Sujet prénégation

De Arbres

En breton standard, le verbe montre une morphologie riche avec un sujet prénégation. Un sujet réalisé devant la négation déclenche l'accord riche sur le verbe.


(x) ... SUJET ne verbe.accord du sujet
mes neuze an dud ne c'hellent ket kanañ ken
mais alors les gens NEG pouvaient.3PL pas chanter plus
'Mais alors les gens ne pouvaient plus chanter.'
Standard, Interview Brigitte Kloareg, par Ronan Hirrien

exception au système d'accord

Le sujet devant la négation déclenche l'accord riche sur le verbe même lorsque la négation n'est pas calculée sémantiquement comme en (2):


(2) Ar chas-ze ne reont nemet harzal pe yudal!
Det chiens-là NEG font seulement aboyer ou hurler
'Ces chiens-là ne font qu'aboyer ou hurler.' > l'action que font ces chiens-là est uniquement aboyer et hurler Le Bozec (1933:48)


Cette exception au système d'accord de la langue est largement documentée:

Denez (1972:112), Hardie (1948:162f), Hemon (1975a:63, 1975b:273f), Kervella (1947:168), Leroux (1957:Ch.II), Urien & Denez (1979/1980), Vallée (1926:39ff), Stump (1984, 1989), Schafer (1995), Schapansky (1996), Jouitteau (2005), Jouitteau & Rezac (2006)...


Analyse théorique

Jouitteau (2005:411) propose de dériver ces faits par l'hypothèse que la partie préverbale Ne de la négation est un complémenteur, une tête C déclenchant une résomptivité obligatoire lorsqu'un sujet le dépasse ('that-trace effect').

Un sujet dépassant une tête de négation déclenche donc un double pronominal qui lui, déclenche l'accord riche en s'incorporant.

variation dialectale

Il existe des variétés de breton dans lesquelles un sujet prénégation ne force pas l'accord. Les limites dialectales géographiques entre ces deux variétés sont actuellement inconnues.

L'exemple ci-dessous est extrait d'un entretien avec Mona Bouzec (Rieg). Stump (1984:293, n.2) note qu'il en existe des traces dans la grammaire de Trépos.


(x) ma zud-kozh ne ouie poz galleg ebet.
poss.1SG grand-parents NEG savait parole français 'any'
'Mes grand-parents ne parlaient pas un mot de français.'
Rieg, Mona Bouzeg

Bibliographie

  • Denez, P. 1972 [1980]. Brezhoneg buan hag aes, (le breton vite et facilement-Breton fast and easy). Paris: Omnivox.
  • Hardie, D. W.F. 1948. A Handbook of Modern Breton (Armorican), University of Wales Press, [Bangor / Caerdydd: Gwasg Prifysgol Cymru].
  • Hemon, R. 1975a [1995]. Breton Grammar. Translated, adapted, and revised by Michael Everson. Dublin: Everson Gunn Teoranta.
  • Hemon, R. 1975b [1984]. A Historical Morphology and Syntax of Breton, Dublin Institute for Advanced Studies.
  • Jouitteau, M. & Rezac, M. 2006. ‘Deriving the Complementarity Effect: Relativized Minimality in Breton Agreement’. Lingua, numéro spécial sur les langues celtiques lingBuzz/000066
  • Kervella, F. 1995 [1947],Yezhadur bras ar brezhoneg, 1947 edition Skridoù Breizh, La Baule ; 1995 edition Al Liamm.
  • Le Roux, P. 1957. Le Verbe breton (Morphologie, syntaxe), Rennes, Librairie Plihon / Paris, Librairie Champion.
  • Urien, J.Y. & Denez, Per, 1977/78-1979/80. 'Essai d’analyse sémiologique du mot verbal et du syntagme verbal en breton contemporain', Studia Celtica, 12-13:259-90; 14-15:290-312.
  • Vallée, F. 1926. La langue bretonne en 40 leçons [7° éd.], Librairie Prud'homme, Saint-Brieuc.
  • Schafer, R. 1995, ‘Negation and Verb Second in Breton.’, Natural Language and Linguistic Theory 13, 135-172.
  • Schapansky, N. 1996. Negation, Referentiality and Boundedness in Breton, a case study in markedness and asymmetry, ms thesis.
  • Stump, G. T. 1989. 'Further remarks on Breton agreement: A reply to Borsley and Stephens', Natural Language and Linguistic Theory, 7:429-471.
  • Stump, G. T. 1984. 'Agreement vs. incorporation in Breton', Natural Language and Linguistic Theory, 2:289-348.