-egezh

De Arbres

La finale en -egezh obtient des noms abstraits. Cette finale est le résultat d'une suffixation en -eg suivie d'une suffixation en -ezh. Il y a donc au moins autant de dérivations de finale en -egezh qu'il y a de combinaisons de suffixes -eg et de suffixes -ezh compatibles.


(1) E-pad ar brezel ez eus bet privadurez ha berregez euz peb tra.
pendant le guerre R4 est eu privation et court.sfx de chaque chose
'Pendant la guerre, il y avait des privations et des restrictions sur tout.'
Cornouaillais (L'Hôpital-Camfrout), Le Gall (1958:'privadurez')


Cette finale complexe est souvent confondue avec un suffixe à part entière: Helias (1986:13) donne buanègèz et sa variante vannetaise buanègèh repris dans Trépos (2001:76) comme buanegez 'colère, emportement'. Chalm (2008:W-214) donne anaoudegezh 'connaissance', gouiziegezh 'savoir, connaissance'.


Morphologie

variation des voyelles

Favereau (1997:§156) reporte une prononciation KLT en ['è:gəz].

Les léonards Seite & Stéphan (1957:13) donnent l'orthographe ar ouiziègèz 'la science'.


base

La base peut être adjectivale comme dans buhan, 'vite, rapide' > buhanegezh ('colère, emportement', Trépos 2001:76).

genre

Puisque -egezh est une finale composée de plusieurs suffixes, son genre fluctue selon les suffixes qui la composent. Les auteurs qui considèrent -egezh comme un suffixe ne considèrent généralement qu'une seule dérivation pour cette finale.

Trépos (1968:§129) considère que -egez est féminin. Il donne gouiziegez 'science', dérivé plus plausiblement du suffixe -ezh qui dérive un nom abstrait à partir d'un nom ou d'un adjectif.

Cheveau (2017:§37) considère que -egeh est féminin. Il donne ivoulegeh 'avidité' et kontegeh 'comté'.

Selon Chalm (2008:W-215), les noms en -egezh sont féminins.

Si cela est vrai pour les noms formés avec le suffixe -eg dénotant une idée de collectif, c'est faux pour les noms formés avec le suffixe -eg des noms d'agent, car ce suffixe est masculin.


tiegezh, m.

Le nom tiegezh 'maisonnée, ménage, famille, exploitation traditionnelle' est donné masculin dans Favereau (1993) et Menard & Kadored (2001). Deshayes (2003:'ti') donne le nom masculin ti attesté depuis le vieux breton, d'une plus ancienne racine tig remontant au celtique * teg-es. Il relève en 1499 le nom masculin tiec 'exploitant', avec donc le suffixe masculin -eg des noms d'animés, et au début du XVI° le nom masculin tyeguez 'ménage, exploitation', formé sur le celtique * teges-ako-.


(2) Mestr an tiegezh a ouie ne oa ket va zad a-wel da c'hellout paeañ …
maître le maisonn.ée R1 savait ne1 était pas mon2 père en-vue de1 pouvoir payer
'Le propriétaire savait que mon père n'allait pas pouvoir payer… '
Léonard (Bodilis), Ar Floc'h (1985:22)


(3) Hag an holl diegezh a yae eus un ti d'egile.
et le tout1 maisonn.ée R allait de un maisonn.ée à autre
'Et toute la maisonnée allait d'une maison à l'autre.'
Douarneniste, Denez (1996:77)


Deshayes (2003'ti') relève aussi en 1519 le nom féminin tiegez 'ménagère, sage-femme', ce qui implique que tant que ce substantif était en usage, le genre masculin de tiegezh 'ménage, exploitation' était renforcé pour éviter une confusion.

La dérivation de tiegezh ne peut pas impliquer le suffixe -eg marquant l'idée de collectif, car ce suffixe est féminin. Cette dérivation ne peut pas non plus impliquer le suffixe -ezh des noms abstraits qui est aussi féminin.

nombre

Les noms dérivés en -egezh font leur pluriel en -ioù (Chalm 2008:W-215).


Sémantique

Vallée (1980:XVIII) pointe que les finales en -egezh, en physiologie et en anthropologie, apparaissent sur les noms des caractères corporels.


(1) rakkarvanegezh 'prognathisme'
ruzegezh 'érythréisme'
druzfeskennegezh 'stéatopygie' Vallée (1980:XVIII)


La dimension méta des finales en -egezh le rend utile pour dériver des noms de systèmes conceptuels.


(2) Lod all zo plijet gant an divyezhegezh kentoc'h, forzh peseurt yezh e vije an eil.
partie autre est séduit avec le bi.lingu.isme plutôt importe quel.sorte langue R serait le seconde
'D'autres sont plutôt attirés par le bilinguisme, quelle que soit la langue seconde.'
Standard, Bremañ n°226-7, p.7


-egezh vs. -elezh

Les noms à finale en -egezh peuvent avoir une valeur morale (méta) qui n'est pas présente dans les finales en -elezh. Vallée (1980:XVIII) contraste le suffixe -ek, que l'on retrouve dans les finales des noms en -egezh, qui dénotent "les qualités des personnes, les habitudes, les dispositions morales" avec le suffixe adjectival concurrent -el, qui apparaît dans les finales en -elezh des noms qui dénotent les "propriétés générales ou la nature des personnes et des choses".


(3) dereadelezh 'propriété des objets qui se conviennent' dereadegezh 'qualité des personnes convenables'
tadelezh 'paternité, qualité de père' tadegezh 'sentiment paternel, conscience de la qualité de père'
denelezh 'humanité (qualité d'homme)' denegezh 'humanité (condition morale supérieure de l'homme)'
loenelezh 'animalité (qualité d'animal)' loenegezh 'animalité (condition morale inférieure de l'animal)'
Vallée (1980:XVIII)


Le Roux (1915:69) contraste douelez, 'divinité, état, nature divine' avec doue(e)gez 'théisme', formé sur doueek 'qui a un Dieu', dérivé ensuite en dizouegez 'athéisme', hollzouegez 'panthéisme', etc. Vallée traduit cependant 'divinité' par douegezh.


(4) N'eus ket a zoueegezh ennout !
ne1 est pas de1 dieu.sfx en.toi
'Il n'y a pas de divinité en toi !'
Standard, Mirabeau traduit par Vallée (1980:XVIII)

Diachronie

  • Enn amzer eur barner, pa c'hourchémenné ar varnerien, é c'houarvézaz naounégez er vrô.
'Dans le temps des juges, sous le gouvernement d'un d'eux, survint une famine dans le pays.', Buez Ruth, Le Gonidec (1807:294)

À ne pas confondre

Ce suffixe marqueur de noms abstraits ne doit pas être confondu avec le suffixe -egez, marqueur de nom d'agent au féminin.


Bibliographie