-us, -ius, -uz

De Arbres
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Le suffixe -us ou -uz forme des adjectifs. Il dénote un état ou la possibilité d'un état.


(1) ar blenier, lorc'hus ha reut a-walc'h an tamm anezhañ.
le conduct.eur orgueill.eux et raide assez le morceau P.lui
'le conducteur, fier et raide'
Trégorrois (Kaouenneg), ar Barzhig (1976:57)


Helias (1986:14) donne skuizuz 'fatigant' sur skuizh 'fatigué', et spontuz, 'épouvantable' sur spont 'épouvante'.


Morphologie

allomorphe

Lorsque la base finit par une consonne, le morphème est -ius.


(2) Hirio eo êriuz an amzer e-skoaz ma oa deh.
aujourd'hui est aér le temps comparé.à que4 était hier
'Il y a plus d'air aujourd'hui qu'hier.'
Cornouaillais (L'Hôpital-Camfrout), Le Gall (1957:'êriuz')


exocentricité

Le suffixe -us est exocentrique. Quelle que soit la catégorie sur laquelle -us apparaît, il obtient un adjectif.


(3) An dra-ze a zo despetuz.
le 1chose. R est dépit.Adj.
'Cela est regrettable.'
Trégorrois, Gros (1984:366)


base nominale

La base peut être nominale. Vallée (1980:XXII) donne par exemple trouzus 'bruyant' sur trouz 'bruit'.


(4) Jɑ̃ Mai amɑ̃ fêntuz.
Jean-Marie ici est drôle
'Ce Jean-marie est amusant.'
Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:46)


base verbale

La base peut être verbale. Vallée (1980:XXII) donne par exemple souezus 'étonnant'. Gros (1984:365) note que le français traduit ces composés par -ant, -able ou -ible.


base adjectivale

La base peut aussi être déjà adjectivale, comme dans le cas de braouac'h, braouac'hus 'effarant'.

dérivation

On trouve des adjectifs formés en -us dans des composés plus larges, obtenant un verbe ou un nom.


(5) N'am-eus ket bet anavezet morse gwasoh c'hoantuzenn.
ne1 R.1SG a pas eu conn.u jamais pire envi.euse
'Je n'ai jamais connu de pire envieuse.'
Cornouaillais (L'Hôpital-Camfrout), Le Gall (1957:'c'hoantuzenn')


(6) Me am-oa kerhet eur bern deliou euz ar hoad da fonnusaad ar vann-drêzenn.
moi R.1SG avait cherché un tas feuille.s de le 5bois pour abondanc.er le compost
'J'avais rapporté un tas de feuilles du bois pour accroître le tas de compost.'
Trégorrois, Gros (1984:343)


morphèmes zéro

Comme beaucoup d'adjectifs bretons, les adjectifs en -us peuvent former, sans dérivation morphologique visible, des adverbes.


(7) Euzuz eo c'hwero.
terrible est amer
'C'est terriblement amer.'
Trégorrois, Gros (1974:141)


Trépos (1968:§120, 129) signale aussi des usages nominaux. Il donne relijuz pour '(un) relijieux'.

Sémantique

Le suffixe -us n'est pas un suffixe générique applicable à tous les adjectifs. Il est en particulier en concurrence avec le suffixe -ek.


-ek vs. -us

Le Bayon (1878:19) oppose méhek 'qui éprouve de la honte', et méhus 'qui fait honte'. Vallée (1980:XXIII) pointe la même différence entre -ek et -us, avec poblek 'populeux' et poblus 'qui amène du peuple'.


(1) Ar brezel a zo bet poblus d'ar c'hêrioù, diboblus d'ar maezioù.
le guerre R1 est été peuple.sfx à le 1ville.s 1.peuple.sfx à le campagne.s
'La guerre a augmenté la population des villes et diminué celle des campagnes.'
Vallée (1980:XXIII)


Vallée (1980:XXIII) contraste aussi eveziek 'habituellement attentif' et evezius 'disposé à l'attention'.

A l'inverse, Favereau (1997:§229) considère comme synonymes talvoudus et talvoudek 'utile'.


base nominale

Sur une base nominale, le suffixe obtient un adjectif qui dénote la possibilité forte de l'abondance de l'élément que le nom racine dénote (dén c'hoantus, 'homme porté à désirer', Vallée 1980:XXII).


(1) lec'h edus , frouezus, gwinus
lieu blé.sfx fruit.sfx vin.sfx
'lieu fertile en blé, en fruits, qui produit du vin.'
Vallée (1980:XXII)


(2) amzer avelus , dourus, rewus luc'hedus kleñvedus
temps vent.sfx eau.sfx gelée.sfx éclairs.sfx maladie.sfx
'temps qui amène du vent, de l'eau, de la gelée, des éclairs, des maladies.'
Vallée (1980:XXII)


C'est le sens mentionné par Le Bayon (1878:19), qui traduit ces adjectifs par une paraphrase 'qui produit… ', suivie du nom de la base (koedus, 'qui produit du bois', leahus, 'qui produit du lait', mogedus, 'qui produit de la fumée').


base verbale

Sur une base verbale, le suffixe -us dénote la possibilité forte d'une action associée à la présence d'un agent (dén karus, degemerus 'homme porté à aimer, à (bien) recevoir', Vallée 1980:XXII).


(1) … hogen abalamour muioc'h c'hoaz marteze d'an istoriou burzudus, skrijus pe fentus a veze warno da lenn !
mais à.cause plus encore peut-être de le histoires merveilleux terrifiant ou drôle R est sur.eux à1 lire
'… Mais peut-être plus encore à cause des histoires merveilleuses, terrifiantes ou drôles qu'on y trouvait à lire.'
Cornouaillais (Pleyben), Ar Go (1950:5)


Vallée (1980:XXII) note la présence d'un agent sémantique dans dazgwel touellus 'mirage trompeur' et danvez entanus 'matière incendiaire'. Le Roux (1915:69), Gros (1984:365) considèrent que ces composés ont un sens "actif".

 Le Roux (1915:69):
 "Le suffixe -us, surtout après un radical verbal, a le sens actif: mezus 'honteux (qui fait honte)', kalonus 'cordial (qui fortifie le coeur)', spontus 'effrayant', mezvus 'enivrant', yac'hus 'salubre (qui rend sain, yac'h)', klanvus, klenvedus 'insalubre (qui rend malade, klanv, qui donne la maladie, klenved)'."


C'est un seul des sens mentionnés par Le Bayon (1878:19), qui traduit ces adjectifs par une paraphrase 'sujet à… ', suivie du nom de la base (klemmus 'sujet à se plaindre', an̄koéhus 'sujet à oublier', spon̄tus 'sujet à s'effrayer'), ou la paraphrase 'qui cause … ' (kouskus 'qui cause le sommeil', ligernus 'qui cause la lumière', strakus 'qui cause des éclaboussures').

Diachronie

(2) Bréma pa oud pinvidik, a zo gwall c'hloriuz.
maintenant que es riche toi R est bien1 fier
'Maintenant que tu es riche, tu es bien fier.'
Trégorrois pré-moderne, Hingant (1868:§117)


Horizons comparatifs

En gallo, il existe à côté du suffixe -ouz correspondant au français -eux (hâlouz 'venteux', farinouz 'farineux' Auffray 2007:intro) un suffixe -u formant des adjectifs (qheuru 'ardent, courageux, fort', sevu 'plein de sève' Auffray 2007:intro).