Subordonnées relatives

De Arbres
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Les relatives sont des domaines propositionnels qui, comme le feraient des adjectifs, modifient un nom, ou même parfois un prédicat, ou un adverbe.

La phrase en (1) montre en breton une relative de l'objet. Le constituant ur reun tanav qui est la tête de la relative est l'objet de gwerzhañ 'vendre'. L'ensemble ur reun tanav a oa aesoc'h da werzhañ est l'objet du verbe kaout 'avoir' de la matrice.


(1) Ar moh bihan o-devoa eur reun tano [ a oa êsoh da werza ___ ].
le cochons petit 3PL-avait un soies fin R1 était facile.plus à1 vendre
'Les petits cochons avaient des soies fines qui se vendaient plus facilement.'
Plouzane, Briant-Cadiou(1998:7)


Pour une étude du système relatif en breton, consulter Guyonvarc'h (1972-73). Pour une approche théorique des relatives, consulter Bianchi (2002).


Complémenteurs et pronoms relatifs

complémenteurs

Les relatives débutent parfois par un pronom relatif comme ar pezh, ou par un complémenteur comme ma, ou ha(g).


(2) Morse n'e-noa bet disklêriet an den-ze ar pezh [ a oa erruet ganin ].
jamais ne R-avait été dit le homme- ce que R était arrivé à.moi
'Jamais cet homme n'avait raconté ce qui m'était arrivé.'
Uhelgoat, Skragn (2002:21)


complémenteur nul

Dans d'autres cas, le nom relativisé précède directement le rannig. La structure est alors réalisée avec un complémenteur nul, c'est-à-dire qui fait le même travail syntaxique et sémantique, mais n'est pas prononcé.


(3) [peb øːn no ɐn tɑ᷉ m nøs χwɑ᷉ nt]
Peb unan en do an tamm [ (e) neus c’hoant ]
chaque un R.3SGM aura le morceau (R) a envie
'Chacun aura le morceau qu'il veut.'
Cornouaille, (Briec), Noyer (2019:242)


(4) Meus aon edo va staoñv o 'n em voazañ ouzh ar vlazenn skildrenk [ a rae ken diaes din, da gentañ! ]
sans.doute était mon2 palais à4 se1 habitu.er à le 1goût demi.aigre C R1 faisait tant difficile à.moi à 1premier
'Sans doute que mon palais s'habituait au goût acidulé qui me dérangeait tant au début!'
Standard, Drezen (1932:27)


à ne pas confondre: sans complémenteur

Il existe des structures qui n'ont aucun complémenteur du tout, par exemple dans le cas des appositions comme les participiales. Les structures à complémenteur nul se distinguent de ces structures où aucun complémenteur n'est réalisé dans la structure dans le cas des relatives sans pronom relatif ni complémenteur. Ces structures font prototypiquement appel à la résomptivité de façon obligatoire.


(5) Sellout a reas ouzh ar breur Arturo evel ouzh un den [ bet darbet dezh koll e lod baradoz ].
regarder R1 fit à le frère Arturo comme à un homme été failli à.lui perdre son1 partie paradis
'Il regarda le frère Arturo comme un homme qui aurait juste failli perdre son bout de paradis.'
Standard, Drezen (1990:74)


ma vs. a vs. ø

En vannetais pré-moderne, Thibault (1914) remarque à Cléguérec les relatives en rannig + lénition (prononcé /e/ en vannetais) remplacées optionnellement par des relatives en ma4 (mi4 pour le vannetais). Thibault (1914:180) cite en ani e gomzã dohtõ 'celui à qui je parle', mais aussi en ani mi komzãn dohtõn. Il rajoute la possibilité de ne pas prononcer de complémenteur du tout, avec une relative SVO : en ani me gomza dohtõn.

On trouve la même optionalité R1/ma4 au XXI°.


(5) en dén e gonzan anehon / en dén ma konzan anehon
le personne C R1 parle de.lui le personne que4 parle de.lui
'l'homme dont je parle'
Vannetais standard, Cheveau (2017:§326)


(6) Ne velan ket ken an den ameus graet dezhon alho ar sakriti.
ne1 vois pas plus le homme R 1SG.a donné à.lui clef le sacristie
'La personne à qui j’ai donné la clef de la sacristie n’est pas en vue.'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (10/2021)

définitude et complémenteur hag a

Un syntagme défini modifié par une relative restrictive est uniquement suivi par un rannig a ou, selon les analyses, par un complémenteur nul suivi de ce rannig a1. Les relatives non-restrictives débutent par hag a.

Un syntagme indéfini est modifié par une relative dont la tête est hag a. Cette propriété est souvent relevée pour certains indéfinis particuliers. Selon Le Gléau (2000b:461) le complémenteur hag a est attendu lorsque netra 'rien', est en tête de relative.


(6) N'eus netra hag a gousi an douar evel an ed.
ne1 y.a rien que R1 souille le terre comme le céréale
'Rien ne souille la terre comme la céréale.'
Dihunamb (1909:315),
cité par Le Gléau (2000b:461)


Ceci n'exclut pas la variation.


(7) B'e ùenang e oé i labourad ne ouiañ ked i mènn...
expl R était un R était à4 travailler ne1 sais pas
'Il y en avait un qui travaillait je ne sais pas où...'
Vannetais (Riantec), RJ.,
collecté par B. Allaire, dico parlants 2018

Résomptivité

Les propositions relatives sont les domaines par excellence de la résomptivité, phénomène par lequel la tête de la relative a, à l'intérieur de la relative, un élément qui co-réfère, un pronom résomptif.

On parle de résomption du sujet lorsqu'une relative contient un élément pronominal qui double la tête sujet d'une relative. On parle de résomption de l'objet lorsqu'un pronom y double la tête objet de la relative. Les résomptifs peuvent aussi doubler des arguments non-directs, comme en (5).


(5) poltredj dioutii hec'hi-unan [ a zo Mari lorc'h ennii gantj ].
photo de.elle son-un R1 est Marie fierté en.elle avec.lui
'La photo d'elle-même dont Marie est fière.' Standard, Guilliot (2006:1894)


Les relatives contenant un pronom résomptif peuvent être introduites par un rannig ou l'autre, ou encore le complémenteur ma (Favereau 1997:587).


lacune

Lorsqu'il n'y a pas de pronom résomptif dans une relative, on considère qu'à l'endroit canonique de l'élément qui est la tête de la relative se tient une lacune. Suivant les théories, cette lacune est interprétée comme une copie ou une trace.

Ci-dessous, des exemples de relatives de l'objet en ar pezh avec une lacune correspondante dans la relative.

  • er pech i hon i leret _ ,
'ce que je suis en train de dire _'
  • er pech i han de leret _
'ce que je vais dire _'
  • er pech i tan a leret _
'ce que je viens de dire _', Vannetais de Cléguérec, Thibault (1914:180)

Sémantique

restrictives vs. appositives: reconstruction

Les relatives restrictives montrent des effets de reconstruction, au contraire des relatives appositives (Guilliot 2006:1890)


(1) * Pep [ poltred Yanni ]j en deus i gwelet __j a zo bet drailhet.
chaque photo Yann R.3SG a pro vu R est été détruit
'Chaque photo de Yann qu'il a vu a été détruite.'
Standard, Guilliot (2006:1890)


(2) [ Poltred-mañj Yanni [CP Øj en deus proi roet __j da Vari ] a zo bet drailhet.
photo-ci Yann R.3SG a pro donné à1 Marie R est été détruit
'Cette photo de Yann, qu'il a donné à Marie, a été détruite.'
Standard, Guilliot (2006:1890)

article défini et relative: an neb a venn...

Certaines relatives sont liées à l'apparition d'un article défini devant la tête de relative, comme le français Le Rennes de mon enfance a disparu vs. *Rennes de mon enfance a disparu.

En breton, cet effet est par exemple notable avec nep qui est toujours suivi d'une relative lorsque précédé d'un article (Kervella 1995:§475).


(3) [ an neb a venn ] a c'hell.
le celui R1 veut R1 peut
'Qui veut peut.' Standard, Kervella (1933:42)


La tête nominale hini est toujours précédée d'un article défini si elle est modifiée par une proposition relative.


Inventaire des types de relatives

relatives réduites

Les relatives réduites sont des propositions relatives dont la tête, nominale, n'est pas prononcée.


(1) War _[ø]_ a gomze...
sur R1 parlait
'Selon ce qu'il disait.'
Standard, Press (1986:206)


(2) ... hervez _[ø]_ en devoa klevet gant ar re all.
selon 3SGM avait entendu avec le ceux autre
'...selon ce qu'il avait entendu de la part des autres.'
Léon (Bodilis), Ar Floc'h (1985:151)


relatives d'un syntagme de temps

(3) Plad Sant Alar, e poent ma veze bouchoù bihan hennezh, a veze traoù e-barzh.
plat Saint Eloi dans moment que4 était poulain.s petit celui.ci R1 était choses dedans
'A l'époque des poulains, le plat de saint Eloi, il était bien garni.'
Léon, Mellouet & Pennec (2004:58).


(4) [ mǝs pasǝd ǝ huʁz [CP ma mɔ dʁukɛɲ ] ].
m'eus paseet ar c'houlz ma m'boa droug-kein
1SGa passé le temps que 1SGavait mal-dos
'J'ai fini le temps où j'avais mal au dos.'
Bas-vannetais, Cheveau (2007:207)


(5) Bevañ a reomp ur poent (hag) ar vugale a hoar en em zervicha gwelloc'h it o zud gant an ordinateur.
vivre R1 faisons un temps que le1 enfants R1 sait se1 servir mieux que leur2 parents avec le ordinateur
'Nous vivons un temps où les enfants savent plus des ordinateurs que leurs parents.'
Léon (Plougerneau), M-L. B. (05/2016)


(6) Evid kelou ar pellder ez out bet er gêr...
pour nouvelles le loin."tée" R es été en.le 1foyer
'Pour la durée de temps que tu as été à la maison...'
(le peu de temps)
Trégorrois, Gros (1984:360)


appositives

En (7), c'est le prédicat degouezhet eno qui semble relativisé dans l'appositive. L'ensemble est apposé à al lanv 'la marée'.


(7) al lanv, degouezhet eno n'oar den dre be gildro ___ ...
le marée arrivé ne1 sait personne par1 quel1 arrière1.tour
'la marée, arrivée là par on ne sait quel ruse...'
Standard, Drezen (1932:20)

Horizon théorique

Bianchi (2002) fournit un état de la recherche complet sur les relatives.


Terminologie

Kervella (1947:§770) utilise les termes islavarenn-stag, islavarenn degouezh et islavarenn-anv-gwan.

Press (1986:236) traduit islavarenn-anv-gwan par l'anglais relative clause.

En anglais, les relatives sans têtes sont appelées headless relatives.

Favereau (1997:587) appelle 'relatives intégrées' les relatives contenant un pronom résomptif.

Bibliographie

breton

  • Favereau, F. 1997. Grammaire du breton contemporain. Morlaix: Skol Vreizh, §574-591.
  • Yann Gerven. 2014. 'me 'zo bet hag...', Yezhadur!, Alioù fur evit ar vrezhonegerien diasur, Keit Vimp Bev, 55-56.
  • King, Phyllis, 1982. 'An internal head analysis of the Breton relative clause', Linguistics 20:83-95.
  • Timm, L. 1988. 'Relative clause formation in Breton', Word, 39:79-107.


diachronie et autres langues celtiques

  • Awberry, G.M. 1977. 'A transformational view of Welsh relative clauses', The Bulletin of the Board of Celtic Studies 27(2): 155-206.
  • Harlow, S. 1981. 'Government and relativisation in Celtic', F. Heny (éd.), Binding and filtering, Cambridge, MA: M.I.T. Press, 213-54.
  • McCloskey, Jim. 1979. Transformational syntax and mode/theoretic semantics. A case study in Modern Irish, Boston: Reidel.
  • Willis, D. 2011. 'Reconstructing last week's weather: Syntactic reconstruction and Brythonic free relatives', Journal of Linguistics 47 (2):407-446.


horizons théoriques et comparatifs

  • Bianchi, Valentina. 2002. 'Headed relative clauses in generative syntax – Part I', Glot International 6:7, 197–204. texte.
  • Grewendorf, Günther & Cecilia Poletto. 2015. 'Relative clauses in Cimbrian', Elisa Di Domenico, Cornelia Hamann and Simona Matteini (éds.), Structures, Strategies and Beyond: Studies in honour of Adriana Belletti, 393-416.
  • Riemsdijk, Henk van. 2005. 'Free Relatives', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol II, chap.27.