Tutoiement et vouvoiement

De Arbres
(Redirigé depuis Vouvoiement)

En breton standard, le système d'adresse s'aligne sur celui du français: la marque de déférence et de politesse est de deuxième personne du pluriel (2PL, c'hwi).

Tous les dialectes traditionnels ont dans leur paradigme un pronom pluriel qui traduit le français vous, qui est un marqueur du pluriel (carte 74 de l'ALBB). Cependant, tous les dialectes traditionnels n'ont pas de forme d'adresse spécifique au singulier qui traduit le français tu. Dans une poche centrale qui irradie du haut-cornouaillais jusqu'à l'ouest du vannetais, des variétés montrent un système à l'anglaise où le pronom d'adresse qui traduit vous traduit aussi tu. Dans ces variétés, le pronom pluriel n'est jamais un marqueur de politesse, car c'est le seul pronom d'adresse. On devine que c'est le cas dans le dialecte du traducteur de Tintin en (1), où un vouvoiement est compatible avec une insulte.


(1) Alo 'ta ! Ho taouarn en nec'h, loustoni !
Eh ! donc ! votre3 deux.main en.le haut sal.eté
'Allons ! Les mains en l'air, canaille !'
Standard, An Here (2003:32)


Dans l'aire parlante s'opposent donc des dialectes de système dual (T-V) et un dialecte sans distinction duale. Le système dual de tutoiement/vouvoiement n'est pas non plus uniforme dans ses usages, et diffère parfois nettement de ceux du français moderne. On verra par exemple qu'en certains endroits du Léon, une relation qui devient plus proche peut passer du tutoiement au vouvoiement. Au XXIe, les systèmes traditionnels ont été lourdement ébranlés mais subsistent sporadiquement et il n'est pas rare que des bilingues se tutoient et se vouvoient alternativement selon qu'ils passent d'une langue à l'autre.


Ressources documentaires

Les ressources qui documentent ces pratiques sont relativement rares, mais surtout partielles.

Manquent cependant les usages discursifs d'adresse, c'est-à-dire qui est censé vouvoyer qui. L'exercice de traduction à partir de formes françaises a aussi pu essayé de traduire précisément l'usage français.
Une analyse des cartes est fournie dans Falc'hun (1981:483-499)
  • Riwall (1942:4) avait lancé en avril 1942 dans le journal l'Arvor un appel à contribution des lecteurs sur ce thème. On n'en trouve pas de suite dans les numéros suivants de mai et juin. Cependant, deux numéros de Gwalarn l'ont immédiatement imité et en ont publié les résultats, avec une belle précision des contextes d'usage, en particulier pour ce qui concerne les usages genrés.
  • Les cartes Nouvel Atlas de la Basse-Bretagne, Le Dû (2001), fournissent des informations précieuses sur les formes morphologiques disponibles à la fin du XXe siècle à travers les dialectes pour les pronoms indépendants qui traduisent 'tu' et 'vous'.
  • Les monographies locales ajoutent des sources plus commentées, et renseignent ponctuellement sur quelques dimensions des usages à un point donné.
  • Jouitteau (2021) fournit en anglais une synthèse des données du XXe au XXIe avec une carte (laide mais informative) des différents systèmes et leur évolution.


Les témoignages de locuteurs sur leurs voisins doivent être pesés selon le système qu'ils emploient eux-même: un locuteur de système dual qui entend un locuteur qui n'a pas cette distinction l'entend s'exprimer en c'hwi (V), et peut le trouver très formel alors que celui-ci ne fait en fait pas de distinctions dans ses adresses. Les locuteurs pour qui le système n'est pas genré peuvent aussi se méprendre sur les marques d'adresses qu'ils entendent. Enfin, si les femmes tendent à mentionner et commenter les usages des hommes, l'inverse n'est pas vrai. Des usages entre femmes, ou même d'adresse des femmes aux hommes peuvent donc passer inaperçus.

L'aire dialectale sans contraste d'adresse

Tous les dialectes du breton n'ont pas le matériel morphologique pour marquer un contraste singulier/pluriel dans l'adresse.

En effet, dans certains dialectes du centre de l'aire parlante, le te a disparu, ainsi que toutes ses prépositions et formes verbales associées (ganit 'avec toi', 'ouzez 'tu sais', etc.). Les paradigmes morphologiques dans ces dialectes ne fournissent donc pas de contraste possible: il n'existe qu'une seule personne d'adresse en c'hwi. Cette zone d'adresse unique en c'hwi émerge nettement dans l'ALBB. Lorsqu'il a été demandé à des brittophones de traduire des formes françaises de tutoiement 2SG, les réponses avec des pluriels ont afflué (voir, par exemple, la carte 502, 'attaché à toi/vous', et carte 107, 'à toi, à vous'). Ces dialectes n'ont qu'un seul nombre pour la seconde personne, qui emprunte la morphologie de ce qui est ailleurs 2PL.

Les locuteurs de cete zone sonnent très formels pour les autres, mais il est important de se rendre compte que pour des locuteurs qui n'ont qu'une forme d'adresse, la pratique du vouvoiement est impossible à réaliser. Ces locuteurs n'ont en fait pas de forme réservée à une politesse d'usage, comme c'est le cas en anglais.


épicentre; Carhaix

Falc'hun (1981:485), d'après l'étude des cartes de l'ALBB, situe l'épicentre de l'absence de tutoiement à Carhaix. La zone de Carhaix était au début du XXe nettement restreinte aux formes en c'hwi.


témoignages de monolinguisme en c'hwi

On trouve dans cette zone autour de Carhaix des témoignages du début du XXe qui ignorent même l'existence des formes de deuxième personne du singulier.

Un lecteur de Gwalarn en 1942 rapporte qu'à Carhaix-Plouger une domestique avant la guerre ne comprenait pas les paysans qui la tutoyaient en breton. Ceci témoigne de l'absence de la forme te, qui était entièrement absente du paradigme morphologique de la locutrice, et de ce qu'à cette époque des contacts nouveaux apparaissaient, venant de la zone où te existait. Barzhig dans Gwalarn ajoute Mael-Carhaix. Falc'hun (1951a) confirme à Carhaix une disparition ancienne du tutoiement. Naoned (1952:61) note que seule la forme plurielle c'hwi est connue à Scaër et Guiscriff, ce qui confirme le témoignage de deux lecteurs différents de Gwalarn dix ans plus tôt.

A Plévin (40), à 10km au sud de Carhaix-Plouguer, l'homme interrogé par l'ALBB répondait avec une seule personne d'adresse pour tous les paradigmes, sauf pour 'avec toi' où il donna ginit-te (carte 209), révélant sporadiquement un contact avec un système T-V.


un épicentre qui n'est pas au milieu

Falc'hun (1981:484) place le centre géographique actuel de l'aire en c'hwi dans "la région comprise entre les hautes vallées du Scorff et de l'Ellé, entre le Faouët et Guéméné", mais il situe l'épicentre historique de cette zone à Carhaix. Falc'hun (1981:485) constate que Carhaix "se trouve bien aujourd'hui à la lisière de l'aire sans tutoiement, comme Quimper. Mais elle a pu subir une influence récente du parler de Morlaix". Pour lui, l'aire non-tutoyante est en régression par rapport à sa frontière Nord, et Carhaix était auparavant au centre de l'aire géographique de son influence.


frontière Nord; Brennilis, Loqueffret, Plounévézel, Corlay

Sur la frontière Nord de l'aire de l'adresse unique en c'hwi, un lecteur de Gwalarn exclut en 1942 La Feuillée (une mère y tutoie ses enfants), mais note qu'à 4km au Sud à Brennilis, le vouvoiement est utilisé par les mamans "même pour des petits enfants". A Botmeur, Le Dû (2001:carte 455) relève une forme en te. A Loqueffret, Solliec (2015) a documenté un système où les deux marques peuvent co-exister dans la même adresse, et ne constituent donc pas de forme de politesse. A Motreff, un locuteur du NALBB remarque le tutoiement à Poullaouen. A Collorec, on y associe le tutoiement à Plouyé. A Lannedern un locuteur remarque la présence du tutoiement à Plonévez(-du-Faou).

Falc'hun (1981:499) relève dans Guilcher (1963:546) un texte de chanson à danser collectée à Plouyé qui mélange les marques T-V. "On y relève pêle-mêle, s'agissant de la même personne, les possessifs ho (pluriel) et da (singulier), les verbes 'mout 'tu es', ' n om gefet 'vous vous trouveriez', taol 'jette', chech 'tire', pokit 'embrassez', reit 'donnez', deus 'viens'".

Wmffre (1998:25) situe la ligne dialectale entre le sud de Plounévézel, où le tutoiement a disparu, et Poullaouen, à 10km au Nord-Ouest, où le tutoiement est répandu.

Ar Barzhig en 1942 considère qu'il existe un système dual à Callac et Carnoëd. Un locuteur de NALBB à Kergrist-Moëlou considère aussi que "du côté de Callac, on dit tu". A Locarn, un autre considère que "à Duault, on dit tu". Selon les locuteurs de Humphreys (1985:317), "te s'emploie couramment dans les communes de Magoar et de Kérien (à 5 km) au nord-ouest, et de Saint-Connan (à 10 km) au nord-est, et sporadiquement dans la commune de Kerpert".

A l'Est, Corlay (35) est clairement dans l'aire du c'hwi, au moins pour les femmes: en 1912, une femme donne un système d'adresse unique dans l'ALBB: elle n'a pas de 2SG dans les possessifs (carte 323), les pronoms incorporés dans diouzh (carte 502) ou da (carte 107), ni sur le verbe emañ (carte 64), elle traduit 'tu étais' par c'hwi wé (carte 70). Mais en était-il de même pour les hommes ? A 19km au Nord à Saint Fiacre (22), en 1912 toujours, une autre femme a une forme unique pour l'objet de da (carte 107), mais un système dual pour le reste des paradigmes (carte 70), et même la préposition diouzh (carte 502).

Le Dû (2001:carte 456) relève à Saint-Servais (point 77) le témoignage d'un locuteur connaissant le tutoiement, qui note plus au Sud à Locarn un usage unique de c'hwi ("A Locarn, on disait hwi à tout le monde").

Le Dû (2001:carte 456) relève en Léon à Guimiliau (point 24) le témoignage d'un locuteur connaissant le tutoiement, qui note à 4km plus à l'Ouest, à Lambaul(-Guimiliau), un usage plus répandu du c'hwi ("E Lambol 'vez laret c'hwi, 'A Lampaul, on dit vous"). Sur ce même point de Guimiliau, un locuteur (peut-être le même) considère que les gens s'y tutoient de plus en plus. Il s'agit probablement d'un commentaire sur un usage plus répandu de c'hwi car Lambaul(-Guimiliau) est nettement au Nord Est de la frontière Nord de l'aire centrale.


frontière Sud

vannetais de l'Ouest

À la fin du vannetais pré-moderne à Cléguérec, Thibault (1914:178-181) présente une personne d'adresse au singulier à l'état de traces. Il note que la seconde personne singulier "de la seconde série" des pronoms n'est que "très rarement employée" (et réalisée sous la forme te). Le possessif d'adresse ha est "inconnu". Le verbe 'être' a une forme ous "à peu près inconnue" au présent, et aucune forme pour les autres temps.

Hemon (2000:§51,n1) considère que la forme d'adresse au singulier est perdue dans l'aire Ouest du vannetais, ce qui correspond au témoignage Le Goff (1927) pour l'Ouest du vannetais et le pays de Pontivy, et de Loeiz Herrieu en 1942 pour Hennebont. Le témoignage de R. Kadig pour Pontivy ci-dessous est assez révélateur. Les villes semblent utiliser le système français, et le français local en 1942 peut être atteint de cette réduction, avec des marquages tu/vous erratiques.

 R. Kadig, (Gwalarn 1942:423)
 "E kanton Pondivi e vez graet gant c'hwi hepken. Te a zo dianav-krenn. Meur a wech em eus klevet-me tud a ziwar ar maez, — mitizion dreist-holl degouezet nevez zo' e kêr, desket ganto un nebeut frazennou gallek, o treuzlec'hiañ e galleg an doare komz ma raent gantañ e brezoneg. Implijout a raent ur furm hepken, toi pe vous, ken na veze iskis meur a wech o c'hlevout o komz galleg. Unan a lavare tu d'an holl, zoken d'an itron : "toi, Madame, tu... " endra ma rae dalc'hmat unan all gant vous hepken, zoken ouz bugale vihan eus he ziegez hag anevaled."


Au XXIe siècle, on a toujours à l'Ouest du vannetais un système unique sur le pronom c'hwi, comme on le voit dans les notes de Cheveau (2011:30) et dans le corpus de Ar Borgn (2011) au Scorff. La frontière de l'aire en c'hwi a même progressé récemment vers Pluvigner. Des enfants de moins de 4 ans s'y chamaillent en c'hwi.


(1) Nann c'hwi n' oc'h ket fur !
non vous ne1 êtes pas sage
'Non toi tu n'es pas sage !' (dispute avec un autre élève à propos d'une chaise)
Production enfantine (3 ans 8 mois), Pluvigner
Mermet (2006:137)


Le code-switching enfantin montre clairement l'usage de la personne plurielle du breton en usage équivalent au tutoiement français.


(2) Nann ! tu laoskit !
non tu laissez
'Non tu laisses (ça)!' (dispute avec un autre élève à propos d'un feutre)
Production enfantine (3 ans 10 mois), Pluvigner
Mermet (2006:annexe B)


Crahe (2013:339) considère que le tutoiement n'existe pas à Languidic.


Val de Scorff

En Val de Scorff, Ar Borgn collecte des formes plurielles en niveau de langue très familier.


(3) Kouchet mat oc'h.
coïncidé bien êtes
'Tu tombes pile-poil.'
Vannetais (Le Scorff), Ar Borgn (2011:25)


(4) Don 'peus lakaet ho piz en hoc'h lagad.
profond 2PL 2.a m.is votre3 doigt en votre+C œil
'Tu t'es mis profond le doigt dans l'oeil.'
Vannetais (Le Scorff), Ar Borgn (2011:36)


campagnes non-littorales autour de Quimperlé

En cornouaillais de l'est maritime, "dans le secteur de Quimperlé, on ne tutoie que dans les communes littorales" (Bouzec & al. 2017:501). Bouzeg (1986:31) confirme qu'en contraste avec le cornouaillais de l'est maritime, le tutoiement est absent des communes de l'intérieur du haut-cornouaillais: Saint-Thurien, Bannalec, Le Trévoux, Locunole, Guilligomarc'h et Tremeven (Bouzec & al. 2017:491 spécifiquement pour Bannalec). A Meslan, le NALBB apporte le témoignage d'un locuteur qui ne connaît le tutoiement que par bilinguisme passif ("On entendait le tutoiement dans les chants et dans les contes", Le Dû 2001: carte 455, point 146).

En (1), à Scaër, la forme pronominale utilisée est la seule disponible mais la traduction exacte en français serait avec un tutoiement.


(1) Hui ' ra tammou dudoñ.
vous R1 fait morceaux de.lui
'Tu en fais des morceaux.'
Scaër, Cheveau & Kersulec (2012-évolutif:Scaër,'dioutañ')


Selon l'ALBB en 1911, le point le plus à l'Ouest de la frontière Sud de l'aire en c'hwi est Edern (point 43), avec une restriction aux formes en V dans toutes les cartes. Cependant, l'aire pourrait déjà être plus large, car les descriptions des usages montrent sur toute cette zone soit un usage très restreint du te, soit des locutrices restreintes au c'hwi, or l'ALBB n'avait documenté que des usages d'hommes en Basse-cornouaille continentale. Fin XXe, Le point frontière d'Edern est confirmé par l'absence de traduction pour 'tu' dans les collectages à Briec et Lothey (Le Dû 2001: carte 455, points 95, 96).

Pays Glazik

Le te n'existe pas en Cornouaillais de Briec (Noyer 2019:171, 172), alors qu'il existait selon Ar Scao en 45. L'ALBB notait le te absent à Edern.

A Ergué-Gabéric en 1982, Marjan Mao, née en 1902, donne du c'hwi à son mari Fanch Mao (c'hwi 'oar, Guegen & Cognard 1982:'Vive Blum'). Dans l'interview en breton de Kemener (1989), Elle utilise aussi un c'hwi impersonnel (C'hwi 'oa asezet er penn all... 'On s'asseyait de l'autre côté (de la table)... ', ). Interviewé par Lors Jouin, Rene Danion né en 1932 utilise des formes en T, même verbales (a-benn […] 'rez komant, te rae komant evid ur bloaz 'quand tu t'engages, tu t'engageais pour un an'), pour s'adresser à lui dans un registre d'impersonnel.

Trépos (1968) considère que Quimper est en zone c'hwi.

Kergoat, sur la commune de Quemeneven, marque un point frontière inclus dans la zone c'hwi. Les communes de Locronan et de Plonevez-Porzay montrent un système dual, genré. A-M. Louboutin (10/2021) rapporte cependant que son mari, comme elle brittophone de Locronan, l'avait tout de suite tutoyée en breton lors de leur rencontre. Au sein du couple, le te est établi, avec les retournements d'adresse en c'hwi réservés à des échanges exceptionnellement agressifs. A-M. Louboutin (10/2021) se rappele distinctement la première fois qu'un homme non-familier l'avait tutoyée en breton en public.

pays rouzig

Originaire de Lothey et bien qu'influencé par le standard, Jakez Riou fait parler des écoliers en c'hwi dans un texte rédigé en 1935, même dans un registre de chicane et d'insultes. Le c'hwi est réciproque entre les enfants.


(1) Fougaser ac'hanoc'h ! A-boan ma anavezit zoken an "a" ouz an "o".
vant.ard P.toi à1-peine si connaissez même le "a" de le "o"
'Vantard (de toi) ! Tu sais à peine lire !' (un élève)
Standard, Riou (1941:22)


Le maître, lui, utilise une forme T d'agression.


(2) Prenn da c'henou, amprevan !
ferme ton1 bouche vermine
'Ferme-la, vermine !'
Standard, Riou (1941:31)

Dialectes de système dual tutoiement/vouvoiement

Il se dégage trois aires différentes utilisant un système dual:

  • La première zone comprend le Léon et peut-être le Nord du Trégor. C'est la zone hiérarchique, où l'âge est reflété dans les adresses de respect.
  • Le seconde zone comprend toute l'aire de Basse-cornouaille et la bande côtière jusqu'au vannetais. C'est la zone de comportement genré, où les femmes et filles sont vouvoyées. Il est compatible avec un système âgiste.
  • La troisième est celle du vannetais de l'Est, qui reste à étudier.


la zone hiérarchique

Dans cette zone, on constate beaucoup d'usages asymétriques. Les enfants typiquement vouvoient les parents. Le te peut notablement être un signe fort d'agressivité.


Léon et bord Léon en Cornouaille

En Léon de manière générale, le système est orienté vers un vouvoiement des personnes auxquelles le respect est dû socialement, dans un système âgiste.

Le Gonidec n'est pas natif (Lambert 1976:240), mais il rapporte spécifiquement des usages léonards du début du XIXe, augmentés de source parcellaires d'autres dialectes. A l'article 'tutoyer', il donne une phrase dont il n'a pas l'air de douter de l'universalité.


(1) kéd déréad téa dâd.
N'eo ket dereat teañ e dad. Équivalent standardisé
ne1 est pas convenable tutoyer son1 père
'Il n'est pas convenable de tutoyer son père.'
Léonard, Le Gonidec (1821:'tutoyer')


Troude (1886:Tutoyer'):
"Il est d'usage à la campagne de ne pas tutoyer les personnes plus âgées que soi, comme aussi celles pour lesquelles on a du respect. Parfois même le plus jeune de deux frères dira[j] vous à son aîné, et celui-ci lui dira tu."

Ce système purement hiérarchique est contrebalancé depuis plus d'un siècle par un tutoiement de proximité, qui ne marque alors pas une domination sociale. Ce tutoiement gagne du terrain au XXe. Dans la pièce de théâtre en breton de Ar Floc'h (1927:32), Fanch et Lan ont quarante ans de différence. Fanch appelle son ami Lanig kozh, mais le tutoie au nom de leur camaraderie. Lan demande le respect dû à son âge ("Je suis assez vieux pour être ton père"). Le tutoiement de proximité a gagné du terrain au XXe. En Bas-Léon, Le Dû (2001:carte 456) relève à Portsall un témoignage d'évolution du système : "Araok e veze lavared te d'ar mevilli ha c'hwi d'an dud, ha bremañ e vez lavared te d'an dud ha c'hwi d'ar mevilli" [avant , on disait tu aux domestiques et vous aux parents, et maintenant on dit tu aux parents et vous aux domestiques].


(2) Ahanta, Kaou ! Mond a ra mad ganéz ?
Eh ! Kaou aller R1 fait bien avec.toi
'Eh, Kaou, ça va ?'
Léonard, Seite & Stéphan (1957:71)


Ouessant

Le système est dual à Ouessant, car Malgorn (1909:230) distingue les expressions utilisant le parlant dre de 'tutoyer' et le parlant dre c'h¨wi 'voussoyer'. À la fin du XXe, le te existe et "on vouvoie les parents" (Le Dû 2001: cartes 455-6, point 1).


Brignogan, Pays Pagan, Santec

Le système dual de politesse est décrit en Léon à Brignogan, en pays Pagan et à Santec au milieu du XXe. Les enfants vouvoient leurs parents qui en retour les tutoient. Le vouvoiement marque globalement l'auto-reconnaissance de la domination sociale de l'interlocuteur sur soi, dans une relation non-réciproque. On note, à l'état de trace, un ancien usage réciproque dans les couples.


 abbé F. Guivarc'h (Gwalarn 1942:421)
 Santeg
 1. Ar vugale a gomz atav dre c'hwi ouz o zad hag o mamm, tud-koz, eontred ha moerebed, hag an holl dud oadet. An dud deut a gomz dre c'hwi ouz an dud a zo kalz kosoc'h egeto, pe o deus da welout warno, evel mistri, beleion... hag ivez ouz an estrañjourion ha tud digenvez. Anaout am eus bet graet priedoù, e-touez ar re goz, hag a yae dre c'hwi an eil d'egile. Rouez-kenañ int.
 2. An dud er mêmes oad, hag eus ar mêmes renk, p'en em anavezont mat, a gomz atav dre te etrezo. Ar gerent a ya atav dre te d'o bugale, hag ar re goz d'ar re yaouank. En ur ger : c'hwi eo ger an doujañs ha te ger ar c'hendere pe an trec'h.


An Dre Nevez 'Saint Sauveur'

Fañch Abeozen est originaire de Saint-Sauveur, sur le bord Sud-Est du Léon. Dans la pièce Janedig ar Rouz, il utilise un système léonard très robuste, avec un système dual asymétrique de type hiérarchique. Le personnage An Tremblai, capitaine de Paimpol, donne un ordre à un soldat en T, puis se tourne vers le général anglais Norris en V (p.369). Le paysan Jakez ar Rouz s'adresse au capitaine en V, qui lui répond en T (p. 385). Les femmes ne sont pas spécifiquement vouvoyées. Janedig ar Rouz vouvoie le recteur, qui la tutoie (p.386).

La pièce montre aussi une différence d'adresse partaire selon les classes sociales. Les classes sociales hautes ont un V paritaire. Le général Norris anglais et son officier Wilfrid se vouvoient (p.369). Le capitaine An Tremblay et et le recteur se vouvoient (p.384). Le capitaine An Tremblay et son lieutenant Kergomar sont complices et se tutoient. Il pourrait s'agir d'un T paritaire à la cornouaillaise, mais c'est à relativiser car le Kergomar est dit ne pas parler bien breton, et son supérieur le tutoierait de toute façon. Chez les paysans, il y a un T paritaire. Les deux femmes Janedig et Naig se tutoient symétriquement (p. 372), et le jeune couple de fiancés se tutoie symétriquement tant qu'il est sur du lien (p.379, 381, Betek er bez me da gаrо!).

De simples soldats, Herve et Jafrez, tutoient Naig, une femme inconnue d'eux dans un contexte d'approche courtisane mêlée d'aggressivité. C'est le T de parité sociale. Mais lorsque c'est le capitaine qui rencontre Janig, une paysanne inconnue de lui qui lui plait, il choisit le V de parité de sa classe sociale à lui en dépit de sa classe sociale à elle, et la vouvoie. Elle le vouvoie en retour, ce qui est forcément ambigü entre le V de distanciation sociale et le V paritaire "offert".

   Abeozen (1942:370, 371): (à Naig)
 HERVE: - C'hwero da furnez, Naig vrav!
 ...
 JAFREZ: - Ro peoc'h deomp gant da gaozioù!
 Abeozen (1942:368):
 JANIG: - Ne gomzit ket 'vel ur c'hristen!
 AN TREMBLAI: - C'hwi roio din an absolvenn.
 KERGOMAR (au capitaine): - Feuket ganit ar plac'hig koant. 
 

Cette différence d'adresse paritaire entre les classes crée des adresses instables: lorsque le capitaine courtise Janedig, il lui adresse un V paritaire de classe sociale haute, pour lui offrir ce statut mais lorsqu'elle marie un autre, il passe à l'adresse en T pour lui rappeler leur différence sociale (p.385,387). Ce système est point pour point celui qui est décrit pour le moyen français par Mason (1990).

Une autre adresse instable est utilisée par Fañch Abeozen pour exprimer l'incertitude de Janedig lorsque, capturée par le capitaine, et s'adressant à son mari avant le viol, elle alterne les adresses T-V.

 Abeozen (1942:387):
 Daoust ha c'hwi c'hoaz am c'hemero ?
 Ne vezin mui ur plac'h direbech
 Evel bremañ, va muiañ karet.
 Eus ar pez a vo c'hoarvezet
 N'on kiriek ha va zourmant
 A vo diremed mar kavan
 Ho karantez lazet en distro.


L'usage des adresses instables ici ne montre pas un système morphologique qui s'écroule, mais au contraire un système assez stable pour que la moindre dérogation en soit signifiante en pragmatique, et utilisée par un écrivain.

Botmeur

A Botmeur, en Cornouaille bord Léon, Le Dû (2001:carte 455) rapporte le témoignage d'un locuteur né au début du XXe qui déclare tutoyer les jeunes et vouvoyer les vieux. Cela peut dériver d'un système âgiste ou d'une évolution de la langue vers le tutoiement, ce locuteur possédant les deux variétés.

vouvoiement entre époux

Troude (1886:'tutoyer'): "En certains cantons, les fiancés se tutoyent avant la noce et ne se tutoyent pas après."

Dans la collecte de Gwalarn en 1942, un témoignage d'une native de Brignogan en 1877 (qui a donc 65 ans en 1942) montre que le tutoiement entre époux était fin XIXe un signe de grande dispute.

 Madame Pont:
 "C'hwi a veze implijet em bugaleaj etre ar priedoù. Komz dre te d'ar gwaz pe d'ar wreg a oa zoken ur seurt kunujenn. Ur wech, pa oan c'hoaz bugel, va mamm a c'houlennas diganin mont da gerc'hat un dra bennak e ti un amezegez. Dor he zi a oa digor hag he gwaz a oa e-barz. Ma ! en ur glevout an daou-se o komz dre te etrezo, intentet em eus e oa tabut bras en ti-se, ha me en-dro d'ar gêr diouztu".
 [Dans mon enfance, les époux se vouvoyaient. Tutoyer son mari ou sa femme était même une sorte d'insulte. Une fois, quand j'étais encore une petite fille, ma mère m'a demandé d'aller chercher quelque chose chez une voisine. Sa porte était ouverte, et son mari était là. Mah ! A les entendre se tutoyer, j'ai compris qu'ils étaient en grande dispute, et je suis retournée chez moi dare-dare.] 


En 1913, dans le journal Ar Bobl, on peut lire un roman feuilleton en breton, an diou vuntrerez, de la plume de Loeiz ar Floc'h, léonard natif de Bodilis. Ar Floc'h y fait parler Mathilde en breton à un marquis. Elle vouvoie celui-ci tant que leurs relations sont aisées. Mais le marquis décide de la marier de force, et elle échafaude son meurtre. A partir de là, elle s'adresse à lui en le tutoyant. Le marquis s'en réjouit: "al levenez a zo em c'halon oc'h da glevet o komz dre te ouzin, rak an dra ze a zo eur merk a garantez tener, [J'ai joie à t'entendre me tutoyer, car c'est une marque d'amour tendre.]". Pour le marquis, le tutoiement est une marque certaine de rapprochement entre prétendants, et quatre paragraphes plus tard, il est assassiné.

A Santec en 1942, l'abbé Guivarc'h dit avoir connu des couples qui se vouvoyaient, mais que cet usage est devenu très rare. Fin XXe, Le Dû (2001: carte 456) remarque le vouvoiement dans un couple en Nord Léon à Kerrien.

signe de contact entre systèmes différents ?

En contraste avec des usages en breton plus traditionnels, Troude (1886:'tutoyer') note que "beaucoup de jeunes gens se tutoyent dès qu'ils se sont vus une fois."

Il ressort de la collecte de Gwalarn qu'en Pays Pagan, c'est plutôt le pronom te qui serait utilisé pour s'adresser à des étrangers. Ceci ne trahit pas une attitude particulièrement agressive vis-à-vis des étrangers en général - le vous leur serait donné en français.


 P. K. (Gwalarn 1942:418):
 Brignogan ha Bro-Bagan
 "Te ha c'hwi a vez implijet dre aman kenkoulz hag out hag oc'h. C'hwi a ziskouez an doujañs. Komzet e vez dre c'hwi d'ar veleion, d'ar mezeg, h.a. Ar stumm-se a reer ganti ivez pa gomzer d'ar re goz. Te evelato a vez implijet alies pa stager da gomz gant un estrañjour bennak, ha pa vefe hemañ un « aotrou » pe un den diwar ar maez (nemet ur beleg e vefe), tra ma vefe graet emichañs '« vous » e galleg en ur gomz gant an hevelep re.
 Ar re goz a lavar e komze ar vugale dre c'hwi d'o c'herent en « o amzer » . Bez' e talc'her d'ar c'hustumse e tiegeziou a zo, war am eus klevet. Hogen te a zo a dra sur kalz implijetoc'h eget c'hwi hiziv an deiz."


Cet usage pour s'adresser à des non-familiers pourrait révèler la conscience qu'un système unitaire sur le singulier est utilisé ailleurs, mais cette hypothèse est faible car le seul dialecte qui s'adresse réellement multilatéralement en te est cependant dans la partie la plus éloignée du vannetais.

Trégor et breton central

En trégorrois pré-moderne, le te existe dans les paradigmes (a te ne teus ne med peder lef evid mond da verdein 'et toi tu n'as que quatre lieues pour aller à Verdun'... hac espedan ma migon quer 'et je t'invite, mon cher ami' Conan 182?:v.3003, 3006).

En 1942, Ar Barzhig témoigne d'un usage de système dual T-V dans tout le Trégor. Gros (1966:111) évoque aussi le vouvoiement.

Un lecteur de Gwalarn en 1942 ajoute que la forme c'hwi est utilisée le plus souvent par les enfants à leurs parents en grandissant, ce qui est confirmé pour Plougrescant où, à la fin du XXe, le te existe et "on vouvoie les parents" (Le Dû 2001: cartes 455-6). Le témoignage de Gwalarn précise que de vieux amis se tutoient, et l'adresse en te à un inconnu est une marque de confiance. Le te paritaire entre gens du même âge est noté en Bas-Trégor à Plouezoc'h, et dans les terres à Loguivy-Plougras (Le Dû 2001:carte 455). La pragmatique du tutoiement semble donc, en Nord-Trégor, assez semblable au système français moderne.


(1) Lakait ho troad er par.
mettez votre3 pied en.le prêt
'Placez votre pied en position.'
Trégorrois, Stephens (1982:164)


(2) Laka ar gwer war an daol.
mets le verres sur le table
'Mets les verres sur la table.'
Trégorrois, Stephens (1982:164)

Les données ne sont cependant pas totalement uniformes, et il existe quelques pratiques de vouvoiement idiosyncratiques. Fin XXe à Plouigneau en Bas-Trégor, le vouvoiement semble très restreint ("Le vous, c'est bon pour la noblesse", point 34, Le Dû 2001:carte 456). A Plougasnou, Le Dû (2001: carte 456, point 36) signale au passé un vouvoiement entre époux. On relève aussi des vouvoiements d'enfants en langage familier à Bégard (le locuteur interrogé par Tangi Yekel est né en 1931), qui restent exceptionnels ("Bepred eo n'eus ket nemet ur skwer a-sort-se. Ti an holl dud kozh e-lec'h on bet a-hend-all em eus klevet ordinal ar stumm dre de ouzh ar vugale, evel en galleg"). Il pourrait s'agir ici de la création d'un vouvoiement hypocoristique.


(3) Ah ! C'hwi zo ur marmouz bihan.
ah ! vous est un singe petit
'Ah, vous êtes un petit garnement.'
Trégorrois (Bégard), Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2018)


Gros utilise une forme de vouvoiement pour l'adresse à un chat.


(4) C'hwi, kaz, na viot ket o kalamarhad an traoù toud amañ.
vous chat ne.R1 serez pas à4 piétiner le choses tout ici
'Vous, (mon) chat, vous ne piétinerez pas tout (vous ne sauterez pas partout) ici !'
Trégorrois, Gros (1989:'kalamarhad')


Fin XXe, Le Dû (2001: carte 456) remarque le vouvoiement dans un couple à Magoar au sud de Guingamp. L'usage peut en être en régression ; à Bourbriac, Le Dû (2001: carte 456, point 51) signale au passé un vouvoiement entre époux.


Kergrist-Moelou

Sur la frontière Sud du Trégor, la zone du système dual est limitrophe avec la zone où les formes de te ont disparu. On trouve des systèmes genrés et des systèmes hiérarchiques, et quelque phénomènes de frontière.

À Kergrist-Moelou à 15 km à l'est de Plounévézel à l'adresse genrée, la forme T est clairement vivante et le système est dual. Le Garrec (1901) utilise des usages différenciés pour les personnages de sa pièce : Fanch et Marc'hared, époux, se tutoient. La vieille femme Môn-goz tutoie Marc'hared, qui vouvoie son père qui la tutoie en retour (p.26). L'aubergiste Bastien, le méchant de l'histoire, tutoie Fanch et vouvoie Marc'hared en (1). Il peut s'agir pour lui ou d'un usage genré ou d'une mise à distance. Le même locuteur a une adresse instable pour parler au père de Marc'hared.


(1) BASTIEN: Iec'hed mad d'id, Fanchik ! d'ec'h, itron, ha d'ho tad !
santé bon à.toi Fanch.DIM à.vous madame et à votre3 père
'A ta bonne santé, mon cher Fanch ! A vous Madame, et à votre père !'
Breton central (Kergrist-Moëlou), Le Garrec (1901:16, 17)


(2) BASTIEN: Diskwez a ret, Kaour-Vraz, na intentez netra...
montrer R1 faites Caour-Vraz ne comprends rien
'Vous faites voir, grand Caour, que vous n'entendez rien... '
Breton central (Kergrist-Moëlou), Le Garrec (1901:18, 19)

vannetais de l'Est

L'ALBB montre nettement un système dual dans la partie est du vannetais. La frontière Ouest de cette aire de tutoiement/vouvoiement suit à peu près le Blavet à distance d'environ 5 km. L'aire est constante dans le temps, entre la carte 107 pour 'à toi, à vous' et plus d'un demi-siècle plus tard dans la zone du 'tu' (Le Dû 2001: carte 455).

Il existe une complication en ce qu'en vannetais, les formes de la seconde personne du tutoiement peuvent être contradictoires à travers les paradigmes.

Dans la carte 70 '(toi) tu étais (malade)', le pronom fort indépendant est réalisé comme te ou ti, ou enfin i à Bourg-de-Batz en guérandais. En 1913, un instituteur à Locmaria à Belle-Île-en-mer donne la forme ha. Dans le NALBB, Le Besco relève cette forme /ae/ chez des locuteurs nés au début du XXe.

Le Goff (1927) considère, lui, uniquement les possessifs et les pronoms proclitiques objets de seconde personne. On a un système dual de tutoiement à Berric (entre Theix et Questembert). À Groix aussi, mais la forme ha est étrange car elle peut provoquer la même mutation durcissante que la forme V.


 Le Goff (1927:198):
 "L'Arvor ne connaît pas te, et se sert constamment de ha; et, aux deux extrémités de l'Arvor, Berric et Groix pratiquent après ha des mutations différentes. 
 Groix (mutation forte): ha pen, ha torn, ha pah; - me ha talhou, mé ha kuélou.
 Berric (mutation douce): ha ben, ha zorn, ha vah; - me ha zalhou, mé ha huélou.  


 Le Goff (1927:198):
 "...dans les cantons de Locminé et de Saint-Jean, le tutoiement est tellement habituel qu'on l'emploie même en parlant à des vieillards et à des ecclésiastiques. Mais ici, le tutoiement n'admet que la forme te, jamais ha, même comme pronom régime te benn, te zorn..."
 [traduction de Hemon en 1942: "... e kantonioù Logunec'h ha Sant-Yec'han-Brevele er c'hontrol ez eo ken boaziet te ma reer gantañ zoken pa gomzer ouz tud koz ha beleion. Hogen aman e vez implijet atav ar furm te, morse ar furm ha (da), zoken evel raganv renet : te benn, te zorn..."]


Est du pays de Baud

A Baud lui-même, et à proximité de 5km à l'est du Blavet, le tutoiement est absent et le système est d'adresse c'hwi unique, à l'anglaise. A l'Est de cette zone, sur une ligne Plouhinec, Nostang, Pluvigner, Plumelin, Saint-Allouestre et Naizin, le système est dual. Le Dû (2001: carte 455) rapporte un usage genré à Plumelin ("On dit vous aux filles").


Groix et sa bande côtière

Des formes verbales comme ous 'tu es' montrent la présence de la 2SG à Groix même dans les paradigmes verbaux. Les dires de Le Goff (1927) sont confirmés par la forme donnée à Groix pour l'ALBB, où ha kani 'le tien', est opposé à u kani 'le vôtre'.

Cheveau (2011) émet l'hypothèse que sous l'influence de Groix, les parlers directement littoraux du continent auraient pu maintenir le te. Les communes directement proches, comme Ploemeur, dans les terres autour de Lorient avaient un tutoiement au début du XXe (ALBB) mais ne le reconnaissent plus (Cheveau 2011).

A Rédéné fin XXe, deux hommes ont été interrogés pour le NALBB, nés en 1901 et 1924. Leurs témoignages semblent se contredire car le point d'enquête apparaît ne pas utiliser le tu (Le Dû 2001:carte 455) mais on dit donner du "tu à un étranger" (Le Dû 2001:carte 456).

A Plouharnel, à la fin du XXe, le 'tu' existe (ti) et "on vouvoie les parents" (Le Dû 2001: cartes 455-6).

Dans la Chrestomathie, Loth (1890c:379) marque en note de de gourhemennèw da gourc'hemennoù que "à Groix ainsi qu'à Belle-Ile et sur une bonne partie de la côte vannetaise, le tutoiement est la forme ordinaire de la conversation."

Haut-vannetais

Audic (2013:195) note une variation dans l'usage à l'intérieur des familles dans les campagnes littorales à l'ouest de Vannes.

 "Anne-Marie G., née en 1917 à Arradon, tutoie ses parents ; Louise G, née à Ploeren en 1911, tutoie ses parents ; Henriette B., née en 1910 à Plescop, tutoie ses parents ; Marie-Anne B., née en 1908 à Plescop, tutoie ses parents ; Henriette J., née à Arradon en 1908, vouvoie ses parents, vouvoiement imposé par ces derniers à la suite, raconte-t-elle, de la réflexion du propriétaire qu'un des enfants avait tutoyé."

Elle interroge finalement Louise, née à Bourgerel en Arradon en 1891, d'une famille de cultivateurs à l'Ile-aux-Moines et à Arradon. Celle-ci tutoie sa mère qu'elle appelle mamm et vouvoie son père qu'elle appelle ma zad(-me) (ni lare dalbezh "te", "te" da mamm ha "c'hwi" da ma zad). Dans le couple des parents, la mère tutoie le père, qui est aussi plus vieux qu'elle.

Le système a pu changer, car on note dans une même famille des différences générationnelles. A Plunéret, à la fin du XXe, le 'tu' existe (te) et "on tutoyait ses parents et on vouvoyait ses grand-parents" (Le Dû 2001: cartes 455-6, point 178). Fin XXe, un peu plus à l'Est, à Lauzach "on vouvoie les plus âgés, et on tutoie les plus jeunes" (Le Dû 2001:carte 456, point 186). A Saint-Nolff, le 'tu' existe (ti) et "on vouvoie les parents" (Le Dû 2001: cartes 455-6).


Sur les îles, on a à Hoedic un témoignage d'usage du vouvoiement pour les étrangers ("Ici, on ne se vouvoie pas, on se connaissait tous", Le Dû 2001: cartes 455, point 175).

guérandais

A l'extrême sud-est du vannetais, dans le dialecte guérandais disparu, le matériel morphologique fournissait une opposition. Ernault (1883:108, 109) a Pi hou hou guerhou 'quand vous les vendrez' et De de iahat 'à ta santé'. L'ALBB relevait début XXe un contraste émbét 'à toi'/ émbòc'h 'à vous' dans la carte 502. Marie-Françoise Le Berre, au XXe, avait aussi un système dual. Elle utilise une personne singulier dans de vég 'ta bouche' et ka uidet ! 'merde pour toi !', ainsi qu'un pronom d'adresse hou.


(1) ma hou za ket hou skrevou.
ma c'hwi (ez) za ket c'hwi skrivo. Équivalent KLT
si vous R+C va pas vous R écrira
'Si vous ne venez pas vous écrirez.'
Guérandais, XXe, Mathelier (2017:34)


La forme plurielle est compatible avec un usage d'adresse au singulier familier. Le pronom d'adresse est le pronom de la 2PL hi dans les phrases collectées vers 1940 par Pierre Le Gall (1924-1991) auprès de son grand-père Guillaume Pain, dans un échange donc entre deux hommes familiers entre eux. Dans la parabole de l'enfant prodigue traduite par Bureau (1878), père et fils s'adressent symmétriquement en V (hou, d-hoX).


(2) Hi gleuf ! Hi ouel houat ! Hi zo klef.
C'hwi ' glev C'hwi ' wel ervat ! C'hwi zo klañv. Équivalent KLT
vous R1 entend vous R1 voit bien vous R1 est malade
'Tu entends !', 'Tu vois bien !', 'Tu es malade.'
Guérandais fin XIXe, Mathelier (2017:35)


Madame Renée Pichon, dans une chanson de 1930 collectée par Gaston Esnault, a un possessif d'adresse en T à un homme (de voné 'ton bonnet').

le vouvoiement genré cornouaillais-trégorrois

La règle de politesse à travers ces dialectes a une dimension genrée à la galloise (Watkins 1977:164-5). Dans ces dialectes, l'adresse peut être différente selon qu'on s'adresse à une femme ou un homme.

Riwall (1942) attire l'attention sur la dimension genrée de l'adresse en breton dans un court article un peu fourre-tout imprimé dans l' Arvor. La précision de son témoignage familial doit être pesée car Riwall était de Brest et non-natif (Riwall 1941), mais la dimension genrée est ensuite vérifiée dans la collecte effectuée par l'équipe de Gwalarn à la suite de son article. Son interprétation de l'usage léonard peut aussi être erroné (Job pourrait répondre en c'hwi par un usage de couple marié, par ex.).

 Riwall (1942:4):
 "selaouomp kentoc'h ar re goz, e korniou 'zo a Vro-Gerne dreist-holl. Ober a reont gant te pa gomzont ouz ar baotred ha gant c'houi pa gomzont d'ar merc'hed, ne vern pe oad en dije an hini a gomz ha ne vern pe oad en dije an hini a vez komzet outan. Eun tad-koz, da skouer, a lavaro c'houi d'e verc'hig vihan, hag houmañ te d'he zad-koz. Klevet am eus alies gant va mamm penaos va mamm-guñv a lavare te d'he mibien ha c'houi d'he merc'hed, ha bez' am eus, ouspenn em fenn eur ganaouenn a Vro-Leon, enni eun diviz a laka Janed da lavarout te d'he fried Job hag heman da respont gant c'houi da Janed."


La plupart des informations sur l'adresse genrée nous vient de la collecte que Gwalarn a effectué auprès de ses lecteurs en 1942, inspirés par l'article de Riwall. C'est Hemon qui synthétise les réponses. Plus tard, il considérera (Hemon 2000:§51,n1) que le vouvoiement est genré dans tous les dialectes où il existe: les hommes se tutoient entre eux et s'adressent aux femmes avec les formes autrement plurielles. Cela ne correspond pas à la variation dialectale qu'il avait révélé dans Gwalarn.

L'ALBB est de peu d'aide, car la collecte a privilégié des collecteurs hommes, qui ont aussi principalement interrogé des hommes. Les auteurs qui rapportent une asymétrie genrée oublient souvent même d'évoquer l'usage entre femmes (Hemon 2000:§51,n1, Bouzeg 1986:31, Wmffre 1998:25, parmi tant d'autres...). Ce manque de documentation est dommageable pour comprendre le système d'adresse et son évolution, car un tel système genré ne peut qu'avoir été ébranlé par les deux guerres mondiales. Lors de la première guerre mondiale, un seul soldat brittophone sur trois a survécu. Lors des mobilisations, et après, le sex-ratio a donc plongé, et les adresses entre femmes ont forcément submergé les échanges en breton. Sur les zones côtières, les longues saisons de pêches séparaient les hommes et les femmes, laissant les "vouvoyeuses" ou "vouvoyées" à terre et isolant les "tutoyeurs" et "tutoyés" en mer.


La Feuillée

A la Feuillée, un lecteur de Gwalarn en 1942 mentionne que les enfants commencent à vouvoyer leur mère vers l'âge de 6 ou 7 ans, en continuant de tutoyer leur père. Les fils vouvoient leur père, mais plus tard.


 R. (Gwalarn 1942:419):
 Ar Fouilhez
 "Bep gwech ma fell da unan bennak diskouez doujañs e-keñver den pe zen, e komz dre c'hwi. Te a vez graet gantañ e troioù all. Da skouer, ez implijer c'hwi pa gomzer d'ar person, d'ar mezeg, d'ar skolaer. An dud yaouank etrezo a ra gant te.
 Diwar an amzer ma stag da varvailhat, ne implij ur c'hrouadur nemet te. Da c'hwec'h pe seiz vloaz, avat (da lavarout eo, pa zeu d'an oad a skiant) e krog da gomz dre c'hwi d'e vamm. Nemet e kendalc'h da gomz dre te d'e dad. Hogen, da hemañ ivez, ur mab a gomz dre c'hwi pa'z eo deut war an oad. Ur vamm a lavar te d'he bugale."
 [Le vouvoiement est utilisé à chaque fois comme marque de respect envers quiconque. On utilise te autrement. On donne du c'hwi, par exemple, au recteur, au médecin, à l'instituteur. Les jeunes gens se tutoient. 
 Dès les premiers babillements, un enfant n'utilise que te. Mais à six ou sept ans, (c'est-à-dire dès l'âge de sagesse), il commence à vouvoyer sa mère. Seulement il continue à tutoyer son père. Mais, lorsqu'il est adulte, un fils vouvoie aussi son père. Une mère tutoie ses enfants.]


breton central, Poullaouen, Plounévézel

Selon Wmffre (1998:25), le tutoiement en breton central est utilisé dans les rapports familiers entre hommes à Poullaouen et Plounévézel, mais pas lorsque ceux-ci s'adressent à une femme. Il n'est pas précisé comment les femmes s'adressent à d'autres femmes. Immédiatement au sud de Plounévézel, on entre en zone d'adresse unique en c'hwi.


Trégor; Quemper-Guézennec et le canton de Pontrieux

A Quemper-Guézennec et dans le canton de Pontrieux, l'abbé L. Ar Floc'h (Maodez Glanndour) rapporte dans Gwalarn que les jeunes hommes se tutoient, vouvoient les femmes même souvent leurs sœurs, ainsi que leurs deux parents. Il ne dit pas ce que font les femmes.


Pays de l'Aven

Le système dual genré est répandu dans le haut-cornouaillais de l'est littoral. Le Dû (2001: carte 456) rapporte le témoignage d'un locuteur, manifestement homme, à Beuzec-Conq en Concarneau; "on [les hommes] dit vous à la mère, aux femmes, aux filles et tu au père, aux amis, aux connaissances". On ne sait pas comment les femmes s'adressent à leurs amis et connaissances.

La règle d'adresse est aussi genrée à Riec.

 Bouzeg (1986:31):
 "Le pronom personnel te est utilisé dans la frange côtière de la région (Tregon, Nizon, Pont-Aven, Rieg, Moelan, Nevez, Kloar). Réservé aux proches en général, il est soumis à une règle dans la commune de Riec: le te s'adresse aux garçons et aux hommes des quartiers maritimes, le vouvoiement étant de rigueur envers les filles et les femmes."

Puisque l'auteur est elle-même une femme, il est probable que cette règle s'applique aux locuteurs de tous sexes (c'est-à-dire formes V entre femmes et formes T entre hommes, les femmes donnant du te aux hommes). Ce n'est cependant pas explicite.


Pays Penn Sardin

Le système est dual et la règle est genrée à Douarnenez, Pouldavid, Ploare. L'ALBB atteste de la présence du matériel morphologique d'un système dual à Ploare pour les pronoms indépendants (carte 70 pour 'toi, tu étais (malade)'), et pour les pronoms incorporés (cartes 107 et 502 'à toi, à vous').

A. Gelleg témoigne en 1942 dans Gwalarn de ce système dual dans le bourg de pêcheurs de Pouldavid (Pouldahud, maintenant quartier de Douarnenez), mais seulement pour les locuteurs hommes. Le tutoiement est rare, toujours entre hommes proches, frère ou pairs, qui peuvent aussi se vouvoyer. Le te peut être utilisé d'un père à son fils, mais pas inversement. Toutes les autres adresses sont au c'hwi. Le vouvoiement est obligatoire dès qu'il y a une fille ou femme dans l'échange, et ce même au sein de la famille, dans les fratries et entre époux.

Gelleg témoigne spécifiquement de ce que les femmes se vouvoient entre elles. Ceci implique que, comme elles vouvoient aussi tous les hommes, pour ces locutrices, le système n'est pas dual.

La restriction des locutrices au vouvoiement est confirmé par les usages de bilingues en français de Douarnenez. Dans Au bout de la digue de Charles Madézo (Liv'editions 2006), la mère dit à son fils "Je n'ai que vous".

Les usages les plus récents sont parfois alignés sur le français ou sur le breton standard, mais des usages anciens peuvent aussi être parfaitement conservés. A Kontañ kaoz (06/2019), le locuteur douarneniste GB2210 traduit par un tutoiement l'adresse à un homme du même âge que lui (69 ans) et par un vouvoiement l'adresse à un arrière-grand-père, un homme d'église ou Dieu. Toutes les femmes sont vouvoyées, petites filles comprises. Chat et araignée sont vouvoyés. Le locuteur a aussi le tutoiement dit "d'agression" au volant.


(1) CONTEXTE: (à une petite fille de la famille)
Breman eo hennezh ho kamion deuzoutoc'h ho keñ.
maintenant est celui-là votre3 camion de.à.vous votre3 un
'Maintenant c'est ton camion à toi toute seule.'
GB2210 (Douarnenez), Kontañ kaoz (06/2019)


Pays Glazik

À Locronan, le système est genré, avec une adresse à une petite fille en c'hwi, et une adresse en te d'une femme à son frère (Plec'h emout ? 'Où es-tu ?', A-M. Louboutin (10/2021)).


(1) Be ma ho mamm ganoc'h ma bihetch ?
être est votre3 mère avec.vous mon3 petit.petit
'Tu as ta maman avec toi ma petite ?'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (10/2021)


La locutrice commente que ce système est le même à Plonevez-Porzay, en contraste avec Kergoat (à 3,5 km), où les gens disent c'hwi à tout le monde (c'est le début de la zone centrale d'adresse unique en c'hwi - Locronan est sur la frontière. Elle dit cependant que son mari, lui aussi brittophone de Locronan, l'avait tout de suite tutoyée en breton lors de leur rencontre. Au sein du couple, le te est établi, avec les retournements d'adresse en c'hwi réservés à des échanges exceptionnellement agressifs. la locutrice dit se rappeler la première fois qu'un homme non-familier l'avait tutoyée en breton comme d'un faux pas remarquable.


A Kontañ kaoz (06/2019), la locutrice du Porzay Renée Ribeyre traduit par un tutoiement l'adresse aux hommes de son âge (71 ans) et aux animaux comme le chat et l'araignée. Elle traduit par un vouvoiement l'adresse à toutes les femmes, petites filles comprises, et à tous les hommes de rang social, religieux ou d'âge élevé, Dieu y compris. Elle utilise aussi le vouvoiement dans l'adresse au volant, ce qui peut s'analyser comme un retournement de système pour exprimer l'agressivité.

La locutrice de Gourlizon, elle, a un emploi genré inverse: elle tutoie les femmes, petites filles inclues. Elle vouvoie les animaux, les hommes de son âge, Dieu ou un homme d'église. Elle a par ailleurs le tutoiement dit "d'agression" au volant. En (2), on voit au mélange des marques de deuxième personne des effets d'instabilité du système.


(2) CONTEXTE: (femme, à une femme familière et d'âge équivalent)
Gouzout a rez ho peus disoñjet da levrig kanañ disadorn diwezhañ ?
savoir R fais 2PL 2.a .pens.é ton1 livr.et chanter jour.samedi tard.le.plus
'Tu sais que tu as oublié ton livret de chant samedi ?!'
Cornouaillais (Gourlizon), Kontañ kaoz (06/2019)


Brieg est dans la zone centrale en c'hwi. Le te n'existe pas dans cette variété (Noyer 2019:171, 172).


(3) [xɥɪ zo ˈfaʁːdɛt ˈheu xoe᷉ x, pjɛx mɐx hɔ᷉ n amɔs plax ?]
C'hwi zo fardet, hirio, ac'hanoc'h, pelec'h emaoc'h o vont a mod-se, plac'h ?
vous est sap.é aujourd'hui P.vous êtes à4 aller de1 mode. fille
'T'es bien sapée, aujourd'hui, toi ! Où tu vas donc, la fille ?'
Cornouaillais (Briec), Noyer (2019:307)


(4) [nim ˈɔkyp døs pez zel uˈzɐx ˈpjeᵃx!]
En em okup deus pezh a sell ouzhoc'h, petra !
se occuper de ce que R1 regarde à.vous quoi
'Occupe-toi de tes affaires, quoi !'
Cornouaillais (Briec), Noyer (2019:320)


  • Ma zebrit ket ho legumaj, po ket dessert
'Si tu manges pas tes légumes, t'auras pas de dessert.'
Noyer (2019:124)


Pays Bigouden

Selon Youenn Drezen en 1942, dans le canton de Pont-l'Abbé, une femme s'adresse en te à tout homme ou garçon, et les hommes s'adressent en c'hwi à toutes les femmes ou petites filles, épouse et sœurs incluses. Dans la ville même de Pont-l'Abbé, Drezen postule que c'est sous l'influence du français que quelques femmes s'adressent en c'hwi à des hommes. L'inverse, c'est-à-dire qu'un homme tutoie une femme, semble tout à fait inenvisageable en 1942.

L'usage d'adresse genrée se maintient globalement en pays bigouden au XXe, surtout en zone littorale. Fin XXe, Le Dû (2001: carte 456) relève un témoignage pour Plonéour-Lanvern, où "on tutoie les hommes et on vouvoie les femmes". A Penmarc'h et Loctudy, "on tutoie tous les hommes, pères compris, mais on vouvoie les femmes, mères et sœurs compris". A L'ile-Tudy "les femmes se vouvoient". A Bénodet, l'informateur considère que te est masculin, et fwi (c'hwi) est féminin.

Au cours du XXe, la zone en fi (c'hwi) progresse par les terres à Plozévet/Pouldreuzic. Dans la pièce de théâtre Ar pare d'ar re vouzar (Helias 1947), hommes et femmes s'adressent en c'hwi, entre époux ou non, et hors contexte hiérarchique.


(1) Petra 'zoñjit, Soaz, va gwreg ?
quoi R1 pensez Soaz mon2 femme
'Qu'en penses-tu, Soaz, ma femme ?'
Cornouaillais (Pouldreuzic), Helias (1947)


(2) Kerzit uhelloh c'hoaz, Jan-Mari, va mignon.
allez haut.plus encore Jean-Marie mon2 ami
'Vas plus haut encore, Jean-Marie, mon ami.' (locuteur: Soaz)
Cornouaillais (Pouldreuzic), Helias (1947)


À Plozévet, après le seconde guerre mondiale, la distinction entre tutoiement et vouvoiement est notée perdue par Trépos puis Goyat, avec un paradigme morphologique dual mais des marquages erratiques. Helias (1975) dans Le Cheval d'orgueil rapporte aussi un usage multilatéral du c'hwi. La forme te est restreinte aux expressions de forte colère ou de profond mépris, comme dans le cas d'invectives de type Te 'dorr din ur revr 'Tu me casses... '.

Le te a disparu à Pouldreuzic et Plogastel Saint-Germain fin XXe (Le Dû 2001: carte 455). Au début du XXIe, lors de Kontañ kaoz (06/2019), Michelle Nicolas de Pouldreuzic, Landudec et Plozevet confirme une adresse unique en fi. En (3), on peut remarquer l'utilisation du complémenteur la(r), qui est aussi répandu dans l'aire du c'hwi unique.


(3) CONTEXTE: (à un homme ou une femme de son âge)
Fi voar lac'h peus digonget oc'h lior kan di sadorn ?!
vous R1 sais que 2.a .pens.é votre+C livre chant jour samedi
'Tu sais que tu as oublié ton livret de chant samedi ?!'
Michelle Nicolas (Plozévet), Kontañ kaoz (06/2019)


île de Sein

Le système à Sein est dual, avec une association du tutoiement à la familiarité, mais aussi à l'agressivité. La tendresse est associée au vouvoiement, qui collectionne les usages égalitaires. L'usage est de vouvoiement des enfants aux parents, mais aussi entre époux et dans la fratrie, entre familiers et pairs. L'usage entre petites filles n'est pas clair - le te est probablement restreint aux jeunes garçons.

 L.D. (Gwalarn 1942:422)
 Chwi : Etre an tad hag ar vamm. Etre ar gerent (tad ha mamm) hag ar vugale. Etre breudeur ha c'hoarezed. Etre ur c'hrouadur hag un den kosoc'h. Etre tud deut war an oad. Etre gwazed ha merc'hed.
 Te : Etre bugale ha paotred yaouank eus an hevelep oad. An tad pe ar vamm da unan eus o bugale a zo bet disent, evit diskouez o displijadur. Etre bugale eus an hevelep tiegez pe tud pa vezont broc'het.
 En ur ger berr : Peurliesañ ez eus gant te ur ster-gwasaat. Tener ha seven eo c'hwi war un dro.

Systèmes frontaliers, signes d'instabilité du système d'adresse

flexibilité et phénomènes de contact

Sur les bords de l'aire du c'hwi, si on compare les cartes de l'ALBB, un même locuteur a ou n'a pas de forme de vouvoiement selon les paradigmes. Ce sont des cas de bilinguisme dans des variétés proches.


systèmes de vouvoiement atypiques

Bothoa

Humphreys (1985:317) ne mentionne pour Bothoa qu'une forme de pronom fort indépendant de seconde personne, c'hwi, mais deux procédés de désambiguisation utilisent des formes pronominales d'autres paradigmes. Le premier pluralise l'objet. Le second ajoute une adresse plurielle au sujet.

  • Debet ho para, 'mange ton pain' ou 'mangez votre pain' / Debet ho parajoù, 'mangez votre pain' (litt. 'vos pains')
  • ar re-mañ ac'hanoc'h, littéralement /ceux-là de vous/, 'vous autres' pour un sujet pluriel

Il existe donc un système dans ce dialecte un système dual T-V, mais il ne passe pas nécessairement par les pronoms.

La répartition dialectale de ce système reste à faire. Gros (1966:111) propose un inventaire des usages de pluriels pour des référents uniques, mais ne mentionne pas un tel système de pluralisation de l'objet, alors qu'il mentionne explicitement le système T-V pronominal.


usages erratiques de formes T-V

Dans ce cas de figure, le matériel morphologique existe, mais la distinction sémantique entre les deux a manifestement perdu sa valeur d'usage.

A Loqueffret, Solliec (2015) a documenté un système où les deux marques peuvent co-exister dans la même adresse, et ne constituent donc pas de forme de politesse.


(1) Lak' 'neoñ beke 'moc'h ' sell' !
mets P.lui puisque êtes à4 regarder
'Mets-la, puisque tu es en train de regarder !' (ceinture de sécurité)
Breton central (Loqueffret), Solliec (2015)


(2) Breman eo d'eoc'h de unan.
maintenant est à vous ton1 un
'Maintenant c'est à toi toute seule.' (ton camion)
Cornouaillais (homme), adapté de Kontañ kaoz (06/2019)


fluctuations temporelles

gain du te, Clohars-Carnoët

Les résultats divergent pour Clohars-Carnoët. C'était une commune en c'hwi dans l'ALBB (point 56). Un ou une aubergiste de 39 ans en 1911 n'y donnait aucune forme au singulier dans, entre autres, les cartes 209 'avec toi' et 323 'le tien', ou 237 'quand tu sais', 244 'quand tu sauras... '.

C'est une commune littorale, citée comme système dual par Bouzeg (1986:31).

perte du te, Lorient, Ploemeur, Guidel, Caudan, Quéven

Il se pourrait que la perte des formes en te se soit accentuée en vannetais rapidement après l'époque de l'ALBB. Cheveau (2011) prend le cas de Ploemeur, où l'ALBB documentait solidement le tutoiement. "Sur le terrain on s'aperçoit vite que dans la zone bas-vannetaise (à l'exception de l'Ile de Groix), les locuteurs n'utilisent jamais le tutoiement, ni spontanément, ni quand on leur demande de traduire de petites phrases en breton, et ne reconnaissent pas les formes de tutoiement quand on les utilise devant eux."

 Cheveau (2011:30):
 "Dans mon corpus, je n'ai relevé aucune forme de tutoiement à Ploemeur (ni d'ailleurs dans les autres communes étudiées dans ma thèse: Guidel, Caudan et Quéven). […] Pourtant, mes informateurs étaient enfants à l'époque où les enquêtes de l'ALBB ont été faites (1911) ou sont nés quelques années après, et devraient donc au moins se souvenir de ces formes s'ils les avaient entendues dans leur commune."


le cas du bas-cornouaillais

En bas-cornouaillais, les formes en te existaient dans les paradigmes en 1911, au moins pour les locuteurs hommes interrogés dans l'ALBB, et la femme à Sein.

L'usage du te est pragmatiquement très restreint. Au moins à Douarnenez en 1942, le te est réservé aux locuteurs hommes. Ailleurs, il est décrit comme étant aussi restreint entre hommes. Denez & al. (2009:56) notent que dans le Cheval d'orgueil paru en 1975, Pierre-Jakez Helias rapporte un usage large du c'hwi dans les adresses, le te étant réservé à exprimer "une grande colère ou un profond mépris", l'adresse au singulier restant vivante dans des invectives de type Te 'dorr din ur revr 'Tu me casses le cul'.


Un locuteur cornouaillais de Kontañ kaoz (06/2019) traduit une phrase en contexte de couple avec un vouvoiement à une femme (1) conformément à l'usage ancien local, des formes mixtes pour une petite fille (d'eoc'h de unan 'à toi toute seule'), et un tutoiement à une femme croisée dans la rue (2).


(1) c'houi a zeus d'ar ger pe me a zred arok.
vous R vas à le 1foyer ou moi R 1mange avant
'Tu rentreras ce soir ou je mange avant ?'
Cornouaillais (homme), Kontañ kaoz (06/2019)


(2) goud a res plec'h e ma ar ty Poste ?
savoir R fais se.trouve le maison poste
'Vous savez où est la poste ?'
Cornouaillais (homme), Kontañ kaoz (06/2019)


pays bigouden, Cap Sizun après 1950

L'ALBB montrait nettement la présence du matériel morphologique d'un système dual sur tout le pays bigouden et le Cap Sizun, avec les points d'enquête 46 à Plogoff, 47 à Plouhinec à côté d'Audierne. On le voit pour les pronoms indépendants (carte 70 pour 'toi, tu étais (malade)'), et pour les pronoms incorporés (cartes 107 et 502 'à toi, à vous').

Il semble cependant qu'à Plozévet, le nombre ait entièrement disparu des pronoms d'adresse (pronoms incorporés, pronoms forts indépendants, déterminants possessifs). Des formes anciennement opposées en nombre peuvent maintenant co-référer.


(2) /'ɡɥɛz pez a 'ɡa:roh /
Grez ar pez a garoh.
fais le que R1 aimez
'Fais ce que tu voudras.', ou bien
'Faites ce que vous voudrez.'
Cornouaillais (Plozévet), Goyat (2012:306)


(3) /'kɛrz du ˌkɥe:le/
Kerz d' ho kwele !
va à votre3 lit
'Va te coucher / Allez vous coucher !'
Cornouaillais (Plozévet), Goyat (2012:306)


(4) / fi ' brɛʃɛs ked do ˌxõne/
C'hwi ne brechez ket doh honnez.
vous ne1 parles pas à celle-là
'Tu ne lui parles pas.'
Cornouaillais (Plozévet), Goyat (2012:306)


Trépos note que dans la partie de Cornouaille qui a perdu la distinction entre tutoiement et vouvoiement, le pronom écho apparaît avec une combinaison de singulier et de pluriel.


(5) ho puoc'h -t-hu
votre3 vache à.toi-à.vous
Cornouaillais, Trépos (1980:94)


Au XXIe, Goyat ne relève effectivement à Plozévet le pronom 2SG que sous forme de trace, en pronom écho intégré à une forme plurielle.


 Goyat (2012:244-5):
 "Le pronom personnel te n'est pas en usage à Plozévet. […] aucune forme de la deuxième personne du singulier appartenant au  groupe nominal, à l'exception de l'enclitique /tu/ -t-hu […] n'est usitée.
 
 Ce pronom personnel /tu/ -t-hu (2ème personne neutre) appelle une explication : le premier composant, /-t-/, provient vraisemblablement du pronom personnel indépendant de la deuxième personne du singulier te et le second, /u/, du pronom indépendant de la deuxième personne du pluriel c'hwi. Il réunit donc des marques des deuxièmes personnes du singulier et du pluriel dans le même morphème. […] Pour notre part, nous ne l'avons entendue employée qu'à Plozévet. Elle ne s'utilise que de manière suffixale, ou enclitique, comme pronom dépendant, pour renforcer la personne.
 Exemples :
 . /'pe:a ˌres tu/ petra a rez-t-hu?, 'que fais-tu / que faites-vous' ?
 . /nu 'ti tu/, en ho ti-t-hu, 'chez toi / chez vous'"


(6) / møs ke 'ɡɥɛl ˌhãxtu/
' Meus ket gwelet ahanoh-t-hu.
ne1 R.1SG a pas v.u P.2-à.toi-à.vous
'Je ne t'ai pas vu.',
Cornouaillais (Plozévet), Goyat (2012:246)


Sources d'instabilité

Les systèmes de politesse sont fragiles en soi, car ils propèrent dans la stabilité. Chaque locuteur sait alors exactement à quels usages correspondent quelles formes, et sont assurés de ne pas faire de faux-pas malheureux. Dès que les usages changent, ou que des contre-signaux apparaissent, les locuteurs sont insécurisés dans leurs pratiques et vont chercher des stratégies d'évitement, quitte à parler une autre langue.


fragilité des systèmes genrés

déséquilibre du sex-ratio

Les systèmes genrés sont directement impactés par tout changement dans le sex-ratio. Les mobilisations guerrières et les morts conséquentes déstabilisent tout le système; les enfants n'entendent plus que les adresses produites par les femmes. Un petit garçon pourra attendre longtemps avant qu'une forme propre à une relation entre deux hommes adultes soit produite devant lui, et encore plus longtemps pour automatiser cette pratique en grandissant, d'autant plus que les autres hommes de son âge rencontrent le même problème.


l'influence de la nuptialité

Les systèmes d'adresse sont sur-sensibles au brassage interdialectal. A l'échelle d'une famille, lorsque deux parents proviennent de dialectes différents, non seulement chaque système linguistique représenté est fragilisé si les pratiques sont contradictoires, mais encore ces pratiques peuvent devenir fondamentalement genrées même si aucun des deux systèmes initials ne l'était.

Prenons le cas de X (c.p.), locuteur quadragénaire de la région de Rosporden. L'usage que le locuteur rapporte à Rosporden est que les parents tutoient les petites filles, qui les vouvoient chacun en retour. Le tutoiement est symétrique entre pères et fils, comme le vouvoiement entre mères et fils. Les grands-parents paternels du locuteur, brittophones natifs, forment un couple matrilocal, l'homme étant de Quimperlé. Ce grand-père vient donc d'un système où le paradigme du tutoiement est inconnu et n'a plausiblement pas tutoyé son propre fils en breton. Ce dernier, lorsque la pratique du breton s'est innovée tardivement en famille aux 18 ans de son propre fils, a fondé avec lui une pratique de vouvoiement. L'usage de vouvoiement père-fils est différent de la coutume locale. Si on observe uniquement les formes produites par la filiation mâle de cette famille, on peut constater une résistance forte de la forme plurielle pour les adresses père-fils. Si on s'intéresse à l'acte de discours révélé par ces pratiques, le grand-père quimperlois, lui, ne vouvoyait personne car il parlait un système unitaire, sans contraste morphologique. C'est l'immersion de son système morphologique dans un environnement où ses formes signifiaient un vouvoiement qui créent un effet d'usage genré de l'adresse: à l'échelle de cette famille, les hommes se vouvoient entre eux (et vouvoient plausiblement tout le monde).


Les couples mixtes de brittophones, où l'un vient d'une zone de système dual et l'autre vient de la zone de système unitaire, créent à chaque fois une pratique genrée différente, associant le c'hwi multilatéral à un homme ou une femme. Un tel système ne peut pas survivre globalement à une augmentation critique des couples mixtes (cf. nuptialité en Basse-Bretagne et brassage dialectal).

L'éclatement des pratiques en une miriade de micropratiques est insécurisante pour les locuteurs, condamnés à produire des actes impolis pour l'une ou l'autre partie. Cette insécurisation linguistique a certainement pesé dans les choix individuels de passage au français pour les communications extra-familiales. Seul un environnement très inductif peut alors assurer la continuation d'une pratique uniforme. Or cette induction est absente de l'histoire du breton au XXe, à l'échelle des dialectes traditionnels comme à celle du standard.


quelques structures ambigües

En (1), l'exemple cornouaillais pourrait être un exemple de système instable, où tutoiement et vouvoiement existent encore en reliquats morphologiques, mais ne font plus signes de tutoiement ou de vouvoiement. Cependant, il se pourrait aussi que le verbe dastum soit à l'infinitif ((Dav eo deoc'h) dastum pevar ha tri, hag ho po seiz 'Il vous faut additionner... ').


(1) Dastum pévar a tri ag o po seiz.
additionne(r) quatre et trois et 2PL 2.aura sept
'Additionnez quatre et trois, vous aurez sept.'
Cornouaillais, Ar Scao (1945:'additionner')


langues d'héritage et appauvrissement des paradigmes morphologiques

Les langues d'héritage, pratiquées en environnements discursifs réduits, sont connues pour le rétrécissement qu'elles montrent des paradigmes d'inflexion. Cependant, l'influence du système dual français irait plutôt dans un sens de conservation des paradigmes bretons.


influence du T-V français, Moréac ?

L'usage à la française induit la préservation voire l'innovation des paradigmes en te dans les dialectes qui en sont dépourvus.

Châtelier (2016:43) collecte en 2013 des formes de tutoiement en te à Moréac chez une locutrice née en 1924. Séveno, au début du siècle (ENVD.), ne produisait que des formes d'adresse plurielles. Il est possible qu'il s'agisse chez la locutrice d'une évolution due à l'usage français en contact, ou chez Séveno au vouvoiement obligatoire d'un texte religieux. Toujours est-il que cette locutrice a en 2013 à Moréac une forme proclitique objet bretonne de seconde personne du singulier.


(3) / me we:l /
Me te wel.
moi toi 1 voit
'Je te vois.'
Haut-vannetais (Moréac), Le Tohic 2013
rapporté dans Châtelier (2016:43)


Perte du c'hwi chez les locuteurs traditionnels de système dual

En Léon pour Plougerneau, M-L. B. (04/2016) précise que des enfants de sa génération ont eu vouvoyé leurs parents, mais que ce n'était pas son propre cas. Elle montre par ailleurs elle-même un paradigme de vouvoiement incomplet sur les verbes.

Les locuteurs qui ne parlent plus le breton qu'en intimité avec des personnes qu'ils tutoient, et qui échangent en breton plûtot avec une seule personne à la fois, peuvent perdre complètement les environnements discursifs qui mobilisent la production de ces pans de paradigmes verbaux.


influence de l'acquisition scolaire

Pour les enfants dont le seul contexte discursif est l'école, l'input d'une adresse plurielle collective est assurée par l'enseignant (c'hwi bugale). L'adresse au singulier est assivement te et le vouvoiement est quasiment absent des pratiques. L'influence du français va aussi das le sens de l'usage régulier d'un tutoiement des enfants, surtout lorsqu'ils sont très jeunes.

Chantreau (2017) a interviewé des jeunes brittophones sur leurs usages langagiers. Dans la description de Marie ci-dessous, l'usage du breton auquel elle est confrontée est un système unitaire en te. Puisqu'elle a été scolarisée en breton, elle ne peut ignorer les paradigmes du c'hwi du breton standard. Elle ignore visiblement l'usage répandu, dans toute l'aire centrale du pays, d'un c'hwi unitaire. Elle choisit d'interpréter socialement les usages en te de la manière qu'il le seraient dans un système dual, c'est à dire un signe de proximité sociale.


 Chantreau (2017:93):
 ""E brezhoneg, n'eus ket harzoù etre an dud". Boaz eo Mari da vont dre de gant ar vrezhonegerien, ar re n'anavez ket zoken, forzh peseurt oad e vefent, iskis e vefe mont dre c'hwi."
 ["En breton, il n'y a pas de barrières entre les gens". Marie a l'habitude de tutoyer les brittophones, même ceux qu'elle ne connaît pas, quel que soit leur âge, il serait bizarre de vouvoyer.]

Bilinguisme et variation des systèmes

Un même locuteur peut montrer plusieurs usages d'adresse. C'est vrai pour les bilingues breton français, mais aussi pour les brittophones bilingues dans deux dialectes du breton. A Ploemeur à côté de Lorient, le marin de 52 ans interrogé pour l'ALBB montre un système dual sur la plupart des cartes, ce qui est conforme à l'usage de la localité. Cependant, pour traduire 'Tu es en train, Vous êtes en train (de)... ', il se restreint subitement à la forme emoc'h pour les deux personnes, comme l'auraient fait chacun de ses deux parents originaires de Bannalec. Ce locuteur produit et comprend deux systèmes différents.

Dans un contexte où les usages en breton sont bouleversés, les locuteurs peuvent interpréter le système d'une langue avec la pragmatique d'une autre, selon ce qui leur convient.

Pragmatique

l'adresse à Dieu

Dans le numéro de mai 2017 de Imbourc'h, les usages dans l'adresse à Dieu sont contrastés en breton et en français, avec un vouvoiement en breton (Yann Maneguen note: "ne-d eomp ket dre 'Te' ouzh Doue an Tad, ['On ne tutoie pas Dieu le Père']").


(1) N'hol lezit ket da gouezhañ en temptadur.
ne nous laissez pas de1 tomber en.le tentation
'Ne nous laisses pas entrer en tentation.'
Nouveau Pater selon les évêques de France


Peeters (2004) relève qu'en français, l'adresse à Dieu est un tutoiement (Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié) depuis le concile Vatican II (1962-1965). L'adresse à la Vierge est cependant un vouvoiement (Je vous salue Marie).


le tutoiement d'agression

Le tutoiement marque un rapprochement. Comme un rapprochement physique, il peut être interprété selon les codes comme une marque d'intimité, ou comme une agression.

Le tutoiement d'agression existe dans le français en contact. Peeters (2004:9) relève ce tutoiement en français dans les invectives typiques des conducteurs de voitures, les invectives de rue ou les interprellations policières. On ne relève cependant pas d'interprétation du tutoiement comme marque d'agression dans des couples qui par ailleurs se vouvoieraient.


Diachronie

l'hypothèse d'une ambiguïté morphologique des marques 2SG

Falc'hun (1981:486) développe l'idée d'une confusion morphologique entre les formes de seconde personne du singulier, qui aurait mené à l'abandon de son usage.

 "Dès une époque très ancienne, le vannetais différait des autres dialectes par une désinence en -s des pronoms personnels suffixés et de certaines formes verbales de la seconde personne du singulier qui avaient ailleurs une désinence en -t; cf. ous, out 'tu es', carte 51; genis, ganit 'avec toi', carte 209. Par Carhaix, certaines formes vannetaises en -s se répandirent dans les autres dialectes. Carhaix créa même, par analogie, des formes verbales en -s qui n'avaient pas plus d' -s en vannetais que dans les autres langues brittoniques, ainsi gres 'fais' en Cornouaille et Tréguier, carte 266. 
 Puis eut lieu à Carhaix une réaction qui rétablit le t à la place de l' s, et qui, par fausse régresssion, l'établit aussi dans les "hypervénétismes" : gres 'fais', devint gret. Mais comme il existait déjà une désinence en -t pour la seconde personne du pluriel des verbes, il se produisit, en certaines formes verbales très usuelles, une confusion entre singulier et pluriel de la 2e personne, ainsi entre le nouveau gret 'fais' et l'ancien gret 'faites'. Cela fut interprété, non comme un accident morphologique, mais comme l'application d'une règle de savoir-vivre interdisant le tutoiement: et progressivement les verbes, les pronoms et les adjectifs de la 2e personne du singulier disparurent des environs de Carhaix."

L'origine de l'aire en c'hwi selon Falc'hun tiendrait donc dans la confrontation de formes vannetaises adoptées à Carhaix, qui auraient ensuite influencé la Cornouaille et le Trégor, puis contre laquelle Carhaix se serait retournée sans impact cette fois sur son aire d'influence, amenant une confusion morphologique à Carhaix, et dont la stratégie de réduction du paradigme aurait essaimé en vannetais et inégalement sur ses aires d'influence. Cette hypothèse implique de nombreux présupposés qui devraient être vérifiés pour les époques antérieures où elle fait des prédictions (d'ailleurs non-situées, si ce n'est qu'elles sont "très ancienne[s]"). Sans confirmations externes, l'hypothèse de Falc'hun semble tenir principalement à sa compatibilité avec l'hypothèse principale de travail de l'auteur, que la zone de Carhaix est installée de longue date comme le centre linguistique créateur des formes nouvelles. Pour Falc'hun, les formes vannetaises descendent du gaulois et celles du KLT du brittonique ancien venu d'une population immigrée - p. 498 il considère comme totalement équivalentes son hypothèse de perte du tutoiement comme phénomène de contact entre le vannetais et le carhaisien et celle d'un phénomène de contact entre le brittonique insulaire et l'"armoricain, encore [resté] au stade de l'indo-européen commun".

L'hypothèse d'une confusion morphologique sur les formes de la 2e personne du singulier devrait inclure la variation intra-vannetaise (cf. Le Goff 1927). Il serait aussi important de pouvoir retracer la diachronie des usages genrés qui, on le voit en synchronie en cornouaillais, affaiblissent l'usage du tutoiement par une restriction de ces paradigmes à des usages sociaux entre hommes, voire entre hommes intimes de statut social égal uniquement, les usages linguistiques des femmes et d'adresse aux femmes étant en c'hwi.


témoignages rares

Falc'hun (1981:492) mentionne un texte en latin découvert à Bruxelles, Norbert (1911:19), qui suggère qu'à Quimper au XIV°, les domestiques hommes étaient normalement tutoyés. Le texte parle de saint Jean Discalcéat (1279-1349), originaire de Saint-Vougay en Léon, qui arriva au couvent des Cordeliers de Quimper en 1317. Le texte dit de lui Faciebat, et in singulari, sicut famulo, sibi loqui 'Il se faisait adresser la parole au singulier, comme à un domestique'". On ne peut pas en déduire si l'usage d'adresse aux prètres est étonnant à Quimper pour les prêtres de Quimper ou pour les prêtres du Léon. On ne peut pas non plus en déduire non plus les usages d'adresse aux domestiques femmes.


Au XVI°, on trouve un phénomène de frontière avec des alternances T-V dans la même phrase dans un texte de Gilles de Kerampuil, originaire de Kerampuil à 1 km au sud-est de Carhaix, et recteur de Cléden-Poher à 8/9km au sud-ouest de Carhaix.

 Falc'hun (1981:492): 
 "La Chrestomatie de J. Loth reproduit, p. 255-256, une paraphrase bretonne de l'Ave Maria, du XVI° siècle, oeuvre de Gilles de Kerampuil, recteur de Cleden-Poher, près de Carhaix. Elle offre cette particularité curieuse de faire alterner le tu et le vous dans une même prière adressée à la Vierge. La pièce débute par Me ho salud 'Je vous salue'; mais ho chastetez 'votre chasteté', y rime avec guenez 'avec toi'; la troisième strophe contient a heus bezet 'tu as eu', eurus out 'tu es heureuse'; mais la cinquième strophe reprend le pluriel avec des impératifs en -et, dont pedet ho map 'priez votre fils'."


Horizons comparatifs

autres langues celtiques

Dans le domaine celtique, les usages varient.

Dans le domaine gaélique, l'irlandais a un seul pronom d'adresse sibh, singulier ou pluriel, avec ou sans déférence. L'écossais a une différentiation duale des pronoms d'adresse, avec sibh (V) et thu (T) (MacAulay 1992:160).

En moyen gallois du XIII°, l'adresse à une personne de statut social supérieur est réalisée avec un pronom singulier, révélant l'absence de système T-V (Höijer 2014:51,84). Morris Jones (1913:270–1) date l'émergence de T-V au XV° siècle, ce qui le place largement après l'occupation normande. T-V peut donc y venir d'une influence romane à travers l'anglais. Au XXe, l'usage T-V est commun, avec des distinctions genrées, malgré un développement en contact avec l'anglais, qui a perdu T au XVII°.


 Watkins (1977:164-5), sur le gallois:
 "The rule for selection of the polite (2nd person pl.) rather than the familiar form (2nd person sing.) can, of course, vary from family to family. This may be particularly true in a dialect such as this in which the language, for younger age groups, has ceased to be functional outside of the extended family group. It seems clear, however, that the norm for the community as a whole may be expressed by the following formula for selecting the second person singular:
 + intimate + contemporary or junior + male.
 Females, however young, are addressed by the polite form, and they in turn always use the polite form in addressing others. The result is that the polite form usually is the mode of address even between husband and wife, and between parents and daughter. The familiar form is used only in the following circumstances:
 1. By the rapidly diminishing chapel membership when addressing the deity.
 2. By all members of the community when addressing animals.
 3. By males when addressing intimate male contemporaries, or younger males with whose families they have intimate connexions."


influence sur le français moderne

Dans la littérature en français standard, le décalage de système d'adresse entre le breton et le français est utilisé comme un élement d'exotisme. Dans Chapeau bas, madame, roman de Joël Raguénès (2005) qui se passe fin XIXe, frère et sœurs se vouvoient, alors qu'ils se tutoyeraient en français (p. 7-9).

Pour ce qui concerne l'influence du système breton sur le français de Basse-Bretagne, se reporter à Le Monze (1998).


le domaine roman

Comme c'était le cas en latin, les adresses en bas-latin sont surtout au tu, mais avec de plus en plus d'occurrences de vous, comme des marques ponctuelles de respect qui n'engagent pas le reste du discours.

En 850, les évêques de Tours, Sens et Rouen demandent à Noménoé "chef de la nation bretonne" de se soumettre en le tutoyant (Levillain 1901, Wolff 1986). En ancien français au XII°, on trouve encore des exemples de tutoiements/vouvoiements instables dans un même domaine discursif. D'un domaine propositionnel à l'autre, le locuteur y passe du tutoiement au vouvoiement pour des effets de discours.

(1) Pren la corone, si seras coronez; O se ce non, filz, laissiez la ester : Je vos defent que vos n'i adesez.

'Prends la couronne, tu seras couronné. Sinon, fils, laisse-là: Je te défends d'y toucher. '
Le couronnement de Louis, pdf


On parle d'instabilité T-V car la marque morphologique change, mais l'optionalité est restreinte à la réalisation d'effets de discours, où la forme en T est assignée à la visibilisation linguistique de relations humaines particulières. La forme T est donc associée à un système de traits particuliers (cf. Lass 1999, Taavitsainen & Jucker 2003). Rezac & Jouitteau (2016:209) comparent ce phénomène à la disparition graduelle du nous face au on du français moderne. En (2), le sujet singulier on coréfère avec le sujet pluriel nous. Ils déclenchent cependant chacun des accords différents sur leur verbe respectif.


(2) Avec mon mari, on a décidé que nous allions utiliser les préservatifs.

exemple trouvé sur un forum, Rezac & Jouitteau (2016:209)


Les usages ne sont pas uniformes dans la société, et l'expression de l'égalité diffère selon les classes sociales. Mason (1990) note que depuis le français médiéval, les égaux des classes supérieures s'adressent en V, alors que les égaux des classes inférieures s'adressent en T (elle illustre par l'exemple des bergers de Nouvelle LXXXII, ms. c. 1460. Les Cent Nouvelles Nouvelles, Paris: Garnier Frères). Mason (1990) considère qu'en ancien français, dès le XIII°, V est l'adresse aux supérieurs hiérarchiques et aux égaux dans classes supérieures. Le T asymmétrique est restreint aux inférieurs hiérarchiques, incluant les plus jeunes. Dieu est tutoyé. Il existe aussi un T symétrique dans l'adresse au divin (adresses aux Nains et Géants, qui répliquent en T). La géénralisation est assez solide pour que ses exceptions soient signifiantes: l'usage de T à un interlocuteur qui s'attend à V peut "indiquer des émotions temporaires comme la tendresse, l'hostilité, ou la défiance" du locuteur.


Le domaine roman n'est pas uniforme dialectalement. Falc'hun (1981:493) mentionne trois cartes de de l'ALF: la carte 1277 'te taire', carte 1297 'Tiens-toi', et la carte 1307 'pour toi' qui montrent "l'emploi du vous pour le tu […] à la lisière septentrionale de la Wallonie". En citant Jaberg (1936:104-105), il mentionne aussi dans certains dialectes de l'italien "une confusion morphologique dans les verbes entre la seconde personne du singulier et celle du pluriel".

Brown & Gilman (1972) ont proposé que l'évolution diachronique du système français illustre le passage d'un système de sémantique du pouvoir à un système de sémantique de la solidarité. Le premier se forme aux XII° et XIII° siècles et reste dominant jusqu'au XIXe siècle, et le XXe illustre la naissance d'un système basé sur la solidarité (par l'expression linguistique de l'égalité). Il n'existe pas dans le domaine roman de système genré comparable au système gallois ou breton, mais dans un système patriarcal, avec un système de marquage linguistique des relations de pouvoir, des différences genrées peuvent être notées. Mason (1990) note par exemple qu'en 1400 dans Les Quinze joies du mariage XI et XV, les mères s'adressent en T à leurs filles, alors que vers 1460 dans Les Cent Nouvelles Nouvelles, les parents adressent leurs fils adultes en V.

typologie

En allemand (Sie) ou en espagnol (usted), la personne d'adresse de politesse ne coïncide pas avec le seconde personne du paradigme, mais avec la troisième. L'usage de la troisième personne en adresse de politesse n'est pas relevé à travers les dialectes du breton, si ce n'est dans l'usage trégorrois et central de ar re-mañ ac'hanoc'h 'vous'.

La valeur d'usage qui est attachée à l'un ou l'autre morphème peut varier grandement avec le temps. En néerlandais, quatre pronoms d'adresse co-existent (Aalberse 2004): jij qui fut pluriel puis marque de politesse est maintenant une forme très familière du singulier, sa forme simplifiée je également singulier informel, a aussi des usages d'adresse plurielle, ou même formelle, enfin le pronom formel u est plutôt singulier mais aussi pluriel et le quatrième pronom jullie qui a longtemps été informel peut aussi maintenant porter des adresses plurielles.


Le système anglais avec le pronom d'adresse unique you a, comme le breton, emprunté le matériel morphologique d'un ancien pluriel (accusatif/datif). L'unicité du système d'adresse pronominal en anglais morderne n'exclut pas des systèmes pragmatiques d'adresses contrastées, par exemple par les prénoms ou par les titres. Pour une étude de la dimension genrée de ces adresses en anglais américain en 1970, se reporter à l'étude de corpus de Kramer (1975). Le sexe du locuteur et des l'interlocuteur a des implications sur l'usage des pronoms dans, entre autres, la langue des Murinbada en Australie du Nord et celle des Yuchi de l'Oklahoma (Capell 1966:86,102), ou en russe (Friedrich 1972, pour une étude de corpus de la littérature russe du XIXe). Les noms utilisés pour la référence de type pronominal en thaï, burman et en vietnamien montrent aussi des distributions genrées (Cooke 1968).

Martin (1966:410) compare le japonais standard, le japonais d'Okinawa et le coréen et montre que si la différence d'âge, la position sociale et le marquage d'exclusion du groupe sont des facteurs importants pour prédire les usages de formes honorifiques, le facteur le plus déterminant des quatres est le sexe du locuteur.

horizons théoriques

Se reporter à Zappettini (2016), qui fait un résumé compréhensif des trois grandes périodes d'étude des adresses dans la littérature scientifique.

Terminologie

 Denez & al. (2009:56):
 "Tutoyer quelqu'un: teal unan bennak, mont dre de ouzh unan
 Celui ou celle qui utilise le tuoiement : un teer, un deerez
 Vouvoyer quelqu'un: c'hwial unan bennak, mont dre c'hwi ouzh unan bennak
 Les personnes qui vouvoyent sont des c'hwied.

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breton

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horizons comparatifs et théoriques

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