Différences entre les versions de « Les questions »

De Arbres
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| (1) ||'''Daoust'''|| '''piv''' ||a c'hounezo?
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|||colspan="4" | 'Qui gagnera?' |||||| ''Trégorrois (Bégard)'', [[Yekel (2016)|Yekel (2016]]:'[http://www.brezhonegbrovear.bzh/temou.php?tem=2123 gounit]')
|||colspan="4" | 'Qui gagnera?' |||||| ''Trégorrois (Bégard)'', [[Yekel (2016)|Yekel (2016]]:'[http://www.brezhonegbrovear.bzh/temou.php?tem=2123 gounit]')
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| (2) ||'''Daoust'''|| '''piv''' ||'neus || laret dit?
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|||colspan="4" | 'Qui est-ce qui te l'a dit?' |||||| [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§531)
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| (3) ||'''Daoust'''||'''petra''' ||eo || an dra-se?
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|||colspan="4" | 'Qu'est-ce que c'est?' |||||| [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§531)
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Version du 16 octobre 2016 à 16:42

Une proposition ou une phrase au mode interrogatif est prototypiquement utilisée pour poser une question.

Le mode interrogatif est repérable en breton par l'utilisation de mots interrogatifs en début de phrase ou de proposition. Il peut aussi n'être signalé que par la prosodie ascendante d'une phrase, comme en français, dans le cas des questions oui/non (Kafe 'po?, 'Tu veux du café?').


Questions créées par mouvement

Pour interroger un élément dans une phrase, on le déplace en initiale de phrase. Il y est réalisé par le mot interrogatif correspondant.

Lorsqu'un mot interrogatif apparaît en initiale de phrase, le verbe fléchi le suit immédiatement.


site d'extraction

On peut localiser le site d'extraction du syntagme interrogatif dans le reste de la phrase. Pour cela, il suffit de remplacer l'élément à l'initiale par un explétif ou un adverbe, et de regarder où apparaît l'élément interrogé.

En (1), le site d'extraction est celui du sujet de lavaro, 'dira'.


(1) Piv a lavaro biken _ niver an dud dilabour en ur vro (...)
qui R1 dira jamais sujet nombre le gens sans.travail dans.un pays
'Qui dira jamais le nombre de gens au chômage dans un pays (...)?'
Standard, Kervella (1933:78)


En (2), le site d'extraction est celui de l'attribut de bezañ, 'être'.


(2) Petra e teu da veza _ ar wezenn goude?
quoi R4 vient à1 être (objet) le1 arbre après
'Que devient l'arbre par la suite?' Léon, Cléder, Seite (1998:44)


timide émergence de stratégies in-situ

Les stratégies in-situ, c'est à dire où un élément interrogatif ne subit pas de mouvement prétensé et apparaît dans la phrase à l'endroit où un syntagme non-interrogatif apparaîtrait, sont agrammaticales en breton classique.


(1) Piv a lenn al levr-se?
qui R1 lit le livre-ci
'Qui lit ce livre?' Standard, Hendrick (1990:154)


(2) * Lenn a ra piv al levr-se?
lire R1 fait qui le livre-ci
'Qui lit ce livre?' Standard, Hendrick (1990:154)


Favereau (1997:§530) signale la timide émergence de structures in-situ en breton de la fin du XX°.


(1) Ar pôtr-se zo 'chom pelec'h?
le gars-ci est (à4) rester
'Ce gars habite où?' Favereau (1997:§530), citant Hewitt 1988 (a ou b)


(2) Te 'oar pelec'h?
toi sais
'Tu sais où?' Favereau (1997:§530)


horizons comparatifs

Le français parlé standard a la possibilité de créer des questions sans mouvement de l'élément interrogé (Tu as vu quoi ce week-end?). Certaines variétés de français permettent même de créer des interrogatives indirectes in-situ; Je sais pas c'est qui (français de l'île de la Réunion, Ledegen 2005), ou Il y en a qui savent pas c’est quoi (français de Montréal, Lefebvre & Maisonneuve 1982:190).

variation dialectale dans les interrogatifs

Certains interrogatifs ont des formes dialectales très diverses et servent donc commodément de marqueurs de dialecte (cf. l'inventaire des mots interrogatifs).

Questions oui / non

On appelle questions oui/non, les questions auxquelles on peut répondre par 'oui' ou par 'non' (par exemple, la question 'C'est vrai?', ou 'Iras-tu loin cette fois?'). Comme ces questions portent l'interrogation sur toute la phrase, on les appelle aussi les 'questions totales'.

En breton, les questions oui / non sont formées en imposant uniquement sur la phrase une intonation montante (1) ou bien en plaçant devant le verbe fléchi une particule hag, hag-eñ, daoust hag-eñ (2).


(1) Ar vro a zo kaer ive?
le1 pays R est beau aussi
'L'intérieur est beau aussi?' Léon (Cléder), Seite (1998:58)


(2) Ha klevet hoc'h eus a-wechoù displegañ an taolennoù e misionoù hor bro?
Q entendu 2PL a parfois expliquer le tableaux dans missions notre pays
'Avez-vous parfois entendu expliquer les tableaux dans les missions de notre pays?'
Standard, Kervella (1933:39)


pour plus de détails, se reporter à l'article sur les questions oui/non.

Interrogatifs multiples

*pe- pe-

Les langues varient selon leur possibilité de monter plusieurs interrogatifs en initiale de phrase. En breton, un seul élément de morphologie interrogative pe- peut monter occuper la zone prétensée dans les interrogatives. Lorsque la phrase contient deux mots interrogatifs de morphologie pe-, l'un des deux reste in-situ (on ne peut pas dire * Piv petra a lavar?).


Hendrick (1990:154) note que lorsque le sujet et l'objet sont tous deux des interrogatifs, seul le sujet est licite à l'initiale, comme c'est le cas en anglais.


(1) Piv a lavar petra? / * Petra a lavar piv?
qui R1 dit quoi quoi R1 dit qui
'Qui dit quoi?' Standard, Hendrick (1990:154)


En français de Basse-Bretagne en (2), pourquoi est à l'initiale de la question rapportée. quoi est resté in-situ (* ...pourquoi qu'est-ce qu'on leur demande.).

(2) Il faut que les gens comprennent pourquoi on leur demande quoi.

Français de Basse-bretagne (Lorient), [10/2014]

Q pe-

Favereau (1997:§531) relève des structures "interrogatives renforcées". La particule Q des questions oui/non y précède directement un mot interrogatif de moprhologie pe-.


daoust piv, petra

(1) Daoust piv a c'hounezo?
Q qui R1 gagnera
'Qui gagnera?' Trégorrois (Bégard), Yekel (2016:'gounit')


(2) Daoust piv 'neus laret dit?
Q qui a dit à.toi
'Qui est-ce qui te l'a dit?' Favereau (1997:§531)


  • Daoust piv foeltr eo honnezh?, titre d'histoire, Laudren 1991
'Qui diable est-elle?'
'Qui est d'accord pour que nous allions...'
  • Daoust piv a fell dezhañ ober un droiadig war an enezenn?
'Is there anyone [who] wants to have a walk on the island?, Press (2010)


(3) Daoust petra eo an dra-se?
Q quoi est le chose-ci
'Qu'est-ce que c'est?' Favereau (1997:§531)


En discours rapporté, il serait difficile de faire la différence avec da c'houzout petra eo ('(Reste) à savoir ce que c'est').

daoust penaos, perak

(3) Daoust penaos 'vo an dro?
Q comment sera le tour
'Comment est-ce que cela tournera?' Favereau (1997:§531)


(4) Daoust perak ?
Q pourquoi
'Mais pourquoi?' Favereau (1997:§531)

daoust ha pegeit

Dans l'exemple en (5) signalé par Anne-Marie C. (Clohars), on compte un élément interrogatif, un complémenteur du type 'que' en français, puis un autre syntagme interrogatif.


(5) Daoust ha pegeit amzer oa chomet ?
? que combien temps était resté ?
'Elle/il était resté.e combien de temps?'


horizons comparatifs

Haegeman (1996) cite un dialecte de néerlandais où une particule Q et un mot interrogatif apparaissent tous deux dans la même phrase. Rizzi (2013) analyse of comme une particule Q qui a attiré le mot interrogatif dans son spécifieur. L'ordre des mots est ici inverse de celui du breton, qui montre aussi ces exemples en matrice.


(1) Ik weet niet wie of Jan gezien heeft. variété de néerlandais, Haegeman (1996)
je sais pas qui si Jan vu a
'Je ne sais pas qui a vu Jan.'


La structure du breton rappelle aussi celle en roumain en (3). Cependant, il est à noter que le roumain, indépendamment, autorise les questions multiples (4), ce qui n'est pas possible en breton.


(3) Oare când pleaca la munte  ?
? quand part à montagne
'Quand est-ce qu'il/elle part à la montagne?'
Roumain, Anamaria Falaus (c.p. 01/2009)


(4) Oare cine ce aduce la cina ?
? qui quoi apporte le dîner
'Qui apporte quoi au dîner?'
Roumain, Anamaria Falaus (c.p. 01/2009)

A ne pas confondre

En breton comme en français, une phrase ou une proposition au mode interrogatif, sructurée formellement comme une auestion, peut très bien ne pas réaliser de question dans le discours. Il s'agit alors d'une question rhétorique.

Un cas particulier est celui des interrogatifs enchâssés, introduits par des verbes déclaratifs non-interrogatifs. Ils ne forment pas de question.


(1) Ouion ket pegis e passa an amzer , med hirig ha berrig, n'avañsa ket an traou.
sais pas comment R passe le temps mais long.petit et court.petit ne avance pas le choses
'Je ne vois pas comment le temps passe, mais je ne fais que bricoler, les choses (le travail) n'avance(nt) pas.'
Plourin (2000:34)


Terminologie

Le mode interrogatif est un terme qui s'oppose à impératif, exclamatif, optatif ou déclaratif.


Bibliographie

horizons comparatifs

  • Lefebvre, C. & Maisonneuve, H., 1982. 'La compétence des adolescents du Centre-Sud:les structures complexes', Lefebvre, C. (éd.), La syntaxe comparée du français standard et populaire: approches formelle et fonctionnelle, Tome 1, Québec, Office de la langue française, 171-206.
  • Ledegen, G., 2007. 'L’interrogative indirecte in situ à la Réunion: elle connaît elle veut quoi', Le français parlé du 21 ième siècle: normes et variations géographiques et sociales, Actes du Colloque à l’Université d’Oxford (23 et 24 juin 2005), Paris, L’Harmattan, 177-200. texte.
  • Rizzi, Luigi. 2013. 'Syntactic Cartography and the Syntacticisation of Scope-discourse Semantics', Anne Reboul (éd.), Mind, Values and Metaphysics – Philosophical Papers Dedicated to Kevin Mulligan, Dordrecht: Springer.