Litote

De Arbres

La litote est une figure de style qui dit le moins pour exprimer le plus. C'est un procédé d'atténuation de ce qui est dit littéralement, et ce afin d'intensifier ce qui est exprimé. Cette figure est très commune en breton (Fave 1998:122), et parfois complètement grammaticalisée.

Par effet de litote, 'ne pas être malade à l'idée de ne pas faire quelque chose' entre dans une construction dénotant un manque net de volonté ou d'envie de faire ce quelque chose.


(1) N'oun ket klañv defot mond er-meaz.
ne1 suis pas malade à.défaut.de aller dehors
'Je n'ai pas très envie d'aller dehors.'
Léonard, Kervella (2009:109)


Effets stylistiques

(2) Ne vefe ket droug ennon bezañ aet kuit ac'hann.
ne1 serait pas peine en.moi être all.é parti de.là
'Je ne serai pas fâché d'être hors d'ici.'
Standard, Kervella (2002b:60)


(3) N'ema ket diwar an dour.
ne1 est pas de le eau
'Il n'a pas bu que de l'eau.'
Trégorrois, Gros (1984:487)


(4) N'omp ket taer ken war ar c'hirri-nij… '
ne1 sommes pas intense plus sur le 5char-vole
'L'avion, euh… Nous n'y tenons pas tellement… '
Standard, Kervella (2002b:62)


(5) A : Eur paotr speredet eo ar mab ? B : Ya, n'eo ket sod a-bez, pell ahano !
un gars esprit.é est le fils oui ne1 est pas sot complètement loin de.là
'A : - Votre fils est intelligent ? B : - Oui, il n'est pas complètement sot, loin de là !'
Léonard (Cléder), Fave (1998:122)


Tournures grammaticalisées

Une expression stylistique qui pratique un effet de litote peut être grammaticalisée dans la langue. C'est un point de non-retour où l'expression ne perd sa signification littérale. Sémantiquement, elle n'est plus compositionnelle. Le module sémantique lui assigne un sens en bloc, et non plus à partir d'un calcul de ses constituants.

Un exemple de grammaticalisation courante d'une litote est probablement Ne c'houlan ket qui signifie 'Je refuse (de)', qui ne signifie plus 'Je ne demande pas (à)'. Il y en a d'autres, comme meur a dra, littéralement 'plus d'une chose' mais utilisé pour traduire 'beaucoup'. La phrase en (1) est incorrecte avec un contexte où les voisins s'échangent deux choses, ce qui serait assez pour la justifier dans son sens littéral.


(1) Gant an amezeien e veze rannet meur a dra.
avec le voisin.s R4 était partag.é plusieurs de1 chose
'On partageait beaucoup avec les voisins.'
Cornouaillais (Ploéven), Gouérec (2018:12)

variation dialectale

Certaines tournures sont restreintes à un dialecte, comme N'eo ket a boan 'Il ne faut pas' (< 'ce n'est pas la peine'), ou pasabl 'souvent' (<'un peu').


(2) N'eo ket a boan kaoud aon, kwa.
ne1 est pas de1 peine avoir peur quoi
'Il ne faut pas avoir peur, quoi.'
Trégorrois, Blanchard (2016)


(3) Implijet ' vez pasabl an teknik diwezhañ-mañ e broioù Europa ar Reter.
employ.é R1 est souvent le technique dernier-ci en pays.s Europe le est
'Cette dernière technique est employée souvent dans les pays d'Europe de l'Est.'
Vannetais, Ar Rouz (2013a:21)

À ne pas confondre

Une antiphrase aurait dit sémantiquement le contraire exact de ce qui est exprimé en discours, en utilisant l'ironie pour que l'interlocuteur ne se trompe pas sur l'intention (yeux au ciel : Je meurs d'envie d'aller dehors). Un euphémisme est aussi une figure de discours qui joue sur l'atténuation, mais contrairement à la litote son effet n'est pas d'intensifier une lecture (Il fait un temps moyen (quand il pleut des hallebardes)).


Bibliographie

  • Le Berre, Yves. 2011. 'La force et l'élégance. Les litotes dans la Passion bretonne de 1530', Nelly Blanchard, Ronan Calvez, Yves Le Berre, Daniel Le Bris, Jean Le Dû, Mannaig Thomas (dir.), La Bretagne Linguistique 16, CRBC, 123-150. texte.