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De Arbres
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* Gros, Jules 1970. [[TBP.I]] ''Le trésor du breton parlé I. Le langage figuré'', chapitre II.
* Gros, Jules 1970. [[TBP.I]] ''Le trésor du breton parlé I. Le langage figuré'', chapitre II.
* [[Ledunois (2002)|Ledunois, J. P. 2002]]. ''La Préposition Conjuguée en breton'', thèse, Skol-Veur Roazhon, Atelier National de Reproduction des Thèses. (p.234-)
* [[Ledunois (2002)|Ledunois, J. P. 2002]]. ''La Préposition Conjuguée en breton'', thèse, Skol-Veur Roazhon, Atelier National de Reproduction des Thèses. (p.234-)
Attention, les pronoms objet proclitiques sont traités dans [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:'''251-257''') sous le titre des possessifs.


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Version du 14 janvier 2015 à 13:14

La préposition a1 est parfois utilisée indifféremment de la préposition eus, dont elle fournit le radical lors d'une incorporation pronominale.

La préposition a est aussi une préposition outil, ou préposition support, qui est sémantiquement transparente et semble n'avoir pour fonction que de fournir un matériel morphologique pour une incorporation pronominale.


Morphologie

mutation

La préposition a1 déclenche une lénition sur le groupe nominal qui la suit.


(1) Darn a red a1-gleiz, darn all a1-zehou... (< Kleiz, Dehou)
certain R court à-gauche certain autre à-droite
'Certains courent à gauche, d'autres à droite.'
Trégorrois (Kaouenneg), ar Barzhig (1976:36)


On trouve parfois des exceptions.


(2) mǝ anawa mat ar vwes nɛ͂n zi ʃom akosti
Me 'anava mat ar vaouez an hani 'zo ' chom a-kostez.
moi connait bien le 1femme le hini est à rester à-côté
'Je connais bien la femme qui habite à côté.', Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)

composés

La préposition a apparaît dans de nombreux composés prépositionnels:


(1) [ betad ǝrǝt avǝzǝl mi frasǝt ]
Betaat a rit a-vuzul m'eh vrasait.
bête.devenir R faites à-mesure que R grandissez
‘Vous devenez plus bête en grandissant.’ Bas-vannetais, Nicolas (2005:26)


voir aussi a-raok, a-enep, a-walc'h, a-benn, a-bouez, a-drenv, a-dreuz, a-bosubl...

variation dialectale

Les pronoms incorporés apparaissent sur la droite du composé. Il y a une petite variation dialectale dans la réalisation du pronom incorporé.


(2) 1SG a-han-on/ a-han-an 1PL a-han-omb/ a-han-amb
2SG a-han-ous/ a-han-as 2PL a-han-oh
3SGM a-ne-hou 3PL a-ne-hai
3SGF a-ne-hi Vannetais du XIX°, Guillome (1836:90-91): 'de', a, ag.


(2) C'hwi a gemera ac'hanin e'it un azen pe petra?
vous R prend P.moi pour un âne ou quoi
'Tu me prends pour un âne ou quoi?' Le Scorff, Ar Borgn (2011:110)

Préposition spatiale

de provenance

La préposition a1 peut avoir un sens de provenance. Elle provoque la lénition (cf. a1-gleiz, 'à droite', carte [1] de l'ALBB).


(1) Nikun ne da tre, 'met a1 Vreiz e ve.
personne ne va postpos. sauf de Bretagne R serait
'Personne ne pénètre, à moins d'être né en Bretagne.' Léon, Kerrien (2000:12)


Sous ce sens de provenance, elle sert à composer des prépositions complexes comme a-zindan.


 Ledunois (2002:250):
 
 Il est souvent difficile pour les prépositions dérivées formées sur a de savoir 
 s'il faut en faire une préposition à part entière ou une variante de la préposition de 
 base. La question se pose en particulier lorsqu'on peut utiliser indifféremment l'une ou 
 l'autre. Avec le couple dindan/a-zindan le doute n'est guère permis dans la mesure où
 la première suppose l'absence de mouvement et la seconde la présence de mouvement.


La préposition a1 peut apparaître devant un syntagme nominal sélectionné par la préposition eus (Le Gonidec1838 :186-7) si le nom est indéfini ou si c'est un nom propre.


(2) An buhez Sant Gwenole abat kentaf eus a Landevennec.
le vie saint Gwenole abbé premier P P Landevennec
'La vie de Saint-Gwénolé premier abbé de Landévennec.' Léon (Berrien), 1580 GW.

préposition spatiale statique

Utilisée avec des désignations de directions, a n'a pas de sens de provenance:


(3) Darn a red a-gleiz, darn all a-zehou...
certain R court à-gauche certain autre à-droite
'Certains courent à gauche, d'autres à droite.'
'*Certains couraient venant de la gauche, d'autres venant de la droite.' Trégorrois (Kaouenneg), ar Barzhig (1976:36)


La préposition a a aussi un sens spatial statique dans les prépositions complexes telles que a-us (da) ou a-zioc'h, 'au-dessus'.

variation dialectale

Gros (TBP.I) note que dans le sens spatial, la préposition a a été remplacée en trégorrois moderne par euz ou deuz, et quelque fois par deuz a.

Préposition outil

Parfois, a semble être une préposition à tout faire, semblable en cela au français 'à' ou 'de'.


(1) Eur marmouz bennag e-nevoa libistret ar prenestr a goh-saout.
un singe quelconque 3SGM-avait barbouillé le fenêtre de merde-vache
'Quelque galopin avait enduit la fenêtre de bouse de vache.' Gros (1970b:§'libistra')


(2) Hennez a oa e bord eur batiment a lïen.
celui.ci R était dans bord un bâtiment à voile
'Celui-là était à bord d'un navire à voiles.' Gros (1970b:§'lien')


C'est aussi la préposition qui apparaît sous la portée de la négation (n'eus ket a vara, 'Il n'y a pas de pain'), des comparatifs de supériorité comme en (3) ou des quantifieurs comme en (4).


(3) Aliesoh a grohen leue a ya da zeha evid a grohen buoh.
souvent.plus de peau veau R va à sécher que de peau vache
'On fait sécher plus de peaux de veaux que de peaux de vaches.'
(Il meurt plus de jeunes que de vieux) Gros (1970b:§'leue')


(4) É nep tu ne vehé kavet kement a sord guskemanteu èl é Breih.
en nep côté ne serait trouvé autant de sorte costumes comme en Bretagne
'Nulle part on ne trouverait autant de sortes de costumes qu'en Bretagne.' vannetais, IB. (1910:19)


tournure distributive

(4) Kontit deom pep a1 gontadenn.
contez à.nous chaque de histoire
'Contez-nous chacun une (votre) histoire).' Cornouaillais (Bigouden), Trépos (2001:§317)

Préposition support

La préposition a1 peut aussi être utilisée comme support morphologique par défaut pour un pronom clitique. Elle est alors explétive, c'est-à-dire sémantiquement vide.

Le Gléau (1973:17) appelle 'pronom composé tonique' le composé morphologique que la préposition support a forme avec un pronom incorporé.


morphologie

La préposition support a apparaît toujours avec son objet pronominal incorporé. Elle n'apparaît jamais lorsque son objet est inincorporable (nom lexical).

support d'objet pronominal postverbal

La préposition a1 sert prototypiquement de support d'incorporation à un pronom objet postverbal comme en (1).


(1) Te, marteze a hellfe kana anezi.
toi peut.être R pourrait chanter P.elle
'Toi, tu pourrais peut-être la chanter.' Léon, (Cléder) Seite (1998:21)


Le pronom apparaît incorporé dans la préposition. En (2), le quantifieur flottant oll a vu son complément 3PL être évacué de sa position in-situ pour s'incorporer en un fondu morphologique dans la préposition explétive a.


(2) Greet am-eus anez-oi oll _i .
fait R.1SG-a P.elles tous (elles)
'Je les ai toutes faites (les troménies).' Léon, (Cléder) Seite (1998:21)


distribution

En (4), on peut voir que la préposition accueillant l'objet pronominal 3SGF, de racine a-, apparaît après la préposition accueillant l'objet indirect.


(4) Méd lavar din anezi da welet.
mais dis à.moi a.elle pour voir
'Mais dis-la moi pour voir.' Léon, (Cléder) Seite (1998:7)


support de résomptif

La préposition a peut aussi accueillir un pronom résomptif.


(2) Hemañx a oa eur paotr fin anezañx.
celui.ci R était un gars fin P.lui
'Celui-ci était malin.' Léon, (Cléder) Seite (1998:8)


(3) [mə zo ˈdɛd a bɛn da ˈgõpʁən ˈnaɔ̯̃ a ˈpoʃə nø ʃə ˈkoːs tijõ ˌnõ]
Me zo deuet a-benn da gompren anezhañ a-bosubl n'en deusx ket kaozeet ouzhin anezhañx.
moi est venu à.bout de comprendre P.lui même.si ne' R.3SG a pas parlé à.moi P.lui
'J'ai réussi à le comprendre quand bien même il ne m'a pas parlé.'
Moëlan, Cheveau & Kersulec (2012-évolutif:Moëlan,'a-bosubl')


variation dialectale

Une alternative à l'incorporation dans la préposition support a est de cliticiser le pronom objet devant la tête verbale. Cette possibilité est archaïsante en standard et pour les dialectes du centre, surtut sur les verbes tensés.


(3) Marijo neus (o frenet / prenet anezho).
Marijo a.3SG les acheté / acheté P.eux
'Marijo (les) a achetés.' Douarnenez, [HD 2010]


La répartition géographique des stratégies d'incorporation du pronom faible objet sont documentées par l'ALBB:

carte 288, traduction de 'Si je la voyais je lui dirais.'.
carte 287, traduction de 'Tu ne peux pas me voir'.


Dans tous les dialectes, les objets proclitiques sont incompatibles avec le verbe kaout/endevout, 'avoir' lorsqu'il est conjugué. La seule option avec ce verbe, lexical ou auxiliaire, est donc une préposition a support. En (4), le verbe infinitif kaout reçoit un objet proclitique va. Cette option n'est pas disponible plus loin dans la phrase puisque le verbe est conjugué et que la place proclitique est occupée par le marqueur du sujet. C'est la forme ac'hanon qui apparaît alors.

(4) pa na de quet falvezet deoc'h va c'haout evit ho Salver,

ho pezo ac'hanon da viana evit ho Parner., breton 1718, RP.:142.


Diachronie

Hemon (2000:§69) signale de rares exemples d'objets en préposition support en moyen-breton.

palaour na ezneuez muy anezi, 1576, Ca. n.34
na saludet quet à Nezafu, Gk.II:166


Favereau (1997:§248) situe le glissement de la forme proclitique à la préposition support "courant 17°, surtout après 1700". Hemon (2000:§69) considère que cette forme se répand nettement seulement à partir de la seconde moitié du XVIII° siècle.

Favereau (1997:§248) propose que le basculement s'est opéré à partir de la forme sémantiquement partitive de la préposition a: Kemerit anezhi aurait glissé de 'Prenez-en' en 'Prenez-la', avec en réaction une distinction de la lecture partitive par l'utilisation de la préposition diouzh, Kemerit diouti. Cependant, les exemples donnés par Hemon en moyen-breton montrent clairement des référents animés, ce qui montre qu'à cette date et au moins dans certains dialectes, la préposition support élait utilisée hors de la lecture partitive.

Quelle que soit la date du basculement, celui-ci est net en breton moderne standard, en cornouaillais ou en Trégor. Le Brigant (1779:21), à Tréguier, donne èn a sko anon, eñ a sko ac'hanon, 'Lui me frappe'. Ce basculement n'a pas eu lieu en vannetais.


quid des objets du verbe kaout?

Quid alors des objets du verbe kaout conjugué avant le XVIII°?

Comment ces objets étaient-ils réalisés puisque la place proclitique y est interdite? En particulier, l'option qui est possible en vannetais moderne d'objet direct après le verbe 'kaout' est restreinte à la personne 3, donc comment étaient réalisés les objets du verbe 'avoir' aux autres personnes?

Gant queuz bras e-m-eus ef clasquet (J.:189), moyen breton
Cafet ... onn-eux ef (J.:101), moyen breton

Bibliographie

  • Cheveau, L. 2007b. 'The Direct Object Personal Pronouns in Lorient Area Breton', Studia Celtica 41, Cardiff: University of Wales Press.
  • Ernault, E. 1901. 'Sur les mots bretons get (a), gant, rak, meurbet, a, da, douaren', Zeitschrift für Celtische Philologie 3, 304-307.
  • Gros, Jules 1970. TBP.I Le trésor du breton parlé I. Le langage figuré, chapitre II.
  • Ledunois, J. P. 2002. La Préposition Conjuguée en breton, thèse, Skol-Veur Roazhon, Atelier National de Reproduction des Thèses. (p.234-)


Attention, les pronoms objet proclitiques sont traités dans Favereau (1997:251-257) sous le titre des possessifs.