Différences entre les versions de « Minimiseur »
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Version du 12 février 2015 à 11:20
Les minimiseurs sont des éléments qui ont en commun d'emprunter sémantiquement à l'unité de mesure la plus petite d'une échelle de grandeur donnée.
En (1), il s'agit de la miette, unité la plus petite possible de nourriture. Son usage en (1) est à mettre en relation avec le français classique 'mie'.
(1) | N'em-eus ket | debret | eun elvenn | abaoe deh. | |||
ne'R4.1SG-a pas | mangé | une miette | depuis hier | ||||
'Je n'ai pas mangé une miette depuis hier.' | Trégorrois, Gros (1970b:§'elvenn') |
Inventaire
den, 'personne'; gour, 'homme'; hini, 'celui'; tra, 'chose'; banne, berad, 'contenu d'un verre', takenn, 'goutte'; tamm, 'morceau'; kammed, 'pas'; seurt, 'sorte', ket ...
Le préfixe dam- peut aussi servir de minimiseur dans les contextes syntaxiques des items de polarité négative.
(1) | Ma he-devoa | klevet | eun damhér bennag… | |||||||
si 3SGF-avait | entendu | un pfx.mot quelconque | ||||||||
'Si elle avait entendu un demi-mot (la moindre parole).' | Trégorrois, Gros (1984:372) |
Selon Willis (2013:254), l'étymologie de ket par le moyen breton quet, serait à chercher dans un minimiseur pour 'habits' dont on trouve une trace dans un composé vieux breton guelcet ‘habit de fête’ (< guel ‘fête’ + cet ‘habit’).
Syntaxe
noms nus et négation
Certains minimiseurs, en usage de nom nu, grammaticalisent en seconde partie de la négation (kammed, littéralement 'pas'). On peut aussi citer avec Favereau (1997:284):
(1) Ne welan banne (/ne1 vois verre/, 'Je ne vois rien/goutte.'),
(2) Ne glevan takenn (/ne1 entends goutte/, 'Je n'entends absolument rien.')
(3) hep kousket tamm (/sans dormir morceau/, 'en passant une nuit blanche')
(4) | Te n'ez | ket kammed | d'an aot? | ||||
toi ne1'vas | pas jamais | à1'le grève | |||||
'Tu ne vas jamais à la grève?' | Trégorrois, Gros (1970b:§'kammed') |
(5) | ...ha kammed den | ne glevas | komz | anezhe. | ||||||
... et jamais homme | ne1 entendit | parler | P.eux | |||||||
'Et jamais nul n'entendit parler d'eux.' | Trégorrois (Kaouenneg), ar Barzhig (1976:34) |
Les minimiseurs qui ne peuvent pas servir de seconde partie de négation sont aussi ceux qui résistent à l'usage de nom nu (un elvenn, 'une miette'). C'est aussi le cas en français (Rooryck 2008).
(5) | Jean n’a pas bu une goutte | vs. | * | Jean n’a bu une goutte | ||
* | Jean n’a pas rien bu | vs. | Jean n’a rien bu | Rooryck (2008) | ||
'Jean est abstinent.' |
Sémantique
En contexte négatif, un minimiseur a un effet maximisant (> 'pas (même) un peu', 'pas du tout').
Minimiser le minimiseur revient à créer un effet d'insistance sur la négation.
Horizons comparatifs
Des exemples de minimiseurs en français qui ont grammaticalisé en seconde partie de négation sont pas, mie, goutte, point.
Des minimiseurs qui sont juste des items de polarité négative seraient de l'ordre de: fermer l'oeil, lever le petit doigt ou faire du mal à une mouche, avec des indéfinis ou des définis faibles. En anglais, on peut citer les équivalents sleep a wink, lift a finger, ou hurt a fly.
Bibliographie
- Rooryck, J. 2008. On the scalar nature of syntactic negation in French. (ms.)
- Willis, David. 2013. 'Negation in the history of the Brythonic Celtic languages', David Willis, Christopher Lucas & Anne Breitbarth (éds.), The History of Negation in the Languages of Europe and the Mediterranean, 239-298.