Kêr

De Arbres

Le nom kêr dénote une 'ville', un 'village', un 'endroit habité', une 'ferme' ou une 'maison' au sens large. Dans l'expression d'ar gêr 'à la maison', il s'agit du 'foyer'.


(1) E kêr ne gaved mui netra.
en ville ne1 trouvait.on plus rien
'On ne trouvait plus rien en ville.'
Léonard (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:197)


(2) Pa veze dornadeg, e kêr-mañ-kêr...
quand1 était battage en ferme-ci-ferme
'Quand on battait dans telle ou telle ferme… '
Cornouaillais (Bigouden), Bijer (2007:243)


Morphologie

variation et répartition dialectale

La carte 366 de l'ALBB montre la variation dialectale de la traduction de en ville, à la maison au début du XXe. On retrouve la variation des formes de ce terme à la fin du XXe dans la carte 010 du NALBB 'un village' et la carte 011 de son pluriel 'des villages', kêrioù, keriadennoù.

'chez soi, chez moi' ("home")

(3) Ne yade ket er gear?
ne1 était pas en.le 1maison
'Il n'était pas à la maison ?'
Cornouaillais (Sein), Fagon & Riou (2015:44)


(4) Deuet int en va c'hear.
ven.u sont en mon2 foyer
'On est entré chez moi.'
Léonard (Lesneven/Kerlouan), Y. M. (04/2016b)


(5) Va c'hear enn-dèon eo.
mon2 maison vraiment est
'C'est ma vraie maison.'
Léonard (Ouessant), Malgorn (1909)


'ferme, terres, exploitation agricole'

Le singulier de la traduction de (une) ferme est documenté dans la carte 259 du NALBB, et son pluriel des fermes dans la carte 260.

À travers les dialectes, le nom kêr 'ferme', est en concurrence lexicale avec atant, menaj, plas, tiegezh, feurm, ti-feurm, koumanand, tachenn, mereuri, parfois sur les sens différents de 'bâtiment de vie', 'exploitation agricole', 'ensemble de terres'...


(6) Labourioù disheñvel a oa da gas da benn er c'hêrioù a-hed ar bloaz...
travau.x dis.semblable R1 était à1 mener à1 bout en.le ferme.s au.long le an
'Les fermes nécessitaient divers travaux à l'année...'
Cornouaillais (Ploéven), Gouérec (2018:4)

dérivation

La finale -iadenn obtient le nom kêriadenn 'village'.

Diachronie

 Kervella (Al Liamm 1954, n°43, p.44):
 "Ar ger-se a zo bet lakaet da zont alies diwar al latin castra ; anat eo avat e vije neuze kastr e-brezhoneg. Ne gredan ket muioc'h e teuje diwar quadra ; rak ne gredan ket e vije kavet a stummoù kozh estreget caer, car- pe kêr. Diwar quadra e c'hortozjed *quazr, *quaezr, e brezhoneg bremañ kwaer, stumm ha n' eus ket anezhañ kement ha ma ouzon. Ha ret eo avat e teuje ar ger diwar al latin ? Furoc'h, ha diazezet startoc'h eo moarvat goulakadur Loth hag Ifor Williams hag a dosta kêr ouzh kae."


  • deut dan gaer poaz eo an panennou
'Rentrez chez vous, les pains sont cuits'
Breton de 1396, ms. BN. lat. 1314

À ne pas confondre

Parfois, les noms toponymiques actuels en kêr- sont des anciens krec'h 'hauteur, colline', comme c'est le cas de Kergouenec au Juch près de Douarnenez, attesté sous la forme Crechguenec en 1687 (Ofis 2003).

Graphie, le K barré

Il existe une abréviation traditionnelle depuis le moyen breton pour kêr, notée par la lettre k au pied barré: . Parfois, cette abréviation apparaît même comme un K simple à l'initiale d'un nom de lieu.

Le Menn (1979a) relève possiblement le premier exemple de ce K barré dans L'éloge funèbre de Peiresc en 1638 (Kian, lu Keryann). Pour l'étude du K barré et son essor au XVII°, il renvoie à la Nouvelle Revue de Bretagne 1947, n°1 p. 69, n°3 p. 215-217, n°4 p. 316, n°5 p. 397-398.


Bibliographie