Discussion:L'habitude

De Arbres

--Jadé Loïc 14 avril 2013 à 16:46 (CEST) : A propos du paragraphe "Analyse" : M Jouitteau doute de l'assertion de Favereau sur la confusion "vije/veze" . Une autre lecture peut en être que dans certains dialectes (bigouden par exemple), les deux s'entendent de la même façon, sous la forme "veie". En ce cas, le sens suffit à faire comprendre quelle conjugaison on utilise.

> --MJ. 24 mai 2013 à 13:14 (CEST): Pour le cas du verbe 'être', oui. Mais il n'est pas possible d'étendre cet argument à tous les paradigmes verbaux.

--A Messager 23 mai 2013 à 10:56 (CEST): N'en déplaise à tous les grammairiens du breton jusqu'à présent, il n'existe pas de forme d'habitude du verbe être au passé qui serait distincte de celle du "conditionnel II". Il ne s'agit pas d'une confusion des deux (qui supposerait, avec une certaine condescendance, que les locuteurs sont incapables de faire la différence). D'ailleurs, la situation est la même en gallois: L'étymologie vient à l'appui de ma thèse. En effet, le gallois contemporain à pour conditionnel les deux séries de formes suivantes :

  • S1 Byddwn i | Baswn i
  • S2 Byddet ti | Baset ti
  • S3 Byddai fe/hi | Basai fe/hi
  • P1 Bydden ni | Basen ni
  • P2 Byddech chi | Basech chi
  • P3 Bydden nhw | Basen nhw

De ces formes, G. King nous dit : « The byddwn conditionnal (but not the baswn) is also used to describe a habitual action in the past – byddwn i'n mynd yno °bob wythnos I used to go there every week2 ». On le voit, pour ce qui est du verbe « être » le parallèle est total avec le breton, tant du point de vu de l'emploi, que de celui de la forme : bezen (bijen) – byddwn, toutes les deux formées sur le radical bez- / bydd (qui se prononce /biđ/). L'exemple donné par G. King pourrait être rendu presque mot à mot en breton : Me 'vije (/vise) o vond eno beb sizhun. Une telle symétrie ne peut être que frappante, dans deux langues séparées depuis au moins 1300 ans...

cf. Gareth King, Modern Welsh, a comprehensive grammar, Routledge, 2003, 403p., isbn : 978-0-415-28270-3, §248 pp.159-160

On pourrait ajouter que l'expression du verbe avoir en breton n'est pas un verbe, mais une périphrase du verbe bezañ, avec un nom verbal supplétif, "kaoud". Le titre de ce chapitre, mériterai d'être renommé.

> --MJ. 24 mai 2013 à 13:17 (CEST): Cependant, on trouve en breton les formes dites d'habitude sur d'autres verbes que les verbes kaout et bezañ.

--A Messager 26 mai 2013 à 21:41 (CEST): Je ne vous suis pas très bien, de quel paradigme des autres verbes parlez-vous ? Je ne vois aucune forme autre que celles en -ze/-je/-che/-he. Et je ne connaît aucun corpus oral dans lequel un locuteur ferair une différence entre conditionnel II et imparfait d'habitude. Quand on regarde l'ALBB non plus, il n'y a aucun endroit où une forme conditionnelle est différente du parfait d'habitude. On voit bien sur la carte suivante les différentes variantes du paradigme, avec la forme en -ze hachurée:

Albb si j avais eu.png

Même dans les régions où l'emploi dans ce sens a été étendu aux verbes forts. Il me semble que l'imparfait d'habitude en tant que paradigme séparé est une construction des grammairiens de la première moitié du XXe siècle.

Ainsi, il me semble que les grammaires donnant deux paradigmes distincts pour « l'imparfait d'habitude », « fréquentatif passé » (Favereau), etc... du verbe bezañ/boud et pour son « conditionnel II » font une erreur en confondant formes dialectales d'un même paradigme d'une part et paradigmes différents d'autre part. Par exemple, voici ce que nous dit Francis Favereau :

« L'irréel a plusieurs variantes, qui se conjuguent à toutes les personnes : vihe (en fait la forme intacte du vieux-breton, LF & PT 302) se maintient bien en Cornouaille (ex. ma vihemp aet 'oamp kollet Ph si nous y étions allés, nous étions perdus), quoique « normalisé » en vise / vize (Ph également : ma vize bev fût-il vivant, gwashoc'h 'vit 'vized bet war e lerc'h pire que si on l'avait poursuivi) ; on trouve ces formes dans des livres de dévotion du 19°(sic) siècle (ne vizent quet ils ne seraient pas – Doctrin 1846) ; cette forme a elle-même plus tard été palatalisée en vije (T Ku – devenue norme littéraire – ex. petra 'vijec'h avañsetoc'h goude-se ? Ku à quoi celui (sic) vous avancerait-il ? ) ou bien viche (L). Qui plus est, ces formes sont parfois confondues avec le fréquentatif passé veze (cf tud 'vize = veze Ph, pa vije dornet T = veze). En haut-vannetais et dans sa bordure cornouaillaise, les formes en -ze (devenues -eze – thème A) se sont mêmes étendues aux verbes dits forts, voire à tout les verbes (à Groix, selon ET, comme à Belle-Ile – Le Besco 1991 / 147, & cf. Evenou, Plourin) ; ainsi, pour exprimer le fréquentatif du passé, comme avec veze, 'm beze, on aura : monet a rezen j'allais, pa rezen ma labour, quand je faisais mon travail, piv 'teze ganeoc'h ? qui venait avec vous ? Me 'reze ma amanenn je faisais mon beurre, (ne)d ezen ket da Bahle je n'allais pas à Palais (habituellement)...(1) »

Voilà qui amène de l'eau à mon moulin. En effet, pourquoi supposer une transformation vihe>vise>vije qui se confondrait avec une autre forme vije alors qu'en haut vannetais on aurait vihe>vise qui se confond et remplace une forme veze, alors qu'il est clair qu'il s'agit de deux formes dialectales d'un paradigme unique. De plus, le traitement de -ize- est normalement /iʒe/ dans le Trégor et une bonne partie de la Cornouaille et /i∫e/ en Haut-Léon. L'évolution de /h/ vers /z/ est, de plus, improbable en breton. Par contre une évolution d'un ancien /θ/ vers un /z/ ou un /h/ serait un phénomène normal. Ainsi, on aurait /θ/ > /z/ > /j/ d'une part, et /θ/ > /h/ d'autre part. Le développement des formes en -ze à la frange du Vannetais ne serait alors qu'une extension des formes cornouaillaises sur les formes vannetaises, et donc un phénomène local

Pourquoi donc postuler deux paradigmes différents, alors que les variations dialectales explique très simplement la variété des formes ? Pour apporter la preuve définitive de mon hypothèse il faudrait évidemment vérifier si, à plus grande échelle, dans chaque corpus non influencé par les différentes grammaires, les formes en -je sont exclusives des formes en -ze ou -he. L'étymologie vient à l'appui de ma thèse (Cf. supra pour le parallèle avec le gallois). Mais quelques différences sont à noter entre les deux langues. Tout d'abord, le conditionnel gallois est généralement réduit au verbe bod, et c'est par des tournures périphrastiques que l'on rend le conditionnel des autres verbes. Le breton, lui, a conservé les formes de tout les autres verbes. Ensuite, le breton a aussi le « subjonctif passé-conditionnel I » pour exprimer une certaine modalité de conditionnel. Je pense que les faits sont clairs : seul le traitement phonétique dialectal a donné l'illusion de deux paradigmes distincts.

(1)Francis Favereau, Grammaire du breton contemporain, Morlaix, Skol Vreizh, 1997, 478p., isbn : 2-911447-12-3, §413 pp.209-210

Sinon, une réflexion: il n'est pas très juste de parler d'"imparfait" d'habitude, puisque l'action ainsi exprimée est normalement révolue, qu'en pensez-vous ?


traductions

  • [LJ/12/2012] J'ai écouté l'enregistrement et je pense que l'intention du locuteur n'est pas de dire qu'il a envie de venir mais qu'il avait envie de venir , auquel cas, le passage du transcrit au standard est abusif . Il aurait fallu écrire : "Pa zigouezhemp e veze plijadur, setu em beze c'hoant da vont, kwa" et par conséquent traduire "Quand...j'avais envie d'aller, quoi"
Pé zigoueemp assam's vê plijadur, set' 'mé c'hoant d'ond kwa.
Pa zigouezhemp asambles e veze plijadur setu em bez c'hoant da vont, kwa.


> --M. Jouitteau 28 décembre 2012 à 11:17 (CET): Effectivement.


L'utilisation du zh dans "digouezoud" est abusive.


  • Per Kouk 15 juillet 2011 à 16:22 (CEST)
Bonjour. J'ai apporté quelques corrections concernant les temps qui avaient été mal compris. Par contre j'ai un peu de mal avec la syntaxe du wiki, donc il y a quelques inter-liens qui ont disparu.

> [MJ/07/2011]: Merci des modifications. J'ai rétabli les liens. [MJ]