Différences entre les versions de « Structures clivées »
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|(3)|| '''Eñ''' an hini ||a rede war-lerc’h ||ur plac’h yaouank || dianav. | |(3)|| '''Eñ''' an hini ||a rede war-lerc’h ||ur plac’h yaouank || dianav. | ||
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| || [[pfi|lui]] [[art|le]] [[hini|celui]]|| [[R]] courait [[war-lerc'h|après]] ||[[art|un]] fille [[yaouank|jeune]] ||[[di-|in]].[[anavezout|connu]] | | || [[pfi|lui]] [[art|le]] [[hini|celui]]|| [[R]] [[redeg|courait]] [[war-lerc'h|après]] ||[[art|un]] [[plac'h|fille]] [[yaouank|jeune]] ||[[di-|in]].[[anavezout|connu]] | ||
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|||colspan="4" | 'C'est lui qui courait après une jeune fille inconnue.' |||| ||||||||''Standard'', [[Drezen (1990)|Drezen (1990]]:45) | |||colspan="4" | 'C'est lui qui courait après une jeune fille inconnue.' |||| ||||||||''Standard'', [[Drezen (1990)|Drezen (1990]]:45) |
Version du 19 février 2019 à 18:17
Les structures clivées sont des phrases complexes comme en (1) qui articulent deux propositions dont le contenu sémantique serait exprimable en une seule, avec les mêmes conditions de vérité. L'effet obtenu est une focalisation.
(1) | TANGI eo | a gar | Agar. | ||
Tangi est (pro) | R1 aime | Agar | |||
'TANGI aime Agar, C'est Tangi qui aime Agar.' | Standard |
Cette phrase est entièrement équivalente à la proposition simple TANGI a gar Agar tant que l'intonation de focus y est bien réalisée. Les structures clivées sont très usitées en breton, avec des clivées simples ou récursives, faisant ou non usage des tournures en an hini comme en (2). Pour une analyse des clivées en breton, se reporter à Timm (1987b).
(2) | [ Zé | o | -ê ] | ||||
Se | an hini | eo. | |||||
ça | le celui | est (pro) | |||||
'C'est ça.' | Goëlo et Standard, Koadig (2010:101) |
Clivées simples
Les clivées simples se composent du constituant de la phrase qui est focalisé, suivi d'une copule, puis, plausiblement, d'un pronom vide pro qui est la tête de la relative.
(1) | A-hont eo | ema | e vag. | ||
là-bas est (pro) | se.trouve | son1 bateau | |||
'C'est là-bas que se trouve son bateau.' | Trégorrois, Gros (1984:140) |
accentuation
Gros (1984:125): "Eo (c'est, ce sont) marquant l'emphase, se place toujours après le mot (quel qu'il soit) ou le membre de phrase sur lequel on veut attirer l'attention. C'est ce mot ou ce membre de phrase qui porte l'accent tonique principal."
Gros (1984:140): "C'est le mot mis en relief par eo ou an hini qui porte l'accent tonique principal, quel que soit ce mot."
arguments de clivées
On peut cliver en breton beaucoup plus de types d'éléments qu'en français. On trouve par exemple des syntagmes verbaux (VP) en clivées, ou même des phrases entières.
(2) | [ marsə | wɛ | dawzɛ̃k milin | wɛ ] | |||
marse | 'oa | daouzek milion | 'oa. | ||||
peut-être | R était | 12 million | R était | ||||
'...peut-être que c'était douze millions (- que c'était).' | |||||||
Vannetais (Kistinid), Nicolas (2005:53) |
(3) | N'eo ket | e vijent pounner, | ne sikouront ket eo. | ||||
ne1'est pas | R4 seraient lourd | ne1 secourent pas est | |||||
'Ce n'est pas qu'ils soient lourds, mais ils ne nous aident pas.' | |||||||
Léon, Kervella (2009:107) |
Syntaxe
Clivées complexes
clivées récursives
Les clivées récursives sont à l'origine des bretonnismes tels que C'est tricher que c'est!, Un homme bon que c'était.. Il s'agit d'une enchâssée composée uniquement d'une copule identificationnelle.
(1)a | Derc'hel a rae | da lâret, | mes lard | n'eo ket kig eo. | ||
continuer R faisait | de dire | mais lard | ne'est pas viande est | |||
'Il continuait à dire, mais le lard/le dire n'est pas viande (il y a loin du dire au faire; lâret = lar't).' | ||||||
Le Scorff, Ar Borgn (2011:36) |
(1)b | Ar re-ze | n'eo ket tud int, | ar re-ze | a zo loened. | ||
le ceux-là | ne est pas gens sont | le ceux-là | R est animaux | |||
'Ceux-là ne sont pas des hommes, ce sont des brutes.' | ||||||
Trégorrois, Gros (1970b:'loen'). |
(1)c. | Ha ind e huilas | uenan i naan ir mour | ha oé ur siren e oé. | |||
et eux R1 vit | un à nager dans.le mer | que était un sirène R était | ||||
'Ils virent quelqu'un nager dans la mer, et c'était une sirène (que c'était).' | Vannetais, An Diberder (2000:97) |
Les clivées récursives focalisent aussi bien les syntagmes nominaux que verbaux.
En (2) et (3), le VP a été antéposé en zone focale dans une clivée au négatif, puis cette clivée négative a elle-même été clivée.
(2) | N' | eo | ket | [ [VP divezvi ]i | eo ] | a reen _ i. | |
ne | est | pas | dessoûler | est | R faisais | ||
'C'est pas dessoûler que je faisais (je ne dessoûlais pas, au contraire!).' | |||||||
(litt: 'C'est pas dessaouler que c'est que je faisais') | |||||||
Trégorrois, Gros (1984:xx) |
(3) | A-dra-zur | [n'eo ket [VP | braoaad ar horn-bro ]i | eo ] | a zo bet | greet _ i | |
à-chose-sur | ne est pas | embellir le 5coin-pays | est | R est été | fait (embellir le coin-pays) | ||
'Pour sur, ça n'a pas embelli le coin.' | |||||||
(litt: c'est pas embellir le coin que c'est qui a été fait') | |||||||
Léon (Cléder), Seite (1998:135) |
En (4), c'est le DP sujet d'un verbe passif, un ene, mat pe fall, qui est clivé. L'ensemble de la phrase est introduit par un mot interrogatif.
(4) | Daoust ha | n'eo ket | evel [DP un ene, mat pe fall ]i, | eo | a zo bet roet | _i | d'al louzaouenn? |
est-ce que | ne est pas | comme un âme bon ou mauvais | est | R est été donné | à.le plante | ||
'N'est-ce pas comme une âme, bonne ou mauvaise, qui a été donnée aux plantes?' | |||||||
Standard, Kervella (1993:87) |
Les clivées récursives ne sont pas restreintes à la répétition d'un même verbe. En (5), il s'agit de deux formes différentes du verbe 'être', emañ et eo.
(5) | N'ema ket | e-kreiz an avel-suill | eo! | ||||
ne est pas | au-milieu le vent brûlant | est | |||||
'Il n'est pas au milieu du vent brûlant (il est à l'abri).' | Trégorrois, Gros (1984:162) |
La lecture peut être nettement contrastive par rapport à une entité saillante présente dans la phrase. En (6), l'entité contrastée a juste été introduite antérieurement dans le texte (il s'agit de rats qui tombent sur le locuteur).
(6) | ...hag e tihunan | en un taol, | é soñjal ema | un obus bennak eo. | |||
et R réveille | dans un coup | à penser est | un obus quelconque est | ||||
'...et je me réveille brusquement, en pensant que c'est quelque obus.' | |||||||
Vannetais, Herrieu (1994:223) |
clivées en an hini
XP eo an hini eo
(3) | [PredP | skañv ] end-eeun | eo | an hini | e oa | evit kouezhañ warne. | |
léger effectivement | est | le celui | R était | pour tomber sur.eux | |||
'Il était effectivement leste pour leur tomber dessus.', | Standard, Ar Barzhig (1976:19) |
(4) | [PredP | Ur baganez ] | eo | an hini | e oa | kentoc'h, | stag ma | oa | ouzh brizhkredennoù... |
un païenne | est | le celui | R était | plutôt | attaché que | était | à superstitions | ||
'C'était plutôt une païenne, attachée qu'elle était à des superstitions.' | |||||||||
Trégorrois (Kaouenneg)/Standard, ar Barzhig (1976:38) |
XP eo an hini
(4) | [PredP | d'ar mare-se ] | eo | an hini | ez ae ar maouezed | d'e laerezh. |
à1'le moment-ci | est | le celui | R4 allait le femmes | à1 le1 voler | ||
'C'est à ce moment là que les femmes allaient le voler.', | Standard, Ar Barzhig (1976:27) |
XP an hini
(1) | Ramp | 'n hini | a oa | ar bizin. | ||
glissant | le celui | (est) (pro) | R était | le goémon | ||
'C'est (surtout) que le goémon était glissant.' | Trégorrois, Gros (1984:117) |
(2) | Dezo | 'n hini | vo | ar gwasañ. | ||
à.eux | le celui | (est) (pro) | (R) sera | le pire | ||
'C'est à eux que ce sera le pire.' | Trégorrois, Gros (1984:120) | |||||
'(Ce sont eux qui en pâtiront le plus)' |
(3) | Eñ an hini | a rede war-lerc’h | ur plac’h yaouank | dianav. | ||||||
lui le celui | R courait après | un fille jeune | in.connu | |||||||
'C'est lui qui courait après une jeune fille inconnue.' | Standard, Drezen (1990:45) |
XP an hini eo
(2) | Ul lazh | an hani eo | al labour-se. | ||||
un meurtre | le celui est | le travail-là | |||||
'Ce travail-là est tuant, c'est un crève-bonhomme.' | Le Scorff, Ar Borgn (2011:50) |
(3) | Kement-se | n'eo ket debriñ | mes krignat | an hani eo. | ||
autant-là | ne'est pas manger | mais grignoter | le celui est | |||
'Cela n'est pas manger mais grignoter.' | ||||||
Le Scorff, Ar Borgn (2011:57) |
X an hini vs. * X eo
Finalement, une tête verbale peut aussi être clivée dans les structures en an hini, comme noté dans Trépos (2001:§438). Press (1986:189) pointe le contraste avec les clivées en eo, qui sont agrammaticales avec une tête verbale antéposée. Il ajoute que la donnée grammaticale Gwelout 'ni 'ra Yann e vignonez "peut être considérée comme non-standard".
(3) | Gwelout | 'ni / * eo | ra Yann | e vignonez. | |
voir | fait Yann | son1 amie | |||
'Yann VOIT son amie.' | |||||
'Yann actually sees his girlfriend' | Anglais, Press (1986:189) |
grammaticalisation en particule de focus
Puisque l'impact de la structure clivée sur la structure informationnelle est un focus, on peut se demander si la forme réduite ni, suivie ou non de la copule, ne grammaticalise pas parfois en une particule enclitique de focus.
(2) | ['ʃãn | ni ɛ | nøz ˌlarɛd | ãn 'draˌhe] | |
Chann (an hi-?) | ni eo | ’neus laret | an dra-se | Equivalent standardisé | |
Jeanne (le ?) ni est | a dit | le chose-ci | |||
'C'est Jeanne qui a dit cela.' | Plozévet, Goyat (2012:232) |
Certains dialectes fournissent des arguments morphologiques pour une telle hypothèse. A Plozévet, par exemple, la réalisation de hini est /hwɛ/ en isolation, /ˌɛ/ après un article défini, /'hwi/ lorsque suivi d'un pronom écho, ou bien encore /'ɥi/ et /'wɛ/ en alternance libre après pep. L'élément ni qui apparaît dans les structures de focalisation préverbale est donc morphologiquement distinct de toutes les autres formes de hini.
(3) /'me ni ɛ/
- moi ni est
- 'C'est moi.', Plozévet, Goyat (2012:232)
clivées déontiques
Parfois, le sens de la clivée est clairement déontique (il faut.. il ne faut pas...). Il s'agit sans doute d'une ellipse.
(4) | N'eo ket | chom amañ | eo | da ouroulat. | |||
ne1'est pas | rester ici | est | pour1 bavarder | ||||
'Ce n'est pas rester à bavarder [que c'est (qu'il faut faire)]' | Léon, Kervella (2009:207) |
Variation dialectale
emañ... eo... en vannetais
En vannetais, la copule peut être réalisée sous la forme emañ. En (1), Herrieu utilise la première copule sous cette forme, puis la seconde sous la forme eo.
(1) | Ar pezh a zo evidomp | ema an anoued eo: | na yen eo! | ||||
le ce.que R y.a pour.nous | est le froid est | que froid est | |||||
'Ce qu'il y a pour nous, c'est un coup de froid: qu'il fait froid!' | Vannetais, Herrieu (1994:15) |
L'argument de la clivée peut être lui-même la tête d'une relative.
(2) | Pa hoc’h eus drougoù | ema [ | an toemmder | eo kentoc’h [ | hoc’h aesa | evit m’ema | an dour yen ]]. |
quand 2PL a maux | est | le chaleur | est plutôt | vous guérit | que que'est | le eau froid | |
'Quand vous avez des douleurs, c’est la chaleur qui vous guérit plutôt que l’eau froide.' | |||||||
Haut-vannetais (JMh), Louis (2015:233) |
Horizons comparatifs
En français de Basse-Bretagne, les clivées en que c'est / que c'était sont très répandues. On peut cliver des éléments impossibles à cliver en français standard, comme une phrase entière, imposant alors un focus sur son entier, ou un adjectif:
- Vous êtes allée à votre voiture que c’est!
- (Brest, infirmière hôpital Morvan, [10/01/2014])
- Aujourd'hui, il passe par Brest, que c'est, et moi, je veux encourager mon favori.
- (Brest, Péron 2001:84)
- Joli que c'était, à ouar et à entend', qu'on aurait dit une vraie ritraite aux flambeaux., :::: (Brest, Péron 2001:62)
Structure informationnelle
Les clivées sont indissociables d'un effet de focus, mais le type particulier de ce focus serait à analyser. En grec chypriote, par exemple, les clivées imposent un focus identificationel qui prédit la possibilité des quantifieurs compatibles avec ce focus (Kanikli 2016).
Terminologie
Le terme anglais pour clivée est cleft.
Bibliographie
breton
- Timm, L. 1987b. 'Cleft structures in Breton', Word, 38:127-142.
horizons théoriques
- Declerk, R. 1994. 'The taxonomy and interpretation of clefts and pseudoclefts', Lingua, 9 (1):183–220.
- Dikken, Marcel den. 2005. 'Specificational Copular Sentences and Pseudoclefts', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol IV, chap.61.
- Kanikli, Antri. 2016. 'The distribution of quantifiers in clefts', Lingua 171:24-36.
- Wirth, J. 1978. 'The derivation of cleft sentences in English', Glossa 12(1 ):58-82.