Différences entre les versions de « Les pronoms écho »

De Arbres
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Version du 30 juin 2018 à 21:08

Cette fiche documente les pronoms écho, comme illustrés en (1).


(1)a. M'eus ket soñj pegement a dud oant ind.
(ne1) 1SG'a pas souvenir combien de1 gens étaient eux
'Je ne me rappelle pas combien ils étaient.' Vannetais (Arradon), Audic (2011:17)


(1)b. C'hwi 'zo c'hwi un c'hwil.
vous est-vous un loustic
'Toi, tu es un loustic.' Le Scorff, Ar Borgn (2011:76)


(1)c. Va mab-me a zo aet gantañ.
mon2 fils-moi R est allé avec.lui
'Mon fils à moi est parti avec lui.' Cornouaille (Pleyben), Ar Floc'h (1950:157)


Il est important de distinguer un pronom écho d'un pronom sujet fort indépendant. Il est aussi important de distinguer un pronom écho des différents pronoms objets qui ont eux-mêmes plusieurs paradigmes distincts:

objet postverbal d'un impératif, objet postverbal d'un infinitif, objet postverbal après le verbe ‘avoir’..


Morphologie, accentuation

paradigme morphologique distinct

Les pronoms écho semblent parfois identiques aux pronoms forts indépendants, et l'effet d'emphase semble ne venir que d'un procédé de redoublement. Ce n'est cependant clairement pas le cas, et leurs formes comme leur distribution divergent nettement.


(1) Ha ni yay-ni kuit…
et nous va-nous parti
'Et nous, on s’en va.' Vannetais, Herrieu (1994:119)


Les pronoms écho ont un paradigme partiellement distinct des pronoms forts indépendants (contra de Rostrenen 1738:66).

Guillome (1836:32) note par exemple que si le pronom fort 2PL est toujours réalisé comme hui, le pronom postverbal écho 2PL est lui ou bien réalisé comme hui ou bien comme hu. Le trégorrois Le Bozec (1933) note c'houi le pronom fort 2PL, mais -hu le pronom écho 2PL (p.46).

On voit en (1) que le breton standard garde vivante cette distinction sur la personne 3PL:

(1) E savanenn Afrika ez eus laboused ampart hag int-i gwiaderien.
dans savane Afrique R est oiseaux habiles et eux- 3PL écho tisserins
'Il existe dans la savane africaine des oiseaux habiles qui sont des tisserins.' Al Liamm (346:115)


Pour le bas-vannetais, Cheveau (2007:133) note plusieurs différences entre les paradigmes des pronoms forts et des pronoms 'suffixés emphatiques': la 1SG est toujours [mɛ̃ɲ], et les personnes 2 et 3 marquent un [h] initial.

(2) ɟənɛ̃ɲ > ɟənɔmɛ̃ɲ ; ɛjdɛ̃ɲ > ɛjdɔmɛ̃ɲ
ganin ganin-me evidon evidon-me
'avec moi' > 'avec MOI.'; 'pour moi' > 'pour MOI' Cheveau (2007:133)


A Plozévet, dans une partie de Cornouaille qui a perdu la distinction entre tutoiement et vouvoiement, le pronom écho a une morphologie particulière: il apparaît avec une combinaison de singulier et de pluriel (Trépos 1980:94). Cette combinaison est propre aux pronoms écho. Le pronom fort indépendant correspondant étant /fi/ (Goyat 2012:244).

(3) ho puoc'h -t -hu
votre3 vache ('te' = 2SG) 2PL Cornouaillais, (Trépos 1980:94)


(4) /'pe:a ˌres tu/
Petra a rez-t-hu ?
quoi R fais-2SG.2PL
'Que fais-tu / Que faites-vous ?', Plozévet, Goyat (2012:244)

accentuation

En KLT, l'accent tombe régulièrement sur la pénultième syllabe. En (1), on voit que le pronom écho d'un possessif, lui-même non-accentué, est visible pour le système accentuel.


(1) [ma 'hwi me] ma hini-me 'le mien'
[ ma 're me] ma re-me 'les miens ou les miennes' Plozévet, Goyat (2012:127)


La question de l'accentuation des pronoms écho, et donc de leur statut plus ou moins affixal, reste ouverte.

Trépos (2001 [1968] :124) pose que les pronoms écho bretons sont non-accentués, mais lorsqu'il distingue les formes post-verbales pré-négation et post-négation, il considère que la forme post-négation est forcément accentuée (donc plutôt une forme de dislocation à droite). Trépos (2001 [1968]:125) note aussi que la forme de troisième personne est accentuée dans ... a lavar-eñ. (/rannig dit-il/, '...dit-il...').

Gros (1974:139) note avant une liste d'exemples de pronoms écho que "le pronom emphatique est fortement accentué, quelle que soit sa place dans la phrase".


modification

Un pronom écho peut être modifié par le focalisateur ivez, 'aussi'.


(x) Goût a ra hi-ivez petra eo poan ur vamm...
savoir R fait elle-aussi quoi est peine un1 mère
'Elle sait, elle aussi, la peine que ressent une mère...'
Vannetais, Ar Meliner (2009:165)


pronoms écho doublés

En trégorrois tout du moins, les pronoms écho peuvent eux-même être doublés (Gros 1984:62,63).

  • din-me-me (/à.1SG-1SG-1SG/; 'à moi')
Da biou out-te-te, mabig? (/à1 qui es.2SG-2SG-2SG, fils.petit/; 'le fils de qui es-tu mon petit garçon?')
deom-ni-ni (/à.1PL-1PL-1PL/; 'à nous')...


(6) Piv oh -hu -hu? ... Petra a hoari deoh -hu -hu?
qui êtes -2PL -2PL ... quoi R joue à.vous -2PL -2PL
'Qui êtes vous, vous? Qu'est-ce qui vous prend?'


Effet sémantique et structure informationnelle

Les pronoms dits 'écho' sont utilisés pour un effet d'emphase (de Rostrenen 1738:66), dit de 'focus'.

Il existe différentes alternatives pour focaliser un élément en breton (c'est-à-dire obtenir un effet d'emphase): soit on met cet élément devant l'élément tensé en initiale de phrase, soit on double l'élément focalisé en utilisant un pronom écho.

Lorsque deux éléments doivent être focalisés dans une même phrase, l'une ET l'autre alternatives doivent être utilisées, car aucune des deux alternatives ne peut être utilisée deux fois dans la même phrase.

Le pronom écho est optionnel dans la phrase, ce qui est prédictible de par son statut de marqueur de structure informationnelle. Toute systématicité du pronom écho met en doute l'effet sémantique d'emphase. Favereau (1997:108) signale pour le vannetais qu'après un possessif, le pronom écho est systématique. L'effet d'emphase y est donc à vérifier.

L'usage précis du pronom écho pour la structure informationnelle reste à déterminer avec précision. Un effet de focus peut par exemple être contrastif ou non. Pour le parler de Tréguier, Le Dû (2012:47) signale un effet 'adversatif' (= focus contrastif) sur les pronoms écho. On retrouve ce contraste traduit par un topique suspendu en français en Léon en (1), où on voit qu'un focus sur le sujet n'impose pas son antéposition (cf. Me a rank..), tant qu'un pronom écho est présent.


(1) Gwalc'hiñ a rankan me va daouarn.
laver R1 dois moi mon2 duel.main
'Et moi, je dois me laver les mains.' Léon, Kervella (2009:209)

Distribution

Les pronoms écho peuvent doubler:


Les pronoms écho peuvent doubler les noms ou les démonstratifs (Widmer (2017:221).


sujet

Le pronom écho peut doubler un sujet pronominal incorporé.


(1) Levrioù a lennit-hu
livres R lisez.2PL-2PL
'VOUS, vous lisez DES LIVRES.'


(2) - clévet oc'h eus-hu ar c'hloc'h?
entendu 2PL a-2PL le cloche
-'Avez-vous entendu la cloche?' Vannetais, de Rostrenen (1738:180)


(3) Met ne selle ket- doc'h ar re-se.
mais ne regardait pas-3SGM à le ceux-
'Mais lui ne les regardait pas.' Vannetais, ar Meliner (2009:16)


  • Bezent-i digass ha lezirek!, 'Qu'ils soient négligents et paresseux!', Vallée (1926:18)


Le pronom écho peut aussi doubler un pronom sujet préverbal.


(4) Ha neuze, ni a vrunelle-ni rac'h àr-un-dro: "'D eo ket gwir, 'd eo ket gwir!"
et alors nous R protestait.3SG-nous tous sur-le-tour ne est pas vrai ne est pas vrai
'Et nous de protester, tous en chœur: "C'est pas vrai, c'est pas vrai!".'
Vannetais, introduction ar Meliner (2009:18)


(5) c'hwi zo-c'hwi, morwalc'h, èl ar re 'rall ivez.
vous est-vous sans.doute comme le ceux autre aussi
'Et tu es sans doute comme les autres, toi aussi.'
Vannetais, Ar Meliner (2009:178)


(6) Daoust hag alïes [...] n'hon deus-ni ket e zouget war hent an ifern?
est-ce que souvent ne 1PL a-nous pas le porté sur route le enfer
'Ne l'avons-nous pas souvent porté sur la route de l'enfer?' Léon, Perrot (1912:842)


Le pronom écho peut enfin doubler un pronom silencieux d'infinitive.


(6) Evit bout koh.
pour être moi vieux
'Bien que je sois vieux.' Vannetais, Guillevic & Le Goff (1986:99)


faux sujet

(5) C'hwi 'zo -hu brav ho ti.
vous R est -vous belle votre3 maison
'VOUS, votre maison est belle.'


objet

(5) /møs ke 'ɡɥɛl ˌhãxtu/
’Meus ket gwelet ahanoh-t-hu.
(ne) ai pas vu P.2-écho
'Je ne t’ai pas vu.', Plozévet, Goyat (2012:246)


En (6), il est possible qu'il s'agisse d'un pronom écho ou d'un pronom fort indépendant autorisé par la particule focalisatrice mem(es).


(6) ... ind er hasas éañ mem geté
eux le envoya lui même avec.eux
'... et lui-même ils l'emmenèrent avec eux.'
Vannetais, AVIE., cité dans Louis (2015:214)


En moyen breton, et jusqu'en breton pré-moderne, ainsi qu'en breton vannetais moderne, les objets proclitiques pouvent laisser derrière eux un pronom écho.


  • perac em c’hanne te _ me, Breton 1710, IN.:277
'Pourquoi me frappes-tu?'

objet d'une préposition

 L'ALBB documente la variation dialectale dans les réalisations de traductions de prépositions fléchies:
   carte 106, traduction de 'à moi'
   carte 107, traduction de 'à toi, à vous'
   carte 108, traduction de 'à lui, à elle' 
   carte 109, traduction de 'à nous'
   carte 110, traduction de 'à eux'
 
 On y trouve, surtout en vannetais et en Léon, quelques pronoms écho.
 


(3) ganeoc'h-hu
avec.vous-vous
'avec VOUS'


Le trégorrois permet d'antéposer un pronom objet incorporé dans une préposition pour les personnes 1 et 2. Un pronom écho est alors possible (Gros 1984:119: Ahanout-te a dapan, emezañ). L'asymétrie 1/2 vs. 3 personne sur l'objet focal préverbal est indépendant du pronom écho (contra Hewitt 2001).

possessif

Le pronom écho peut doubler un déterminant possessif de l'autre côté de la tête nominale.


(4) ho ti-hu
votre3 maison-vous
'votre maison à VOUS'


Selon Kervella (1947:§434), le pronom écho ne peut pas focaliser un possesseur après la tête nominale anaphorique hini / re (*e hini-eñ, *hi re-hi, *o hini-i). Le pronom écho devrait alors être incorporé dans la préposition da.


(x) e hini dezhañ, he re dezhi, o hini dezho

'le SIEN (à lui)', 'les SIENS (à elle)', 'les LEURS (à eux)'


Cependant, on trouve cette forme en corpus vannetais:


(5) ... da lennerion a zo ar brezhoneg o lavar pemdeziek, èl m'ema hon hani-ni.
à lecteurs R y.a le breton leur2 langue quotidien comme que est notre N-nous
'... aux lecteurs dont la langue quotidienne est le breton comme c'est le cas chez nous.'
Vannetais, ar Meliner (2009:11)

Variations dialectales

L'usage des pronoms écho, de dialecte en dialecte, peut être plus ou moins répandu. Bouzeg (1986:31) note par exemple que les prépositions conjuguées sont souvent augmentées en haut-cornouaillais.


variations dans le paradigme

Il est possible que toutes les personnes du paradigme ne se comportent pas de la même façon.


évitement de la personne 3

Le paradigme des pronoms écho semble défectif dans certains dialectes, avec une restriction aux personnes 1 et 2 (Kervella 1947:§424, Trépos 2001:§442). Dans l'ALBB, on trouve une belle répartition dialectale du pronom écho à la première personne pour la traduction de 'avec moi' dans la carte 208, alors qu'on en trouve peu ou aucun à la troisième personne plurielle avec la même préposition gant, 'avec' dans la carte 214.

Kervella (1947:§424) pointe que les formes d'insistance de troisième personne sont les formes réfléchies e-unan, he-unan et o-unan. Press (1986:294) converge: il remarque qu'en (1), la forme de troisième personne de pronom écho est "rare, sinon incorrecte". Il contraste cette donnée avec le grammatical ennon-me, /dansmoi-moi/, 'dans MOI'.


(1) Tamm ha tamm e teuas Garan ennañ e-unan/* eñ.
morceau et morceau R vint Garan dans.lui son1-un
'Garan revint peu à peu à lui.'
Trégorrois, Konan (1981:31), cité dans Press (1986:292)


Cet évitement du pronom écho à la personne 3 est confirmé en pays bigouden, où le paradigme des échos de personne 3 est suppléé par les formes intégrées à la préposition support da (Goyat 2012:227, 250).


(1) 1SG ma2 zi-me 'ma maison (à moi)'
1PL on5 ti-ni 'notre maison (à nous)'
2SG, 2PL ho3 ti-t-hu 'votre maison (à vous)'
3SGM e1 di dez 'sa maison (à lui)'
3SGF he2 zi dezi 'sa maison (à elle)'
3PL o2 zi dezo 'leur maison (à eux/elles)' Plozévet, basé sur Goyat (2012:250)


Trépos (2001:§443) précise que les pronoms post-tensés de personne 3 sont de "vrais sujets". Il ne fournit pas d'argument pour étayer cette affirmation. Il pense probablement aux pronoms post-verbaux de désambiguïsation genrée des parlers de l'Ouest.

Selon Trépos, le pronom écho à la troisième personne est un trait du dialecte trégorrois. En trégorrois, Le Dû (2012:47) rapporte effectivement un paradigme complet de pronoms écho après les possessifs.


(2) 1SG me2 bugalé mẽ 'mes enfants (à moi)'
1PL õm2 bugalé nim 'nos enfants (à nous)'
2SG de1 vugalé 'tes enfants (à toi)'
2PL ó3 pugalé hwi 'vos enfants (à vous)'
3SGM i1 vugalé 'ses enfants (à lui)'
3SGF i2 bugalé hi 'ses enfants (à elle)'
3PL ó2 bugalé i 'leurs enfants (à eux/elles)' Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:47)


avec une préposition support ?

On trouve en Basse-cornouaille des pronoms 1PL relevés par Rezac (2013:appendix). Au vu du système d'accord, il est possible qu'il s'agisse d'un paradigme additionnel de pronoms écho.


(3) Med hi 'lavar: "gwelloh deom ni ahanom mond da Gemper da glask ahanom , ni mond da di Andre." Basse-cornouaille Madeg (1993:19), cité dans Rezac (2013:appendix)
mais elle dit mieux à.nous nous P.nous aller à1 Quimper à1 chercher P.nous nous aller à1 maison André
'Mais elle dit: "Nous devrions aller chercher à Quimper, aller chez André.'


(4) Disadorn e oam bet ahanom e-barz Kemper c'hoaz. Basse-cornouaille Madeg (1993:19), cité dans Rezac (2013:appendix)
samedi R4 étions allé P.nous dans Quimper encore
'Samedi nous sommes retournés à Quimper.'

Comportement syntaxique erratique

invisibilité syntaxique

L'accord verbal ne voit pas les pronoms écho. En (1), lorsqu'un sujet est indépendamment présent, le pronom écho est compatible avec l'accord pauvre.


(1) /in 'ɥɛl -ən cə 'mi nin'tʁa: / Névez, Desseigne (2015:40)
Int 'wel -int ket mui netra anezhe.
eux 1voit.3SG -eux pas plus rien P.eux
'Ils ne voient plus rien.'


En (2), on voit que le pronom écho n'est pas considéré comme un pronom sujet puisqu'il ne permet pas un accord pauvre.


(2) Levrioù a lenn(it)* -hu
livres R lisez / * lit -vous
'VOUS, vous lisez des LIVRES.'


Dans le dialecte de Lanvénégen étudié par Evenou, le verbe kaout, 'avoir' suit la même règle que les autres verbes (effet de complémentarité) qui gèle son accord à 3SG quand un sujet est exprimé. Les pronoms écho apparaissent avec l'accord riche, comme invisibles.


(3) [ nɵne s̈Omɵ pe:l dyzɵn ]
En deunt-i chomet pell du-se
R.3SGM ont-eux resté loin chez eux
'Ils sont restés longtemps chez eux/là-bas.'
Haut-cornouaillais (Lanvénégen), Evenou (1987:573)


Les pronoms écho n'ont pas non plus besoin d'être autorisés casuellement par une tête fonctionnelle. Leurs paradigmes ressemblent plus à celui des pronoms au cas direct qu'à celui des pronoms au cas oblique.

site d'apparition

après un pronom

Le pronom écho suit immédiatement un pronom direct indépendant comme en (1), un déterminant possessif ou un morphème d'accord.


(1) E savanenn Afrika ez eus laboused ampart hag int-i gwiaderien.
dans savane Afrique R y.a oiseaux habiles et eux-eux tisserands
'Il existe dans la savane africaine des oiseaux habiles qui sont tisserands.' Al Liamm (346:115)


Les pronoms écho n'apparaissent pas doublant un groupe nominal non-pronominal (ar vaouez-hi ou Marjanig-hi auraient la lecture typique des pronoms d'incise contrastifs). En (2), le pronom 3SGM eon coréfère avec le groupe nominal un enebour mais il ne s'agit pas d'un pronom écho (cf. résomption du sujet 'à la Cornouaillaise').


(2) un enebour dispar oa bet-eon.
un ennemi sans.pareil était été lui
‘Il avait été un ennemi hors pair.’ Sud Cornouaille, An Orignal, p.45.


avant la négation ket

Le pronom écho apparaît cliticisé sur le verbe tensé, au-dessus du site de la négation, chez Kervella (1947:§424), ne don-me ket aet.


(1) Na pet gwech ne'm eus-me ket klevet tud vat o lavarout (...)
et combien fois ne'1SG a-moi pas entendu gens 1bon à4 dire
'Combien de fois n'ais-je entendu de bonnes gens dire (...)'
Standard, Kervella (1933:62), voir aussi Kervella (1947:§242)


(2) A-dra-sur an den Doue a soñje er pezh na sonjemp-ni ket... Léon (Bodilis), Ar Floc'h (1985:21)
certainement le homme Dieu R1 pensait dans.le que ne1.R1 pensions-nous pas
'Certainement, l’homme de Dieu pensait à ce dont nous ne pensions pas...'


(3) Daoust hag alïes [...] n'hon deus-ni ket e zouget war hent an ifern?
est-ce que souvent ne'1PL a-nous pas le1 porté sur route le enfer
'Ne l'avons-nous pas souvent porté sur la route de l'enfer?' Léon, Perrot (1912:842)


(4) Kathleen n'eman-hi ket aze !!
Kathleen ne'est-elle pas ici
‘Kalthleen (elle) n'est pas ici!’ traducteur de Derib (1983:8)


(5) Petra, emezon-me, n'out-te ket da Varianna?
quoi dis.1SG-moi ne es-toi pas à1 Marianne
'Comment, dis-je, n'es-tu pas un fils (ou une fille) à Marianne?' Trégorrois, Gros (1970:154)


(6) ne oas-te ket, marvad, da-unan...

'Tu n'étais sans doute pas tout seul', Trégorrois, Al Lay (1925:33)


(7) Hag echuet ar rimodell... Achuet n'eo-hi ket, marhat... Poullaouen, Favereau (1984:442)
et fini le histoire fini ne'est-elle pas sans.doute
'...et l'histoire est finie... Elle n'est sans doute pas finie...'


Dans des écrits plus anciens aussi, comme ceux de de Rostrenen au XVIII° siècle, le pronom écho apparaît bien au-dessus de la négation post-verbale (8).


(8)a. Pe evit tra ne leveres-te qet an dra-man-dra?
que pour chose ne dis-tu pas le chose-là-chose
'Que ne dis-tu telle chose?' de Rostrenen (1738:62)


(8)b. Pe rag tra ne res-te qet qemeñ-ze?
que car chose ne fais-tu pas autant-ci
'Que ne fais-tu cela?' de Rostrenen (1738:62)


Pour le trégorrois Leclerc (1986:§139, III), le pronom écho apparaît obligatoirement avant la négation "dans les formes interrogatives [...] et dans la réponse correspondante".

après la négation ket

Des pronoms écho peuvent apparaître plus bas que la négation (Borsley & Stephens 1989, puis Stump 1989b:435, discutant les données de Borsley & Stephens 1989).


(1) Na brenit ket gwin c'hoaz, betegoud n'en-devo ket prenet araog dont.
ne1 achetez pas vin encore jusqu'à.savoir ne'3SGM-aura pas lui acheté avant venir
'N'achetez pas encore de vin, de peur qu'il ne l'ai acheté avant de venir.' Trépos (2001:§383)


De tels exemples sont aussi attestés en vannetais du XIX° (2). Pour Cheveau (2007:209), en bas-vannetais moderne, le pronom écho est toujours placé après la négation.


(2) perac ... n’hun es chet ni sentet avel guir bugalé?
pourquoi ... ne1'1PL a pas nous obéi comme vrai enfants
'Pourquoi... ne nous sommes nous pas obéi comme de vrais enfants?' Vannetais 1849, LLB-41, cité par Hemon (2000:124)


(3) ʃǝ mɛ̃ɲ ɟɥelǝt.
meus ket me gwelet
1SG.a pas moi vu
‘Moi je n'ai pas vu.’ Bas-vannetais, Cheveau (2007:209)


C'est aussi l'ordre de mots relevé à Groix.


(4) /ẃeilinče my brəzeil əbed žamaes /
verrai pas moi guerre aucun jamais
'Je ne verrai plus jamais de guerre.' Groix, Ternes (1970:293)


Selon Borsley & Stephens (1989:414), le pronom écho suivant la négation ket n'est pas une option grammaticale en Douarneniste.


évidence de mouvement

Le pronom écho monte très visiblement à partir d'un site d'insertion plus bas dans la structure. En (5)a, le pronom écho a bougé en laissant derrière lui son modificateur ho-taou.


(5)a ma c'halon a lâr din e tahet-c'hwi c'hoazh _ ho-taou da bardona amañ.
mon2 cœur R dit à.moi R4 viendrez-vous encore votre3-deux pour "pardonner" ici
'Mon cœur me dit que vous reviendrez, tous les deux, faire le pardon ici.'
Vannetais, Ar Meliner (2009:107)


au milieu de la négation ket mui

En (5)b, le pronom écho interrompt le groupe de la négation postverbale ket mui.

(5)b Ne vin ket me mui amañ é kennig dour deoc'h.
ne1 serai pas moi plus ici à4 proposer eau à.vous
'Moi, je ne serai plus là à vous offrir de l'eau.'
Vannetais, Ar Meliner (2009:107)


avant le clitique objet de kaout

Les pronoms écho peuvent apparaître au-dessus du pronom objet postverbal du verbe 'kaout', 'avoir' en (6). Cependant, en vannetais, tout du moins, le pronom écho sujet peut flotter sous le pronom objet du verbe 'avoir', comme en (7) (voir aussi l'exemple d'Herrieu plus bas).


(6) perac e h-eus-te int laset?
pourquoi R 2SG-Aux-toi eux tué
'Pourquoi les as-tu tués?' XVIII°, BD:509 cité en Hemon (2000:124)


(7) mǝs hi mɛ̃ɲ kle:wǝt
1SG.a la moi entendu
'Moi je l'ai entendue.' Bas-vannetais, Cheveau (2007:209)


particule bet

On trouve le pronom écho plus haut que la particule bet.


(1) [he wije pig̈is wa be daj c̈wiT]
Int a ouie pegiz (e)c'h oa-eñ bet deuet kuit.
eux R savait comment R+C était-lui ptc venu parti
'Eux savaient comment il était parti.' Haut-cornouaillais (Lanvénégen), Evenou (1987:575)


(2) ... ma viemp bet ni degourdi...
si4 étions été nous dégourdi
'...si nous avions été dégourdis...' Bas-Cornouaillais (Tréboul), Hor Yezh (1983:76)


On trouve aussi le pronom écho plus bas que la particule bet. Fave (1998:136) semble reconnaître les deux possibilités et note même sa préférence, en breton du Léon (Cleder), pour le pronom écho situé après la particule bet. Il semble y avoir variation, même en Léon.


(3) A! ma vijen me bet gouest da labourat! Léon, Kervella (2009:51)
Ah! si4 serais moi été capable de1 travailler
'Ah! Si j'étais capable de travailler!'


participe + incise + adverbe + écho

(3) Me zo bet [ouezan ket 'ta marse...] marse me teir gwezh
moi est été sais pas donc peut-être peut-être moi 3 fois
ged man den é weled er Point du jour ase...
avec mon2 homme à4 voir à.le (nom de café)
'Moi, je suis peut-être allée trois fois avec mon mari les voir au "Point du jour" ici...'
Vannetais (Arradon), Audic (2011:15)

participe

En Cornouaillais, des pronoms écho sont signalés flottant sous un participe (German 2007:174).


(1) N’oun ket hann ema chomet haoñ ba'n ger.
ne' sais pas si est resté lui à le maison
'Je ne sais pas s'il est resté à la maison.'
Cornouaillais (Saint-Yvi), German (2007:174)


(2) Ha n'oe selaouet anezhañ da wel pelec'h vie bet aretet.
et 3SGM'avait écouté P.lui pour1 voir serait été arrêté
ha oa aretet deus kostez an ti du-se.
et était arrêté lui de côté le maison chez.2
'Et il l'avait écouté pour savoir où il s'arrêterait, et il s'était arrêté du côté de cette maison.'
Cornouaillais (Le Juch), Hor Yezh (1983:8)


(3) Benn oa deuet hi un tammig 'ba' 'n hent.
quand était avancée elle un petit.peu dans le chemin
'Quand elle fut avancée sur la route.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:III)


Les exemples cornouaillais ci-dessus ne montrent que des arguments internes, mais on trouve des pronoms échos sujets agents en trégorrois.


(3) Lavaret e oa bet he-devoa lahet hi anezañ.
dit R était été avait tué elle P.lui
'Il avait été dit que c'est elle qui l'avait tué.' Trégorrois, Gros (1974:139)


Dans les variétés de langue où le pronom écho apparaît sous le participe, le pronom écho n'est pas distinguable d'un pronom fort indépendant.

compatibilité avec un résomptif

Stephens (1982:254-5) montre que les pronoms écho sont possibles avec des résomptifs, mais pas à la troisième personne.


Me a sonje din-me ne vije ket arruet.
te a gaso an traou-se ganit-te.
En a gav dezha(*-en) eo brav ar vro.
Int a vez roet re a labour dezho(*-int).


Gwelet em eus e dad-en.

mais pas

Yann en deus kavet e dad(*-en)


Cependant, on trouve des pronoms résomptifs 3SG en vannetais, au moins à l'intérieur d'un adjoint comme en (1).


(1) Ret eo bout graet ar vicher-se e-pad pevar blez bennak
forcé est être fait le métier- pendant quatre an quelconque
... èl m' em-eus -hi -me great evit kompren pegen divourrus eo
... comme que [j'ai] -3SG.F-1SG fait pour comprendre combien déplaisant est
'Il faut avoir fait ce métier pendant quatre ans comme je l’ai fait (moi) pour comprendre combien c’est déplaisant.'
Vannetais, Herrieu (1974:54)

Enjeux théoriques

L'enjeu commence au niveau descriptif car nous avons une image très floue de la distribution des pronoms écho. Le phénomène de la transparence syntaxique d'u élément qui peut apparaître à différents endroits dans la phrase est passionnant.

Widmer (2017) considère que ce sont des indexes affixaux coréférentiels qui servent de marqueurs d'emphase in-situ, mais ne peuvent pas marquer les noms ou les démonstratifs. Cette hypothèse ne peut pas non plus prédire leur distribution mouvante erratique.

Sémantiquement, le contraste reste à saisir entre l’effet "d’insistance" produit par les différents pronoms exemplifiés ci-dessus (pronoms écho sujets, objets de ‘avoir’ ou d’un verbe à l’impératif) et les phénomènes de résomption du sujet où, à la troisième personne et avec une négation, un pronom d’insistance apparaît en fin de phrase, incorporé dans une préposition support sémantiquement vide.

Cette tournure est connue comme un signe prototypique du Sud Finistère (résomption du sujet 'à la Cornouaillaise', cf. Trépos 1968, Blanchard 2004:26).


(11) Ne wel netra anez-i.
ne voit rien P-elle
'Elle ne voit rien.' Cornouaille, Trépos (2001:125)


L'utilisation des pronoms écho comme pronoms résomptifs est d'autant plus étonnante que Hendrick (1988:44) montre l'incompatibilité des pronoms écho et résomptifs en gallois.


horizons comparatifs

La documentation des paradigmes pronominaux est aussi un enjeu théorique important dans une perspective comparative, surtout avec les autres dialectes brittoniques (gallois, cornouaillais).

La littérature galloise distingue des ‘pronoms auxiliaires’ qui correspondent partiellement aux pronoms écho du breton. La comparaison est fructueuse pour deux raisons (voir Jouitteau et Rezac 2006) :

(i) le système pronominal gallois a été l’objet d’analyses fines (Rouveret 1991, Koopman 1999, Sichel 2001 entre autres)

et (ii) ces analyses contrastent aisément les deux systèmes en apportant des questions nouvelles.

Les pronoms doublés du gallois ne sont pas des formes faibles mais des pronoms indépendants. Rouveret (1991), Koopman (1999), et Sichel (2001) proposent que le pronom incorporé et son double écho proviennent d’un même syntagme nominal, à la façon du doublage clitique dans le domaine roman.

Cette hypothèse prédit correctement pour le gallois que lorsque le pronom n’est pas incorporé, les deux formes peuvent apparaître in situ, et que le pronom écho peut apparaître dans des positions de syntagmes nominaux pleins. Ces deux prédictions seraient fausses pour le breton. La position pré-négation n’est par exemple pas accessible pour un pronom écho.

Diachronie

(1) Madan meker Moyen vannetais 1499, Gl.AvH
(a)ma din -me kerh interprétation d'Ernault (1911:284)
ici à.moi -moi avoine
'Donnez-moi de l'avoine.'


(2) m-e-dalcho=hy Moyen breton 1557, B. 197, cité dans Widmer (2017:235)
moi-la-tenir=elle
'Je la tiendrai.'


(3) monet pront a gresont y.
aller promptement R font-eux
'Eux vinrent rapidement.' Moyen breton 1650, Nl. 28


(4) ê so mad dimme beza guenec'hu. Breton prémoderne 1709, IN.:423, cité dans Hemon (1975:§70,a)
il est bon à.moi.moi être avec.vous.vous
'Il est bon pour moi d'être avec vous.'

Terminologie

Pennaod (1969:38) utilise le terme raganv azgeriad (mais il les confond avec les pronoms forts indépendants et les pronoms objets directs après le verbe ‘avoir’).

Widmer (2017) utilise le terme anglais coreferential affixal indexes (AFI).

Bibliographie

analyses théoriques

  • Koopman, H. 1999. The internal and external distribution of pronominal DPs, Beyond Principle and Parameters, Kyle Johnson and Ian Roberts (eds.), Dordrecht, Kluwer.
  • Rezac , M. 2004. ‘The EPP in Breton: An unvalued categorial feature’, Triggers, Studies in Generative Grammar, A. Breitbarth & H. v. Riemsdijk, Mouton de Gruyter.
  • Rouveret, Alain. 1991. Functional categories and Agreement. The Linguistic Review 8:. 353-387.
  • Stump, G. T. 1989. Further remarks on Breton agreement: A reply to Borsley and Stephens, Natural Language and Linguistic Theory, 7:429-71.
  • Sichel, I. 2001. Studies in the syntax or pronouns and features, with particular reference to Hebrew. PhD. ms. City University of New York.

descriptions de la variation dialectale

  • Blanchard, N. 2004. ‘L’utilisation pédagogique des textes du concours ‘Ar Falz’’ La Bretagne Linguistique 13, numéro spécial Dialectologie et Géolinguistique, CRBC : UBO, Brest, 13-30.
  • Cheveau, L. 2007. Approche phonologique, morphologique et syntaxique du breton du grand Lorient, PhD. Thesis. (disponible sur son site).
  • German, G. 2007. 'Language Shift, Diglossia and Dialectal Variation in Western Brittany:the Case of Southern Cornouaille', The Celtic languages in contact : Papers from the workshop within the framework of the XIII International Congress of Celtic Studies, Bonn, July 2007, Hildegard L. C. Tristram (ed.), Postdam. pdf.
  • Guillome J. 1836. Grammaire francaise bretonne, contenant tout ce qui est nécessaire pour apprendre la langue bretonne de l’idiome de Vannes, Vannes : J.M. Galles. Preview
  • McKenna, M. 1978. The Breton of Guémené-sur-Scorff, Bas Vannetais, Part II: A Morphology of the verb. ZCP 35, 199-247; ZCP 37, 249-277.
  • de Rostrenen, G. 1738. Grammaire Françoise-Celtique ou Françoise-Bretonne qui contient tout ce qui est nécessaire pour apprendre par les Règles la langue celtique ou bretonne, Roazhon : Vatar, 1738. In-12 : XVI-192 p. ([réédition Alain Le Fournier, Brest], [réédition 2008 Al Lanv])
  • Ternes, E. 1970. Grammaire structurale du breton de l’Ile de Groix, Carl Winter, Heidelberg.
  • Trépos, P. 2001 [1968, 1980, 1996], Grammaire bretonne, 1968 édition Simon, Rennes.- 1980 édition Ouest France, Rennes; 1996, 2001 édition Brud Nevez, Brest.