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Les groupes nominaux sont normalement des [[expressions référentielles]] qui réfèrent de façon autonome à leur référent dans le monde. Cependant, certains syntagmes nominaux réfèrent plus comme des pronoms. Ils ont des propriétés [[anaphoriques]], c'est-à-dire qu'il peuvent obéir aux règles de [[co-référence]] avec un autre syntagme nominal que l'on observe d'habitude sur les pronoms.  
Les groupes nominaux sont normalement des [[expressions référentielles]] qui réfèrent de façon autonome à leur référent dans le monde. Cependant, certains syntagmes nominaux réfèrent plus comme des pronoms. Ils ont des propriétés [[anaphoriques]], c'est-à-dire qu'ils peuvent obéir aux règles de [[co-référence]] avec un autre syntagme nominal que l'on observe d'habitude sur les pronoms.  


En breton, ''al [[loen]]'' 'l'animal', ''an abostol'' 'l'apôtre' sont des syntagmes qui peuvent coréfèrer avec un [[antécédent]] humain dans le discours, comme en français, ''cet animal'', ''l'idiot'', ''la coquette'' ou ''cet imbécile''. Il existe aussi des groupes nominaux, comme ''an tamm anezhañ'', ''e jez'' ou ''ma fenn golo'', qui contiennent un pronom référent.
En breton, ''al [[loen]]'' 'l'animal', ''an abostol'' 'l'apôtre' sont des syntagmes qui peuvent coréfèrer avec un [[antécédent]] humain dans le discours, comme en français, ''cet animal'', ''l'idiot'', ''la coquette'' ou ''cet imbécile''. Il existe aussi des groupes nominaux, comme ''an tamm anezhañ'', ''e jez'' ou ''ma fenn golo'', qui contiennent un pronom référent.
== référence au locuteur ou interlocuteur ==
Les groupes nominaux lexicaux sont normalement de personne 3 : ils réfèrent à des entités du monde réel qui ne sont ni le locuteur ni l'interlocuteur. Cependant, des usages permettent d'utiliser des syntagmes nominaux lexicaux pour référer au locuteur ou à l'interlocuteur.




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Version du 16 juin 2022 à 07:42

Les groupes nominaux sont normalement des expressions référentielles qui réfèrent de façon autonome à leur référent dans le monde. Cependant, certains syntagmes nominaux réfèrent plus comme des pronoms. Ils ont des propriétés anaphoriques, c'est-à-dire qu'ils peuvent obéir aux règles de co-référence avec un autre syntagme nominal que l'on observe d'habitude sur les pronoms.

En breton, al loen 'l'animal', an abostol 'l'apôtre' sont des syntagmes qui peuvent coréfèrer avec un antécédent humain dans le discours, comme en français, cet animal, l'idiot, la coquette ou cet imbécile. Il existe aussi des groupes nominaux, comme an tamm anezhañ, e jez ou ma fenn golo, qui contiennent un pronom référent.


référence au locuteur ou interlocuteur

Les groupes nominaux lexicaux sont normalement de personne 3 : ils réfèrent à des entités du monde réel qui ne sont ni le locuteur ni l'interlocuteur. Cependant, des usages permettent d'utiliser des syntagmes nominaux lexicaux pour référer au locuteur ou à l'interlocuteur.


(1) Me meus bet tomm ha plouf kouet ar plac'h bars an dour.
moi ai eu chaud et plouf ! tomb.é le fille dans le eau
'J’ai eu un coup de chaud, et plouf ! La tête de linotte est tombée dans l'eau.'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (02/2022)


(2) E veg figus a ra an aotrou ?
son1 bouche regardant R fait le monsieur
'Monsieur fait le difficile ?'
Standard, An Here (1996:15)


an tamm anezhañ

Certains syntagmes nominaux anaphoriques complexes trouvent leur entité coréférente non dans le contexte, mais à l'intérieur même de leur structure. En breton, une structure particulière permet de faire référer un syntagme nominal avec un pronom incorporé dans ce complexe. En (1), an tamm anezhañ est un syntagme qui coréfère obligatoirement avec le sujet ar blenier sur lequel est prédiqué lorc'hus ha reut awalc'h.


(1) ar blenier, [SC lorc'hus ha reut a-walc'h an tamm anezh ].
le conduct.eur orgueil.l.eux et raide assez le morceau P.lui
'le conducteur, fier et raide'
Trégorrois (Kaouenneg)/Standard, ar Barzhig (1976:57)


syntaxe

copule prédicative

Cette structure de syntagme nominal anaphorique est fréquemment utilisée dans les structures à copule prédicative, y compris lorsque la copule n'est pas réalisée morphologiquement.


(2) Ma sac'h, pounner ken a oa, e oa digempouezet ma red gantañ ha sachet-disachet an tamm ac'hanon.
mon2 sac lourd tant R était R était 1.équilibré mon2 course avec.lui et tiré-.tiré le morceau P.moi
'Décidément trop lourd, mon sac déséquilibrait ma course... '
Standard, CAPES 2005, traduction Hanotte (2000)


le groupe est sujet

Le système d'accord breton est caractérisé par l'effet de complémentarité qui bloque le verbe à la troisième personne du singulier lorsque le sujet lexical est exprimé. En (3), l'accord 3SG sur le verbe montre donc que le groupe nominal an tamm ac'hanon est considéré par le système d'accord verbal comme un sujet lexical de première personne du singulier.


(3) N’eo ket aonik [ an tamm [ ac’hanon ] ].
ne est pas peur.eux/se le morceau P.moi
'Je ne suis pas peureux/se.'
Krog (1924:58)


ma jez, ma fenn golo, 'moi'

'la tête de linotte que je suis '

La locutrice montre avec (ar) penn golo remplaçable par ma fenn golo (ou ma benn dans ce dialecte) que la coréférence du sujet de la phrase et du possesseur à l'intérieur de ce sujet est un processus productif, au moins pour la première personne du singulier.


(4) Me meus bet tomm ha plouf kouet penn golo bars an dour.
moi ai eu chaud et plouf ! tomb.é tête vide dans le eau
'J’ai eu un coup de chaud, et plouf ! La tête de linotte est tombée dans l'eau.'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (02/2022)


(5) Me meus bet tomm ha dustu 'n un taol kouet ma benn golo bars an dour.
moi ai eu chaud et de.suite en un coup tomb.é mon1 tête vide dans le eau
'J’ai eu un coup de chaud, et plouf ! La tête de linotte est tombée dans l'eau.'
Cornouaillais (Locronan), A-M. Louboutin (02/2022)


l'argot ma jez

Dans l'argot trégorrois de la Roche-Derrien, un paradigme entier autour du nom jez assigne comme référent du groupe nominal entier le référent du possessif (ma jez 'moi', da jez 'toi', etc. cf. relevés de Menard & Bihan 2016- comme Ernault 1893).


Menard & Cornillet (2020) donnent le nom chez 'frime, bobine' comme masculin. Ils traduisent ma chez 'bibi, ma frime' ou da chez 'ta frime'.

Horizons comparatifs

La structure nominale de type ma jez ou an tamm anezhañ ressemble au français familier ma pomme 'moi' en ce que sa référence est celle d'un pronom qu'elle contient (ma réfère à 'moi', ma pomme).

Comme dans la construction en français, la structure bretonne peut être déclinée à toutes les personnes.

  • Qui s'excuse ? C'est ma pomme !
  • L'addition, c'est pour ma/ta/sa/notre/votre/leur pomme, toujours.

En français, la structure semble restreinte à des configurations de structure informationnelle particulière, et à un niveau de langue familier qui exclut le vouvoiement. Le nom pomme dans l'expression est restreint au singulier.

* Alain, j'ai vu sa pomme.
* Je recontacterai votre pomme sous quinzaine.
*/? Ceux qui paient, c'est leur pomme.
* L'addition, c'est pour vos pommes, toujours.


L'argot anglais a une structure de groupe nominal anaphorique similaire avec ass (My ass got arrested, 'J'ai été arrêté').

Bibliographie