La copule existentielle

De Arbres

La copule existentielle est réalisée en breton sous la forme a zo, vez ou (ez) eus, plus rarement emañ. A la tournure négative, seule la copule (ez) eus est utilisée. La copule existentielle est abrégée sur ce site dans les gloses par le sigle E.

Sémantiquement, la copule existentielle sélectionne un seul argument dont elle asserte l'existence. Syntaxiquement, elle est reconnaissable car elle sélectionne un sujet vide.


Morphologie

La variation dialectale de l'utilisation de la copule existentielle en tournure positive est documentée dans la carte 028 de Le Dû (2001), par une traduction du français Il y a. La présence de réponses utilisant l'auxiliaire ober ('faire') suggère que le protocole demandait la traduction d'une tournure telle que il y a de la pluie.

La variation dialectale de l'utilisation de la copule (ez) eus en tournure négative est documentée dans la carte 030 de Le Dû (2001), par une traduction du français Il n'y en a plus, et dans la carte 029 par une traduction de Il n'y a pas.


Infinitif

L'infinitif de la copule (et du verbe 'être' en général) a de multiples variantes dialectales.

Alternance des formes

Toutes les formes morphologiques possibles du verbe 'être' semblent pouvoir recevoir la lecture existentielle.

La forme vez apparaît lorsque l'existence assertée est stable sur une longue période de temps, ou habituelle.


(1) Eno a zo kokouz penegwir ne vez ken med kargañ ar voz d'ober.
y R y.a coques C ne est plus mais charger le poignée à faire
'Là, il y a des coques, puisqu'il n'y a qu'a charger (ramasser) avec les mains jointes (à pleines mains).'
trégorrois, Gros (1984:13)


(2) Ha goude-se ar re-se ouie dont tout setu vie blag ken-ha-ken.
et après-ça le ceux-ci AUX venir tous voila y.avait blague autant-et-autant
'Et après tous ceux-là venaient et on blaguait tant et tant.' < litt.: 'Il y avait des blagues...'
Bas-Cornouaillais (Treboull), Hor Yezh (1983:76)


En breton standard, la forme eus est réservée au sujet postverbal indéfini.


(1) E savanenn Afrika ez eus laboused ampart hag int-i gwiaderien.
dans savane Afrique R y.a oiseaux habiles et 3PL-3PL tisserands
'Il existe dans la savane africaine des oiseaux habiles qui sont tisserands.' Al Liamm (346:115)


En trégorrois, il existe une alternance avec zo. Gros (1970:26) note même que la forme eus à l'affirmative n'est pas présente du tout en Trégor (alors qu'il la note comme possible ailleurs).


(y) Aze e-traoñ ar prad a zo eun naer hag a zo ken koz ken a zo savet blev warni.
Aze e-traoñ ar prad ez eus eun naer hag a zo ken koz ken ez eus savet blev warni.
en-bas le prairie R y.a un serpent C est tellement vieux C R y.a poussé cheveux.(coll) sur.3SG.F
'Là au bas de la prairie il y a une couleuvre qui est tellement vieille que les poils lui ont poussé dessus.'
trégorrois, Gros (1984:20)


En breton standard, la forme zo est obligatoire dès que la copule existentielle est précédée de son DP argument. Cependant, on trouve de tels exemples avec ez eus.


(2) Arc'hant ez eus e Breizh, tud kalonek ez eus ivez.
argent R y.a en Bretagne gens courageux R y.a aussi
'En Bretagne, il y a de l'argent, des gens courageux aussi.'
LLMM. 114/63, cité dans Le Gléau (1973:41)


La forme emañ se trouve aussi utilisée comme copule existentielle:


(2) An den a zo hirio; warc'hoazh n'ema mui!
le humain R y.a aujourd'hui demain ne y.a plus
'L'homme existe aujourd'hui, demain il ne sera plus!'
BSA. (1877:165), cité dans Le Gléau (1973:41)

Négation

Gros (1970:26) rejette pour le trégorrois la forme affirmative (ez) eus pour la copule existentielle. Au négatif, cependant, il note la forme n'eus ket.

quantifieurs en contexte

Lorsque le nom quantifié par kement, 'autant' est suivi par la relative a zo ('qu'il y a'), le sens global est: 'tous les X existants', 'autant de X qu'il y en a'.


(9) Pleustriñ a reomp war gement Levr Sakr a zo.
s'entrainer R faisons sur autant livre sacré R y.a
'Nous nous entrainons sur tous les livres sacrés.'
standard, Drezen (1990:41)


Notons que dans cet exemple, le quantifieur kement n'est pas lui-même en contexte existentiel.

En contexte existentiel, les quantifieurs forts comme pep ('chaque') ou kement ('autant') sont illicites (comme en français *Il y a chaque pain.).


Bibliographie

  • Urien, J.-Y. 1989. 'Le syntagme « existentiel » en breton. Définition syntaxique et sémantique {X + zo / n’eus ket + X, « Il y a X / il n’y a pas X »}', La Bretagne Linguistique 5, CRBC.