Structure syntaxique

De Arbres
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Une phrase, qu'elle soit écrite, prononcée ou entendue, est contrainte à un ordre linéaire temporel - les mots sont écrits, prononcés ou entendus les uns après les autres. Les éléments doivent être ordonnés sur un axe unique, celui du temps. Le sens de cette phrase, lui, est fondamentalement hiérarchique. Certains éléments imposent par exemple leur sens, leur référence à d'autres (Ce n'est pas Henriette, Chaque élève pâtissier préfère son propre gâteau).

La structure syntaxique est la structure de médiation entre le sens, de structure hiérarchisée, et la réalisation phonologique des phrases, linéarisée dans le message linguistique.


De la grammaire structurale à l'étude des structures syntaxiques

Gagnepain (1960) appelait à une description structurale du breton, à son appréhension en tant que système linguistique, conformément au structuralisme de Ferdinand de Saussure. Il fut suivi en cela par Urien (1982) et ses travaux suivants. Le structuralisme s'attache à dégager la fonction des éléments linguistiques en relation avec les autres éléments de cette langue. Ce cadre théorique n'implique pas l'idée de structure syntaxique, de hiérarchie entre les éléments de la phrase. Seuls existent les éléments et leurs possibles relations individuelles. Ces relations ne peuvent pas être comparées entre langues, car elles sont définies par leur contexte langagier propre.

 Gagnepain (1962:44):
 "On sait désormais que, dans le continu psychique, chaque langue opère, pour son compte, un découpage dont les éléments, définis l'un par l'autre et non plus par leur contenu, sont tout, moins seulement ce que sont les autres et, comme tels, ne s'avèrent à aucun degré transposables. Or, la même raison qui permit à Lavoisier de régler le sort de 1'« esprit de sel » entrave précisément le progrès du structuralisme. Loin d'aboutir à l'unité, en effet, nos analyses, non dans leurs méthodes, bien sûr, mais dans leurs résultats, nous séparent, comme nos langues : chacune, se trouvant être un système complet du monde, doit être décrite sans référence à d'autres systèmes, en termes qui n'ont de sens que dans le cadre du sien."


L'école générativiste, d'influence anglo-saxonne, débute pour le domaine breton avec Anderson & Chung (1977), puis la thèse de la trégorroise Stephens (1982). La phrase bretonne y est comprise comme une structure hiérarchisée d'éléments en relation entre eux. Cette structure est comparable aux structures des autres langues du monde, ainsi que les règles qui s'appliquent dans cette structure. En grammaire générative, la structure syntaxique est construite à partir de structures plus petites ; des éléments du lexique et d'éléments fonctionnels, soudés les uns aux autres en un arbre syntaxique, à la manière imagée d'un jeu de légos. C'est dans cette structure syntaxique que sont opérées les relations syntaxiques de vérification de traits, d'accord et de cas, les mouvements liés à la structure informationnelle qui obtiennent l'ordre des mots. Le but de la grammaire générative est de construire des règles qui produisent ("génèrent") des phrases grammaticales, et qui peuvent prédire exactement quelles phrases seront agrammaticales, pour réaliser une modélisation de la grammaire interne des locuteurs.


L'ordre linéaire n'est qu'un indice de la structure syntaxique

Il existe quelques exemples frappants dans la langue, qui montrent que la structure syntaxique ne coïncide pas avec la structure linéaire.


accord

En (1), le sujet logique de kouezhañ e poultrenn 'tomber en poussière' co-réfère avec le groupe nominal pluriel ar pajennoù 'les pages'. Si le système d'accord était restreint à la linéarité, rien n'empêcherait le verbe de s'accorder avec son sujet pluriel (ce qui donnerait, selon l'effet de complémentarité, typique de l'accord en breton, un accord verbal 3SG (... ar bajennoù a gouezh e poultrenn). Au contraire, le verbe se comporte comme si ar pajennoù ne faisait pas partie du domaine du verbe kouezhañ. C'est que structuralement, ar pajennoù est enfoncé profondément dans la conditionnelle dont il est l'objet. En (1), le rannig e devant kouezhont confirme que pour l'ensemble verbal, ce qui le précède n'est pas un groupe nominal.


(1) Ma ne vez ket kemeret evezh bras evit treiñ ar pajennoù e kouezhont e poultrenn.
[ si4 ne1 est pas pr.is attention grand pour tourner le page.s ] R4 tombent en poussière
'Si on ne tourne pas les pages avec grande attention, elles tombent en poussière.'
Standard, Herri (1982:30)

quantifieurs flottants

Les cas de mouvement syntaxique sont assez facilement repérables, comme dans le cas des quantifieurs flottants.

En (2), le quantifieur flottant tout apparaît séparé du groupe nominal an dud 'les gens' qu'il quantifie.


(2) An dud a ouie dont tout da di Mémère neuze.
[ le 1gens ]i R AUX venir [ tous _ ]i à1 maison Mémère alors
'Les gens venaient alors tous chez Mémère.'
Bas-Cornouaillais (Tréboul), Hor Yezh (1983:75-76)


Dans la dérivation de la structure syntaxique, le bloc tout an dud a été formé. Ensuite, le groupe nominal an dud est antéposé seul en zone préverbale, laissant son quantifieur dans le champ du milieu.


le sens dépend de la structure assignée à une phrase

Dans le sens de la phrase en (3) tel que traduit par Ar Borgn (2011), l'agent de l'action est ma mestr-skol. En (4), la structure assignée est différente. Le verbe passif lakaet n'a plus de complément d'agent exprimé, et le groupe syntaxique get ma mestr-skol modifie l'adjectif sot. Il y a deux lectures possibles de la phrase, car il y a deux structures syntaxiques différentes que l'on peut leur assigner le sens vient de la combinaison hiérarchisée des éléments entre eux.


(3) Lakaet e oan sot get ma mestr-skol.
m.is R étais [ sot ] [ avec mon2 maître-école ]
'Je passais pour fou auprès de mon instituteur.'
Vannetais (Le Scorff), Ar Borgn (2011:102)


(4) Lakaet e oan sot get ma mestr-skol.
m.is R étais [ sot [ avec mon2 maître-école ]]
'Je tombais amoureux de mon instituteur.'
Standard


Niveaux de représentation

La structure syntaxique et sa dérivation peuvent être représentées visuellement sous forme de structure arborescente, ou avec un système de crochets qui découpent les constituants (pour une première approche rapide, voir D'Alessandro 2019).

La structure syntaxique est bien formée lorsqu'elle obtient un résultat correct dans les deux niveaux de représentation : la forme logique et la forme phonologique.


Outils de représentations d'arborescences

  • Shang, Miles. 2011. Syntax Tree Generator, en ligne.


Bibliographie

breton


horizons théoriques

  • Chomsky, Noam. 1969. Structures syntaxiques, Points.
  • D'Alessandro, Roberta. 2019. Syntax for dummies. How to read (and draw) syntactic trees, ms. de vulgarisation. texte.