Différences entre les versions de « Portée »

De Arbres
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Globalement, plus l'élément ayant portée est haut dans la structure syntaxique, plus le domaine sur lequel il a portée est important. Cependant, cette correspondance est imparfaite.
Globalement, plus l'élément ayant portée est haut dans la structure syntaxique, plus le domaine sur lequel il a portée est important. Cependant, cette correspondance est imparfaite.
En (1), l'indéfini ''ur servicher'', 'un serveur', est plus haut dans la structure syntaxique que ''pep taol'', 'chaque table', et pourtant la lecture où il y a autant de serveurs que de tables est licite.
{| class="prettytable"
| (1) || Ar friko-mañ || a zo deuet|| da ger. ||'''Ur servicher''' a yoa ||evit renkañ pep taol! || <font color=grey>('''17 servicher''')</font color=grey>
|-
||| [[art|le]] dîner-[[DEM|ci]]||[[zo|est]] [[dont|venu]] || [[da|à]] cher|| [[art|un]] serveur|| [[R]] [[COP|était]] || [[evit|pour]] ranger ||[[pep|chaque]] table 
|-
| ||colspan="4" |'Ce mariage a occasionné des frais insensés. Il y avait un serveur par table pour ranger!' (17 tables, 17 serveurs)
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| ||||||||colspan="4" | ''Léon (Plougerneau)'', [[M-L. B. (05/2016)]]
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Pour le [[constituant]] ''un nebeut embannerien'', 'quelques éditeurs', la lecture 1 est la '''lecture à portée large''' et la lecture 2 est la '''lecture à portée restreinte'''. L'existence des deux lectures constitue la portée ambigüe.
Pour le [[constituant]] ''un nebeut embannerien'', 'quelques éditeurs', la lecture 1 est la '''lecture à portée large''' et la lecture 2 est la '''lecture à portée restreinte'''. L'existence des deux lectures constitue la portée ambigüe.


=== éléments intégrés morphologiquement ayant portée à l'extérieur ===
=== éléments intégrés morphologiquement ayant portée à l'extérieur ===
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=== horizons théoriques ===
=== horizons théoriques ===


Unger (2010), considérant la typologie des cas où la position syntaxique d'un opérateur ne coïncide pas avec sa portée sémantique propose que le [[mouvement syntaxique]] et le calcul de la portée sémantique sont deux opérations entièrement indépendantes, opérant au niveau local comme pour les dépendances à longue distance.  
Unger (2010), considérant la typologie des cas où la position syntaxique d'un opérateur ne coïncide pas avec sa portée sémantique propose que le [[mouvement syntaxique]] et le calcul de la portée sémantique sont deux opérations entièrement indépendantes, opérant au niveau local comme pour les dépendances à longue distance.
 


== Références ==
== Références ==

Version du 1 juillet 2016 à 11:14

La portée est le domaine de la phrase sur lequel porte un élément fonctionnel.

Les éléments ayant portée sont: les quantifieurs, les particules interrogatives, les adverbes, la négation, le focus...

Certains éléments n'apparaissent que sous la portée d'un autre, comme les items de polarité négative. La préposition-outil a apparaît par exemple sous la portée de la négation ou du comparatif de supériorité.


(1) Aliesoh a grohen leue a ya da zeha evid a grohen buoh.
souvent.plus de peau veau R va à sécher que de peau vache
'On fait sécher plus de peaux de veaux que de peaux de vaches.'
(Il meurt plus de jeunes que de vieux) Gros (1970b:§'leue')


Portée syntaxique vs. portée sémantique

Globalement, plus l'élément ayant portée est haut dans la structure syntaxique, plus le domaine sur lequel il a portée est important. Cependant, cette correspondance est imparfaite.

En (1), l'indéfini ur servicher, 'un serveur', est plus haut dans la structure syntaxique que pep taol, 'chaque table', et pourtant la lecture où il y a autant de serveurs que de tables est licite.


(1) Ar friko-mañ a zo deuet da ger. Ur servicher a yoa evit renkañ pep taol! (17 servicher)
le dîner-ci est venu à cher un serveur R était pour ranger chaque table
'Ce mariage a occasionné des frais insensés. Il y avait un serveur par table pour ranger!' (17 tables, 17 serveurs)
Léon (Plougerneau), M-L. B. (05/2016)


portée ambigüe

Deux lectures concurrentes peuvent émerger. On parle alors de portée ambigüe. La phrase en (1) comporte deux quantifieurs, nebeut et pep, 'chaque'. Deux lectures émergent suivant la portée sémantique allouée à chaque quantifieur.

(1) Un nebeut embannerien en deus lennet pep skrid.

'Quelques éditeurs ont lu chaque manuscrit.'
lecture 1: -> 'Il existe quelques éditeurs tels que chacun a lu l'intégralité des manuscrits.'
lecture 2: -> 'Chaque manuscrit est tel que quelques éditeurs l'ont lu.'

Pour le constituant un nebeut embannerien, 'quelques éditeurs', la lecture 1 est la lecture à portée large et la lecture 2 est la lecture à portée restreinte. L'existence des deux lectures constitue la portée ambigüe.


éléments intégrés morphologiquement ayant portée à l'extérieur

La portée sémantique contredit parfois même des éléments morphologiques. En (2), le diminutif a portée sur un élément temporel dans la phrase, en dehors du composé morphologique auquel il appartient.


(2) Unanig bennag a deu eur wech an amzer.
un.DIM quelconque R vient un fois le temps
'Un petit quelqu'un (quelques rares personnes) vient de temps en temps.' Trégorrois, Gros (1984:174)
* 'quelqu'un de petit en taille', * 'quelqu'un que j'aime bien'


(2) Un rare touriste entrait dans la boutique.
> Un touriste entrait parfois/rarement dans la boutique.'


horizons théoriques

Unger (2010), considérant la typologie des cas où la position syntaxique d'un opérateur ne coïncide pas avec sa portée sémantique propose que le mouvement syntaxique et le calcul de la portée sémantique sont deux opérations entièrement indépendantes, opérant au niveau local comme pour les dépendances à longue distance.

Références

pour aller plus loin

  • Aoun, Joseph and Li, Audrey. 1993. Syntax of Scope, MIT Press.
  • Chierchia, Gennaro. 1992-93. 'Questions with quantifiers', Natural Language Semantics 1: 181-234.
  • Fox, Danny. 1995. Economy and Scope, Natural Language Semantics 3:283-341.
  • Kiss, Katalin É. 2005. 'Quantifier Scope Ambiguities', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol IV, chap.53.
  • Ruys, E. G. 2005. 'Unexpected Wide Scope Phenomena', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol V, chap.74.
  • Sportiche, Dominique. 2005. 'Reconstruction, Binding, and Scope', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol IV, chap.54.
  • Unger, Christina. 2010. A computational approach to the syntax of displacement and the semantics of scope, LOT publications, pdf.