Mar

De Arbres

Le nom mar dénote le 'doute'.


(1) Gwel eo din beza sur evit beza war var.
mieux est à.moi être sur que être sur1 doute
'Il vaut mieux pour moi être sûr qu'être dans le doute.'
Trégorrois, Gros (1970b:'mar')


Morphologie

dérivation

C'est ce nom mar que l'on trouve dans marteze 'peut-être', martezeadenn 'hypothèse', divar 'indubitable' ou, avec le préfixe ar-, al-, arvar 'doute, indécision, danger'.


grammaticalisation

Le nom mar 'doute' est probablement la source de grammaticalisation du complémenteur ma(r) 'si' des conditionnelles.


Syntaxe

hep mar ebet 'sans doute'

(2) Hep mar ebet, he devoa graet anaoudegezh gant unan eus kizhier gouez an enez
sans doute aucun 3SGF avait fait connaiss.ance avec un de chat.s sauvage le île
'Elle avait sans doute fait connaissance avec un des chats sauvages de l'île.'
Pleyben, Ar Gow (2005:56)


hep mar (ket)

Bihan (2016:233) ne relève en moyen breton que deux occurrences de la locution adverbiale hep mar quet. La forme hep mar est alors plus courante.

  • Me aia hegar hep mar dre hoz caret
'Je vais avec plaisir, certes, car je vous aime'
Breton fin XV°, N. v. 178‑181.
  • da conquerif an breiz man hep mar quet
'Afin de conquérir cette Bretagne-ci, sans aucun doute'
Breton 1352, PO, traduction Bihan (2016)
  • An roe hep mar quet ne falho / Da nep he mir hac he miro
'Le Roi sans doute qui ne faillira pas / A quiconque le conserve et le conservera'
Breton 1530, (Trois poèmes, no 188)


hep ket a var !

(1) Hep ket a var !
sans pas de1 doute
'Oh ! J'en suis sûre !'
Standard, Kervella (2001:33)

n'eo ket hep mar

La trégorroise Angela Duval utilise n'eo ket hep mar dans le sens de C'est pas étonnant (elle applique en fait la concordance négative entre ket et hep, ce qui donne 'c'est sans aucun doute', puis un glissement de sens de type c'est pas douteux, pas de quoi douter, pas étonnant').

  • Ma ! n’eo ket hep mar ne gorde ket hon c’haoz avat dec’h, bremañ a gomprenan.
'Ma! Ce n'est pas étonnant que nous ne nous entendions pas hier, maintenant je comprends.'
Pardon sant Erwan, Duval (1962?)
  • Job a c’hoarzhe, n’eo ket hep mar gant un taol ken fentus all
'Job riait, pas étonnant après un coup si drôle'
Breur ar Miliner, Duval (1962?)
  • Trubuilh war drubuilh da Fañch Kouer, O va Doue ! Pebezh micher !…
Koll a bep tu. — N’eo ket hep mar eo ken dilezet an Douar…
'Un tracas après l'autre pour le paysan. Oh mon Dieu! Quel métier!'
'Des pertes partout. - Pas étonnant que les gens quittent (le travail de) la Terre.'
Ar Suilh-Raden, Duval (1962)


On trouve cette expression dès 1894.

  • n’eo ket hep mar ma c’hon nehet, n’ouzon petra d’ober ouz ze.
'pas étonnant que je sois ennuyé, je ne sais comment réagir.'
Guillouzic (1894:24)

Sémantique

retournement, war var 'certain'

Il n'est pas rare que les langues inversent le sens des expressions de certitude. Le groupe prépositionnel war var, pour Troude fin XIX°, exprime une certitude au point de le mettre en exemple à l'entrée de dictionnaire 'sur (et certain)'. En français moderne, on utilise également sans doute pour induire un doute.


(3) He-man a zo war var da goll he vuez.
celui-ci R1 est sur1 doute de1 perdre son1 vie
'Il est sûr de mourir.'
Léon, Troude (1886:'sur')


Diachronie et horizons comparatifs

Le nom mar 'doute, incertitude' est apparenté au cornique mar et au gallois mor, remontant au celtique * mar-o-s.