Krediñ

De Arbres
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Le verbe krediñ 'croire' est un verbe déclaratif.


(1) An avel nord oa ar gwellan tout, e c'hellez da grediñ...
le vent Nord était le mieux tout R4 peux à1 croire
'Le vent du Nord était le mieux, tu peux me croire … '
Léonard (Plougerneau), Elégoët (1982:36)


Morphologie

variation dialectale

(2) Hañ greit ke vôl pe ma hañ uel zo dehéoñ.
a gred holl (ar) pezh emañ o welout zo dezhañ. Équivalent standardisé
lui R1 croit que tout ce que est lui à4 voir est à.lui
'Il croit que tout ce qu'il voit est à lui.'
Guérandais fin XIXe, Mathelier (2017:28)


dérivation

La nominalisation est en -enn kredenn 'croyance, conviction (peu fondée)'.


Syntaxe

structure argumentale

Il s'agit d'un verbe transitif, avec un sujet agent ou expérienceur et un objet. L'argument interne de krediñ doit être un animé.

objet

L'objet peut être syntaxiquement un nom, une proposition infinitive ou une complétive.


(3) Ar vugale o deus kredet gwelet ar vaouez.
le 1enfant.s R.3PL a cr.u v.oir le 1femme
'Les enfants ont cru voir la femme.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


Le verbe krediñ, comme les verbes déclaratifs prototypiques, peut aussi sélectionner une complétive comme argument interne (Me 'gred e talv ar boan 'Je pense que ça vaut la peine').

Cette complétive peut débuter par un complémenteur vide, ou, selon les dialectes, les complémenteurs déclaratifs la(r) ou penaos.

  • Me gred lar e talv ar boan.
'Je pense que ça vaut la peine.'
Cornouaillais (Uhelgoat), Skragn (2002:100)

expérienceur

En (4), l'expérienceur de la croyance n'est pas le sujet. Soit le sujet est un explétif vide, soit il n'y en a pas du tout (car le verbe porte les traits d'accord 3SG, cf. * Ne greden ket din).


(4) Ne grede ket din, e soñje, edo hi ken fall.
ne1 croyais pas à.moi R4 pensait était elle tant mauvais
'Je ne la croyais pas si mal en point, pensait-il.'
Standard, Riou (1957:15)


(5) … kredet en doa d'ez klevout un trouz bennak.
cr.u avait à.lui entendre un bruit quelconque
'… il lui avait cru entendre quelque bruit.'
Standard, Riou (1941:7)

Sémantique

krediñ ober, 'oser faire'

(5) Ne greda ket kemer e lod.
ne1 ose pas prendre son1 part
'Il n'ose pas prendre sa part.'
Vannetais (Le Scorff), Ar Borgn (2011:110)


(6) … nikun diyomp grédè pigno ken pèl…
nikun ac'hanomp ne grede pignat ken pell Équivalent standardisé
personne de.nous ne1 croyait grimper tant loin
'… aucun d'entre nous n'osait grimper si loin … '
Cornouaillais (Bannalec, Riec), Bouzec & al. (2017:71)

Expression

'Incroyable !'

Gerven (2011) pointe qu'il n'est pas grammatical de traduire l'interjection française Incroyable ! par l'adjectif breton digredus. L'interjection bretonne d'incrédulité est formée sur l'adverbe biskoazh 'jamais' (Biskoazh ! Biskoazh c'hoazh ! Biskoazh em buhez ! Biskoazh kement all !).


Diachronie

En moyen breton comme en cornique, l'argument interne peut être une proposition infinitive. Ce n'est plus le cas en breton moderne.


(1) my a grys bos Tom ow palas y'n lowarth. Cornique
Me a gred bout Tom o palad el luorz. Moyen breton
Me a gred ema Tom o palad el liorz. Breton
moi R1 crois est/être Tom à4 bêch.er en.le jardin
'Je crois que Tom est en train de bêcher dans le courtil.'
cité dans Trépos (2001:§363)


Horizons comparatifs

Le vannetais Buleon (1927:318) relève en français du pays vannetais un bretonnisme qui vient du double sens en breton de kredein, "à la fois oser et croire": Je ne croyais pas répondre, 'Je n'osais pas répondre' (Ne greden ket reskond).