Dorn

De Arbres

Le nom dorn dénote une 'main'.


(1) Kraoñ am-oa bet digantañ leiz ma daou zorn.
noix R.1SG avait eu de.lui plein mon2 deux1 main
'J'avais reçu de lui des noix plein les deux mains.'
Trégorrois, Gros (1984:183)


Morphologie

variation dialectale

La carte 147 de l'ALBB, documente la variation dialectale de la traduction de 'la main droite, à droite', la carte 172 'ma main', la carte 173 'dans ta main', la carte 174 'sa main (à lui, à elle)', et la carte 175 'leurs mains'.


(2) En e zourn e luc'he eur gontell.
en son1 main R4 luisait un 1couteau
'Dans sa main luisait un couteau.'
Standard, Riou (1941:7)

nombre

Dorn est un nom comptable.

Le singulier dorn est documenté dans la carte 172 de l'ALBB et dans la carte 404 du NALBB.


duel

Au nom dorn est associé le duel daouzorn et surtout sa forme synthétique daouarn.

Ce duel est documenté dans la carte 175 de l'ALBB, 'leurs mains', traduit surtout par différentes prononciations de daouarn. On relève le duel+pluriel daouarnoù à Groix, et quelques formes en dorn en sud Cornouaille et en vannetais. Dans la carte 405 du NALBB, 'des mains (paire)', on trouve surtout différentes prononciations de daouarn, mais aussi le groupe duel+pluriel daouarnoù à Sein ou ponctuellement le pluriel dornoù à Beuzec-Cap-Sizun en Cornouaille, à Tréglamus en Trégor, ou à l'est du vannetais. Le vannetais se caractérise par un usage plus répandu des formes en daouzorn. La forme dorn relevée dans l'ALBB en de multiples points dans l'aire sud n'apparaît plus dans le NALBB.


genre

Le nom dorn est masculin - La forme récoltée pour le pluriel leurs mains est partout daouarn ou daou zorn dans la carte 175 de l'ALBB. Dans la carte 405 du NALBB, un seul point, Saint-Rivoal, donne divzorn.


dérivation

Le préfixe (h)al- obtient aldorn 'poignet' (/hal'dɔrn/, Bouzec & al. 2017:360).

Un suffixe verbal de l'infinitif obtient l'action de 'battre (les blés)'. Le suffixe nominal -adeg obtoent 'battage collectif'.


(3) mar fôt t'iac'h dorneiñ men gunaic'h arhoac'h
si faut à.vous battre mon blé demain
'si vous voulez (bien) battre mon blé, demain'
Vannetais (Sarzeau), Ernault (1876-1878:233)


(4) Pa veze dornadeg, e kêr-mañ-kêr, Naig ar Rouz kozh eo a veze e penn ar maouezed.
quand1 était main.age en ferme-ci-ferme Naig ar Rouz vieil est R était en tête le femme.s
'Quand on battait les blés dans telle ou telle ferme, c'est la vieille Naig ar Rouz qui prenait la tête des femmes.'
Cornouaillais (Bigouden), Bijer (2007:243)


Le participe formé sur la même racine n'a pas le même sens. C'est un participe qui n'est pas forcément verbal, mais dérivé directement de la racine dorn. C'est à comparer avec l'anglais hand dans left-handed qui n'est pas dérivé du verbe to hand something, 'tendre pour donner quelque chose'.


(5) Ur masoner dornet mar zo unan.
un maçon doué si+C,4 est un
'Un maçon doué s'il en est un.'
Vannetais (Le Scorff), Ar Borgn (2011:11)

Expression

taol-dorn 'tour de main'

(6)... ar pleg [...] da sellout evit kompren ha da ober evit pakañ an taol-dorn.
le pli pour regarder pour comprendre et pour faire pour attraper le coup-main
'... l'habitude [...] de regarder pour comprendre et d'imiter pour attraper le coup de main.'
Cornouaillais (Ploéven), Gouérec (2018:14)

Diachronie

Le proto-celtique * durno- 'poing' a donné le vieil irlandais dorn, dornn [o m], l'irlandais dorn 'poing', le gaélique d'Écosse dòrn (Matasović 2009). Dans la branche brittonique, on a dans le sens 'main, poing, poignée' le gallois dwrn, le cornique dorn, le vieux breton durn. Deshayes (2003) relève dornn en moyen breton en 1464 'main, poing, poignée'.

En gaulois, le nom * durnos est reconstitué à partir du nom de personne Durnacos (Deshayes 2003), ou du nom de lieu Dago-Durnus. Ce nom gaulois a été emprunté dans le domaine roman par l'ancien français dor et le provencal dorn 'mesure de quatre doigts' (Matasović 2009), qui n'est donc pas un emprunt au breton (contra Troude 1886).


Le proto-indo-européen * dows- 'bras, avant-bras' (IEW:226) a donné le proto-celtique * dowsant- 'main, bras' (Matasović 2009), puis le vieil irlandais doë, doe mais Matasović (2009) les traite comme des racines différentes. Il considère que le proto-celtique * durno- 'poing' n'est pas de source indo-européenne, et a été emprunté à une langue indigène plus ancienne.