Subordonnées relatives

De Arbres
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Les relatives sont des domaines propositionnels qui, comme le feraient des adjectifs, modifient un nom, ou même parfois un prédicat, ou un adverbe.

En (1), le domaine propositionnel o deus c'hoariet 'ont joué' modifie la tête ar vugale 'les enfants'. Dans l'ensemble dénoté par 'les enfants', on modifie le domaine de référence en restreignant sa référence aux 'enfants qui ont joué'.


(1) Ar gwaz e nevez ar vugale o deus c'hoariet.
le homme R connaît le 1enfant.s [ 3PL a jou.é ]
'L'homme connaît les enfants qui ont joué.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


Pour une étude du système relatif en breton, consulter Guyonvarc'h (1972-73). Pour une approche théorique des relatives, consulter Bianchi (2002).


Inventaire du matériel de relativisation

ce qui peut être la tête d'une relative

En breton, on a :

  • des relatives du sujet
  • des relatives de l'objet
  • des relatives d'adjoints
  • des relatives d'adjectifs (gant ar brav ma oa...)


La phrase en (2) montre en breton une relative de l'objet. Le constituant ur reun tanav qui est la tête de la relative est l'objet de gwerzhañ 'vendre'. L'ensemble ur reun tanav a oa aesoc'h da werzhañ est l'objet du verbe kaout 'avoir' de la matrice.


(2) Ar moh bihan o-devoa eur reun tano a oa êsoh da werza.
le cochons petit 3PL avait [ un soies fin [ R1 était facile.plus à1 vendre ___ ]]
'Les petits cochons avaient des soies fines qui se vendaient plus facilement.'
Léonard (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:7)


Il faut aussi penser aux interrogatives indirectes, qui constituent des relatives.


(3) Ar gwaz a hoar peur ar vugale o deus gwelet ar vaouez.
le homme R sait quand le 1enfant.s 3PL a v.u le 1femme
'L'homme sait quand les enfants ont vu la femme.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)

complémenteurs, pronoms relatifs

Les relatives débutent parfois par un pronom relatif comme ar pezh, ou par un complémenteur comme ma, ou ha(g). Leur distribution est décrite ci-dessous.

ar pezh

Le pronom relatif ar pezh 'ce que' est restreint aux inanimés.


(4) Morse n'e-noa bet disklêriet an den-ze ar pezh a oa erruet ganin.
jamais ne1 R avait été d.it le personne. [ ce que R était arriv.é à.moi ]
'Jamais cet homme n'avait raconté ce qui m'était arrivé.'
Cornouaillais (Uhelgoat), Skragn (2002:21)


complémenteur nul

Dans certains cas, la structure est réalisée avec un complémenteur nul, c'est-à-dire qui fait le même travail syntaxique et sémantique qu'un autre complémenteur mais n'est pas prononcé. Le nom relativisé semble alors précéder directement le rannig.


(5) Ar gwaz e nevez ar vugale (hag) o deus ket gwelet ar vaouez deac'h.
le homme R connaît le 1enfant.s que 3PL a pas v.u le 1femme hier
'L'homme connaît les enfants qui n'ont pas vu la femme hier.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


(6) [ peb øːn no ɐn tɑ᷉ m nøs χwɑ᷉ nt]
Peb unan en do an tamm (e) neus c'hoant.
chaque un R.3SGM aura le morceau [ C R a envie __ ]
'Chacun aura le morceau qu'il veut.'
Cornouaillais, (Briec), Noyer (2019:242)


(7) Meus aon edo va staoñv o 'n em voazañ ouzh ar vlazenn skildrenk a rae ken diaes din, da gentañ !
sans.doute était mon2 palais à+C,4 se1 habitu.er à le 1goût demi.aigre [ C R1 faisait tant difficile à.moi à 1premier ]
'Sans doute que mon palais s'habituait au goût acidulé qui me dérangeait tant au début !'
Standard, Drezen (1932:27)

à ne pas confondre : sans complémenteur

Il existe des structures qui n'ont aucun complémenteur du tout, par exemple dans le cas des appositions comme les participiales. Les structures à complémenteur nul se distinguent de ces structures où aucun complémenteur n'est syntaxiquement présent. Ces structures font prototypiquement appel à la résomptivité de façon obligatoire.


(8) Sellout a reas ouzh ar breur Arturo evel ouzh un den bet darbet dezh koll e lod baradoz.
regarder R1 fit à le frère Arturo comme à un personne [ été faill.i à.lui perdre son1 partie paradis ]
'Il regarda le frère Arturo comme un homme qui aurait juste failli perdre son bout de paradis.'
Standard, Drezen (1990:74)


ma vs. a vs. ø

En vannetais pré-moderne, Thibault (1914) remarque à Cléguérec les relatives en rannig + lénition (prononcé /e/ en vannetais) remplacées optionnellement par des relatives en ma4 (mi4 pour le vannetais). Thibault (1914:180) cite en ani e gomzã dohtõ 'celui à qui je parle', mais aussi en ani mi komzãn dohtõn. Il rajoute la possibilité de ne pas prononcer de complémenteur du tout, avec une relative SVO : en ani me gomza dohtõn.

On trouve la même optionalité R1/ma4 au XXIe.


(1) en dén e gonzan anehon
le personne C R1 parle de.lui
'l'homme dont je parle'
Vannetais standard, Cheveau (2017:§326)


(2) en dén ma konzan anehon
le personne que4 parle de.lui
'l'homme dont je parle'
Vannetais standard, Cheveau (2017:§326)


(3) Ne velan ket ken an den am eus graet dezhon alho ar sakriti.
ne1 vois pas plus le personne R.1SG a donn.é à.lui clef le sacristie
'La personne à qui j'ai donné la clef de la sacristie n'est pas en vue.'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (10/2021)

distribution du complémenteur hag a

Un syntagme défini modifié par une relative restrictive est uniquement suivi par un rannig a ou, selon les analyses, par un complémenteur nul suivi de ce rannig a1. Les relatives non-restrictives, elles, débutent par hag a.

Un syntagme indéfini est modifié par une relative dont la tête est hag a. Cette propriété est souvent relevée pour certains indéfinis particuliers. Selon Le Gléau (2000b:461) le complémenteur hag a est attendu lorsque netra 'rien' est en tête de relative.


(4) N'eus netra hag a gousi an douar evel an ed.
ne1 est rien que R1 souille le terre comme le céréale
'Rien ne souille la terre comme la céréale.'
Dihunamb (1909:315),
cité dans Le Gléau (2000b:461)


Ceci n'exclut pas la variation.


(5) B'e ùenang e oé i labourad ne ouiañ ked i mènn...
être R était un R était à4 travailler ne1 sais pas
'Il y en avait un qui travaillait je ne sais pas où...'
Vannetais (Riantec), RJ.,
collecté par B. Allaire, dico parlants 2018

Inventaire des types de relatives

relatives réduites

Les relatives réduites sont des propositions relatives dont la tête n'est pas prononcée. On sait que cette tête est nominale quand elle déclenche le rannig a.


(1) War a gomze...
sur _[ø]_ R1 parlait
'Selon ce qu'il disait.'
Standard, Press (1986:206)


(2) ... hervez en devoa klevet gant ar re all.
selon _[ø]_ R.3SGM avait entend.u avec le ceux autre
'...selon ce qu'il avait entendu de la part des autres.'
Léonard (Bodilis), Ar Floc'h (1985:151)


relatives d'un syntagme de temps

Les relatives d'un syntagme de temps sont particulières en ce qu'elles sont restreintes à certains complémenteurs.


(3) Plad Sant Alar, e poent ma veze bouchoù bihan hennezh, a veze traoù e-barzh.
plat Saint Éloi en moment que4 était poulain.s petit celui-là R1 était choses dedans
'À l'époque des poulains, le plat de Saint Éloi, il était bien garni.'
Léonard, Mellouet & Pennec (2004:58).


(4) [ mǝs pasǝd ǝ huʁz ma dʁukɛɲ ] ].
m'eus paseet ar c'houlz ma m'boa droug-kein
1SG a pass.é le temps [ CP que 1SG avait mal-dos ]
'J'ai fini le temps où j'avais mal au dos.'
Bas-vannetais, Cheveau (2007:207)


(5) Bevañ a reomp ur poent (hag) ar vugale a hoar en em zervicha gwelloc'h it o zud gant an ordinater.
vivre R1 faisons un temps que le 1enfant.s R1 sait se1 servir mieux que leur2 parents avec le ordinateur
'Nous vivons un temps où les enfants savent plus des ordinateurs que leurs parents.'
Léonard (Plougerneau), M-L. B. (05/2016)


(6) Evid kelou ar pellder ez out bet er gêr...
pour nouvelles le longu.eur R+C es été en.le 1foyer
'Pour le peu de temps que tu as été à la maison...'
Trégorrois, Gros (1984:360)

appositives

En (7), le syntagme al lanv 'la marée' et ce qui le suit sont apposés. Le prédicat degouezhet eno semble relativisé à l'intérieur de la structure appositive.


(7) al lanv, degouezhet eno n'oar den dre be gildro ___ ...
le marée arriv.é ne1 sait personne par1 quel1 arrière1.tour
'la marée, arrivée là par on ne sait quelle ruse ...'
Standard, Drezen (1932:20)

Phénomènes syntaxiques de relativisation

résomptivité

La résomptivité est le phénomène par lequel la tête de la relative a, à l'intérieur de la relative, un élément qui co-réfère avec elle. On appelle cet élément un pronom résomptif. Les propositions relatives sont les domaines par excellence de la résomptivité.

On parle de résomption du sujet lorsqu'une relative contient un élément pronominal qui double la tête sujet d'une relative. On parle de résomption de l'objet lorsqu'une relative contient un élément pronominal qui double la tête objet de la relative, comme en (5).


(5) Ar gwaz e nevez ar vaouez hag ar vugale o deus gwelet ani.
le homme R connaît le 1femme que le 1enfant.s 3PL a v.u P.elle
'L'homme connaît la femme que les enfants ont vu hier.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


Les résomptifs peuvent aussi doubler des arguments non-directs, qui ne sont donc ni le sujet ni l'objet comme en (6).


(6) poltred diouti hec'h-unan a zo Mari lorc'h enni gant.
photo de.elle son-un [ R1 est Marie fierté en.elle avec.lui ]
'La photo d'elle-même dont Marie est fière.'
Standard, Guilliot (2006:1894)


Les relatives contenant un pronom résomptif peuvent être introduites par l'un ou l'autre rannig, ou encore le complémenteur ma (Favereau 1997:587).


lacune

Lorsqu'il n'y a pas de pronom résomptif dans une relative, on considère qu'à l'endroit canonique de l'élément qui est la tête de la relative se tient une lacune. Suivant les théories, cette lacune est interprétée comme une copie ou une trace. En (1), la tête de la relative est son sujet ar vugale 'les enfants', dont la place canonique serait après son verbe tensé. Ce sujet est monté en tête de la relative (par un mouvement A-barre). Cette relative du sujet est l'objet du verbe anavezout 'connaître' de la phrase principale.


(1) Ar gwaz e nevez(e) ar vugale o deus gwelet ar vaouez deac'h.
le homme R connaît [ le 1enfant.s [ 3PL a v.u __ le 1femme hier ]]
'L'homme connaît les enfants qui ont vu la femme hier.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


Ci-dessous, des exemples de relatives de l'objet en ar pezh en vannetais, avec une lacune correspondante dans la relative.

  • er pech i hon i leret _ ,
'ce que je suis en train de dire _'
  • er pech i han de leret _
'ce que je vais dire _'
  • er pech i tan a leret _
'ce que je viens de dire _'
Vannetais de Cléguérec, Thibault (1914:180)

relativisation à longue distance

Le mouvement de la tête de la relative est un mouvement A-barre. Il est opérable à longue distance. Se reporter à l'article sur le mouvement à longue distance.


(2) Ar gwaz a nevez ar vugale hag ar plac'hig e lavar o deus gwelet ar vaouez.
le homme R connaît [ le 1enfant.s [ que le fill.ette R dit [ 3PL a __ v.u le 1femme ]]]
'L'homme connaît les enfants que la fillette a dit qu'ils ont vu la femme.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


article défini et relative: an neb a venn...

Certaines relatives sont liées à l'apparition d'un article défini devant la tête de relative, comme le français Le Rennes de mon enfance a disparu vs. *Rennes de mon enfance a disparu.

En breton, cet effet est par exemple notable avec nep qui est toujours suivi d'une relative lorsque précédé d'un article (Kervella 1995:§475).


(3) an neb a venn a c'hell.
[ le celui R1 veut ] R1 peut
'Qui veut peut.'
Standard, Kervella (1933:42)


La tête nominale hini est toujours précédée d'un article défini si elle est modifiée par une proposition relative.

extraposition

La tête et sa relative peuvent être séparés par un mouvement d'extraposition de la relative en périphérie droite de la phrase.


(3) Arouez kêr Perroz-Gireg int deuet da vezañ, a weler war he c'hirri boutin zoken.
symbole ville Perros-Guirec sont ven.u à1 être [ R1 voit.on sur son2 voiture.s commun même ]
'Ils sont même devenus le symbole de Perros-Guirec, que l'on peut même voir sur les bus.'
Standard, Robin (2021)

Sémantique

restrictives vs. appositives: reconstruction

La reconstruction est le phénomène par lequel un élément qui a été déplacé dans la phrase est interprété dans sa position antérieure au déplacement. Ce sont précisément les relatives restrictives qui montrent des effets de reconstruction, au contraire des relatives appositives (Guilliot 2006:1890).

La phrase en (1) montre une appositive. L'objet pep poltred ne peut pas être reconstruit dans la position objet de drailhañ 'détruire'.


(1) * Pep poltred Yann en deus gwelet a zo bet drailhet.
chaque [ photo Yann R.3SG a v.u ] R est été détru.it
'Chaque photo de Yann qu'il a vu a été détruite.'
Standard, Guilliot (2006:1890)


(2) Poltred-mañ Yann en deus roet da Vari a zo bet drailhet.
[ photo.ci Yann R.3SG a donn.é _ à1 Marie ] R est été détru.it
'Cette photo de Yann, qu'il a donné à Marie, a été détruite.'
Standard, Guilliot (2006:1890)

Horizon théorique

Bianchi (2002) fournit un état de la recherche complet sur les relatives.


Terminologie

Kervella (1947:§770) utilise les termes islavarenn-stag, islavarenn degouezh et islavarenn-anv-gwan.

Press (1986:236) traduit islavarenn-anv-gwan par l'anglais relative clause.

En anglais, les relatives sans têtes sont appelées headless relatives.

Favereau (1997:587) appelle 'relatives intégrées' les relatives contenant un pronom résomptif.

Bibliographie

breton

  • Favereau, F. 1997. Grammaire du breton contemporain. Morlaix: Skol Vreizh, §574-591.
  • Yann Gerven. 2014. 'me 'zo bet hag... ', Yezhadur !, Alioù fur evit ar vrezhonegerien diasur, Keit Vimp Bev, 55-56.
  • King, Phyllis, 1982. 'An internal head analysis of the Breton relative clause', Linguistics 20:83-95.


diachronie et autres langues celtiques

  • Awberry, G.M. 1977. 'A transformational view of Welsh relative clauses', The Bulletin of the Board of Celtic Studies 27(2): 155-206.
  • Harlow, S. 1981. 'Government and relativisation in Celtic', F. Heny (éd.), Binding and filtering, Cambridge, MA: M.I.T. Press, 213-54.
  • McCloskey, Jim. 1979. Transformational syntax and mode/theoretic semantics. A case study in Modern Irish, Boston: Reidel.
  • Willis, David. 2011. 'Reconstructing last week's weather: Syntactic reconstruction and Brythonic free relatives', Journal of Linguistics 47 (2):407-446.


horizons théoriques et comparatifs

  • Bianchi, Valentina. 2002. 'Headed relative clauses in generative syntax – Part I', Glot International 6:7, 197–204. texte.
  • Cinque, Guglielmo. 2020. The Syntax of Relative Clauses, A Unified Analysis, Cambridge Studies in Linguistics, Cambridge University Press, review.
  • Grewendorf, Günther & Cecilia Poletto. 2015. 'Relative clauses in Cimbrian', Elisa Di Domenico, Cornelia Hamann and Simona Matteini (éds.), Structures, Strategies and Beyond: Studies in honour of Adriana Belletti, 393-416.
  • Riemsdijk, Henk van. 2005. 'Free Relatives', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol II, chap.27.