Différences entre les versions de « -ded, -ted »

De Arbres
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Version du 8 mars 2022 à 10:14

Le morphème -ded, ou -ted, est un suffixe productif qui sert à former des noms abstraits sur une base adjectivale.


(1) berr 'court, bref' => berrded 'brièveté'

(2) berr.boell.ded 'versatilité'

poell.us.ted 'discrétion, intelligence active', Merser (2009)


Trépos (1968:§120) donne uhelded 'hauteur', brasted 'grandeur', gwanded 'faiblesse', splannded 'clarté, splendeur'.

Chalm (2008:W-214) donne izelded 'bassesse' et eürusted 'bonheur'.


Morphologie

allomorphe en -dez

La forme en -ted est le résultat d'un sandhi.

Kervella (1947:§838) signale quelques occurrences d'allomorphes en -dez, dont Meurdez. On trouve aussi don(d)ez 'profondeur' (Favereau 1997:§168).


genre

Le suffixe -ted, -ded forme en KLT un nom féminin (Menard & Bihan 2016-). Pour le cornouaillais Trépos (1968:§129), les noms en -ded, -ted sont toujours féminins (brasted 'grandeur', gwanded 'faiblesse') et s'opposent en cela aux noms en -der, -ter toujours masculins (donder 'profondeur', kaleter 'dureté').

Le vannetais Le Bayon (1878:14) considère à tort que les noms en /det/ sont masculins dans les autres dialectes, et que l'emploi féminin est récent en vannetais du XIX° (il confond probablement ici les deux genres). Irslinger (2014:89) remarque que Deshayes (2003:377) classe kaouded 'cœur, pensée' du latin cavitātem comme un nom masculin, contrairement à Hemon.


nombre

Les mots suffixés en -ted ou -ded n'ont pas de pluriel (Kervella 1947:§853).

exocentricité

Le suffixe ded, -ted est exocentrique: il s'affixe sur un adjectif et obtient un nom.

variation dialectale

Selon Irslinger (2014:95), en vannetais, le suffixe -ded, -ted, féminin, remplace le suffixe -der, -ter, masculin, des noms abstraits désadjectivaux des dialectes KLT du Nord.


Sémantique

-ed vs. -ded

Goyat (2012:321) note l'alternance entre les suffixes -ed et -ded dans sklêred/sklêrded 'clarté'.


-der vs. -ded

Les noms en -der sont tous masculins. Les noms en -ded sont tous féminins. Le suffixe -ded, -ted se distingue du suffixe -der, -ter en standard par un plus haut niveau d'abstraction (Vallée 1980:XVII, Kervella 1947:§838, Chalm 2008:W-214).


(1) uhelder un ti / uhelded ur spered
haut.eur un maison haut.eur un esprit
‘la hauteur d'une maison / la hauteur d'un esprit.’ Standard, Kervella (1947:§838)


(3) ar gwanderiou a zeu eus ar wanded.
le faible.N.s R vient de le 1faible.esse
'les infirmités qui viennent de la faiblesse.'
Le Roux (1915)
cité par Vallée (1980:XVII)


La différence de sens n'est parfois pas flagrante. Sur l'adjectif tomm 'chaud', on construit tommder et tommded 'chaleur' (Helias 1986:13). Sur l'adjectif sal 'salé', on construit sallded et sallder 'salure, qualité de la chose salée' (Rostrenen 1732:841b).

Dans kaerderted, il semble que les deux suffixes se suivent.


(3) pebéh hardéhted!
quel beauté
'Quelle beauté!' Vannetais, Guillevic & Le Goff (1986:79)

-der et -ded vs. -adurezh

Vallée (1980:XIX) considère que -ded, comme -der, peut dénoter des qualités physiques, en contraste avec la finale en -adurezh qui peut servir à dénoter une qualité morale.


(1) skañvder, skañvded 'légèreté (physique)' skañvadurez 'légèreté morale'
breskder, breskded 'fragilité (physique)' breskadurez 'fragilité morale'
Vallée (1980:XIX)


On a une autre paire minimale avec l'adjectif seven 'poli' qui donne sevended 'politesse' et sevenadur 'culture', sevenadurezh 'civilisation'.

Diachronie

Le breton -ded, -ted dérive d'un emprunt au suffixe féminin latin ‑tātem en proto-brittonique (Irslinger 2014:89). Zimmer (2000:321f.) signale en proto-brittonique un autre suffixe en *-tātan, avec lequel le suffixe ‑tātem emprunté du latin aurait pu se fondre.

En moyen breton, le Catholicon donne au XV° abhominabldet comme correspondant au français abomination et au latin abhominatio.

Horizons comparatifs

Irslinger (2014:89) met -ded/-ted en correspondance avec le gallois ‑dod/‑tod dont le genre varie, et avec le moyen cornique -ses. Deshayes (2003:40) pointe le cornique -sys.

A ne pas confondre

Favereau (1997:§168) donne don(d)ez 'profondeur', comme dérivé du suffixe -ezh qui forme des noms à partir des adjectifs, comme dans furnezh 'sagesse'. Il s'agit cependant probablement de l'allomorphe du suffixe -ded, -ted.

Bibliographie