d'accord verbal dédié ne sont pas propres aux langues celtiques. Une forme de l'impersonnel dans les paradigmes verbaux existe en estonien et en finnois (Belvins 2003).


(5) (a) Poisid kaklesid õues. / (b) Õues kakeldi.
garçons battaient.3PL dehors / dehors battit.on
'Les garçons se battaient dehors./ Des gens se battaient dehors'
Estonien, Erelt & al. (1995:73)
cité dans Belvins (2003)


(6) (a) Talo tuhottin. / (b) Suomessa ollaan niin totisia.
maison.NOM détruit.on / Finlande.INEssif être.on.PRES si sérieux.NOM.PL
'La maison a été détruite (par qq)./ En Finlande, les gens sont si sérieux.'
Finnois, Shore (1988:159)
cité dans Belvins (2003)


Belvins (2003) montre qu'en estonien comme en finnois ci-dessus, il ne s'agit pas non plus de passifs (les verbes n'ont pas de restriction sur leur structure argumentale, le pronom sujet est obligatoirement humain et peut lier un réfléchi, et aucun complément d'agent ne peut être ajouté).


anaphores de l'impersonnel en an-unan

Les formes anaphoriques liées par un pronom vide impersonnel prennent la forme an unan, avec un article défini qui apparaît en lieu et place des déterminants possessifs qui forment autrement ce paradigme avec des antétédents personnels (Me ma-unan, Alban e-unan… ).


accord verbal -r

Lorsque l'antécédent est un impersonnel réalisé par l'accord verbal, le composé commence par un article défini.


(1) Amañ ez eer an-unan.
ici R+C,4 va.on le-un
'Ici on marche seul.' (l'enfant d'ici marche seul)
Trégorrois, Gros (1984:186)


Favereau (1993:§'soi') donne pa vezer an-hunan, 'quand on est soi-même'.


agent non-exprimé d'un passif

An-unan peut co-référer avec l'agent non-exprimé d'un passif. Cette structure n'est pas possible en français ( ?/* avec le lin qui était planté soi-même).


(2) gand al lin a veze plantet an-unan er prajou.
avec le lin R1 était plant.é le-soi en.le champ.s
'avec le lin qu'on plantait soi-même dans les champs'
Léonard (Ouessant), Gouedig (1982)


objet des prépositions

(3) Goulenn a reer ouzor an-unan ha n'eo ket an anv-ze eun distresadur […]
demander R fa.it.on à.on le-un si ne1 est pas le nom- un trans.form.ation
'On se demande si ce nom n'est pas une transformation.'
Léonard (Cléder), Seite (1998:88)


Ar Gow (1963), à Pleyben, en cite quelques exemples:

  • Kaoud kasoni ouzor an-eun.
'Avoir de la haine pour soi-même.'
  • Kemeroud preder ganeor an-eun.
'Avoir souci de soi-même.'
Cornouaillais (Pleyben), Ar Gow (1963)


Ce pronom impersonel incorporé dans les prépositions est loin d'être disponible dans tous les dialectes, et même en Léon.


(4) A-wechoù, ar pezh a gaser { ganeomp / * gantor } a gaver barzh ar magajinoù.
parfois le que R1 envoie.on avec.nous / avec.on R1 trouve dans le magasin.s
'Des fois ce qu'on apporte avec soi, on le trouve dans les magasins.'
Léonard (Lesneven/Kerlouan), A. M. (04/2016b)

PRO arbitraire

En (5), le sujet de la phrase est une proposition infinitive dont le sujet n'est pas prononcé et est interprété comme arbitraire. Ce pronom silencieux (PRO) réfère à la personne qui fait l'action elle-même. Ce pronom PRO de lecture arbitraire est l'antécédent de la forme an-unan.


(5) Gwelloh eo __ ober ar homisionou an-unan.
mieux est [ PROARB faire le 5commission.s le-un ]
'Il vaut mieux faire les commissions soi-même.'
Trégorrois, Gros (1984:187)


(6) Trist eo rankout bevañ an-unan.
triste est devoit vivre le-un
'C'est triste de devoir vivre seule.'
Léonard, Kervella (2009:165)


En (7), la chaîne de coréférence entre le sujet PROarb de l'infinitive et an-unan comprend le réfléchi en em.


(7) Lod a zifenne en em lakâd an-unan da varner.
certains R défendait PRO1 se mettre le-un1 à jug.e
'Certains défendaient de se mettre soi-même juge.'
Cornouaillais (1893), IAI.:122
cité dans Hemon (2000:§58)


Ces formes sont souvent les formes de citation dans les grammaires ou dictionnaires, qui surutilisent les pronoms vides arbitraires. Favereau (1993:§'soi') donne par exemple chom an-hunan 'rester soi-même'.

variation dialectale

An-(h)unan est une forme assez rare et peu documentée, ce qui reflète une variation dialectale dans son utilisation. La forme liée an-(h)unan n'est pas connue partout. De Rostrenen (1738:64) consacre un chapitre à la traduction du pronom français 'soi', mais ne donne aucune forme en an-unan.

Le liage par un impersonnel sujet ne déclenche pas dans tous les dialectes la forme an de l'article. Trépos semble utiliser le possessif e, 3SGM.


(8) Emeer o sevel e di.
est.onx à4 monter son1x maison
'On est en train de bâtir sa maison.'
Cornouaillais, Trépos (1980:§343)


Selon Kervella (1995:§431), c'est la marque 3SGM ou 2PL qui est choisie pour co-référer avec un impersonnel, même s'il signale la forme an unan (Kervella 1995:§436). Les Léonards Fave et Seite en ont quelques exemples.

Ar Gow (1963) en cite plusieurs à Pleyben, en modification d'un pronom impersonnel incorporé dans une préposition.

  • Ar skiant-prenet eo ar pez a zesker dreizor an-eun.
'L'expérience est ce qu'on apprend par soi-même.'
  • Eur gwall-skouer a laka sonjou fall da sevel ennor an-eun.
'Un mauvais exemple soulève de mauvaises pensées en vous.'


usages logophoriques (sans antécédent)

Favereau (1993:§'soi') cite karantez an-(h)unan, pour traduction du français 'amour de soi-même'.

sémantique

On lit parfois que l'impersonnel "n'a pas de référent" (par ex., Ledunois (2002:195). C'est faux: un référent sujet est clairement sémantiquement calculé dans tous les usages d'impersonnels. C'est même une propriété de l'impersonnel que son système de référence est très plastique.

 Plourin (2004):
 "Un mot (trop rapidement) des emplois dérivés et idiomatiques de la forme en -r. On peut dire : Sell ’ta, ase e vezer/emaer o sevel un ti newez !, 'Tiens, là on construit une maison neuve !' en passant devant un village peu familier, dont le nom des habitants ne revient pas immédiatement à la mémoire. Idem pour : Ase ’ver ’tornañ, 'C’est le battage chez eux', ou pour la citation (à l’imparfait) de Y. Le Gall [E-barz ar park… oar ehanet da labourad, 'Dans le champ… on s’était arrêté de travailler']. On l’entend aussi beaucoup dans des salutations, du genre : ’vont ’ve(ze)r ? 'on y va, on part ?' à l’adresse de quelqu’un qu’on rencontre. C’est une formule encore plus polie que : ’vont ’oac’h ? 'Vous alliez ?' ou que : ’vont ’oas ? 'Tu allais ?' Il y a dans les deux cas marque de distance respectueuse, soit par l’imparfait, soit par le rejet vers la 3e personne, mais cette dernière présente en plus l’avantage de ne pas imposer de choix, parfois délicat, entre tutoiement et vouvoiement." 


Cette plasticité référente obéit à des règles que l'on peut écrire. Les impersonnels comme le PRO arbitraire peuvent lier des pronoms anaphoriques, qui doivent donc obligatoirement être lus avec le même référent. Dans le titre de Dumoulin 1804: Hent ar Barados: pe ar guir Voyen da _ savetei e Ene, dans la lecture la plus facile, le sujet de savetiñ 'sauver' a une lecture coréférente avec le possessif. Il est délicat mais tout à fait possible d'étudier le référent de l'impersonnel, et d'établir des tests syntaxiques qui permettent d'étudier les différentes lectures de ces impersonnels.


lecture incluant le locuteur

La lecture de l'impersonnel glisse parfois vers la première personne. En (1), l'impersonnel co-réfère avec le pronom antécédent 1PL.


(1) Ar pezh a zo dimp, hon lod eus madoù ar bobl, n' heller ket asantiñ koll anezhañ.
le ce.que R est à.nousz notrez part de bien.s le 1peuple ne1 peut.onz pas consentir perdre P.lui.
'Ce qui nous appartient, notre part des biens du peuple, on ne peut pas consentir à le perdre.'
Standard, ar Barzhig (1976:72)


lecture excluant le locuteur

Cependant, la première personne peut être entièrement exclue de la lecture de l'impersonnel, par exemple par le contexte.


(2)a. Selaou, selaou krenn, En tu all emer o lazhañ c'hwenn.
écoute écoute complètement en.le côté autre est.on à4 tuer puce.s
'Écoute, écoute bien, à côté on tue des puces.'
Cornouaillais (Riec), comptine, Bouzeg (1986:I)


(2)b. … [ˈvefɛa ke vi a nøs ke be døˈzɔ᷉ m]
(ne) vefer ket evit lâr (e) neus ket bet deuzomp.
ne1 serait.on pas pour dire ne1 est pas eu de.nous
'… on ne pourra pas dire que nous n'avons pas existé.'
Cornouaillais (Briec), Noyer (2019:205)


lecture incluant l'interlocuteur

On trouve des contextes où la lecture est celle où l'impersonnel co-réfère avec l'interlocuteur.

 Gros (1984:159):
 "Te, 'tu' et c'hwi, 'vous', sont quelquefois remplacés par l'impersonnel dans une intention de courtoisie à l'égard de l'interlocuteur. Cette forme le met moins directement en cause, en donnant à l'énoncé une portée plus générale, donc moins agressive. On l'emploie surtout dans les salutations."


(3) Poaniañ a reer ! Hastañ a reer !
pein.er R fait.on dépêcher R fait.on
'Vous peinez !' , 'Vous vous dépêchez !'
Trégorrois, Gros (1984:159)


(4) E vannika eur bet ?
à4 verre.DIM.er on.est été
'On est allé picoler ?'
Cornouaillais (Sein), Fagon & Riou (2015:'bannika')


(5) Penôs 'deur gati, saet eur?
comment est.on avec.elle lev.é est.on
'Comment ça va, vous êtes levés ?'
Cornouaillais (Sein), Kersulec (2016:28)


temps épisodique

Les formes en -r apparaissent dans des contextes génériques, mais aussi épisodiques, comme en (5).

CONTEXTE: "Dans le jardin, vous sentez l'odeur d'un barbecue. Vous dites à votre ami:"

(6) Oc'h ober barbecue emeur e-kichen.
à+C,4 faire "barbecue" est.on à-côté
'On fait un barbecue à côté.'
Léonard (Plougerneau), M-L. B. (04/2016)

structure informationnelle

Le pronom sujet impersonnel que réalise la forme en -er (ou l'accord avec lui) ne peut pas être focalisé. Le verbe lexical sur lequel il apparaît, lui, peut porter un focus contrastif.


(1) Amañ ' raer bara, ha ne brener ket.
ici R fait pain et ne1 achète.on pas
Ici on fait, on fabrique du pain, on ne l'achète pas.'
Favereau (1997:§471)


contraste avec le passif

Favereau considère que la possibilité de focaliser un verbe portant une forme en -er de l'impersonnel dessine un contraste avec le mode passif qui est avec lui en concurrence d'usage.


 Favereau (1997:§471):
 "Le passif tend à se généraliser bien souvent aux dépens de la non-personne [forme en -r'] (pour exprimer on, l'on), même s'il faut bien noter qu'une nuance subsiste entre les deux formes: 
 Amañ 'vez graet bara (e-leizh, atav, peur(a)liesañ etc.)
 'Ici on fait du pain (en règle générale).'
 Amañ 'raer bara (hag e raer, oberiñ a raer - W -, ha ne brener ket)
 'Ici on fait, on fabrique du pain (on ne l'achète pas).'

Terminologie

Kervella (1947:§210) utilise en breton le terme stumm dic'hour.

L'impersonnel an nen

an den ou an nen, grammaticalisation du syntagme défini 'l'homme', oscille suivant les dialectes entre un pronom fort indépendant et un syntagme nominal.

Il n'est pas restreint au rôle de sujet. Le Dû (2012:101) en signale en position d'objet. On le trouve aussi en position d'argument indirect, ou en état construit.


(1) Red e vez d 'an den ober e zispign diouz e hounedigez.
obligé R est à on faire son1 dépense selon son1 gagn.erie
'Il faut régler sa dépense sur son gain'.'
Trégorrois, Gros (1984:528)


(2) An trichin n'int ket un ampoezenn evit yec'hed an den.
le oseille ne1 sont pas un poison pour santé on
'L'oseille n'est pas un poison.' (pour les humains)
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (09/2015a)


morphologie

variation morphologique dialectale

A travers les dialectes, les formes varient entre an den, (a)n nen, n'in, un den et den.

Avezard-Roger (2004a:289) relève le pronom fort indépendant impersonnel en trois points en KLT, La Forêt Fouesnant, Saint-Pol-de-Léon et Duault. La grammaticalisation de an den en pronom impersonnel est autrement plutôt exogène en Léon, où les formes de conjugaison impersonnelles en -er ont assez bien résisté. On voit une forme grammaticalisée an nen sur toute l'aire centrale.


liste interdialectale des formes de l'impersonnel basé sur den
(3) lieu de collecte forme API forme écrite source
Saint-Pol-de-Léon [ nan ] Avezard-Roger (2004a:289)
Sein an den Fagon & Riou (2015:'bara')
Trégorrois an den, eun den Gros (1970b:§'estren'), Gros (1996:112)
Trégorrois, Bégard, Tréguier [ən 'nèn] an nén, an nen Georgelin (2016:'ar verboù gant ober'), Merser (2011:127), Le Clerc (1986:146)
Duault [ nən, nan ] Avezard-Roger (2004a:289)
Bothoa [ ə n'i:n ] Humphreys (1995:335)
Pélem 'n nin Favereau (1997:§316)
Poher 'n nen Favereau 1997:§316)
Berrien an nen Ploneis (1983:165), Lozac'h (2012-:'den')
Saint Yvi nenn German (2007:174)
La Forêt Fouesnant [ nə, ne, nen ] Avezard-Roger (2004a:289)
Scaër/Bannalec nen, anin, 'n din H. Gaudart (04/2016), H. Gaudart (04/2016b)
Riec an nen Mona Bouzeg c.p. (01/2009)
Moëlan, Clohars-Carnoët en den Bouzec & al. (2017:26)
Lanvénégen an den Evenou (1989:54)
Inguiniel [ ɔ̃n dɛ̃ːn ] Cheveau & Kersulec (2012-évolutif:Inguiniel,'amzer')
Lanester an den Herrieu (1974)
Plaudren den Quéré (2011)
Vannetais XVIII° an dèn De Rostrenen (1738:64)


Humphreys (1995:335) signale la forme n'in en breton de Bothoa.

 [ ə n'i:n ] on, quelqu'un
 
 wè:ra kə n'i:n        / sait.3SG pas n'i:n /           'on ne sait pas.'     
 pé vè scɥ'i:z ə n'i:n / quand1 est fatigué ə n'i:n / 'quand on est fatigué'
 
 Ce mot provient du mot /d'i:n/ 'personne, homme', dont il se distingue par la nasalisation de l'initiale. À Scaër/Bannalec, on trouve la même distinction.


(2) Ne oar ket anin / Ne oar ket an din.
ne1 sait pas on / ne1 sait pas le personne
'On ne sait pas.' / 'L'homme ne sait pas.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


Merser (1963:§58) considère que la forme débutant en N résulte d'une mutation nasale de type dor, an nor 'la porte', comme il existe de façon productive en gallois. Selon Merser (2011:127), la forme an nén est employée en Trégor. C'est effectivement la forme rapportée à Bégard (an nen, [ən 'nèn], Georgelin 2016:'ar verboù gant ober') ou à Tréguier.


(3) A-wejo e c'hoarz an nen.
parfois R rit on
'On rit quelquefois.'
Trégorrois (Tréguier), Le Clerc (1986:146)


Favereau (1997:§316) rapporte aussi cette forme nasalisée dans l'Est de la Cornouaille. C'est la forme reportée à Riec par Bouzeg, et à Saint Yvi par German (2007:174).


(4) Ne oar ket 'n nen. Poher
' oera ke' 'n nin. Pélem
ne1 sait.3SG pas on
'On ne sait pas.'
Favereau (1997:§316)


Cette forme est aussi rapportée à Berrien dans Lozac'h (2012-).


(5) Cherr labourad ra an nen traou-all.
en travailler fa.it on choses-autre
'Tout en travaillant on fait autre chose.'
Cornouaillais du Nord (Berrien) Lozac'h (2012-:§'cherr/serr')


Gros, en trégorrois, utilise la forme eun den, homophone du syntagme indéfini 'un homme'.


(6) Ar re-ze a zoñj ganto n'e-nevez sort eun den d'ober.
le ceux- R1 pense avec.eux ne1 R a.HAB rien on à faire
'Ceux-ci se figurent qu'on n'a rien à faire.'
Trégorrois, Gros (1984:331)


(7) Pa adtaol eun den da gousket e chom diwezad.
quand1 re.commence un personne à1 dormir R reste tard
'Quand on recommence à dormir, on reste tard au lit.' (après être resté longtemps réveillé)
Trégorrois, Gros (1970b:§'adteurel')


A Inguiniel, on trouve aussi une forme en un den. Jouitteau (2015) relève de multiples utilisations de an den dans le vannetais de Herrieu (1974).


(8) [ a bɛ̃ ɔ̃n dɛ̃ːn nǝze ãmzǝɾ]
A beñ, un den a yae pa en deze amzer.
Ah ! ben on R1 allait quand1 R.3SGM avait temps
'Ah ben, on y allait quand il y avait le temps.' (on = moi)
Inguiniel, Cheveau & Kersulec (2012-évolutif:Moëlan,'amzer')


On trouve à Plaudren la forme nue den.


(9) Pa den a sell adrest er "haie" den a uel asset e bark a zo sale.
quand1 on R regarde au.dessus le haie on R1 voit Adv. son1 champ R est sale
'Quand on regarde par dessus la haie, on voit bien que son champ est sale.'
Vannetais (Plaudren), Quéré (2010)


A Berrien, Ploneis (1983:165) signale la forme an nen comme seule alternative aux formes verbales en -r à l'imparfait. À Scaër, H. Gaudart qui refuse consistamment les formes en er, utilise massivement le passif, mais aussi la forme nen.


(1) Faotfe ket da nen lar gaou d'e vamm !
faudrait pas à le personne dire mensonge à son1 mère
'On ne devrait jamais mentir à sa maman !'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016)


Les formes en an den s'installent facilement dans les structures génitives dans les dialectes (la plupart) qui n'y ont pas de contrepartie avec les formes en an unan.


(2) … amann yen a ra vat da galon an den.
beurre froid R fait 1bon à1 cœur on
'… le beurre froid fait du bien au cœur de l'homme.'
Cornouaillais (Sein), Fagon & Riou (2015:'bara')

pas de forme écho ou de focus

L'impersonnel type an nen n'a pas de forme écho, ce qui est compatible avec sa restriction aux structures informationnelles non-saillantes.


un pronom singulier ou pluriel

Le pronom an den peut référer à un ensemble maximal d'humains, mais c'est un pronom grammaticalement singulier (an den *o daou), comme on a en allemand jemand *drei, Hofherr c.p.).

Le pronom anin est par ailleurs incompatible avec des réciproques comme 'l'un l'autre', 'les uns les autres'.


(1) Anmañ n'em gar { an dud / * anin } an eil egile.
ici se1 aime le 1gens / * on le second autre
'Ici on s'aime les uns les autres.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


(2) Anmañ, n'em salud { an dud / * anin } an eil ar-lerc'h egile.
ici se1 salue le 1gens / * on le second après autre
'Ici on se salue les uns après les autres.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


Cependant, à Bégard, on trouve une occurrence de l'impersonnel an nen avec une interprétation manifestement plurielle.


(3) Met arri a rae an nen da en em gompren bopred, gwel a rez, evel se quoi.
mais arriver R1 faisait on à1 se1 comprendre toujours voir R1 fais comme ça quoi
'Mais on arrivait à se comprendre toujours, tu vois, comme ça quoi.'
Trégorrois (Bégard), Georgelin (2016:'displegañ ar verboù gant ober')

distribution syntaxique

Quand an den est un indéfini, et non pas le syntagme nominal an den (le homme, 'l'homme'), on le voit nettement car leurs distributions diffèrent.


distribution de l'indéfini

Dans l'exemple ci-dessous, l'impersonnel sujet de la petite proposition qui a la structure [ on malade ] est juste après le verbe tensé.


(1)a. Ben 'vez an nen klañv, ne vez ket gwelet ken.
quand R est on malade ne1 est pas v.u plus
-- b.
* Ben 'vez klañv an nen, ne vez ket gwelet ken.
quand R est malade on ne1 est pas v.u plus
'Quand quelqu'un est malade, on ne le voit plus en société.'
Mona Bouzeg, Cornouaillais (Riec), Bouzeg c.p. (01/2009)


C'est le même ordre [ on prédicat] qu'on observe en (2).


(2) Gav ket nen aes boût dikriet.
ne1 trouve pas on facile être .cri.é
'On n'aime pas être critiqué.'
Cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:30)


C'est justement la distribution des autres pronoms pour cette locutrice (cf.3), en contraste avec les syntagmes nominaux qui doivent être placés obligatoirement après l'adjectif prédicatif (4).


(3) Ben ' vez eoñ klañv, ne vez ket gwelet ken.
quand R est 3SGM malade ne1 est pas v.u plus
'Quand il est malade, on ne le voit plus en société.'
Mona Bouzeg, Cornouaillais (Riec), c.p. (01/2009)


(4)a. * Ben 'vez (pep den / pep medisin / an dud / ma bugale) klañv, e vezomp trapet fall !
quand R est (chaque homme /chaque médecin /le 1gens /mon2 enfant.s) malade, R sommes attrapés mauvaisement
-- b.
Ben 'vez klañv (pep den / pep medisin / an dud / ma bugale), e vezomp trapet fall !
quand R est malade (chaque homme /chaque médecin /le 1gens /mon2 enfant.s), R sommes attrapés mauvaisement
'Quand (chaque homme /chaque médecin /les gens /mes enfants) sont/est malade, on est salement attrapés !'
Mona Bouzeg, Cornouaillais (Riec), c.p. (01/2009)

reprise anaphorique 3SGM

An den peut être repris anaphoriquement par un pronom 3SG masculin. Les deux expressions réfèrent à tout humain, femmes comprises, malgré le pronom masculin lié.


(3) Pa vez kustum an den da vezañ en ti e krog an amzer enn.
quand1 est habitué on de1 être en.le maison R4 commence le temps en.lui
'Quand on est habitué à rester à la maison, le froid vous saisit.'
Trégorrois, Gros (2014:'amzer')


(4) Güell eo gad an dèn lavaret droucg a nezâ e-unan, egued ne eo tevel a grenn var e-unan.
Gwell eo gant an den lavaret drouk anezh e-unan, eget n'eo tevel a grenn war e-unan.
mieux est à on dire méchant de.lui son-un que ne1 est taire complètement sur son-un
'On aime mieux dire du mal de soi que de n'en point parler.'
Breton pré-moderne, De Rostrenen (1738:64)


En (5), l'impersonnel an den est repris anaphoriquement par le pronom e 3SGM (on s'attendrait par ailleurs à la forme o-unan dans le réfléchi).


(5) Gwelloh eo an estren ouz an den evid e dud e-unan.
mieux est le étranger à on que son1 parents son1-un
'Les étrangers sont plus généreux à votre égard que vos propres parents.'
Trégorrois, Gros (1970b:§'estren')


reprise d'un impersonnel, mais pas de lui-même

A travers les langues, un impersonnel doit pouvoir être repris par lui-même (Quand on aime, on ne compte pas). Je n'ai pas trouvé en corpus d'exemples de reprise anaphorique de an den par lui-même.


(1) Como hombre es mujer y vieja, hacen burla de hombre.

'Quand on est une vieille femme, les gens se moquent de vous.'
Espagnol du XVI° siècle, [Refranes 174], Pozas Loyo (2010)


Cependant, an nen peut reprendre un autre impersonnel.


(2) Bep ma tostaer d'ar hreisteiz, e kav an nen ar gwiniennou stankoh.
chaque que4 proche.on à le 5Midi R4 trouve on le vign.es nombreux.plus
'Au fur et à mesure qu'on approche du Midi, les vignobles deviennent plus nombreux.'
Klerg
cité dans Merser (1963:§354)


absent des "anaphores donkey"

La traduction de la phrase en "anaphore donkey" est refusée avec le pronom anin, au profit d'un passif.


(3) Benn ' vez prenet un azen e vez dav gober war e dro, mallestoupen !
quand R est achet.é un âne R4 est obligé faire sur son1 tour sacrebleu
'Quand on achète un âne on s'en occupe, sacrebleu !'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


(4) * Benn ' pren anin un azen ...
quand R achète on un âne
'Quand on achète un âne … on s'en occupe !'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


reprise par un sujet vide ou pronom faible

A travers les langues, un pronom impersonnel de type on ne peuvent pas co-référer avec un sujet vide ou un pronom faible (Quand on x vieillit, on x faiblit, mais pas *Quand on x vieillit il x faiblit).

En (5), an den et le sujet vide de fallaat co-réfèrent, ce qui est le signe qu'il ne s'agit pas, ici, d'un impersonnel. L'hypothèse qu'en (5), an den co-réfère avec un pronom vide impersonnel doit être écartée car il n'existe pas indépendamment de sujet vide impersonnel en breton. En (5), il ne s'agit donc pas d'un pronom impersonnel, mais d'un groupe nominal défini avec une lecture d'espèce (l'Homme) sous lecture générique, traduit par Gros par un impersonnel en français.


(5) Pa goz an den eo fallad an hini a ra.
quand1 vieill.it le personne est empirer le celui R fait
'Quand on vieillit, c'est faiblir qu'on fait.' (et non pas prendre des forces)
Trégorrois, Gros (1989:'fallaad')


fonctions syntaxiques diverses

À travers les langues, la grammaticalisation de l'équivalent de 'homme' est prototypiquement en fonction sujet. Or, en breton, l'impersonnel an nen n'est pas restreint à la fonction sujet.


sujet

(1) Laret ' rafe an nen 'neus ket gouzanvet anezhan.
dire R1 ferait on ne1 a pas souff.ert P.lui
'On dirait qu'il n'a pas souffert.'
Comes (1981:27)


(2) Ga labourad erru an nen.
avec travailler arrive on
'On réussit par le travail.'
Cornouaillais du Nord (Berrien), Lozac'h (2012-:'den')


En (3), le sujet est un objet dérivé dans une structure passive.


(3)a. Ba'n amzer oan yaouank vi ket kas 'nenn kalz d'ar skol.
en le temps étais jeune était pas envoy.é on beaucoup à1 le école
'Du temps de ma jeunesse, on n'était pas souvent envoyé à l'école.'
Breton de Saint Yvi, German (2007:174)


(3)b. Amañ e vez bouzaret an den gand ar mekanikou.
ici R est sourd.i on avec le machine.s
'Ici, on est assourdi par les machines.'
Trégorrois, Gros (1984:394)


objet

L'interprétation impersonnelle n'est pas toujours disponible. En (2), on n'a pas affaire au pronom impersonnel, mais à un syntagme nominal défini classique, 'l'homme', qui doit référer à une entité mâle animée. Il n'est pas possible de comprendre la phrase comme : '* Ceux qui aiment la littérature fantastique connaissent (quelqu'un/ n'importe qui) par l'œuvre de Jean Ray'.


(4) Ar re a blij dezho al lennegezh voemus a anavez an den dre oberenn Jean Ray.
le ceux R1 plait à.eux le littérature 1fantastique R connait le homme par œuvr.e Jean Ray
'Ceux qui aiment la littérature fantastique connaissent l'homme par l'œuvre de Jean Ray.'
Jean-Baptiste Baronian, introduction Comes (1981:5)


objet indirect

(5) Ne vefent ket pell o sachañ brud fall d'an nen.
ne1 seraient pas long à4 (at)tirer réputation mauvaise à on
'Ils ne seraient pas longs à tisser de mauvaises réputations.'
Standard, Ar Barzhig (1976:33)


expérienceur

(6) Stard eo d' an nen.
dur est à on
'C'est dur pour soi.'
Favereau (1997:§316)


(7) Ne blij ket d' an nen.
ne1 plait pas à on
'Ça ne plait pas en général.'
Favereau (1997:§316)


possesseur

L'impersonnel peut être le possesseur dans un état construit. Dans ce dialecte, il n'est donc pas réanalysé comme un pronom, car l'état construit n'est pas disponible pour les pronoms (*izili int)


(8) Skornañ a ra izili eun den, hag e ra !
gel.er R fait membre.s on et R fait
'Vos membres gèlent, et ils le font réellement.'
Trégorrois, Gros (1984:64)


(9) Poa'hañ ' ra beg 'n nen.
cuire R fait bouche on
'Ça vous brûle la gueule.'
Breton central (Poher), Favereau 1997:§316)

structure informationnelle

restriction à l'arrière-plan et ordre des mots

L'impersonnel est principalement en arrière-plan dans la structure informationnelle. En (1), l'objet est à l'initiale car le sujet impersonnel lui laisse la place de saillance informationnelle.


(1) Aon en doa bet an den.
peur 3SGM avait eu on
'On avait eu peur.'
Lanvénégen, Evenou (1989:54)


La place prétensée est donc défavorable au pronom an nen, comme en (2), phrase jugée inconfortable, dans un contexte où Sherlock Holmes découvre une assiette de coquillages:


(2) # 'N din neus bet debet boued mor.
on a été mang.é nourriture mer
'On a mangé des fruits de mer ici.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


sémantique

usages déplacés

Gros note que l'impersonnel peut servir à référer au locuteur.


(1) Amañ ez arru an avel ken e fell dezañ diskar eun den.
ici R+C arrive le vent tellement R plait à.lui détruire on
'Le vent arrive ici tellement qu'il manque de me faire tomber.'
Trégorrois, Gros (1996:112)


On trouve aussi des usages d'adresse indirecte. En (2), il s'agit d'une mère parlant devant son fils pour lui reprocher un mensonge.


(2) Faotfe ket da nen lar gaou d'e vamm !
faudrait pas à le homme dire mensonge à son1 mère
'On ne devrait jamais mentir à sa maman !'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016)


contextes épisodiques

L'impersonnel anin est reçu inégalement dans les contextes épisodiques.


CONTEXTE: "La mobilisation générale est déclarée."

(1) Chiou ' zo bet galvet { an dud / an nin } c'hwec'h gwech gant 'n arme.
aujourd'hui R1 est été appel.é le 1gens / on six fois avec le armée
'Aujourd'hui, on a été appelé six fois par l'armée.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


CONTEXTE: "Sherlock Holmes, découvrant des coquillages dans une assiette:"

(2) Boued mor ' zo bet debet gant anin.
nourriture mer R1 est été mang.é avec on
'On a mangé des fruits de mer ici.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)


CONTEXTE: "Je ne veux pas dire qui (pour ne pas faire d'histoires), mais..."

(3) laret ' zo bet din (# gantoñ / * gant anin) ar lerc'h ar sinatur ne oa ket bet plijet al levr (# doñ / * d'anin).
d.it R1 est été à.moi avec.lui / avec on après le sign.ature ne1 était pas été pl.u le livre à.lui / à on
'On m'a dit après la dédicace qu'on n'avait pas apprécié le livre.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (04/2016b)

pronom météorologique et variation dialectale

À Briec en Cornouaille, Noyer (2019) donne un exemple où l'impersonnel en -er a une interprétation de pronom météorologique, non-humain, donc.


(5) [ ʁeːa ke ˈkaləs ˈglɐo saaʁa ]
Ne rer ket kalz glav e-barzh ar Sahara.
ne1 fait.on pas beaucoup pluie dans le Sahara
'Il ne pleut pas beaucoup dans le Sahara.'
Cornouaillais, Noyer (2019:219)

horizons comparatifs

On a vu plus haut des exemples où l'impersonnel, même repris anaphoriquement par un pronom masculin, pouvait référer à des femmes. C'est le cas dans toutes les grammaticalisations du syntagme l'homme, homme à travers les langue, comme avec l'impersonnel hombre en espagnol du XVII°.


(1) Come hombre está preñada, no se puede abajar.

'Quand on est enceinte, on ne peut pas se pencher.'
Espagnol du XVI° siècle, [Refranes 174], Pozas Loyo (2010)


L'impersonnel an den semble partager quelques points avec le nouveau pronom impersonnel man qui émerge en anglais urbain moderne (Cheshire 2013): pas de restriction à la position sujet ou usages déplacés pour la référence au locuteur.

No robbing man's journal man
before I got arrested man paid for my own ticket to go Jamaica you know., Cheshire (2013)

Unan

Le cardinal unan 'un' a grammaticalisé en un impersonnel, comme l'anglais one.


(1) Laret ' rafe unan eman ar gaouenn o kaozeal dezhi.
dire R ferait un est le 1chouette à4 parler à.elle
'On dirait que la chouette lui parle.'
Comes (1981:25)


morphologie

variation dialectale

(2) Sebezet e chom eun o klevoud ar bugel-se o komz.
stupéf.ait R reste un à4 entendre le enfant- à4 parler
'On demeure stupéfait d'entendre cet enfant parler.'
Cornouaillais (Pleyben), Ar Gow (1963)


répartition dialectale

Dans Goyat (2012), unan est le seul exemple d'impersonnel.


(3) /war ked 'ɛ :n/
(Ne) oar ket unan.
ne1 sait pas un
'On ne sait pas.'
Cornouaillais (Plozévet), Goyat (2012:242)


an-unan

Selon Merser (2011:127), la forme an unan est employée en Finistère-Sud. Menard & Kadored (2001:§ 'an-unan') donnent une forme sujet en an-unan, avec un pronom 3SGM co-référent.


(3) Ne vez ket an-unan sur eus e vuhez.
ne1 est pas le un sur de son1 vie
'On n'est pas sûr pour sa vie.'
Menard & Kadored (2001:§ 'an-unan')


(4) Tennañ a reont da gerniel, a larfe an unan.
tirer R font à corne.s R1 dirait le un
'On dirait des cornes.'
Standard, Keit Vimp Bev (1987:25)


Cette forme est syntaxiquement différente de an unan, l'anaphore des impersonnels (Ne ouier ket an-unan 'On ne sait pas soi-même').

syntaxe

Unan peut être utilisé comme un impersonnel dans une structure passive ou active. Cet usage rappelle encore l'usage de one en anglais.


(5) Skoet e vez unan, e gwirionez, pa bign gand hent praz Douarnenez da Gastellin.
frapp.é R est un en vérité quand1 grimpe avec chemin grand Douarnenez à1 Chateaulin
'On/quiconque est frappé, en vérité, en montant la grand-route qui va de Douarnenez à Chateaulin.'
Léonard (Cléder), Seite (1998:38)

sémantique

L'impersonnel unan peut avoir une lecture existentielle de type "Boucle d'or" 'On a mangé dans mon bol' (Unan bennak zo deuet amañ 'On est venu ici'). Dans cette lecture impersonnelle particulière, unan peut référer à une entité plurielle. Cette compatibilité de l'impersonnel unan avec le pluriel est mise en évidence formellement par les effets d'accord sémantique.

En (6), Kervella précise que dans cet usage de unan bennak, il équivaut sémantiquement à meur a hini, qui dénote un ensemble sémantiquement pluriel. La source de l'accord pluriel n'est pas le groupe syntaxique unan bennak, qui est syntaxiquement singulier. Le pluriel standard commun de unan bennak 'quelqu'un' est re bennak 'quelques-uns'. Il s'agit ici d'un accord sémantique avec la lecture impersonnelle de unan bennak qui est sémantiquement compatible avec une entité plurielle.


(6) Unan bennak int ha n'int ket deuet.
un quelconque sont et ne1 sont pas ven.u
'Ils sont quelques uns à ne pas être venus.'
Standard, Kervella (1947:§246)

3PL

Comme en français, une forme de troisième personne pluriel peut renvoyer à une entité floue indéfinie (corporation, scientifiques, membres du gouvernement) qui tient de l'impersonnel, mais certaines grammaticalisations vont plus loin et réalisent entièrement un pronom impersonnel.

CONTEXTE: "En entendant des bruits de travaux."

(1) O labourat emaint en traoñ.
à4 travailler sont en.le bas
'Il y a les travaux en bas.' / 'On travaille en bas.'
Léonard (Plougerneau), M-L. B. (04/2016)

CONTEXTE: "En lisant la presse."

(2) Adarre o deus augmentet ar foucher.
encore 3PL a augment.é le impôts
'Ils ont encore augmenté les impôts.'
Léonard (Lesneven/Kerlouan), Y. M. (04/2016)

CONTEXTE: "En rentrant de vacances."

(3) Deuet int en va c'hear.
ven.u sont en mon2 foyer
'On est entré chez moi.'
Léonard (Lesneven/Kerlouan), Y. M. (04/2016b)


On peut le trouver, avec une lecture non-corporatiste, en alternance optionnelle avec un impersonnel en -r.


(4) En Almagn { ez eont / ez eur } da labourat da eizh eur.
en.le Allemagne R vont/va.on pour1 travailler à1 huit heure
'En Allemagne ils vont / on va au travail à 8h.'
Léonard (Lesneven/Kerlouan), Y. M. (04/2016)


Thibault (1914:181, 189) remarque qu'à Cléguérec, "on se rend souvent par gi 'ils'".

  • Gi lar (nen) de ke wach eriw
'L'on dit qu'il n'est pas encore arrivé'
  • Gi lar i ma klã
'Ils disent, l'on dit qu'il est malade.'


coréférence

Cet impersonnel de troisième personne plurielle peut co-référer avec l'agent inexprimé d'un passif. L'équivalent français passe mal.


(1) Amañ ez eus c'hoariet gant an echedoù… hag o deus ket renket nentra.
ici R+C est jou.é avec le échec.s et 3PL a pas rang]].é rien
'On a joué aux échecs ici, et # ils n'ont rien rangé.'
Léonard (Plougerneau), M-L. B. (04/2016)


Impersonnel de deuxième personne

En breton comme en français, on utilise des formes de personne seconde, en tutoiement et en vouvoiement, pour des usages impersonnels:


(1) N'oa ket eas dit lakaat kement-se ablamour ar bezhin a zo rinklus.
ne1 était pas facile à.toi mettre autant-ça car le algues R est gliss.ant
'On ne pouvait pas en mettre tellement que ça, car les algues sont glissantes.'
Léonard (Plougerneau), Elégoët (1982:41)


(2) [ petra (ə) fa:lEx ga vil-sən ]
Petra e v-malec'h gant ar vilin-se ?
quoi R4 moud.2PL avec le 1moulin-
'Qu'est-ce qu'on moud avec ce moulin ?'
Cornouaillais de l'Est (Lanvenegen), Evenou (1987:581)


(3) ' dour 'resk hou fouessenno.
Ho poa dour a-res ho feskennoù. Équivalent standardisé
2PL avait eau à-ras votre3 fesse.s
'On avait de l'eau jusqu'aux fesses.'
Cornouaillais (Moëlan), Bouzec & al. (2017:357)


Le pronom impersonnel de seconde personne singulier peut lier des tournures sémantiquement plurielles car réciproques.


(4) E vezes an eil o' n em c'hortoz a-wechoù.
R es le second à4 se 1 attendre des.fois
'On s'attend les uns les autres des fois.'
Cornouaillais (Plogonnec), Kergoat (1976:74)


On trouve des phrases où un impersonnel en -er peut coréférer avec une marque claire de seconde personne. Ces données passent souvent inaperçues à cause d'une ressemblance de prononciation (debrer, 'on mange'; vs. debrec'h, 'vous mangez').


(5) Ben ' zeber mat pez ket naon war-lerc'h.
quand R 1mange.on bien a.2 pas faim après
'Quand on mange bien, (*tu/*vous) on n'a pas faim après.'
(= … n'en dez ket an nen naon war-lerc'h)
Mona Bouzeg, Cornouaillais (Riec), c.p. [02/2012]


Coréférence avec 1PL

En breton comme en français, un impersonnel peut co-référer avec une marque de 1PL. Ce n'est cependant pas toujours le plus naturel.

 Plourin (2004):
 "prenons un énoncé comme : « Evel m’anavezer or zent » (Helias 1962). Ce titre est la traduction approximative de « Comme on connaît ses saints » ; le or, possessif de la 1re personne du pluriel (= 'nos') est un gallicisme. Il est très rare de trouver [l'impersonnel] suivi de possessifs de la 3e personne, et ce parce que cela donne des phrases ambiguës, alors la 1re du pluriel ! Conseil final aux amateurs de thème breton : si l’on vous demande un jour de traduire le dicton : Comme on fait son lit on se couche, méfiez-vous de son [...]. Dans notre parler natal, cette maxime se dit : evel e ra peb heni e wele eh a da gousked e-barzh."

pronom sujet des infinitives (PRO)

Le pronom impersonnel vide est repérable dans les infinitives (1). C'est un pronom de choix arbitraire comme il en existe l'équivalent en français. En grammaire générative, ce pronom est noté PRO.


(1) Hennez a zo eur gramenn loustoni e-touez e vleo war e vruched da raskañ gant ar forh.
celui-là R est un couche crasse parmi son1 chevelure sur son1 poitrine à PRO racler avec le fourche
'Il y a parmi les poils sur sa poitrine une couche de crasse à [PRO] racler à la fourche.'
Trégorrois, Gros


(2) Ar pehed a lez hen ober.
le péché R laisse [ PRO le faire ]
'Le péché se laisse faire.'
Trégorrois, Gros (1984:207)


Lorsque ce pronom en lie un autre comme en (3), on voit qu'il est 3SG.


(3) Un doare d' ober ur poent war e emzalc'h e-keñver ar boeson eo.
un façon de PRO faire un point sur son1 comportement à-encontre le boisson est
'C'est une façon de faire le point sur son propre comportement vis-à-vis de l'alcool.'
Standard, Gourvenneg (2023)

Le passif

L'effacement de l'agent dans les tournures passives correspond sémantiquement aux impersonnels. Une des formes concurrentes à l'emploi des impersonnels pronominaux en breton est l'emploi du passif.


(1) Alies e vez graet hemañ gant kig yar, met graet e c'hell bezañ ivez gant pesked...
souvent R est fa.it celui-ci avec viande poulet mais fa.it R4 peut être aussi avec poisson.s
'On le fait souvent avec du poulet, mais on peut aussi le faire avec du poisson.'
Cornouaillais/bordure Léon (Dirinon), Kervella (1985:120)


Des pronoms coréférentiels qui n'ont pas les mêmes traits

coréférence entre différents impersonnels

Plusieurs pronoms impersonnels différents peuvent co-exister dans la grammaire d'un même locuteur, et même co-référer. Dans sa traduction de Soljenitsyn, Ti Vatriona, Ernest ar Barzhig utilise les deux marqueurs consécutivement dans la bouche de Matriona (1).


(1) Pa ne oar ket an nen, pa ne reer tamm kegin ebet,
quand1 ne1 sait pas le personne quand1 ne1 fa.it.on morceau cuisine aucun
penaos e c'hellfed degemer unan bennak?
comment R4 pourrait.on accueillir un quelconque ?
'Quand on ne sait pas, quand on ne cuisine pas du tout, comment accueillir quelqu'un ?.'
Standard, ar Barzhig (1976:23)


Mona Bouzeg, de Riec, a un usage très restreint de la forme verbale en -er. Elle peut utiliser la même co-référence.


(2) Ben ' glever soniñ kreizteiz ma poent d'an nen mont d'ar gêr.
quand R1 entend.on sonn.er mi.jour est temps pour1on aller à1 le 1foyer
'Quand on entend sonner midi, il est temps de rentrer à la maison.'
Mona Bouzeg, Cornouaillais (Riec), c.p. (02/2012)


traits différents

pour l'accord verbal

Les pronoms qui peuvent coréférer entre eux n'ont cependant pas les mêmes traits syntaxiques. Ils ne déclenchent pas le même accord verbal: le pronom an nen ne peut pas déclencher le même accord verbal que le pronom vide.


(2) An nen ne oar / * ouzer ket bepred.
un personne ne1 sait / * sait.on pas toujours
'On ne sait pas toujours.'
Cornouaillais (Riec), Mona Bouzeg, c.p. (01/2009)


Avec le verbe kaout bloqué à l'accord riche, on voit que l'impersonnel eun den chez Gros à des traits de troisième personne masculin singulier.


(3) O ! Bet e-neus eun den buheziou !
Oh eu R a on vie.s
'Oh ! On a eu de ces vies ! (difficiles, pénibles, terribles)
Trégorrois, Gros (1984:180)


pour les anaphores liées

Les impersonnels -r de l'accord et an den ont des formes différentes d'anaphores liées. An den déclenche la forme masculine de la troisième personne du singulier. PROARB comme le pronom sujet vide déclenchant -r déclenchent la forme impersonelle an-unan.


(4) Ne vez ket kavet mad ar boued pa vezer an-unan o tebri.
Ne vez ket kavet mad ar boued pa vez an den e-unan o tebri.
ne1 est pas trouv.é bon le nourriture quand1 est on det-un à4 manger
'On ne mange pas avec appétit quand on est seul à manger.'
Trégorrois, Gros (1984:187)


(5) Lod a zifenne en em lakâd an-unan da varner.
certain R1 défendait PROARB se mettre le-un à1 jug.eur
'Certains défendaient de se mettre soi-même juge.'
Cornouaillais 1893, IAI.:122


(6) Gwelloh eo ober ar homisionou an-unan.
Gwelloh eo d'an den ober ar homisionou e-unan.
mieux est [ (à') on/PROARB faire le5 commissions le-un ]
'Il vaut mieux faire les commissions soi-même.'
Trégorrois, Gros (1984:187)


Terminologie

Il existe une tradition terminologique qui assigne les formes en -r au passif. Guillevic & Le Goff (1902:47) parlent pour les formes en -er de "formes personnelles pour le passif". Sommerfelt (1921) considère que les formes en -r sont la marque du mode passif. Lambert (2010, 2012a) utilise le terme "passif impersonnel", tout en considérant cela comme un problème terminologique (il existe aussi en breton une structure de passif impersonnel qui n'a rien à voir, que Lambert appelle lui un "passif périphrastique"). Les formes de l'impersonnel en -r ne répondent pas positivement aux tests des passifs.

Ploneis (1983), Humphreys (1995:335) ou Crahe (2013:223) désignent le pronom impersonnel -r ou an den sous le terme de personne indéfinie. Si le sujet de l'impersonnel était réelement indéfini, il provoquerait les formes ez eus du verbe 'être'.

Favereau (1997:§767), suivi par Ledunois (2002:136), utilisent le terme de "non-personne". Ce terme est à éviter dans la mesure où dans la tradition structuraliste, le terme de "non-personne" désigne la troisième personne (celle qui est extérieure au cadre d'énonciation). Favereau (1997:§472-3) justifie son choix terminologique en réservant le terme d'"impersonnel"… à ce qui est ailleurs appelé un explétif (comme le pronom météorologique).

L'expression littérale 'impersonnel' est désigné en breton par le terme diberson, dibersonel (Chalm 2008), ou par le terme dic'hour (Kervella 1995, Chalm 2008, SADED 2010).

Cependant, ce que Denez (1983) ou Goyat (2012) désignent comme an dibersonel, l'impersonnel correspond à l'explétif.

Ce que Guillevic & Le Goff (1902), Ploneis (1983) ou Crahe (2013) désignent comme l'impersonnel ou la conjugaison impersonelle correspond à la forme d'accord pauvre de l'effet de complémentarité sur le verbe fléchi.

Le terme personne zéro, est person zero en anglais et gour mann en breton. Cette expression a l'avantage de s'insérer numériquement dans la liste des traits de personne tout en suggérant une absence de contenu de ses traits.

Chalm (2008) traduit passif impersonnel (de type Il a été tiré sur ce bateau) par l'expression stumm gouzañv dic'hour.

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