Le plus-que-parfait
Le plus-que-parfait est un temps composé formé d'un auxiliaire à l'imparfait et d'un participe passé.
(1) | Marteze ivez | n'he doa ket | klasket | Matriona | kalz | war o lerc'h. |
peut-être aussi | ne 3SGF avait pas | cherché | Matriona | beaucoup | à.leur.suite | |
'Peut-être aussi que Matriona n'avait pas beaucoup cherché à les trouver.' | ||||||
Trégorrois (Kaouenneg)/Standard, Ar Barzhig (1976:34) |
Distribution
Le plus-que-parfait est utilisé lorsque l'action s'est déroulée dans un temps entièrement passé (Gros 1970:27, Ar Merser 2009:584).
Gros note une différence entre générations de brittophones, les plus jeunes en 1970 étant les seuls à jamais utiliser le passé composé pour des actions entièrement passées (hier, la semaine dernière...).
temps du passé
Gros (1970:28): "Le plus que parfait [...] remplace presque toujours le passé simple qui est en voie de disparition: Pa oan deut en ti., 'Quand j'entrai dans la maison.' Ahanta! ne gredfes ket ahanon; kaset o devoa anezañ ganto., 'Eh bien, tu ne me croirais pas; ils l'emportèrent!' N'on-oa ket greet a van., 'Nous n'avions pas fait semblant.'
Un bretonnisme connu est d'ailleurs une sur-utilisation du plus-que-parfait en français.
(2) Hier, j'avais écrit une lettre, Lossec (2010:94)
- J'avais été malade toute la semaine dernière, Lossec (2010:94)
conditionnel
Gros (1970:28) et Ar Merser (2009:584) signalent aussi un usage des formes du plus-que-parfait dans les conditionnelles (réalis ou irréalis).
(3) | Ma ne vijes ket deut | da grïal ahanon, | ne oan ket | savet c'hoazh. | |||||
si ne serais pas venu | pour crier P.moi | ne étais pas | levé encore | ||||||
'Si tu n'étais pas venu m'appeler, je ne serais pas encore levé.' | Trégorrois, Gros (1970:28) |
(4) | Anez da ze | ne oam ket eet | da haloupad keit-se. | ||||||
sans de ça | ne étions pas allé | à1 galoper si.long.que.ça | |||||||
'Sans cela, nous ne serions pas allés courir si loin.' | Trégorrois, Gros (1970:28) |
(5) | Penemet ma'z oc'h-c'hwi | kañveriez, | Me am boa graet | deoc'h | ur garlantez. | ||
sinon que êtes-vous | endeuillée | moi R.1SG avait fait | à.vous | un1 guirlande | |||
'Sinon que vous êtes en deuil, je vous aurais fait une guirlande.' | |||||||
(la guirlande se moque d'un râteau reçu, d'un délaissement amoureux) | |||||||
Luzel (1868:258), cité dans Menard (1995:172) |
Diachronie
Falc'hun & Fleuriot (1978-79:7B) signalent que le vieux breton comprenait des formes simples exprimant le plus-que-parfait (brostse, 'il avait tissé'). Ces formes "subsistent, mais dans un sens conditionnel" (irréalis).
Falc'hun & Fleuriot (1978-79:7B): "Les anciennes formes en sen, ses, se du plus-que-parfait ont donné naisance à des formes en fen, fes, fe, en exprimant un sens plus irréel que potentiel."
En breton moderne, le plus-que parfait n'a que des formes composées.
A ne pas confondre
En breton, les participes passés et les participes passifs ont la même forme. Le plus-que-parfait est un temps composé avec un auxiliaire à l'imparfait, sa forme coïncide donc avec l'imparfait du passif.
(6) | Paneved | ma oa arruet | ma breur | e oan bet mouget. | |||||
quand.ce.n'est | que était arrivé | mon frère | R étais été étouffé | ||||||
'Sans l'arrivée de mon frère, j'aurais été étouffé.' (litt. ...j'étais...) | Trégorrois, Gros (1970:28) |
Terminologie
Kervella (1947) et Chalm (2008) utilisent le terme amzer beurdremenet. KAG (2016) utilise le terme amzer dremenet ledan kevrennek.
Press (1986:226) traduit amzer-beurdremenet par le terme anglais pluperfect tense.