Différences entre les versions de « Le passif »
Ligne 97 : | Ligne 97 : | ||
== Syntaxe == | == Syntaxe == | ||
Seul l'auxiliaire ''[[bezañ]]'', 'être' est licite à la voix passive ([[Kervella (1947)|Kervella 1947]]:§178), en opposition à ''[[ober]]'', 'faire et à ''[[kaout]]'', 'avoir'. | Seul l'auxiliaire ''[[bezañ]]'', 'être' est licite à la voix passive ([[Kervella (1947)|Kervella 1947]]:§178), en opposition à ''[[ober]]'', 'faire' et à ''[[kaout]]'', 'avoir'. | ||
La distribution large du passif en breton est due à différents facteurs convergents. | La distribution large du passif en breton est due à différents facteurs convergents. | ||
Ligne 136 : | Ligne 137 : | ||
En français ou en anglais, la passivisation d'un verbe transitif dont le sujet est un [[expérienceur]] est impossible. Un verbe transitif dont l'argument externe est un [[expérienceur]], et non un [[agent]], n'a pas de forme passive dans ces langues. Cette différence typologique concourt à faire qu'en breton, les formes passives soient plus répandues. | En français ou en anglais, la passivisation d'un verbe transitif dont le sujet est un [[expérienceur]] est impossible. Un verbe transitif dont l'argument externe est un [[expérienceur]], et non un [[agent]], n'a pas de forme passive dans ces langues. Cette différence typologique concourt à faire qu'en breton, les formes passives soient plus répandues. | ||
=== tournures impersonnelles et sujet indéfini === | |||
==== variation dialectale ==== | |||
[[Kervella (1947)|Kervella (1947]]:§216,a) note que dans sa variété de breton, une phrase passive ne peut pas avoir un sujet réalisé après l'auxiliaire. Selon lui, les phrases en (1) seraient agrammaticales en commençant par le participe (il recommande l'usage de [[l'impersonnel]] verbal ''-er''). | |||
{| class="prettytable" | {| class="prettytable" | ||
| ( | | (2) ||<u>Tud</u> a zo anavezet. || <u>Dek</u> a zo kaset. || <u>Un niz dezhañ</u> a zo pedet. | ||
|- | |- | ||
||| | | || gens [[R]] [[zo|est]] connu ||[[les numéraux cardinaux|dix]] [[R]] [[zo|est]] envoyé || [[art|un]] neveu [[a|à]].[[pronom incorporé|lui]] [[R]] [[zo|est]] invité || [[Kervella (1947)|Kervella (1947]]:§216,a) | ||
|- | |- | ||
| ||colspan="4" |'Des gens sont connus. Dix ont été envoyés. Un neveu à lui a été invité.' | |||
|||colspan="4" | ' | |||
|} | |} | ||
Ces ordres de mots sont cependant faciles à documenter. | |||
Ligne 168 : | Ligne 169 : | ||
En (3), | Il est malaisé de décider si la tournure est passive (''Une souris a été attaquée par le chat'') ou s'il s'agit d'une tournure impersonnelle ('''''Il''' a été attaqué une souris par le chat''). En effet, l'équivalent de l'[[explétif]] ''il'' en français serait en breton un [[pronom vide]]. | ||
En (3), on voit que la forme ''ez eus'' de l'auxiliaire est déclenchée par la définitude du [[patient]], car la forme ''eo'' apparaît dès que le patient ''ar priz'', [[défini]], lui est substitué. | |||
{| class="prettytable" | {| class="prettytable" | ||
| (3) || | | (3) || Diou wech ||'''ez eus''' || bet roet ||<u>eur priz</u> ||d'eul levr savet gantañ. | ||
|- | |- | ||
||| | ||| Diou wech ||'''eo ''' || bet roet ||ar priz ||d'eul levr savet gantañ | ||
|- | |||
||| [[Les numéraux cardinaux|deux]] fois ||[[R]] [[COP|est]]|| [[bet|été]] donné || [[art|le]] prix ||[[da|à]] [[art|un]] livre monté [[gant|par]].[[pronom incorporé|lui]] | |||
|- | |- | ||
|||colspan="4" | ' | |||colspan="4" | 'Deux de ses livres ont reçu un prix.' ||||||||||||''Léon'',|| [[Fave (1998)|Fave (1998]]:142) | ||
|} | |} | ||
Ce n'est cependant pas un argument définitif pour écarter l'hypothèse d'une tournure impersonnelle, car ces tournures sont prototypiquement limitées de la même façon ('''*Il a été attaqué la souris par le chat''). On peut juste dire que s'il existe un pronom explétif vide, celui-ci serait [[indéfini]], puisque la forme ''eo'' de l'auxiliaire ne pourrait pas lui être associé. | |||
Il est possible que l'usage du passif ait l'air plus répandu en breton en partie pour la raison que les tournures impersonnelles sont comptées dans les passifs. | Il est possible que l'usage du passif ait l'air plus répandu en breton en partie pour la raison que les tournures impersonnelles sont comptées dans les passifs. | ||
En (1), le sujet syntaxique du verbe passif est soit la [[proposition]] [[enchâssée]], soit un explétif du passif impersonnel, [[co-référent]] avec | === tournures impersonnelles === | ||
Les tournures impersonnelles sont indépendamment présentes en breton. On le voit lorsque le patient est une proposition [[enchâssée]]. | |||
En (1), le sujet syntaxique du verbe passif est soit la [[proposition]] [[enchâssée]], soit un explétif du passif impersonnel, [[co-référent]] avec cette proposition enchâssée (tensée ou infinitive comme en (2)). | |||
{| class="prettytable" | {| class="prettytable" | ||
| (1) || | | (1) || Diskouezet || '''ez eus''' ||bet gant x||<font color=green>[</font color=green><sub>[[CP]]</sub> ||e vez muioc'h... | ||
|- | |- | ||
| || | ||| montré ||[[R]] est||[[bet|été]] [[gant|par]] x|| || [[R]] [[vez|est]] [[muioc'h|plus]] | ||
|- | |- | ||
| ||colspan="4" |'Il | |||colspan="4" | 'Il a été montré par X qu'il y avait plus de...' ||||||||||||''Léon'',|| [[Fave (1998)|Fave (1998:142)]] | ||
|} | |} | ||
Ligne 210 : | Ligne 218 : | ||
Les seuls auxiliaires possibles dans ces constructions, à travers les dialectes, sont les formes ''[[zo]]'' et ''[[ez eus]]''dans les variétés où ces formes sont associées à un sujet [[indéfini]]. L'hypothèse de l'existence d'un [[explétif]] vide indéfini semble plausible. | |||
{| class="prettytable" | {| class="prettytable" | ||
| ( | | (2) ||Lavaret || ''' 'z eus/' zo / *eo''' || bet din || <font color=green>[</font color=green> e oa klañv <font color=green>]</font color=green>. | ||
|- | |- | ||
| || | | || dit ||est || [[bet|été]] [[da|à]].[[pronom incorporé|moi]] || [[R]] [[COP|était]] malade | ||
|- | |- | ||
| || colspan="4" | ' | | ||colspan="4" |'Il m'a été dit qu'il était malade.' || [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§443) | ||
|} | |} | ||
On obtient donc une analyse des tournures impersonnelles où il existerait en breton au moins deux pronoms explétifs vides, l'un défini, associé à certaines constructions, et visibilisé par la forme ''eo'' de la copule, et l'autre indéfini, associé, suivant les dialectes, aux copules ''zo'' et ''ez eus''. | |||
{| class="prettytable" | {| class="prettytable" | ||
| ( | | (3)|| Difennet || '''eo''' || tapout kokouz |||| ''sujet défini'' | ||
|- | |- | ||
| || défendu || [[COP|est]] || prendre coques | | || défendu || [[COP|est]] || prendre coques | ||
|- | |- | ||
| || colspan="4" | 'Il est défendu de ramasser des coques.'|| [[TBP.II|Gros (1970]]:124), cité dans [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§443) | | || colspan="4" | 'Il est défendu de ramasser des coques.'|| [[TBP.II|Gros (1970]]:124), cité dans [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§443) | ||
|} | |||
{| class="prettytable" | |||
| (4)|| Difennet || '''zo''' || tapout kokouz |||| ''sujet indéfini'' | |||
|- | |||
| || défendu || [[zo|est]] || prendre coques | |||
|- | |||
| || colspan="4" | 'On a défendu de ramasser des coques.' || [[TBP.II|Gros (1970]]:124), cité dans [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§443) | |||
|} | |} | ||
Version du 27 février 2014 à 12:37
Le passif est un mode verbal où, pour un verbe transitif, l'agent apparaît comme un argument indirect du verbe introduit par la préposition gant. L'argument interne, ici le patient, est sujet.
(1) | Skoeit on | genoc'h. | ||||
frappé suis | avec.vous | |||||
'Je suis frappé par toi, tu me plais.' | ||||||
Le Scorff, Ar Borgn (2011:40) |
Le passif est un cas d'absorption dans la grille thématique du verbe: un verbe transitif passe de deux arguments obligatoires (le sujet argument externe et l'objet argument interne) à un seul (le sujet argument interne). En (2), l'argument externe agent de l'action de manger est absent de la phrase. Le sujet grammatical réfère à l'entité affectée par l'action, l'argument interne qui porte le rôle thématique de patient.
(2) | A-benn neuze | e vint | debret | toud. | |||||||
d'ici alors | R seront | mangé | tous | ||||||||
'D'ici là ils seront tous mangés.' | Trégorrois, | Gros, (1984:312) |
Le passif a une distribution très large en breton, comparativement au français ou à l'anglais.
Morphologie
variation dialectale
Trépos (2001:§593): La préposition dre peut, en vannetais, introduire le complément d'agent (au lieu de gant en KLT)
Presque tous les compléments d'agent des passifs dans le vannetais de Herrieu (1974) sont introduits par da. On trouve aussi la préposition da dans la vallée du Scorff.
(2) | An hani wellañ | gwraet dezhoñ | biskoazh. | ||||
le celle meilleure | faite à.lui | jamais | |||||
'La meilleure qu'il ait jamais faite.' | Job Jaffré, Le Scorff, cité par Ar Borgn (2011:53) |
(3) | Achapomp | 'raok ma vimp | tapet dezhe! | |||
échappons | avant que serons | attrapé à.eux | ||||
'Echappons-nous avant qu'ils ne nous rattrapent!' | ||||||
Le Scorff, Ar Borgn (2011:38) |
(4) | Nag a wez | pilet d'an avel foll! | ||||
que de1 arbres | abattu à'le vent fou | |||||
'Que d'arbres abattus par le vent déchainé!' | ||||||
Le Scorff, Ar Borgn (2011:7) |
Cependant, on trouve aussi des compléments d'agent introduits par gant dans la vallée du Scorff.
(5) | Lod traoù | 'vez difennet | g'an Iliz. | |||
certain choses | est défendu | avec le Eglise | ||||
'Certaines choses sont interdites par l'Eglise.' | Le Scorff, Ar Borgn (2011:67) |
Sporadiquement, on en trouve aussi dans Herrieu.
(1) | Livet eo | an dachenn | gete. | ||||
peint est | le sol | avec.eux | |||||
'Le sol en change de couleur.' | Vannetais, Herrieu (1994:32) |
Syntaxe
Seul l'auxiliaire bezañ, 'être' est licite à la voix passive (Kervella 1947:§178), en opposition à ober, 'faire' et à kaout, 'avoir'.
La distribution large du passif en breton est due à différents facteurs convergents.
verbes transitifs sans agent
En breton, contrairement au français, la préposition du complément optionnel du passif peut introduire un expérienceur.
Le verbe koll, 'perdre', en (1), est à la voix active et son sujet 3SGM est un expérienceur.
(1) | Dall, | ne wele ket mat, | kollet en deus | e wel. | |||||||||
aveugle | ne voyait pas bien | perdu R.3SGM a | son vue | ||||||||||
'Aveugle, il ne voyait pas bien, il a perdu la vue.' | Combrit, Dastum fichier SAY2913610. |
La structure en (2) montre le même verbe au passif. Son équivalent actif est Kollet en deus eñvor. Le prédicat est kollet, prédiqué sur le sujet e eñvor par la copule eo (forme de la copule qui confirme que son sujet la suit). La préposition gant amène l'expérienceur.
(2) | Kollet | eo | e eñvor | gantañ. | |||||||||
perdu | est | son mémoire | avec.lui | ||||||||||
'Il a perdu la mémoire.' | Uderzo & Goscinny (1977:13) | ||||||||||||
(*'sa/la mémoire est perdue avec/par lui.') | |||||||||||||
(*'his/the memory is lost by him.') |
En français ou en anglais, la passivisation d'un verbe transitif dont le sujet est un expérienceur est impossible. Un verbe transitif dont l'argument externe est un expérienceur, et non un agent, n'a pas de forme passive dans ces langues. Cette différence typologique concourt à faire qu'en breton, les formes passives soient plus répandues.
tournures impersonnelles et sujet indéfini
variation dialectale
Kervella (1947:§216,a) note que dans sa variété de breton, une phrase passive ne peut pas avoir un sujet réalisé après l'auxiliaire. Selon lui, les phrases en (1) seraient agrammaticales en commençant par le participe (il recommande l'usage de l'impersonnel verbal -er).
(2) | Tud a zo anavezet. | Dek a zo kaset. | Un niz dezhañ a zo pedet. | |
gens R est connu | dix R est envoyé | un neveu à.lui R est invité | Kervella (1947:§216,a) | |
'Des gens sont connus. Dix ont été envoyés. Un neveu à lui a été invité.' |
Ces ordres de mots sont cependant faciles à documenter.
(2) | Skrivet | 'z eus/' zo / *eo | bet ul levr. | ||
écrit | est | été un livre | |||
'Il a été écrit un livre.' | Favereau (1997:§443) | ||||
'Un livre a été écrit.' |
Il est malaisé de décider si la tournure est passive (Une souris a été attaquée par le chat) ou s'il s'agit d'une tournure impersonnelle (Il a été attaqué une souris par le chat). En effet, l'équivalent de l'explétif il en français serait en breton un pronom vide.
En (3), on voit que la forme ez eus de l'auxiliaire est déclenchée par la définitude du patient, car la forme eo apparaît dès que le patient ar priz, défini, lui est substitué.
(3) | Diou wech | ez eus | bet roet | eur priz | d'eul levr savet gantañ. | ||||||
Diou wech | eo | bet roet | ar priz | d'eul levr savet gantañ | |||||||
deux fois | R est | été donné | le prix | à un livre monté par.lui | |||||||
'Deux de ses livres ont reçu un prix.' | Léon, | Fave (1998:142) |
Ce n'est cependant pas un argument définitif pour écarter l'hypothèse d'une tournure impersonnelle, car ces tournures sont prototypiquement limitées de la même façon ('*Il a été attaqué la souris par le chat). On peut juste dire que s'il existe un pronom explétif vide, celui-ci serait indéfini, puisque la forme eo de l'auxiliaire ne pourrait pas lui être associé.
Il est possible que l'usage du passif ait l'air plus répandu en breton en partie pour la raison que les tournures impersonnelles sont comptées dans les passifs.
tournures impersonnelles
Les tournures impersonnelles sont indépendamment présentes en breton. On le voit lorsque le patient est une proposition enchâssée.
En (1), le sujet syntaxique du verbe passif est soit la proposition enchâssée, soit un explétif du passif impersonnel, co-référent avec cette proposition enchâssée (tensée ou infinitive comme en (2)).
(1) | Diskouezet | ez eus | bet gant x | [CP | e vez muioc'h... | ||||||
montré | R est | été par x | R est plus | ||||||||
'Il a été montré par X qu'il y avait plus de...' | Léon, | Fave (1998:142) |
(2) | N'eus ket bet | laret dit morse [ | souchañ da filip? ]. | ||
ne est pas été | dit à.toi jamais | cacher ton zizi | |||
'On ne t'a jamais dit de cacher ton zizi?' | Favereau (1997:§443) | ||||
'Il ne t'a jamais été dit de...' |
Les seuls auxiliaires possibles dans ces constructions, à travers les dialectes, sont les formes zo et ez eusdans les variétés où ces formes sont associées à un sujet indéfini. L'hypothèse de l'existence d'un explétif vide indéfini semble plausible.
(2) | Lavaret | 'z eus/' zo / *eo | bet din | [ e oa klañv ]. | |
dit | est | été à.moi | R était malade | ||
'Il m'a été dit qu'il était malade.' | Favereau (1997:§443) |
On obtient donc une analyse des tournures impersonnelles où il existerait en breton au moins deux pronoms explétifs vides, l'un défini, associé à certaines constructions, et visibilisé par la forme eo de la copule, et l'autre indéfini, associé, suivant les dialectes, aux copules zo et ez eus.
(3) | Difennet | eo | tapout kokouz | sujet défini | |
défendu | est | prendre coques | |||
'Il est défendu de ramasser des coques.' | Gros (1970:124), cité dans Favereau (1997:§443) |
(4) | Difennet | zo | tapout kokouz | sujet indéfini | |
défendu | est | prendre coques | |||
'On a défendu de ramasser des coques.' | Gros (1970:124), cité dans Favereau (1997:§443) |
verbes intransitifs
Trépos (2001:§419): "En principe, les verbes intransitifs, qui n'ont pas de complément d'objet, ne peuvent pas se mettre à la voix passive. Cette tournure est cependant possible pour beaucoup d'entre eux: la préposition qui précède le complément déterminatif devient préposition conjuguée; ainsi: voix active Ar vugale a zent ouzh ar mestr-se. 'Les enfants obéissent à ce maître.' voix passive Ar mestr-se a vez sentet outañ gant ar vugale. 'Ce maître est obéi des enfants.'
Même mis à part la construction du faux sujet, l'équivalent en français est agrammatical (* Il est obéi à ce maître par les enfants).
Stylistique et pragmatique
La stylistique et a pragmatique peuvent aussi concourir à une utilisation plus répandue des passifs en breton qu'en anglais ou en français.
désambiguïsation syntaxique
Avec les verbes transitifs à deux arguments lexicaux, utiliser un passif permet de différencier syntaxiquement le sujet de l'objet dans les ordres VSO (verbe-sujet-objet).
pragmatique et stylistique
Les verbes transitifs sont plus souvent au passif en breton qu'ils ne le sont en français ou en anglais pour des raisons de pragmatique (préservation de la face par impersonnalisation).
Gros (1970:32), breton trégorrois: Le passif breton se traduit dans de nombreux cas par l'actif [en français] Debret eo ho koan ganeoh?, 'Votre dîner est-il mangé par vous? (avez-vous dîné?) Souezet braz on ganit, 'Je suis fort étonné par toi (tu m'étonnes beaucoup).' Gant piv eo bet gwerzet?, 'Par qui fut-il trahi? (: qui le trahit?)' E peleh e vez prenet an traou-ze?, 'Où sont achetées (où achète-t-on) ces choses-là.' Piou a vez greet diouzit (ahanout)?, 'Qui est fait de toi? (qui, comment t'appelle-t-on?)' Hennez a zo bet greet evitañ, 'Il a été fait pour lui (on l'a aidé).' Hag e veze lavaret evel-henn gand an dud., 'et il était dit comme ceci par les gens (et les gens disaient ceci...)'
Madeg (2013:8), breton du Léon: Ganez eo bet graet ? ; 'C'est toi qui a fait ça ?' Petra 'vo lavaret dezhañ ?; 'Qu'est-ce qu'on lui dira ?' Bet skrivet gant va zad !; 'C'est mon père qui l'a écrit !'
A ne pas confondre: faux passifs
Il peut se trouver en breton des phrases avec l'auxiliaire bezañ, 'être' et un argument amené par le préposition gant qui ne sont cependant pas des passifs.
En (1), le verbe est à la voie active: le sujet du verbe intransitif est Lili, qui porte le rôle d'agent.
(1) | Lili | zo komañset | get e eost. | ||||
Lili | est commencé | avec son moisson | |||||
'Lili a commencé sa moisson.' | Le Scorff, Ar Borgn (2011:15) |
La structure en (2) donne l'impression fausse qu'un verbe inaccusatif comme c'hoarvezout, 'arriver, survenir' a une forme passive. Cette forme n'a cependant pas d'équivalent actif.
(2) | C'hoarvezet eo gantañ. | ||||
arrivé est avec.lui | |||||
'Ça lui est arrivé.' | |||||
(*'C'est arrivé avec/par lui.') | français | ||||
(*'It is happened by him.') | English, Jouitteau [03/2012] |
Il existe aussi des cas troublants de faux passifs où la préposition gant introduit un complément causal.
La préposition gant peut aussi exprimer la cause d'un inaccusatif. En (3), on sait qu'il ne s'agit pas d'une tournure passive juste car il n'existe pas de version de cette phrase à la voix active.
(3) | Steuziet eo | gant ar vrumenn | a oa. | |||
disparu est | avec le brume | R y.avait | ||||
'Elle a disparu à cause de la brume.' | ||||||
(*'Elle a disparu avec/par la brume qu'il y avait.') | français | |||||
(*'She disappeared by the fog there was.') | English, Jouitteau [03/2012] |
Horizons comparatifs
La polyvalence sémantique de la préposition 'avec', traduction mot-à-mot de gant, est un trait saillant du français de Basse-Bretagne. Dans cette variété de français, la préposition avec apparaît au passif.
(1) Vous devriez être étouffé avec la honte! > = 'Vous devriez avoir honte!' (Gallen 2006:7)
Terminologie
Le terme anglais pour 'passif' est passive.
Le terme breton pour 'voix passive' est tu gouzañv, opposé à la 'voix active', an tu gra (Kervella 1995:§208-211).