Différences entre les versions de « Construction transitive explétive; Bez' préverbal »
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Trépos précise qu'en (17), la présence de ''bez'' met l'accent non seulement sur l'actualité de la recherche, mais "sur la présence de Perig dans le bois". On pourrait donc penser à une particule de focus sémantiquement vide, dont la fonction serait de transmettre l'effet de focus à son verbe associé | Trépos précise qu'en (17), la présence de ''bez'' met l'accent non seulement sur l'actualité de la recherche, mais "sur la présence de Perig dans le bois". On pourrait donc penser à une particule de focus sémantiquement vide, dont la fonction serait de transmettre l'effet de focus à son verbe associé. | ||
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|( | |(1)|| ''Bez''' || ema ||Perig o klask e vreur ||er hoad. | ||
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Cependant, on connait des langues comme le nupe qui ont une telle particule de focus (Kandybowicz 2008[[Kandybowicz 2008:37|:37]]), et elles sont sémantiquement compatibles avec la négation. Or, ''Bez'' n'est pas compatible avec la négation. | |||
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Version du 14 novembre 2015 à 12:29
Cette fiche documente les occurrences de Bez', l'infinitif du verbe 'être' (ou de sa forme abrégée) devant un verbe fléchi.
(1) | Bez’ | e vo pesked | da goan. | |||||||
bez | R sera poissons | pour1 souper | ||||||||
'Il y aura du poisson à souper.' | Cornouaillais, | Trépos (2001:§440) |
- Dans quel contexte cette particule induit-elle un effet sémantique particulier?
- Y-a-t-il des dialectes où cette particule produit obligatoirement un effet de verum focus du type 'Le fait est que...'?
- Peut-elle être sémantiquement vide?
- Est-elle restreinte à certaines configurations de discours?
- Est-elle restreinte à certains environnements syntaxiques (présence du verbe 'être' en verbe lexical, présence de la particule aspectuelle 'bet', etc...)
Morphologie et variation dialectale
La réalisation morphologique de la particule préverbale varie actuellement de dialecte en dialecte, avec la réalisation de l'infinitif du verbe 'être': bezañ.
La carte 028 de Le Dû (2001), traduction du français Il y a, montre un bez' préverbal sur toute l'ère brittophone (la présence de réponses utilisant l'auxiliaire ober ('faire') suggère que le protocole demandait la traduction d'une tournure telle que il y a de la pluie). Les formes observées sont [bø], [be(z)], [bɛ], [bə], [bid], ou [bu(d/t)].
(2) | Bea | vez | d'ober | war an douar patatez-mañ. | |||
être | R est | à'faire | sur le terre patates-ci | ||||
'Il y en a à faire, sur cette terre à pommes de terre!' | |||||||
> 'Il y a beaucoup de travail.' | Le Berre & Le Dû (1999:44) |
A noter que différentes formes peuvent manifestement être vivantes au même lieu géographique. Pour Riec sur Belon, Le Dû (2001:§028; pt 134) donne [bə zo] alors que Mona Bouzeg y donne Boût oa.
(3) | Boût 'oa | avel gouez. | ||||||
être y.avait | vent fou | |||||||
'Il y avait un vent fou.' | Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:35) |
Distribution
Bez est toujours directement devant l'élément tensé, et plus précisément devant le rannig. Il apparaît le plus souvent comme le seul élément dans la zone pré-tensée, mais certains éléments peuvent l'y précéder.
compatibilité avec le nom pivot d'une construction du faux sujet
En (2), on voit le nom pivot d'une construction du faux sujet précéder bez' dans la zone pré-tensée. Le nom pivot est repris anaphoriquement par le pronom résomptif incorporé dans enno.
(2) | Politikerezh ha broadelouriezh, | bez' e pege | Frañsez Kervella | a-drovriad enno (...) | |||
politique et nationalisme, | BEZ R collait | F.K. | à-bras.le.corps dans.eux | ||||
'Frañsez Kervella empoignait à bras-le-corps politique et nationalisme.' | |||||||
Standard, Denez (1993:13) |
sites d'apparition
Bez se trouve en matrices comme en enchâssées, après le complémenteur ha (10, 11, 12). Bez se trouve encore après ha en interrogatives (13).
(10) | Lavar din | ha | bez’ e teui. | |||||||
dis à.moi | si | bez R4 viendras | ||||||||
'Dis-moi si tu viendras.' | Cornouaillais, | Trépos (2001:§592) |
(11) | N'ouzon ket | ha | bez’ e vo kreñv a-walh ar jadenn. | ||||||
ne1 sais pas | si | bez R sera fort assez le 1chaîne | |||||||
'Je ne sais pas si la chaîne sera assez forte.' | |||||||||
Cornouaillais, Trépos (2001:§592) |
(12) | Me va-unan | ne | ouien | ket ha | bez’ e oa ac’hanon. | |||
moi reflex | ne | savais | pas si | bez R était P.moi | ||||
'Moi-même je ne savais pas si c'était moi.' | ||||||||
Hemon (1962:64), cité par René Le Gléau (1973:75) |
(13) | Daoust ha | bez’ | e c'hallfec'h [...] | kas ac'hanon | davet an aotrou K? | |||
Q | bez | R pourriez | envoyer P.moi | à le monsieur K | ||||
'Pourriez-vous me mener à monsieur K?' | ||||||||
Standard, Dupuy (2007:39) |
Voir aussi, pour d'autres exemples toujours après ha:
- en léonard, Kerrien (2000:8)
- en breton central par le traducteur de Cosey, Hag ar menez a gano evidoc'h, Jonathan 2, p.29.
incompatibilité avec la négation
Les phrases qui contiennent la particule bez' ne sont pas compatibles avec la négation (Press 1986:193).
Motivation d'insertion
Le breton est une langue 'à verbe second', aussi appelée V2. Cela signifie que la position canonique du verbe tensé est la seconde position de phrase. Parfois, l'item bez/bout semble entièrement ad-hoc, justifié uniquement par la préservation de l'ordre à verbe second. Il est cependant difficile de prouver que cette particule (?) est insérée uniquement pour obtenir un ordre V2, car cela demanderait de prouver que la structure informationnelle de la phrase n'en est pas impactée.
distribution hors des contextes de dernier recours pour V2
Bez ne peut pas être uniquement et dans tous les cas un item de dernier recours permettant de satisfaire V2, car devant le verbe 'emañ', qui est un des rares verbes à pouvoir être placé en initiale de phrase, on peut tout de même le trouver.
(1) | Bez | ema | Perig o klask e vreur | er hoad. | |||||
bez | est | Perig à4 chercher son1 frère | dans.le 5bois | ||||||
'En ce moment, Perig est occupé à chercher son frère dans le bois.' | Cornouaillais, | Trépos (2001:350) |
De même, on peut trouver la forme bout après un complémenteur satisfaisant indépendamment à l'ordre V2 (à moins que parskan soit restreint aux ordres V3).
(2) | /parskan | bud əwaj | e-rgaer | bijənoX ẃidon... | ag əjaleče | raportiɲ / |
parce.que | expl R.y.avait | dans.le foyer | petit.plus que.moi | que R.pouvait.pas | rapporter | |
'Parce qu'à la maison il y a avait des plus petits que moi qui ne pouvaient pas rapporter (de l'argent).' | ||||||
Groix, Ternes (1970:248) |
Impact sémantique
Leclerc (1986), suivi par Press (1986:193), signale un effet emphatique "qui attire l'attention sur le verbe".
Leclerc (1986:69) 93. - Dans les temps simples, toutes les formes ordinaires et même les formes d'habitude [du verbe 'être'] peuvent être précédées de l'infinitif bean toutes les fois que, pour attirer l'attention sur le verbe plutôt que sur le sujet ou sur l'attribut, on veut le mettre en tête de la proposition: on a ainsi une sorte de conjugaison que l'on appelle 'emphatique'. bean e vin fur, /être je serai sage/, 'je serai sage' au lieu de: me a vo fur ou fur e vin.
Leclerc (1986:75) Toutes les formes des temps simples de am eus, comme celles du verbe bean, peuvent être précédées de l'infinitif bean, chaque fois que l'attention doit être attirée sur le verbe et non sur le pronom: bean am oa, /être à moi était/, 'j'avais' au lieu de: me am oa
verum focus
Le Gléau (1973:45), Trépos (2001:§440), Gros (1984:110), Bouzeg (1986:35), Favereau (1997:§443) et Chalm (2008:212) notent tous ce qui semble un 'verum focus' sur le verbe lorsqu'il est précédé de bez.
Le Gléau (1973:45): "Originellement l'indicatif radical bez (ou l'infinitif apocope bez') signifie: 'effectivement, réellement'."
(1) | Bez’ez | eus tud | hag a zo | mat da stagañ | ||||||
bez R | y.a gens | C R est | bon à1 lier | |||||||
'Il y a (vraiment) des gens qui sont fous à lier.' | Trégorrois, | Gros (1984:110) |
(2) | - Ha gwir eo klañv ? | - Ya, | bez ez | eo ! | |||||||
Q vrai est malade | Oui, | bez R+V | est | ||||||||
'- Est-il vrai qu’il soit malade ?' | '- Oui, il l’est réellement.' | Trégorrois, | Gros (1984:110) |
(3) | Boût 'zo | goulou. | ||||||
être y.a | lumière | |||||||
'Il y a bien de la lumière.' | Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:35) |
(4) Ha bez e c’helle ne zeuje ket ?
- 'Se pouvait-il (vraiment) qu’elle ne vînt pas ?', Standard, Drezen (1990:82)
Cette hypothèse est renforcée par l'occurrence de bez en initiale de réponse positive à une question négative.
(5) | A:- | Ne yade ket er gear? | B:- | Neo, bea e yade. | ||||
ne était pas dans.le maison | Si, être R était | |||||||
'A: Il n'était pas à la maison? / B: Si, il était chez lui.' | Sein, Fagon & Riou (2015:44) |
(6)a. | Tad Jeremie: | Gwall-huñvreal | 'peus graet | ... | N'emañ ket amañ! | ||||||
mauvais-rêver | as.2 fait | ne est pas ici | |||||||||
'Tu as fait un cauchemar. Il n'est pas ici.' | |||||||||||
(6)b. | Jeremie: | Met yao! | bez' | 'mañ a'h! | |||||||
mais si | est là | ||||||||||
'Mais si! il est là!' | Sud Cornouaille, An Orignal, p.30. |
Cependant, il est des cas où le 'verum focus' est difficilement postulable, par exemple où bez apparait dans la question même.
(7) | An arhant-se | n'int ket deoh; | bez ez int? | Daoust m'emaint ganeoh. | |||
le argent-là | ne sont pas à.vous | bez R sont | malgré que sont avec.vous | ||||
'Cet argent ne vous appartient pas, n'est-ce pas? Bien que vous l'ayez (sur vous).' | |||||||
Cornouaillais (bigouden), Bijer (2003:17). |
(8) | Bez’ | zo | ur wenodenn all? | ||||||
bez | y.a | un1 sentier autre | |||||||
'Il y a un autre sentier?' | Kavell ar Bodhisattva, Jonathan 4, p.33. |
marqueur de conflit avec l'interlocuteur ?
Les cas de verum focus ainsi que ceux où bez apparaît dans la question même pourraient être accommodés dans la description proposée par Bottineau.
Bottineau (200X:4) : "L’effet de sens le plus courant est une prise en charge assertive renforcée, centrée sur le locuteur et potentiellement en conflit avec l’interprétant, avec valeurs pragmatiques proches de celles de l’interrogation et de do dit emphatique en anglais actuel."
Si cette hypothèse est juste, en (6), bea marque d'abord le doute de A quant à une réponse positive à sa question, ce à quoi B répond par une marque d'opposition à ce doute exprimé.
(6) | A:- | Bea 'di er gear? | B:- | O, bea tre bea. | ||||
être est dans.le maison | O, être doit être | |||||||
'A: Il est à la maison? / B: Oh, il doit y être.' | Sein, Fagon & Riou (2015:44) |
focalisation verbale
Trépos précise qu'en (17), la présence de bez met l'accent non seulement sur l'actualité de la recherche, mais "sur la présence de Perig dans le bois". On pourrait donc penser à une particule de focus sémantiquement vide, dont la fonction serait de transmettre l'effet de focus à son verbe associé.
(1) | Bez' | ema | Perig o klask e vreur | er hoad. | |
bez | est | Perig à chercher son1 frère | dans.le bois | ||
'En ce moment, Perig est occupé à chercher son frère dans le bois.' | |||||
Trépos (2001:§645) |
Cependant, on connait des langues comme le nupe qui ont une telle particule de focus (Kandybowicz 2008:37), et elles sont sémantiquement compatibles avec la négation. Or, Bez n'est pas compatible avec la négation.
(2) | * | Bez' | n' ema ket | Perig o klask e vreur | er hoad. | |||
bez | ne est pas | Perig à chercher son1 frère | dans.le bois | |||||
'En ce moment, Perig n'est pas occupé à chercher son frère dans le bois.' | M.Jouitteau [05.2009] |
Relevés
doublant le verbe 'être' et 'avoir'
Le Gléau (1973:45) dit de Bez qu'on "le trouve partout avec les formes verbales de l'indicatif et du conditionnel de bezañ [, être'] et endevout [,'avoir']." La surreprésentation statistique de l'infinitif (réduit) de 'être' devant les verbes dont 'être' est la racine ('être', 'avoir') pourrait découler (au moins en partie) de cas de redoublement verbal (bez 'e vez... sur le mode de Gouzout a ouzon).
(1) | Bez ez eus | ur c'hategori tud | ha n'ouzon ket | pe o deus nosion eus un dra bennak | pe d'o deus ket. |
Bez R y.a | un catégorie gens | C ne sais pas | ou 3PL a notion P un chose quelconque | ou NEG? 3PL a pas | |
'Il y a une catégorie de personnes, je (ne) sais pas si ils ont une notion de quoi que ce soit.' | |||||
Léon, Mellouet & Pennec (2004:18) |
(2) | Bez' omp | digemeret | en eur zal vraz spontuz. | ||
Bez sommes | accueillis | dans un salle grande terrible | |||
'Nous sommes accueillis dans une salle terriblement grande.' | |||||
Bez' he-deus | da vihanna, | tri-ugent metr hed ha tregont metr lehed. | |||
Bez R.3SGF a | P1 moins | trois-vingt mètre long et trente mètre large | |||
'(En effet) Elle fait au moins 60m de long et 30 de large.' | |||||
Yves Miossec, Dreist ar mor bras, p.7 |
Dans certaines variétés, il semble que l'explétif soit entièrement réductible au doublement de la racine verbale.
Dans kammdro an ankoù, du vannetais Loeiz Herrieu, la réduction de l'infinitif du verbe 'être' est bout et apparaît uniquement devant les verbes 'être' et 'avoir' . On trouve dans le texte de multiples occurrences de bout préverbal, devant 'être' au passé, présent et futur, ainsi que devant le verbe 'avoir', avec un sujet postverbal défini ou indéfini. Aucune occurrence de bout n'apparaît jamais devant un autre verbe.
Dans le breton de Herrieu, la distribution de bout semble donc entièrement circonscrite aux cas de redoublement verbal.
(3) | …un den kozh | hag en deus graet e amzer soudard en Oriant, | bout 'zo 50 vlez 'zo ! | ||
un homme vieux | C R.3SGM a fait son temps soldat P Oriant | être R.y.a 50 an R.y.a | |||
'... un vieil homme qui a fait son service militaire à Lorient, il y a 50 ans!' | |||||
Vannetais, Herrieu (1994:70) |
(3) | Tostennoù Kistinid ha glannoù ar Blaouezh | ha bout | am bo | ar joa d'ho kwelet c'hoazh ur wezh? |
buttes Kistinid et rives [art|le]] Blavet | Q être | R.1SG aurai | le joie de vous voir encore un fois | |
'Buttes de Kistinid et rives du Blavet, est-ce que j'aurai encore une fois la joie de vous voir?' | ||||
Vannetais, Herrieu (1994:215) |
devant d'autres verbes
verbes semi-auxiliaires
(3) | Bez’ e c'helle | an anv-verb, | evel an holl anvioù-kadarn, | beza rener pe renadenn [...] | |
bez R pouvait | le nom-verbe | comme le tous noms-fort, | être sujet ou complément | ||
'Le nom verbal pouvait, comme tous les noms, être sujet ou complément.' | Fleuriot (2001:20) |
(4) | Ha Bez’e ouie | ma zad | kontañ ivez | doare ar brezelioù a save (...) etre ar broioù hag an dud. | ||
et bez R savait | mon père | conter aussi | manière le guerres R montait entre le pays et le gens | |||
'Et mon père savait raconter aussi la façon dont les guerres naissaient entre les pays et les gens.' | ||||||
Cornouaillais, Yann Bijer, Avel gornôg p. 137 |
(5) | Bez’ e rankan | lavared da genta | n'am-eus ket | greet nemed se. | |
bez R dois | dire pour premier | ne1'R.1SG-ai pas | fait seulement celà | ||
'Je dois tout d'abord dire que je n'ai pas fait que cela.' | F. Broudig, kenavo d'am labour, texte. |
verbes lexicaux
Grégoire de Rostrenen (1738) présente cinq alternatives pour conjuguer un verbe en breton, l'une d'elles, la 'quatrième conjugaison', étant par insertion de Bez préverbal (Beza ez rañ un ty, [Bez-R-fais.1SG-un-maison], 'Je bâtis une maison' p.97). Il illustre un paradigme entier avec le verbe 'aimer' (Beza ez carañ, [Bez-R-aime.1SG], 'Je t'aime' p.179).
René Le Gléau, Pierre Trépos, Fañch Elies Abeozen, Visant Fave, Yann Bijer et Eugène Chalm citent tous des phrases avec Bez d'emphase devant des verbes lexicaux.
(6) | Bez’ e kaver | c’hoaz tier-soul | e Breizh. | ||
bez R4 trouve.IMP | encore maisons-chaume | en Bretagne | |||
'On trouve encore des chaumières en Bretagne.' | |||||
Trépos (2001:§440) |
(7) | Politikerezh ha broadelouriezh, | bez' e pege | Frañsez Kervella | a-drovriad | enno (...) | ||
politique et nationalisme, | bez R4 collait | F.K. | à-bras.le.corps | dans.eux | |||
'Frañsez Kervella empoignait à bras-le-corps politique et nationalisme.' | |||||||
Standard, Denez (1993:13) |
(8) | bez' | ez eas | Frañsez Kervella | d'hen gwelout | e 1938 (...) | ||
bez | R alla | à le voir | P 1938 | ||||
'Frañsez Kervella alla le voir en 1938.' | |||||||
Standard, Denez (1993:20) |
(7) | Bez’ e c'hounezas | ur gaer a vrud ha karantez. | |||
bez R4 gagna | un 1belle de1 renommée et amour | ||||
'(le fait est qu') elle gagna affection et renommée.' | |||||
Fañch Elies Abeozen(1991:45) |
(8) | Bez’ e prenis | eul leor | d'am breur | deh. | |
bez R4 achetai | un livre | à mon frère | hier | ||
'J'ai acheté un livre hier à mon frère.' | |||||
Fave (1998:51) |
(9) | Gwir e oa. | Bez’e | weled | an ti gwenn. | |
vrai R était | bez R | voyait.IMP | le maison blanche | ||
'C'était vrai. On voyait la maison blanche.' | |||||
Hemon, An tri boulomig kalon aour:27, cité par Le Gléau (1973:45) |
(10) a. | Bez’ | e | lennan | b. | Lavar din | ha | bez' e teui. | ||
bez | R | lis | dis à.moi | si | bez R viendras | ||||
'Je lis (effectivement)'/ 'Dis-moi si (effectivement) tu viens.' | Chalm (2008:212) |
- Favereau (1997:§443) donne comme licites à Plougastell (citant Y. Gerven comme source), et en Poher: Bez e welez, 'tu vois', et bez' e lennan an anoñsoù ivez [bez R lis.1SG le annonces aussi, 'je lis les annonces aussi'].
Cependant, les données de Plougastell rapportées par Favereau semblent porter à discussion (cf. discussion sur forum kervarker).
Variation dialectale
dans la restriction à certains verbes
Les dialectes varient suivant les verbes avec lesquels on trouve Bez.
- Hingant (1868:74) (du dialecte de Tréguier) semble considérer que l'option d'un Béz préverbal est restreint aux verbes bezañ, 'être', et kaoud, 'avoir'. (L'infinitif utilisé devant l'auxiliaire ober, 'faire' conjugué étant son propre infinitif).
- Gros (1984:110) note que le Bez’ d’insistance est restreint en Trégorrois à trois verbes tensés: les verbes bezañ, 'être', kaoud, 'avoir' et gouzout, 'savoir'.
La question de la variation dialectale dans la possibilité d'avoir recours à bez est posée depuis longtemps par Steve Hewitt (1988, c.p. 2003). Une discussion intéressante existe à ce sujet sur le forum de kervarker.org. Steve Hewitt propose de tester la généralisation que bez préverbal est restreint dans tous les dialectes aux co-occurences avec 'être', 'avoir' et, "à l'ouest du Trégor", aux auxiliaires modaux (rankoud, galloud, dleoud...).
Au vu des données ci-dessus, puisque Bez devant un verbe lexical semble solidement attesté, on peut aménager la généralisation en proposant un continuum allant du Trégor ('être', 'avoir' et peut-être 'savoir'), puis, allant vers l'ouest, une acceptation des modaux pour finalement cerner les zones ou Bez peut-être pré-lexical.
Leclerc (1986:63, fn2) signale qu'en Léon, "l'infinitif beza, 'être', peut s'employer emphatiquement devant tous les verbes. : beza e karan, bez' e karan, /être j'aime/, 'j'aime'.
étudier la variation dialectale
Pour tester l'aire géographique de cette généralisation, se pose alors la question de ce qui est (et n'est pas) un auxiliaire modal:
- gouzout, 'savoir', cité par Jules Gros en fait-il partie?
- rankout, 'devoir', est cité par Hewitt comme n'étant pas licite en trégorrois avec Bez'. Ce verbe n'est-il pas un modal en trégorrois? Quelle évidence pourrions-nous trouver pour supporter cette hypothèse?
- kavout, cité par Trépos, a-t-il une valeur modale en cornouaillais qu'il n'aurait pas éventuellement dans d'autres dialectes? Quelle évidence pourrions-nous trouver pour supporter cette hypothèse?
- quand un dialecte n'a pas la possibilité d'avoir recours à bez pour un 'verum focus', quelle stratégie est employée?
Etant donné que le breton littéraire a Bez pré-lexical, il est aussi possible que la variation ne soit pas intrinsèquement géographique, mais la marque d'un niveau de langue.
Il y a une ressemblance certaine entre les verbes qui tolèrent Bez, et ceux qui peuvent se dédoubler pour remplir la zone préverbale. De dialecte en dialecte, se pourrait-il que les verbes devant lesquels on trouve bez soient les mêmes que ceux qui peuvent se prendre eux-mêmes comme auxiliaires?
rannig associé
Le rannig associé à Bez/Bout varie selon les dialectes.
Pour le trégorrois Gros (1984:110), c'est le rannig e qui est associé à Bez, ainsi que la mutation mixte qu'il déclenche sur le verbe. Le Bozec (1933:6), un manuel scolaire de cours préparatoire, recommande "bez ez eus [qui] équivaut à beza 'zo, moins correct."
Pour le cornouaillais Trépos (2001:§440), c'est le rannig e qui apparaît après Bez', alors que selon Goyat (2012:297), c'est la copule zo associée au rannig a (/be zo 'ty:d/, Bez’ zo tud, 'Il y a du monde.').
En vannetais, Guillevic et Le Goff (1986:56) notent une alternance entre Bout e zou avaleu et Bout es avaleu ('Il y a des pommes').
Horizons comparatifs
SADED (2010:207) cite des exemples en moyen breton devant les verbes tensés kaout, gouzout, dleout, kouezhañ, et gwelout.
La gradation dialectale que l'on constate dans la compatibilité de Bez' préverbal avec le verbe 'être', le verbe 'avoir', les modaux puis tous les verbes lexicaux, se retrouve à une échelle typologique plus large entre les langues pour la disponibilité d'un explétif préverbal (Kayne 2006:23).
En occitan du Couserans, il existe une particule dite d'"insistance" qui se trouve être homophone à Bez' . La présence de cette particule be d'insistance prévient l'apparition de la particule que autrement présente dans les déclaratives.
(1) Be parlarà, se vòu.
- 'Il parlera, s'il veut.', Occitan du Couserans, Ensergueix (2012:55)
Bibliographie
description du phénomène
- Le Bozec, 1933. Le français par le breton, méthode bilingue, cours préparatoire, E. Thomas (ed.), Guingamp.
- Fave, V. 1998. Notennou yezadur, Emgleo Breiz: Brest.
- Favereau, F. 1997. Grammaire du breton contemporain. Morlaix: Skol Vreizh.
- de Rostrenen, G. 1738. Grammaire Françoise-Celtique ou Françoise-Bretonne qui contient tout ce qui est nécessaire pour apprendre par les Règles la langue celtique ou bretonne, Roazhon : Vatar, 1738. In-12 : XVI-192 p. ([réédition Alain Le Fournier, Brest], [réédition 2008 embannadurioù Al Lanv])
- Gros, J. 1974. (réédition 1984)Le trésor du breton parlé III. Le style populaire. Brest: Emgleo Breiz - Brud Nevez.
- Le Gléau, R. 1973. Syntaxe du breton moderne: 1710-1972, Editions La Baule.
- Le Gonidec, J-F., 1807, [rééd. 1838], Grammaire celto-bretonne, ed. H. Delloye, Paris.
- Guillevic, A.; Le Goff, P. 1986 [1902 Vannes, Lafolye]. Grammaire Bretonne du Dialecte de Vannes. Brest: Ar Skol Vrezhoneg- Emgleo Breiz.
- Hewitt, Steve, 1988. 'Ur framm ewid diskriva syntax ar verb brezoneg / Un cadre pour la description de la syntaxe verbale du breton', La Bretagne Linguistique, 4:203-11.
- Leclerc, Louis. 1986 [1906, 1911], Grammaire Bretonne du dialecte de Tréguier, 3ième édition, Ar Skol Vrezhoneg, Emgleo Breiz (précédentes Saint-Brieuc: Prud'homme).
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