Différences entre les versions de « Les huchements »

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Les huchements sont des [[interjections]] spécialisées sur l'adresse à un animal.  
Les huchements sont des [[interjections]] spécialisées sur l'adresse à un animal.  


Les huchements en breton sont régulièrement rapportés dans la littérature descriptive, mais parfois difficiles à localiser. [[Ernault (1879-1880)]] fournit par exemple une description détaillée d'une série de huchements à l'entrée lexicale ''Bara!''.
Les huchements en breton sont régulièrement rapportés dans la littérature descriptive, mais parfois difficiles à localiser. [[Ernault (1879-1880)|Ernault (1879-1880]]:147) fournit par exemple une description détaillée d'une série de huchements à l'entrée lexicale ''Bara!''.




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Les '''mimologismes''' consistent à reconnaître un élément de langage dans un son du monde naturel, du bruit de voiture au chant d'un oiseau. Par exemple, [[Ernault (1903)]] compare le mimologisme trégorrois pour le roucoulement amoureux du pigeon ''N'eus ked a gour?'' 'On ne vous fait pas la cour?' et le mimologisme provencal ''quouro?'' 'quand?'. Il ne s'agit pas de huchement, puisqu'il ne s'agit pas de communication avec un animal.
Les '''mimologismes''' consistent à reconnaître un élément de langage dans un son du monde naturel, du bruit de voiture au chant d'un oiseau. Par exemple, [[Ernault (1903)]] compare le mimologisme trégorrois pour le roucoulement amoureux du pigeon ''N'eus ked a gour?'' 'On ne vous fait pas la cour?' et le mimologisme provencal ''quouro?'' 'quand?'. Il ne s'agit pas de huchement, puisqu'il ne s'agit pas de communication avec un animal.


== extrait de Ernault ==
[[Ernault (1879-1880)|Ernault (1879-1880]]:147,8):
''Bara! bara! bara'' ! Lr., Trév., St-M., ''baraïk, baraïk'' (pr. ''ekh''), Lr., interjection pour appeler les moutons (comme si on leur promettait du pain). On dit aussi ''bara bè'' (de leur cri), d'où ''bèikh'', 'mouton (enfantin)', Trév.
Pour les chasser : ''cha bouch, cha bouch du-me'' ou ''tu-me ('ta)'' ! Trév. Cf. ''cha tu-mañ, cha du-më, cha tu-me ('ta., laer)''!, St-M., Lr., Trév., Go.
quand on s'adresse aux chats : haut-breton ''cha(t) ci!'' M. Troude donne pour ce dernier sens ''gaz!'' que je suppose une altération de ''[[kazh|kaz]],
M. Troude donne ''chegad'', qui s'emploie en Go. pour chasser les veaux (''chega(d) du-më!'') On dit ''eur chegad'', 'un veau, fig. un niais', Trév. Cf. ''echegad'' (Troude) et peut-être ''ichekoñn'' (Go.), ''ichecon'' (''Feiz ha Breiz'', 7 juillet 1877), interjection d'étonnement.
cri pour exciter les béliers à se battre (''tourchal''), Tv, ''Tourch tak tak, maotik!'' (''ekh'').
Pour appeler les chats:
''Bichekh'', 'petit chat', Lr., ''Milbisekh, Misekh'', 'Minet', h.-br. ''Biche'', semblent venir de ''bich-bich-bich'', St-M., ''bss bss'', Trév., ''pich-pich-pich'', Lanr., ''pss pss'', Lr. et h.-br., Cf. angl. ''Puss''? A Trév., ''bisekh'', 'petit chat', pl. ''bisegho''.
''Bisegho halek'', 'les chatons du saule', Trév.; ''bichego, bicheio halek'', à Pleud. et à Plouezec (où l'on dit même ''bichego ros'', 'des boutons de rose'). Le mot propre est ''kéjer bihan'', ''kéjer halek'', Lanr., Trév.
Pour chasser les moutons et les veaux, ''turch tu-me'', Lr.;
pour appeler les veaux, ''tu tu tu tuy''
pour les chasser, ''prr-chett''! St-M.
Pour chasser les moutons, on dit à St-M. comme si on appelait un chien : ''khiê, khiê'' ! Ce mot, à Lang. ''kheñ'', doit venir du français ''tiens'' ainsi que ''khië, khië''! St-M., ''khiê, khiê''! Lanr.,
pour faire venir les chevaux, ''chien, chien, chien'' ! pour appeler les poulains, et peut-être ''tieñ, kieñ, tiañ, kiañ'', usités à Landerneau et aux environs pour dire ''n'est-ce pas?''. On dit encore pour appeler les chevaux ''d'aman'' ! Trév.; ou ''hei'', ''do'' (du français ''donc''), ''hei'' ! Lr.; ''hei si'' (du français ''ici''), Trég.;
pour les chasser, ''da du-ze''! St-M.; cf. fr. ''dada'' ?
Pour chasser les chiens : ''tè du-man, tè du-me (poezon)'' ! Lr., Trév.; ''tè isi'', Trév.; St-M., d'où ''tè tè, tè tè bihan'', 'un chien (enf.)', Lr., Trév.
Pour appeler les vaches : ''do, do, do ! do (paour)'' ! Lr.; ''zo, zo, zo'' ! Trév.; ''pio-ho'', St-M.
Pour les arrêter : ''cho''! ''cho-ho-ho''! Trév., Lr. Pour les chasser : ''boït''! Trév.; ''boï tu'', Lanr., St-M.; ''boï tu-me'' ! Trév., Lr.; Cf. ''Barzaz Breiz'', 'La Chanson de fête des petits pâtres', et ''boeicho'', Lanr., ''cho-cho'', Trév., 'vache, vaches (enf.)'.
— Pour appeler les pourceaux : ''chièm, chièm''! Trév.; ''khiou, khiou''! Lanr. et h. -bret. (onomat.); ''khiouekh, khiouekh''! Tressigneaux ; ''toch, toch, toch''! près de Lanr.; ''tochekh''!, ''tochekh''! Trév.; ''tac'hekh, tac'hekh, tac'h bian, tac'h, tac'h, tac'h, tach'', St-M.
Pour les chasser, ''sikh'' ! Pontrieux, Lr., Trév.; ''sikh tu-me'', Lr. Trév.; ''sikh tu-ze'', ''sikh'u-me'', ''sikh'u-mañ'', Lr., Go.; ''sikh'u, sikh'u'', St-M. (forme qui m'empêche d'écrire ''boit-hu''). Cf. ''sik'', van. dans
Troude, qui y soupçonne à bon droit un ancien substantif. Cette interjection se retrouve en letton et en russe (Orig. indo-europ., I, 372).
— Pour appeler les poulets : ''peti, peti''! ou ''keti, keti''! St-M.; ''pouti, pouti''! Trév. ''bouti, bouti, bouti''! Lr.; ''ar bouti bihan'', Lr., 'les petits poulets (enf.)' du français ''petit''. Cf. La Fontaine, le Faucon et le Chapon.
Pour chasser les poules et les poulets : ''chou du-man'' ! ''chou 'ta''! Trév., Lr., St-M. h.-br., ''chou ci''!
— Pour faire venir les canards : ''kan, kan, kan'', Trév., St-M.; ''kanekh, kanekh'' ! Trév. Cf. ''kanikhenn'', f. pl. ''kanikhen[n]o, kanikho'', 'canard'', Trév.


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Version du 8 mai 2020 à 21:01

Les huchements sont des interjections spécialisées sur l'adresse à un animal.

Les huchements en breton sont régulièrement rapportés dans la littérature descriptive, mais parfois difficiles à localiser. Ernault (1879-1880:147) fournit par exemple une description détaillée d'une série de huchements à l'entrée lexicale Bara!.


Inventaire

La compilation de de huchements ci-dessous est une compilation de Kervella (1947:§114), Favereau (1993) et Lozac'h (2014).

  • pour des vaches: pruik!, wetiu! 'appel'
  • pour des cochons: doc'h!, dac'h 'appel', si, si 'ta! 'pour éloigner'
  • pour des poules: pit, pit, pit! 'appel', chou!, dachou ! 'pour faire fuir'
  • pour des moutons: meñ, meñ! 'appel'
  • pour des renards: tiê Lan! 'faire fuir'
  • pour des chats: bis, bis! sous!, bisous! 'appel', ichek! 'faire fuir'
  • pour des chiens: tiê! 'appel', kis, kis! 'hisser'
  • pour des chevaux: ei!, hei!, yao! 'hue, continuer, avancer', c'ho!, c'hri 's'arrêter', rirc'h, kul! 'reculer', hal!, dic'ha! 'à droite', so! 'à gauche'.
dia! ['ɟa], 'à gauche !', Haut-cornouaillais (St-Nigoudenn), Lozac'h (2014:'dia')

Morphologie

onomatopées

Les huchements d'appel, pour attirer l'animal, sont typiquement des onomatopées évoquant un son produit par l'animal lui-même.


variations dialectales

Il existe une grande variation dialectale dans les huchements. On peut même parler de variation idiolectale.


Syntaxe

Il n'est pas possible de modifier les huchements (par ex., on ne dit pas * mell yao pour 'avance plus', ou 'avance plus vite').


Sémantique

ordres

Le contenu sémantique de ces interjections est assez pauvre, centré sur des ordres simples. Les animaux montés ont un registre spatial plus étendu, ainsi que sans doute les chiens de berger ou les chiens de chasse. Les huchements qui ont pour morphologie une onomatopée demandent un mouvement de rapprochement spatial en reproduisant un cri typique de l'animal.


grammaticalisation de verbes de mouvements

Le verbe fiñval 'bouger' pourrait venir d'une racine proto-indo-européenne de huchement. Matasović (2009) postule la racine proto-indo-européenne ? * ksweybh- 'faire un mouvement brusque' (IEW: 1041 (* swēy-)), qu'il considère inhabituelle, et qu'il propose être de nature onomatopéique (cf. résumé en français sur la page de fiñval).

A ne pas confondre

Les mimologismes consistent à reconnaître un élément de langage dans un son du monde naturel, du bruit de voiture au chant d'un oiseau. Par exemple, Ernault (1903) compare le mimologisme trégorrois pour le roucoulement amoureux du pigeon N'eus ked a gour? 'On ne vous fait pas la cour?' et le mimologisme provencal quouro? 'quand?'. Il ne s'agit pas de huchement, puisqu'il ne s'agit pas de communication avec un animal.

extrait de Ernault

Ernault (1879-1880:147,8):

Bara! bara! bara ! Lr., Trév., St-M., baraïk, baraïk (pr. ekh), Lr., interjection pour appeler les moutons (comme si on leur promettait du pain). On dit aussi bara bè (de leur cri), d'où bèikh, 'mouton (enfantin)', Trév. Pour les chasser : cha bouch, cha bouch du-me ou tu-me ('ta) ! Trév. Cf. cha tu-mañ, cha du-më, cha tu-me ('ta., laer)!, St-M., Lr., Trév., Go.

quand on s'adresse aux chats : haut-breton cha(t) ci! M. Troude donne pour ce dernier sens gaz! que je suppose une altération de kaz,

M. Troude donne chegad, qui s'emploie en Go. pour chasser les veaux (chega(d) du-më!) On dit eur chegad, 'un veau, fig. un niais', Trév. Cf. echegad (Troude) et peut-être ichekoñn (Go.), ichecon (Feiz ha Breiz, 7 juillet 1877), interjection d'étonnement.

cri pour exciter les béliers à se battre (tourchal), Tv, Tourch tak tak, maotik! (ekh).

Pour appeler les chats: Bichekh, 'petit chat', Lr., Milbisekh, Misekh, 'Minet', h.-br. Biche, semblent venir de bich-bich-bich, St-M., bss bss, Trév., pich-pich-pich, Lanr., pss pss, Lr. et h.-br., Cf. angl. Puss? A Trév., bisekh, 'petit chat', pl. bisegho.

Bisegho halek, 'les chatons du saule', Trév.; bichego, bicheio halek, à Pleud. et à Plouezec (où l'on dit même bichego ros, 'des boutons de rose'). Le mot propre est kéjer bihan, kéjer halek, Lanr., Trév.

Pour chasser les moutons et les veaux, turch tu-me, Lr.;

pour appeler les veaux, tu tu tu tuy pour les chasser, prr-chett! St-M.

Pour chasser les moutons, on dit à St-M. comme si on appelait un chien : khiê, khiê ! Ce mot, à Lang. kheñ, doit venir du français tiens ainsi que khië, khië! St-M., khiê, khiê! Lanr.,

pour faire venir les chevaux, chien, chien, chien ! pour appeler les poulains, et peut-être tieñ, kieñ, tiañ, kiañ, usités à Landerneau et aux environs pour dire n'est-ce pas?. On dit encore pour appeler les chevaux d'aman ! Trév.; ou hei, do (du français donc), hei ! Lr.; hei si (du français ici), Trég.; pour les chasser, da du-ze! St-M.; cf. fr. dada ?

Pour chasser les chiens : tè du-man, tè du-me (poezon) ! Lr., Trév.; tè isi, Trév.; St-M., d'où tè tè, tè tè bihan, 'un chien (enf.)', Lr., Trév.

Pour appeler les vaches : do, do, do ! do (paour) ! Lr.; zo, zo, zo ! Trév.; pio-ho, St-M. Pour les arrêter : cho! cho-ho-ho! Trév., Lr. Pour les chasser : boït! Trév.; boï tu, Lanr., St-M.; boï tu-me ! Trév., Lr.; Cf. Barzaz Breiz, 'La Chanson de fête des petits pâtres', et boeicho, Lanr., cho-cho, Trév., 'vache, vaches (enf.)'.

— Pour appeler les pourceaux : chièm, chièm! Trév.; khiou, khiou! Lanr. et h. -bret. (onomat.); khiouekh, khiouekh! Tressigneaux ; toch, toch, toch! près de Lanr.; tochekh!, tochekh! Trév.; tac'hekh, tac'hekh, tac'h bian, tac'h, tac'h, tac'h, tach, St-M. Pour les chasser, sikh ! Pontrieux, Lr., Trév.; sikh tu-me, Lr. Trév.; sikh tu-ze, sikh'u-me, sikh'u-mañ, Lr., Go.; sikh'u, sikh'u, St-M. (forme qui m'empêche d'écrire boit-hu). Cf. sik, van. dans Troude, qui y soupçonne à bon droit un ancien substantif. Cette interjection se retrouve en letton et en russe (Orig. indo-europ., I, 372).

— Pour appeler les poulets : peti, peti! ou keti, keti! St-M.; pouti, pouti! Trév. bouti, bouti, bouti! Lr.; ar bouti bihan, Lr., 'les petits poulets (enf.)' du français petit. Cf. La Fontaine, le Faucon et le Chapon. Pour chasser les poules et les poulets : chou du-man ! chou 'ta! Trév., Lr., St-M. h.-br., chou ci!

— Pour faire venir les canards : kan, kan, kan, Trév., St-M.; kanekh, kanekh ! Trév. Cf. kanikhenn, f. pl. kanikhen[n]o, kanikho, 'canard, Trév.