Les complémenteurs

De Arbres

Un complémenteur est la tête fonctionnelle d'une proposition. Les conjonctions de subordination ou les pronoms relatifs, par exemple, sont des complémenteurs (La fille qui a vu le film que je t'ai dit.).


Le breton a des complémenteurs dans les propositions enchâssées (subordonnées ou complétives), mais aussi dans les phrases principales (dites 'matrices').

L'inventaire des complémenteurs, connecteurs et mots interrogatifs est sujet à de grandes variations dialectales, variations explorées ci-dessous.


Complémenteurs déclaratifs

ma

Le complémenteur ma introduit des subordonnées qui ne sont ni sujet ni objet.

Ce complémenteur entre comme composé morphologique dans un grand nombre de complémenteurs complexes, comme gant ma, salv ma, 'pourvu que'.

Il est au dessus de la négation potentielle (ma ne...). Il marque l'enchâssement, et est illicite en phrase matrice.


na, ne

Le complémenteur na introduit les proposition négatives. Jouitteau (2005/2010) propose que ce complémenteur provoque des effets "that-trace", ce qui prédit le paradigme des sujets prénégation.


le complémenteur vide suivi du rannig e

En breton le complémenteur est parfois réalisé par un morphème réalisé, comme ma, 'que', mais aussi parfois par unvide (c'est-à-dire non-réalisé phonologiquement).

Le complémenteur vide est un complémenteur qui n'est pas réalisé par un morphème morphologique segmental. On le décèle cependant dans la distribution de l'accent. Ce complémenteur vide est déclaratif: il est sélectionné par les verbes déclaratifs comme lavarout, 'dire'; gouzout, 'savoir'; krediñ, 'croire', gwelout, 'voir'...


(1) Eñ a lavaras e(z) oa kouezet en dour.
lui R dit que R4 oa tombé dans l'eau
'Il dit qu'il était tombé dans l'eau.' Trépos (2001:§380)


Ce complémenteur précède le rannig e4.

Le complémenteur vide est plausiblement compatible avec la négation qui apparaît plus bas que les complémenteurs déclaratifs réalisés.


variations dialectales

Ces complémenteurs déclaratifs en sont pas disponibles dans tous les dialectes.


la(r)

Le complémenteur la(r) n'est pas présent dans tous les dialectes. Il marque l'enchâssement, et est illicite en phrase matrice.


penaos

Le complémenteur penaos n'est pas un complémenteur déclaratif dans tous les dialectes. Il marque l'enchâssement, et est illicite en phrase matrice.


en

Le complémenteur en est restreint à certaine variétés de vannetais. Il s'agit possiblement aussi d'une forme du rannig.


(2) ... hag e lâr d'ar vestrez a sell doc'hti get truez, en he deus naon he mamm.
et R dit à'le 1patronne R regarde à.elle avec pitié que R3SGF a faim son mère
'...et elle dit à la patronne qui la regarde avec pitié que sa mère a faim.' Vannetais, Ar Meliner (2009:64)


Complémenteurs des questions

interrogation totale (Q)

Les marqueurs de l'interrogation totale, c'est-à-dire des questions oui/non. Ce sont: hag et hag eñ, daoust ha(g) et daoust hag eñ, c'hwistim, ou même eskø.

mots interrogatifs en pe-

Les mots interrogatifs sont ceux qui servent à "remplacer" l'élément sur lequel porte une question.


Complémenteurs introduisant des circonstantielles

temps

Les propositions circonstancielles de temps peuvent être introduites par pa, ou a-benn, 'quand'. On relève aussi evel ma, 'dès que'; goude, 'après'; keit et kenkoulz, 'tant (que)'...


pa, 'quand'

(1) P'oa deuet er maez, partiet al loan kuit.
quand était sorti dehors parti le bête parti
'Quand il est sorti, le cheval était parti.' Léon, Mellouet & Pennec (2004:79).


ha pa, 'quand'

En vannetais et jusque dans la vallée du Scorff, le complémenteur pa peut apparaître précédé du complémenteur ha(g).


(3) Doc'h en gwelet a pa red, e poania ur bochad.
à le voir quand court R peine un masse
'A son aspect (à le voir) quand il court, il peine beaucoup.' Le Scorff, Ar Borgn (2011:13)


a-benn, 'quand'

(2) Benn eo kouet hè barz.
quand est tombé 3PL dedans
'Quand ils sont tombés dedans.'
Breton de Saint Yvi, German (2007:174)


pese, 'quand'

Selon Le Dû (2012:98), la postériorité temporelle est marquée en trégorrois par le complémenteur pesé.


(z) Pesé nijé évhed vijé gwẽ.
quand avait.HAB bu était.HAB mauvais
'Quand il avait bu, il était mauvais.' Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:98)


keit ha(g) (ma), 'tant que'

(1) Keit ha ma vin-me mestr en ti-mañ.
que que serai-moi maître dans.le maison-ci
'Tant que je serai le maître de cette maison.' Cornouaillais (Bigouden), Trépos (2001:§248)


Le complémenteur ma n'apparait pas toujours.


  • Evel-se am-eus soñjet abaoe lar keit ha 'vez bihan an dud ne welent nemed traou braz en-dro dezo.
'Comme ça j'ai pensé depuis que tant que les gens sont petits, ils ne voient autour d'eux que des choses grandes.'
Uhelgoat, Skragn (2002:23)

e-keit (ma), 'pendant (que)'

(1) Ur wech hepken, e c'hellis pakañ anezhi e-keit ma c'hoarzhe outi hec'h-unan [...].
un 1fois seulement R4 pus attraper P.elle pendant que4 riait à.elle son.un
'Une seule fois, je pus la surprendre pendant qu'elle riait toute seule (...)'
Trégorrois (Kaouenneg)/Standard, ar Barzhig (1976:24)


e-kerzh (ma), 'pendant (que)'

goude, 'après'

La postériorité temporelle est marquée par goude. En haut-cornouaillais, on voit qu'il s'agit bien ici d'un complémenteur, car l'adverbe est autrement toujours war-lerc'h (Bouzeg 1986:29).


(2) Goude 'oa deuet da vat, 'veze gwelet Jos 'vale 'kost'z 'n aod bemdez.
après était venu pour bien était vu Jos à marcher à-côté le côte chaque.jour
'Après qu'il a été guéri, on voyait Jos se promener à la côte tous les jours.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:29)


evel ma, 'dès que'

(2) Me, evel m'am bez evet un dakenn win, e lamm ar gwad dioustu em fenn.
moi, comme que R.1SG ai bu un goutte vin, R saute le sang de.suite en.mon tête
'Moi, dès que je bois une goutte de vin, le sang me saute tout de suite à la tête.'
Trégorrois, Gros (1984:55).

kenkoulz, 'tant (que)'

lieu

e-lec'h ma, 'où'

(1) Ma oa brao dezo [ e-leh ma oant ] e oa dezo beza chomet eno.
si était beau à.eux au-lieu que étaient R était à.eux être resté
'S’ils se trouvaient bien où ils étaient, c’était à eux d’y être restés.'
‘… il leur appartenait d’y rester.’ Trégorrois, Gros (1970:154)


Le complémenteur ma n'est pas forcément réalisé, ni la préposition e (voir Nicolas 2005:52)


(2) an ti lec'h ec'h yaen da labourat.
le maison lieu _[ø]_ R allais pour travailler
'la maison où il travaillait.' Lanvenejen, Favereau (1997:§585), citant Evenou (1989)

but

ma, 'pour'

(1) Kemer eur baner, ma tastumi an avaloù.
prends un1 panier que rassembleras le pomme.s
'Prends un panier pour ramasser les pommes.' Trépos (2001:§383)


abalamour da, 'afin de'

abalamour da se trouve comme équivalent du français 'afin de' (attention, abalamour da est aussi employé pour marquer la cause).


(3) abalamour da gaout greun ha kolo.
C de1 avoir grain et paille
'pour avoir du grain et de la paille.' Léon, Mellouet & Pennec (2004:92).


evit ma, 'pour'

(1) Kemer a ra eur baner evit ma tastumo an avaloù.
prendre R fait un1 panier pour que rassemblera le pomme.s
'Il prend un panier pour ramasser les pommes.' Trépos (2001:§383)


evit ne, 'pour ne pas'

(1) En em zivenn a ra evit ne vezo ket lakaet er-mêz.
se1 défendre R fait pour ne sera pas mis dehors
'Il se défend pour ne pas être jeté dehors.' Trépos (2001:§383)


kuit da, 'pour ne pas'

Solliec (2015) relève à Loqueffret kɥit da , 'pour ne pas'.

moyen, manière

pegiz, 'comment'

(1) [ he wije pig̈is wahô be daj c̈wiT ]
Int a ouie pegiz (e)c'h oa-eñ bet deuet kuit.
eux R savait comment R était-lui ptc venu parti
'Eux savaient comment il était parti.' Haut-cornouaillais (Lanijen), Evenou (1987:575)


penaos, 'comment'

(2) N' ouzon ket penaoz eo chomet beo ar chatal .
ne sais pas comment est resté vivant le bétail
'Je ne sais pas comment le bétail est resté vivant.'
Léonard, (Cléder) Seite (1998:141)

opposition

abdal, padal, 'alors que'

(1) Ni 'oa ' c'hortoz Loeiz abdal 'oa chomet da ruzañ.
nous était à attendre Loeiz alors.que était resté à traîner
'Nous attendions Loeiz, alors qu'il était resté à traîner.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:29)


e-lec'h, 'alors que'

(1) Hoñzh zeske ‘lec’h me reen ket.
celle.ci 1apprenait (dans).lieu moi (ne) faisais pas
'Elle, elle apprenait [bien] alors que ce n’est pas mon cas (litt. je ne faisais pas).' Loqueffret, Solliec (2015)


daoust da, 'malgré, bien que'

(1) Daoust dezhañ da vezañ krommet un tammig gant ar boan-gein...
malgré P.lui de1 être courbé un morceau.petit avec le 1douleur-dos
'bien qu'il soit un peu courbé par le mal de dos...'.
Trégorrois (Kaouenneg)/Standard, ar Barzhig (1976:51)

concessives

ha pa, 'quand bien même'

(4) Ha pa valefen aman seiz lew en dro da gêr, Me na gavfen ket unan capab d’am c’hass d’ar gêr.
et quand1 marcherais ici 7 lieu autour de lieu moi ne1 trouverais pas un capabl de'me envoyer à le maison
'Quand bien même je ferais 7 lieues alentour, je ne trouverais personne pour me ramener chez moi.'
zon cloarec Pempoul, An Uhel (1890:II, 192)

a-bosubl, 'même si, quand bien même'

(1) [mə zo ˈdɛd a bɛn da ˈgõpʁən ˈnaɔ̯̃ a ˈpoʃə nø ʃə ˈkoːs tijõ ˌnõ]
Me zo deuet a-benn da gompren anezhañ a-bosubl n'en deus ket kaozeet ouzhin anezhañ.
moi est venu à.bout de comprendre P.lui de-possible ne' R.3SG a pas parlé à.moi P.lui
'J'ai réussi à le comprendre quand bien même il ne m'a pas parlé.'
Moëlan, Cheveau & Kersulec (2012-évolutif:Moëlan,'a-bosubl')

na bout, na boût 'zo Doue, 'même si'

La locution complexe na bout, ou na boût 'zo Doue, 'bien que, même si' apparaît parfois sous la forme raccourcie nabochdou.


(2) Na boût 'zo Doue 'vo glav 'ni yelo da vale.
C.être.y.a.Dieu 'y.aura pluie nous ira à marcher
'Même s'il pleut, nous irons nous promener.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:35)


poseve, 'quand bien même'

(1) Poseve vichen aet, pet'a mije gwelet?
quand.bien.même serais allé quoi aurais vu
'Quand bien même j'[y] serais allé, qu'y aurais-je vu?' Loqueffret, Solliec (2015:78)

petra bennak, 'quoique'

soustraction

penemet, 'sinon'

panevet, panese, 'si ce n'est'

nemet, 'seulement'

keneve, 'n'était-ce'

kennebeut, 'non plus'

hypothèses

ha pa, 'si'

(1) Bout a zo e-leizh hag a rahe èltoñ a pa vehent lezet...
EXPL R est beaucoup que R ferait comme.lui et quand seraient laissé
'Yen a beaucoup qui feraient comme lui si on leur laissait le choix.' Vannetais, Herrieu (1994:58)


gant aon ne, 'de peur que'

(2) Lakaet em eus kordenn, gant aon ne vezo diskaret an doenn gand an avel.
mis 1SG a corde avec peur ne sera détruit le 1toit avec le vent
'J'y ai mis des cordes, de peur que le toit ne soit abattu par le vent.' Trépos (2001:§383)


betegout ma/ne, 'au cas où'

(2) Degas't ho harz-glav ganeoc'h betegoût ma teuio ar barrad.
apportez vos stoppe-pluie avec.vous jusqu'à.savoir viendra le averse
'Prenez votre parapluie, au cas où il viendrait une averse.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:29)


(3) Na brenit ket gwin c'hoaz, betegoud n'en-devo ket eñ prenet araog dont.
ne1 achetez pas vin encore jusqu'à.savoir ne'3SGM-aura pas lui acheté avant venir
'N'achetez pas encore de vin, de peur qu'il ne l'ai acheté avant de venir.' Trépos (2001:§383)


betek (ma), 'pourvu que, tant que'

(4) Kõtɑ̃n õ de jitour bétég vĩ pêet.
Kontant on da sikour betek vin paeet. orthographe standard
OK suis de aider tant (que) serais payé
'Je veux bien aider, pourvu que je sois payé.' Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:99)

causalité

 abalamour ma, peogwir, pandeogwir, penegwir, a gost ma, rak, kar, a zo kaoz, dre ma, dre an abeg, en abeg ma, digar, parskan, beke, darpenn, trapenn, ouzhpenn...


abalamour ma

(1) N'am-bo ket aon, abalamour ma vezin ambrouget gant ma zad.
ne'aurai pas peur en.raison que serai escorté avec mon2 père
'Je n'aurai pas peur, parce que mon père m'escortera.' Trépos (2001:§363)


peogwir, pandeogwir, penegwir, pugur...

On trouve en complémenteur de causalité la forme peogwir et ses diverses variations dialectales.


(3) '... pandeogwir eh oc'h é pasiñ dre amañ, marse ho po un tasad kafe?'
puisque R êtes à passer par ici peut-être 2PL aura un tasse.contenu café
'Comme vous passez par là, vous prendrez bien un café?’
Vannetais, Elen, introduction Ar Meliner (2009:7)

a-gost ma

(6) A gost ma ous aman, te chomou de zèbein genem.
P _ C es.2SG ici toi resteras pour manger avec.nous
'Puisque tu es là, tu resteras manger avec nous.' Vannetais (Plaudren), (Quéré 2010)


nanvai

Le Dû (2012:98) signale en trégorrois les formes pegur et nɑ̃vɑ̃i, 'puisque, parce que'.


(7) brénjé-ke giĝ méɑ̃ nɑ̃vɑ̃i wa ré-gér.
achèterait-pas viande dit.il puisque était trop cher
'Il a dit qu'il n'achèterait pas de viande, puisqu'elle était trop chère' Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:98)


kar

(8) [ fot ke la:ɤ gɛjəɤ kaɤ gud ɤã aɤ veɤjõnə ]
faut pas dire mensonges car savoir fais le vérité
'Ne di(te)s pas de mensonges car je connais la vérité.'
'Do not say lies since I know the truth' Breton central, (Wmffre 1998:56)


a zo kaoz

A Quimperlé ou à Clohars, selon Denise L. et Anne-Marie C., l'usage du connecteur standard X peogwir Y, parallèle en sa construction avec le français 'X car Y est exogène. La tournure utilisée renverse la connection logique en plaçant la cause avant la conséquence: Y 'dreus 'zo kaoz' X. Cette tournure est aussi favorisée en centre Bretagne avec Y 'na 'zo kaoz' X'.

Autre exemple de variation, Huguette (Carhaix-Quimperle) signale qu'elle utilise goz'tra (a gaoz da betra, 'à cause de quelle.chose') là où le standard utiliserait perak ('pourquoi').


Entendu aussi: "setu kaoz da berak" (dans une chanson vannetaise chantée par le groupe AL Liamm - webnoz 23).


dre ma

(1) N'am-bo ket aon, dre ma vezin ambrouget gant ma zad.
ne'aurai pas peur de.part que serai escorté avec mon2 père
'Je n'aurai pas peur, parce que mon père m'escortera.' Trépos (2001:§363)


dre an abeg, en abeg ma

(2) Aet oa hi kuit, dre 'n ab'g 'oa 'n noz ' tont.
allé était elle parti par le raison était le nuit à tomber
'Elle est partie, pour la raison que la nuit venait.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:29)


(3) Re hir eo bremañ, en abeg m' hen hoc'h eus astennet.
trop long est maintenant dans raison que le avez étiré
'Il est trop long maintenant, puisque vous l'avez étiré.' cité par Trépos (2001:§363)


digar, war zigarez

(4) 'ma ket deuet 'nezhi, digar 'oa bet rial dec'h.
est pas venu P.elle sous.prétexte y.avait eu verglas hier
'Elle n'était pas venue, sous prétexte qu'il y avait eu du verglas hier.' Haut-cornouaillais (Riec), Bouzeg (1986:29)


Solliec (2015) relève à Loqueffret la forme /vaʁ ziˈgaʁe/ , 'au prétexte que'.


parskan

(5) /parskan bud əwaj e-rgaer bijənoX ẃidon.../
parce.que expl R.y.avait dans.le foyer petit.plus que.moi
'Parce qu'à la maison il y a avait des plus petits que moi...' Groix, Ternes (1970:248)


beke

La forme beke, /ˈbeke/ est reportée à Loqueffret dans le sens de 'puisque' (Solliec 2015).


darpenn, trapenn, 'car'

ouzhpenn, 'outre que'

conséquences

Une proposition dénotant une conséquence peut être introduite par setu, ou ha neuze.


setu

ha neuze

Relatives

Les propositions relatives peuvent être introduites

par ha(g) avec un antécédent indéfini
par ma dans les relativisations positives de noms de temps (non sujet)
ou par un complémenteur vide

Dans les relativisations négatives de noms de temps, le seul complémenteur réalisé est na (Hingant 1868:§118).

Enn amzer na renn nétra , é oann reûzeûdik.
'Le temps où je ne faisais rien, j'étais malheureux.' (Hingant 1868:§118)

Pseudo-relatives

a-gement

Le complémenteur complexe a-gement peut introduire une pseudo-relative.


(1) N'eus ken med er zizun-mañ a-gement n'eo ket bet.
ney.a que mais dans.le semaine-ci que ne'est pas été
'Il n'y a que cette semaine-ci qu'il n'y a pas été.'
Trégorrois, Gros (1989:'bet')

Structures comparatives

Puisqu'il est possible de transformer une proposition en un argument en l'introduisant par ma ou na au négatif, toutes les prépositions de comparaison peuvent former avec ces complémenteurs une structure de proposition circonstancielle de comparaison.


evel ma, 'comme si'

(1) evel ma ouezfe / evel na ouezfe ket
comme si savait / comme ne.si savait pas
'comme s'il savait / comme s'il ne savait pas' Merser (2011:57)


evel ha pa, 'comme si'

(2) ...èl a pa vennahe ma zrugarekaat e'it ar pezh am eus graet eviti [...].
...comme et quand voulait me remercier pour le ce.que R.1SG a fait pour.elle
'...comme si elle voulait me remercier de ce que j'ai fait pour elle [...].' Vannetais, Herrieu (1994:56)


comparatives de supériorité et d'égalité

Le complémenteur qui apparaît dans les comparatives de supériorité est eget en alternance dialectale avec evit.

Celui des comparatives d'égalité est evel.


(2) [ mø ɛspera mi wutʃəkɛn tɥɛmərblema ɛlər ble pasət ]
me 'espera m'e vo ket ken tuemm ar blez-mañ èl ar blez paset
moi espère que sera pas aussi chaud le année-ci comme le année passé
'J'espère qu'il fera pas aussi chaud cette année que l'année passée.'
Bas-vannetais, Nicolas (2005:16)

Conjonctions de coordination

Les conjonctions de coordination prennent comme arguments deux éléments de même catégorie syntaxique et de même rang. Ce sont:



Les conjonctions de coordination ont des affinités évidentes avec les autres complémenteurs. En breton, la conjonction de coordination équivalente au français et est ha(g). Il est frappant de voir que cette conjonction de coordination est réalisée de la même façon qu'une tête de complétive conditionnelle, ou que la tête d'une relative.


Certaines des conjonctions, surtout adverbiales, peuvent prendre comme argument un élément vide, présent auparavant dans le discours. Ce sont des conjonctions de coordination si on considère qu'elles prennent des propositions indépendantes comme arguments.


Complémenteur exclamatif

na(g), 'que'

(2) Nag a wez pilet d'an avel foll!
que de1 arbres abattu à'le vent fou
'Que d'arbres abattus par le vent déchainé!' Le Scorff, Ar Borgn (2011:7)


Grammaticalisation des complémenteurs

A travers les langues, l'étude des complémenteurs en diachronie montre des processus de grammaticalisation à partir de différentes catégories linguistiques. Il semble que ces processus de création des complémenteurs suive des chemins sémantiquement universaux.


 Bertin & Bat-Zeev Shyldkrot (2008:introduction):
 "Les conjonctions temporelles suivent un parcours ordonné (Heine et Kuteva 2002, 2005) [...] en fonction de la notion temporelle exprimée, il est généralement possible de prévoir dans quel sens la conjonction est susceptible d’évoluer. Pour ne prendre qu’un exemple, très tôt dans les travaux de la grammaticalisation, il a été signalé par Traugott (1982), Bat Zeev Shyldkrot (1987, 1989) que la notion temporelle exprimée par la conjonction pouvait entraîner une évolution sémantique de type différent. Ainsi les conjonctions exprimant la simultanéité comme alors que ou tandis que devenaient assez régulièrement des expressions de concession ; de même, une conjonction temporelle exprimant l’antériorité comme puisque devenait très tôt dans la constitution du français, une conjonction à sens causal."

Terminologie

Les complémenteurs sont aussi appelés conjonctions ou connecteurs.

La projection étendue d'un complémenteur est un domaine propositionnel, désigné ici par l'abréviation CP (cf. l'anglais Complementizer Phrase).

Press (1986:246) traduit stagell par l'anglais conjunction, avec stagell-kenurzhiañ / coordinating conjunction et stagell-isurzhiañ / subordinating conjunction.


Bibliographie

breton

  • Borsley, R. & A. Kathol, 2000. 'Breton as a V2 language', Linguistics 38/4:665-710.
  • German, G. 2007. 'Language Shift, Diglossia and Dialectal Variation in Western Brittany: the Case of Southern Cornouaille', The Celtic languages in contact : Papers from the workshop within the framework of the XIII International Congress of Celtic Studies, Bonn, July 2007, Hildegard L. C. Tristram (ed.), Postdam. pdf.
  • Hemon, R. 1969. 'Hag-eñ', Ar Bed Keltiek 126 : 155-156.
  • Hemon, R. 1969. 'ma’ ha mar', Ar Bed Keltiek 128 :218.
  • Quéré, A. 2010. 'Remarques sur le breton parlé à Plaudren', présentation au séminaire de la Bretagne Linguistique, 11 juin 2010, Brest.
  • Wmffre, I. 1998. Central Breton [= Languages of the World Materials 152] Unterschleißheim: Lincom Europa.

horizons comparatifs

  • Bat-Zeev Shyldkrot, H. 1987, 'Quand, alors que et tandis que : un cas classique d'évolution sémantique', Romance Notes, 28/1:45-51.
  • Bat-Zeev Shyldkrot, H. 1989, 'Conjonctions et expression temporelle-causale en français', Folia Linguistica Historica, X: 1-2:263-281.
  • Bertin, Annie & Hava Bat-Zeev Shyldkrot. 2008. Les conjonctions en diachronie : parcours sémantiques, LINX 59, pdf.
  • Heine, B., & Kuteva, T. 2002, World Lexicon of grammaticalization, Cambridge, Cambridge University Press.
  • Heine, B., & Kuteva, T. 2005, Language contact and grammatical change, Cambridge, Cambridge University Press.
  • Leeman, Danielle (dir.) 2002. Les connecteurs, LINX 46, pdf
  • Traugott, E. C. 1982, 'Meaning Change and the Development of Grammatical Markers', Language Sciences, 2/1:44-61.