Em-
Le préfixe em- apparaît sur des bases nominales. C'est un morphème lié, un pronom réfléchi à mettre en relation et en contraste avec le clitique préverbal en em.
(1) | Evelato, | seul | goshoc'h | an dud, | seul | suroc'h | o | yezhadur | diemskiant. | |||||||||
cependant | le.plus1 | vieux.le.plus | le 1gens | le.plus1 | sur.le.plus | leur2 | grammaire | sans.conscience | ||||||||||
'Cependant, plus les gens sont vieux et plus leur grammaire est inconsciente.' | ||||||||||||||||||
Madeg (2013:21) |
Kervella (1947:§882) donne : emgann 'bataille', emsav, emglev, emgarantez, emboellad, emlazhañ, emdreiñ, emouestlañ.
Trépos (2001:§121) ajoute emgav 'rendez-vous', emhloar 'vanité', emloc'h 'amour propre', emlaz 'suicide'
Helias (1986:15) donne emgarantez 'égoïsme'
Favereau (1997:§194) ajoute emvrud 'amour propre'
Deshayes (2003:'difiñv') donne emfiñv, 1931, 'automatique'.
Cornillet (2020) donne emzifenn 'autodéfense'.
Morphologie
Ce préfixe est productif.
mutation
Em- provoque une lénition sur la racine (Helias 1986:15).
(2) kuzuliata => emguzuliata 'se consulter, faire une réunion', Press (1986:224)
allomorphe im-?
Sémantiquement, la dérivation de imbroudañ 'imaginer, inventer, chercher dans soi' semble utiliser un allomorphe du préfixe em- sur la racine verbale broudañ 'piquer, aiguillonner'. Cependant, le préfixe im- n'a pas provoqué de lénition sur son hôte.
base déverbale ou non, structure argumentale
Sur les noms déverbaux transitifs, em- peut réaliser l'argument interne comme dans le réfléchi emlaz 'suicide', sur lazhañ X, ou le réciproque emgav, sur kavout X & Y.
Sur les noms déverbaux inaccusatifs, em- peut remplacer un complément de manière comme dans le néologisme emfiñv 'automatique'.
Sur les noms qui ne sont pas dérivés de verbes, em- peut remplacer un argument prépositionnel, comme dans emskiant 'conscience de soi-même', skiant eus X.
Sémantique
réfléchi, réciproque
La lecture la plus répandue de em- est celle d'un réfléchi, ou d'un réciproque (emgann 'combat'). Trépos (2001:§121) parle de réciprocité ou d'"action sur soi-même".
impersonnel
Kervella (1947:§882) note que le préfixe em- a parfois le sens de 'facile à V', une lecture compatible avec une lecture impersonnelle. Il cite emsav, emwerzh.
(1) | Emzavoh | eo | dit | mond | dre | ar vourh. | ||||||||||||
se.lève.plus | est | à.toi | aller | par | le 1bourg | |||||||||||||
'Il est préférable/plus avantageux pour toi de passer par le bourg.' | ||||||||||||||||||
Cornouaillais (L'Hôpital-Camfrout), Le Gall (1957:'emzao') |
Cette lecture impersonnelle existe aussi avec le préfixe he- concurrent (hewerz 'facile à vendre, vendable', Vallée 1980:XXII). Ce dernier n'a pas la sémantique d'un réfléchi.
horizons comparatifs
Le préfixe em- impersonnel est à comparer avec la lecture impersonnelle du réfléchi se dans les langues romanes (Les fraises, ça se vend cette année).
(2) | Si | lavora | sempre | troppo. | |||||||||||||
se | travaille | toujours | trop | ||||||||||||||
'On travaille toujours trop.' | |||||||||||||||||
Italien, Cinque (1988:522) |
Diachronie
Selon Deshayes (2003:36), le préfixe em- est issu du vieux breton im-, et répond au cornique om- et au gallois ym-.
À ne pas confondre
Le préfixe en- grammaticalisé à partir de la préposition e 'dans' qui marque l'intériorité a aussi un allomorphe en em-, comme dans embladañ (Menard & Bihan 2016-) 'cuisiner, mettre en plats'.
Bibliographie
- Cinque, Guglielmo. 1988. 'On si constructions and the theory of arb ', Linguistic Inquiry 19, 521-582.