Kozh-

De Arbres

Kozh devant un nom peut être l'adjectif prénominal kozh 'vieux' ou un préfixe qui en dérive: kozh-.


(1) Ni a gleve bern kozh traoù evel-se.
nous R1 entendait tas vieux choses comme-ça
'Nous entendions plein de conneries comme ça.'
Trégorrois (Bégard), locuteur né en 1932, Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2019)


Morphologie

variation dialectale

Le Dû (2012:45) distingue deux prononciations: l'intensifieur /koz/ et l'adjectif non-péjoratif prénominal /kóz/. Ceci révèle, au moins pour le dialecte de Plougrescant, l'existence de deux entités antéposées dérivées de l'adjectif kozh.


mutation de kozh-

Il y a deux usages de mutation, qui révèlent potentiellement deux structures différentes.

Dans le premier, l'adjectif mute selon le genre du nom qui le suit.


(2) Ema o turlutad aze gand eur goz souflez.
est à4 bricoler avec un 1vieil soufflet
'Il est là en train de bricoler (perdre son temps, s'amuser) avec un vieux soufflet.' Trégorrois, Gros (1984:484)


  • goz bisiklêt, 'un vieux vélo', Le Dû (2012:45)
  • e hoz tarkaz, 'un vieux filou (litt. un vieux matou)', Trégorrois (Plougrescant), Le Dû (2012:45)

Cet usage n'est pas nouveau. De Rostrenen (1732:'contre-échange') traduit 'un méchant manteau' par ur goz vantell, ur vantellicq fall.


Dans une seconde classe d'usage, visible sur les noms féminins seulement, kozh- mute comme si le nom qui le suit était masculin (Ur c'hozh klouar 'une femme gnan-gnan', Bégard, Yekel, Georgelin & Ar C'hozh 2015-2019). La lecture est alors toujours péjorative.

Mark Kerrain (FeB 04/2019) oppose ainsi pour le nom féminin bali 'boulevard', ar c'hozh vali, de sens péjoratif et ar gozh vali, forme sans lecture particulière si ce n'est l'effet produit par le choix d'un adjectif prénominal alors qu'il aurait pu être postverbal (il propose qu'il s'agit d'un usage dialectal).


(3) ar c'hozh delwenn-mañ,

'cette statue minable', Vannetais, Herrieu (1994:32)

(4) Arru on ur c'hozh vachin !

'Je suis vieille (familier)', Trégorrois (Bégard), Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2019)


La différence de traitement dans les mutations induit deux choses. Tout d'abord, il existe deux adjectifs prénominaux kozh de sens et comportement morphosyntaxique différents, avec des différences morphosyntaxiques alignées sur une différence d'interprétation. Ensuite, comme la lecture obligatoirement péjorative est signalée par le décalage de mutation (C'H devant un nom féminin), il existe une stratégie péjorative pour les noms féminins dont il n'existe pas d'équivalent pour les noms masculins.


kozh- ne bloque pas la mutation du nom

Au contraire du nom tamm 'morceau, expèce de' ou du nom intensifieur de degré mell 'énorme, balèze' qui bloquent la lénition sur le nom qui les suit (ur1 wezenn 'un arbre', mais ur mell gwezenn 'un arbre énorme', ur gador 'une chaise mais un tamm kador 'une espèce de chaise'), le nom après kozh- subit la même mutation que si kozh- n'était pas là.


(5) ar hoz vugale-ze.
le 5vieil 1enfants-
'ces sales gosses.' Merser (2009:'koz')


La finale "-zh" n'est donc pas une barrière aux mutations (à comparer avec diriaou, disul dremenet, mais dimeurzh tremenet).


Syntaxe

L'adjectif antéposé ne bannit pas l'adjectif postnominal kozh qui est, lui, restreint à la sémantique 'daté, ancien'.


(1) kozh karrigell gozh
vieil brouette 1vieil
'vieille brouette (vieille peau)' Trégorrois (Bégard), locuteur né en 1928, Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2019)


(2) Neuze 'da gwelet ur c'hozh oto gozh
alors avaient vu un4vieil auto 1vieil
'Alors ils avaient vu une vieille auto déglinguée.' Trégorrois (Bégard), locuteur né en 1951, Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2019)


Sémantique

L'adjectif kozh, lorsqu'il est postnominal, signifie 'vieux, âgé, ancien, daté'. L'antéposition peut obtenir cette lecture, mais aussi parfois une lecture différente, nettement péjorative, ou une lecture aspectuelle.


lecture péjorative nette, sans ancienneté

En usage prénominal, kozh- peut avoir une lecture uniquement péjorative, sans sémantique d'ancienneté aucune. En (1), le locuteur trégorrois peut même utiliser kozh traoù pour 'les nouvelles, les faits divers'. J.Do. Robin (c.p., 07/2019) rapporte l'usage répandu en Trégor de kozh kaozioù 'commérages, sornettes', autre exemple qui excède largement la sémantique de l'ancienneté propre à l'adjectif kozh.


(1) Me ne sellan ket deus ar c'hozh traoù a vez warni.
moi ne1 regarde pas à le vieux choses R1 est sur.elle
'Moi je ne regarde pas les faits divers qu'il y a dedans (le journal).'
Trégorrois (Bégard), locuteur né en 1928, Yekel, Georgelin & Ar C'hozh (2015-2019)


La possibilité de lecture péjorative est partagée entre tous les dialectes.


(2) ur c'hozh ti kozh parkeier
un vieux maison vieux champs
'une maison délabrée, de peu de valeur', 'de mauvaises terres'
Standard, Kervella (1995:§513)


(3) ar c'hozh darvoudoù-se
le 5vieux évènements-
'ces évènements douteux' Cornouaille, (Pleyben), Ar Gow (1999:19)


(4) [kọz 'diʎad], koz dillad,

'vêtements de peu de valeur', Plozévet, Goyat (2012:194)


La lecture péjorative, si elle est obligatoire avec la mutation C'H avant un nom féminin, n'y est pas restreinte.


(5) /urgox verx /
un1.vieux1 fille
'une mauvaise fille.' Groix, Ternes (1970:225)


sans lecture péjorative nette

Gros (1984:385) donne kospér 'poires sauvages'. J.Do. Robin (c.p., 07/2019) rapporte pour le Trégor et la Haute-Cornouaille la prononciation /koper/ pour les poires anciennes et sauvages, par opposition avec les nouvelles variétés.

L'adjectif kozh peut modifier le groupe nominal un den yaouank 'un jeune homme'. Le sens de un den yaouank kozh est littéralement 'un vieux jeune homme', c'est-à-dire 'un vieux célibataire'. François Vallée a collécté auprès de l'abbé Besco (1865-1939) une forme antéposée de kozh qui ne change pas le sens de la formule entière.


(6) eun den yaouank koz eur c'hoz den yaouank
un homme jeune vieux un 1vieux homme jeune
'homme déjà presque mûr, resté célibataire.' Trégorrois (Abbé Besco), Vallée (2014:'kozh den yaouank')


lecture aspectuelle

Kozh-, comme nevez- ou pell-, peut avoir une lecture aspectuelle. Gros (1984:386) donne kozhalet 'qui a vêlé depuis longtemps'. La lecture aspectuelle n'est pas particulièrement péjorative.


 Le Gall (1957:'koz'), L'Hôpital-Camfrout:
 "Koz : adj. 
 — Se place quelquefois devant un participe passé, et signifie alors : 'depuis longtemps': saout koz halet ('qui ont vêlé depuis longtemps'), lann koz trohet, panez koz tennet."


Vallée (2014) relève en Trégor koz-dimêt 'anciennement marié'.