Différences entre les versions de « Les mots à morphologie expressive »

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Version du 17 avril 2020 à 09:10

Les mots appelés mots expressifs forment une classe assez hétéroclite comprenant:

  • les "mimétiques" qui imitent un son, comme les onomatopées (ar flip 'le martinet') et certains huchements (oc'h-oc'h à un cochon).


Pour un état des lieux de la littérature scientifique sur les mots expressifs en général, se reporter à Vigliocco & Kita (2006), Akita (2015), Armoskaite & Koskinen (2017), Ibarretxe-Antuñano (2017), Svantesson (2017). Akita & Dingemanse (2019) proposent une synthèse théorique.


Tentatives de définition

Selon Dingemanse (2012), les mots expressifs (qu'il appelle, en tradition anglophone, idéophones) sont "des mots [formellement] marqués qui dépeignent une imagerie sensorielle".


morphologie déviante, mais adaptation au système langagier

Dans le cas des onomatopées et de certains huchements aux animaux, on voit qu'un son hors du langage humain est reproduit en prenant en compte la langue d'accueil (inventaire des voyelles, par exemple).

A travers les langues, on voit aussi que les mots expressifs peuvent montrer une morphologie déviante par rapport aux morphèmes et lexèmes de la langue (longueur, accentuation, structure acceptée de la syllabe, phono-esthétique...).


syntaxe et intégration syntaxique

Les mots expressifs ont différents degrés d'intégration dans les systèmes linguistiques, allant jusqu'à indépendance grammaticale dans le cas des interjections.

L'idée est commune que l'intégration grammaticale va avec une perte d'expressivité, jusqu'à ce que la dimension expressive soit totalement émoussée ou opaque pour les locuteurs.


sémantique et iconicité

Les mots expressifs sont généralement analysés comme montrant des formes d'iconicité. La question de l'iconicité est complexe. Les mots expressifs ont en tout cas une forme phonomorphologique qui déroge partiellement à l'arbitraire du signe.

L'iconicité potentielle des mots expressifs les rend particulièrement importants pour l'étude comparée des langues orales et des langues signées.


Horizons comparatifs

Les langues d'Asie, d'Afrique et des Amériques sont particulièrement bien documentées pour contenir des classes lexicales fermées de mots expressifs (Akita & Dingemanse 2019). Les langues varient dans leur inventaire de mots expressifs. Différentes hiérarchies implicationnelles ont été proposées.

  • Hiérarchie de l'iconicité lexicale (Akita 2009)
Phonomimes (onomatopées) > Phenomimes > Psychomimes
  • Hiérarchie implicationnelle des systèmes de mots expressifs (Dingemanse 2012)
Son > Mouvement > Visual patterns > autre perceptions sensorielles > sentiments et émotions internes


Terminologie

Dans la littérature francophone pré-moderne, le terme d'onomatopée a largement couvert le spectre large des mots expressifs. Sur ce site et en français contemporain, le terme d'onomatopée dénote plus précisément les mots formés sur l'imitation d'un son externe au langage humain, qui ne sont qu'une sous-classe des mots expressifs. Le terme de mot expressif rejoint les traditions terminologiques asiatiques du Sud et du Sud Est.

Dans ce même sens large que couvre le terme mot expressif, Doke (1935) a proposé en anglais le terme idéophone, maintenant communément utilisé en littérature anglophone. La tradition d'analyse japonaise, elle, utilise le terme de mimétiques (Akita 2009).


Bibliographie

  • Akita, K. 2009. A Grammar of Sound-Symbolic Words in Japanese: Theoretical Approaches to Iconic and Lexical Properties of Japanese Mimetics (PhD dissertation), Kobe University, Kobe. texte.
  • Akita, K., & M. Dingemanse. 2019. 'Ideophones (Mimetics, Expressives)', Oxford Research Encyclopedia for Linguistics. Oxford: Oxford University Press. doi:10.1093/acrefore/9780199384655.013.477.
  • Armoskaite, S., & Koskinen, P. 2017. 'Structuring sensory imagery: ideophones across languages and cultures', Canadian Journal of Linguistics/Revue Canadienne de Linguistique 1–5. https://doi.org/10.1017/cnj.2017.12.
  • Dingemanse, M. 2012. 'Advances in the cross-linguistic study of ideophones', Language and

Linguistics Compass 6(10), 654–672. https://doi.org/10.1002/lnc3.361.

  • Doke, C. M. 1935. Bantu Linguistic Terminology, London: Longmans, Green, and Co.
  • Ibarretxe-Antuñano, I. 2017. 'Basque ideophones from a typological perspective', The Canadian Journal of Linguistics / La Revue Canadienne de Linguistique 62(2), 196–220.
  • Svantesson, J.-O. 2017. 'Sound symbolism: the role of word sound in meaning', Wiley Interdisciplinary Reviews: Cognitive Science e0144, 1–12. https://doi.org/10.1002/wcs.1441
  • Trips, Carola. 2014. 'How to account for the expressive nature of phrasal compounds in a conceptual-semantic framework', Skase Journal of Theoretical Linguistics 11:1. 33-61.
  • Vigliocco, G., & Kita, S. 2006. 'Language-specific properties of the lexicon: Implications for learning and processing', Language and Cognitive Processes 21(7–8), 790–816.