Différences entre les versions de « Kan-, ken-, kem-, kef-, kev-, kiv-, kom-, kon- »
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* ''ken-'' + ''ment'', 'taille' > ''[[kement]]'' | * ''ken-'' + ''ment'', 'taille' > ''[[kement]]'' 'autant, de même mesure' | ||
* ''kam-'' + ''pouis'', poids > '''''kam'''pouis, kempouez'' | * ''kam-'' + ''pouis'', poids > '''''kam'''pouis, kempouez'' 'de même poids', [[Le Bayon (1878)|Le Bayon (1878]]:15) | ||
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Le [[préfixe]] ''kef-, kev-, kiv-'' est [[exocentrique]] lorsqu'il crée un [[adjectif]] à partir d'une catégorie nominale, comme dans '''''kiv'''ioul'' 'opiniâtre'. En ce sens, il est similaire au privatif ''[[di-]]'' dans '''''di'''c'hoarzh'' 'maussade'. | Le [[préfixe]] ''kef-, kev-, kiv-'' est [[exocentrique]] lorsqu'il crée un [[adjectif]] à partir d'une catégorie nominale, comme dans '''''kiv'''ioul'' 'opiniâtre'. En ce sens, il est similaire au privatif ''[[di-]]'' dans '''''di'''c'hoarzh'' 'maussade'. | ||
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Selon [[Chalm (2008)|Chalm (2008]]:w-217), ''ken-'' ne provoque pas non plus de [[lénition]] sur une initiale en <font color=green>/g/</font color=green>. | Selon [[Chalm (2008)|Chalm (2008]]:w-217), ''ken-'' ne provoque pas non plus de [[lénition]] sur une initiale en <font color=green>/g/</font color=green>. | ||
== Sémantique == | == Sémantique == |
Version du 24 février 2019 à 17:01
Le morphème ken- apparaît aussi sous les formes ke-, kev-, kef-, ki-, kiv-, ainsi qu'avec les nasales kem-, kom-. Les formes kan- et kon- sont aussi apparentées. Ce préfixe est très productif. Sur les noms ou les verbes, il dénote une notion de groupe, de collectif, de réciprocité ou de parallélisme .
(1) | Ha, dezhañ _ | bevañ e kumuniezh, | n’en doa ket | d’he c’henlodañ gant den. | |||
et, de.lui | vivre en commun.auté | ne’3SGM avait pas | à’la com.partager avec personne | ||||
'Et, bien qu’il vive en communauté, il n’avait pas à la partager avec quiconque. | |||||||
Standard, Drezen (1990:64) |
(2) kevrenn 'part, portion' (Trépos 2001:§121), 'section' (Favereau 1997:§194)
Gros (1984:369) donne kevannus 'fréquenté'.
Morphologie
allomorphes
Kervella (1947:§878) donne :
- kenson, kengarantez, kenganañ, kenober, kenoad, kenouenn,
- kenstrollañ, kenderc'hel, kenep, kenliv
- kenforn mais keflusk, keferata, kefrifi, kefrisa
- kenvroad mais kevleue, kevilin, kevezer, keveler,
- kevenderv, kevrenn, kevre, kevred, kevnid, kevrin, kevatal, kewez
- kivioul, kivni
Le Bayon (1878:15) donne quelques dérivations avec des racines en /a/, dont la voyelle peut se centraliser.
- kan- + dereu, 'souche' > kan̄derw 'de même souche, cousin'
- kam- + pouis, poids > kampouis, kempouez 'de même poids'
Ce sont les racines en /m, p, b/ qui déclenchent l'allomorphe de finale nasale et labiale /-m/ du préfixe comme dans kemmesk, kombod, kemenn...
- ken- + ment, 'taille' > kement 'autant, de même mesure'
- kam- + pouis, poids > kampouis, kempouez 'de même poids', Le Bayon (1878:15)
variation
La morphologie du préfixe hésite parfois pour la même racine comme dans keveil, keneil 'camarade'. Favereau (1997:§229) donne l'alternance kevleue / kefleue 'avec veau'.
exocentricité
Le préfixe kef-, kev-, kiv- est exocentrique lorsqu'il crée un adjectif à partir d'une catégorie nominale, comme dans kivioul 'opiniâtre'. En ce sens, il est similaire au privatif di- dans dic'hoarzh 'maussade'.
mutation
Selon Helias (1986:15), ce préfixe provoque uniformément une lénition.
(1) | Ne gare ket | nemeur | e genvreur, | abalamour d’e | spered risigner. | |
ne1 aimait pas | guère | son1 confrère | à.cause de'son1 | esprit rican.eur | ||
'Il n'aimait guère son confrère à cause de son esprit moqueur.' | ||||||
Standard, Drezen (1990:28) |
(2) | Ha mui netra | da brena | er henwerziou. | ||||
et plus rien | à1 acheter | dans.le5com-1.ventes | |||||
'Et (il n'y avait) plus rien à acheter dans les commerces.' | |||||||
Léon (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:163) |
Kervella signale que la lénition provoquée par ken- ne s'applique pas sur une racine en /d/ (kendere).
(3) | ...evit ma kavi | eur gwaz | eus da gendere, | merc'hig ? | ||
pour que4 trouveras | un mari | de ton1 com.degré | fille.DIM | |||
'Pour que tu trouves un mari de ton milieu social, ma fille?' | Léon (Bodilis), Ar Floc'h (1922:347) |
(4) kendalc’h, ' continuation' (Favereau 1997:§194), 'maintien' (Trépos 2001:§121)
Selon Chalm (2008:w-217), ken- ne provoque pas non plus de lénition sur une initiale en /g/.
Sémantique
pluralité
Ken- implique une pluralité sémantique des entités dénotées par son hôte.
(1) | Em gavet a ran | get kenseurted, | amezeion. | |||||||
se1 trouver R fais | avec con.sort.s | voisins | ||||||||
'Je me retrouve avec mes pareils, des voisins.' | Vannetais, Herrieu (1994:§13) |
Selon Deshayes (2003:37), ken- rend l’idée de "mutualité, de réciprocité, ou implique l’idée de conjonction, de regroupement, d’accession".
(2) | daou zevezh | kenstag | Morlaix, Herri (1982:17) | ||
deux1 jour | ensemble.lié | ||||
'deux jours (fériés) de suite' |
réciprocité
Le nom karantez 'amour' n'implique pas forcément de réciprocité, mais kengarantez, oui ('affection mutuelle', Trépos 2001:§121). La réciprocité ne découle pas de la pluralité car il pourrait s'agir d'un amour partagé pour une autre entité.
De même, le verbe gwerzhañ 'vendre' n'est pas intrinsèquement réciproque, mais on a kenwerzh 'commerce', kenwerzhañ 'commercer', kenwerzhour 'commerçant' (exs de Deshayes (2003:37).
communauté ?
Selon Trépos (2001:§121), ce préfixe exprime une idée de communauté. Celà vient probablement des noms comme kenvroad 'compatriote', où l'idée de communauté vient de multiples sous-ensembles à un super-ensemble.
relevés sémantiquement opaques
?
Trépos (2001:§121) donne kenvreur 'confrère', Deshayes (2003:37) kenvreuriañ 's'affilier'.
Il s'agit intuitivement du même préfixe, mais sa sémantique est complexe. Le nom breur est déjà intrinsèquement le nom d'une relation réciproque entre des entités plurielles. Comme en français, un frère et un confrère ou un co-affilié n'ont pas les mêmes propriétés.
kem-
Certaines initiales en kem- sont données comme exemple de ce préfixe sans qu'on retrouve sa sémantique habituelle.
(1) kempenn 'ordonné', Favereau (1997:§194)
Il est possible qu'il s'agisse de préfixes différents. Gros (1984:369) considère que le préfixe en (2) remonte au vieux breton et "n'est plus productif en breton trégorrois".
(2) kembennad 'long moment', Gros (1984:369)
Diachronie
Matasovic (2009) propose une racine protoindo-européenne et proto-celtique en *kom 'avec', ayant donné le vieil irlandais co, cu [+nasalisante, DAT], le moyen gallois cyf-, le moyen breton et cornique kev-. Le latin cum 'avec' est apparenté. Cette racine protoindo-européenne a un autre dérivé celtique, le racine protoceltique *kanti, *kmti-, qui a donné gant 'avec' en breton moderne.
Deshayes (2003:37) propose, à partir du vieux breton, la dérivation diachronique suivante :
- vieux breton co-
- > breton moderne ke- noté principalement devant une initiale en h.
- cf. gallois cy-
- vieux breton con-
- > breton moderne kon-
- > breton moderne ken-, qui provoque une mutation sauf sur /d, g/
- variante kun- pour les mots dont le radical a une initiale contenant un u, /y/.
- cf. gallois cyn-
- vieux breton com-
- > moyen breton queff- > breton moderne kev- devant une voyelle
- cf. gallois cyf-
- > breton moderne kem- par assimilation devant m ou par labialisation devant un p ou un b.
horizons comparatifs
Delamarre (2012) étudie plusieurs formations nominales du gaulois avec un préfixe similaire en co- qui dénote l'accompagnement ou le partage, sur le modèle de Cosintu 'compagnon de route, qui partage le chemin'. Delamarre compare ce préfixe au préfixe germanique ga-. Il relève pour le même sens de 'compagnon de route' le germanique *gasenþ(i)o(n) qui donne le vieil allemand gisind et l'allemand moderne Gesinde, le gotique gasinþa, et le vieil anglais gesīþ 'camarade'.
En gallo, Auffray (2007:intro) donne, correspondant au français col-, com-, con-, le préfixe com-, con-, qem-, qen- de consort, qemander'.
Bibliographie
- Delamarre, Xavier. 2012. 'Les noms du compagnon en gaulois', Studia Celtica Fennica vol. 2, 47-52.
- Loth, J. 1921. 'Co-, com-, con- dans les langues brittoniques', Annales de Bretagne 35:2, 263-267. texte.