De-, di-, dis-
Le morphème de-, ou di-, préfixe les noms, les adjectifs ou les verbes et marque un rapprochement ou, de façon plus vague, un mouvement.
Ce morphème de- ou di- est à différencier du morphème privatif ou d'opposition di-.
(1) | /e-dijaro:k | t-ənti / | ||||
e-diaraok | d'an ti | |||||
à-pfx.avant | de-le.maison | |||||
'devant la maison.' | Groix, Ternes (1970:319) |
Chalm (2008:w-217) donne: deredek, 'accourir'; degas, 'apporter'; degouezhout, 'arriver'; denesaat, 'approcher'; dezougen, 'rapprocher en transportant'.
Morphologie
accentuation
Kervella (1947:§880) note que le préfixe de- ou di- n'est pas accentué. Il reconnaît donc ce préfixe dans les bisyllabiques du KLT accentués sur la seconde syllabe.
variation dialectale
Le morphème de- est prononcé di- en dehors du vannetais en breton moderne (Kervella 1947:§880, Gros 1984:374), et dans certains mots comme:
(1) diabarzh, diavaez, diaraog, diadreñv, diabell, diamen, diagent, diadraoñv, diwarlerc'h, dindan
Selon Gros (1984:374), l'allomorphe de- marque la langue littéraire dans les mots degas (digas), degemenn (digemenn), degouezoud (digouezoud), deredeg (diredeg), etc…
mutations
Chalm (2008:w-217) signale que de- provoque une lénition sur sa racine.
composition interne
Selon Kervella (1947:§880), le morphème de- est un composé dans les préfixes:
Syntaxe
base nominale
Kervella (1947:§880) donne aussi, devant un nom penn, dibenn et lost, dilost.
base adjectivale
(1) | /ar vi'ɡa:le ma | zo n ˌdivɛr 'bye/ | |||||
Ar vugale-mañ | zo eun diverr buhez. | ||||||
le 1enfants-ci | est un pfx1.court vie | ||||||
'Ces enfants sont « tuants ».' (Ils vous abrègent la vie) | Plozévet, Goyat (2012:278) |
base verbale
sélection de l'auxiliaire
Les verbes de mouvement prennent normalement l'auxiliaire kaout, 'avoir', cependant, les dérivés de verbes de mouvements par préfixe, comme deredek, dilammat, dinijal sélectionnent l'auxiliaire bezañ, 'être' Kervella (1995:§213).
Sémantique
Helias (1986:14) donne la paire minimale degas 'apporter' sur kas 'envoyer'. Le morphème de- devant un verbe marque un mouvement de rapprochement.
(1) | kas, degas | / | dougen, dezougen | |||
kemer, degemer | / | tarzhañ, dedarzhañ | ||||
gorren, diorren | / | berañ, deverañ | ||||
tostaat, dedostaat | / | nesaat, denesaat | ||||
ren, deren | / | tennañ, dedennañ | ||||
sevel, desevel | / | kemenn, degemenn | ||||
azezañ, diazezañ | / | redek, deredek | Standard, Kervella (1947:§880) |
Selon Gros (1984:374), di- marque un "mouvement vers, un rapprochement".
Selon Kervella (1947:§880), le rapprochement exprimé est orienté vers le locuteur. Cependant, dans Dedennet eo gant an destenn 'Elle est attirée par le texte', le rapprochement ne prend pas en compte la position du locuteur.
De plus, quand la racine verbale ne dénote pas de mouvement, on voit que le préfixe de-, di- n'apporte pas seul ce sens.
(2) | bremañ, avat, | edo bras-disec'het... | ||||
maintenant cependant | était grand-desséché | |||||
'... elle était cependant maintenant complètement desséchée.' | Standard, Kervella (1933:58) |
(3) | an defotadou | beb sizun: | sukr, holen, kafe… | Léon (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:13) | |
le pfx.faut.N.PL | chaque semaine | sucre, sel, café | |||
'les produits de nécessité hebdomadaires : sucre, sel, café…' |
Etymologie
Kervella (1947:§880) donne une ancienne racine de forme te-. Il la postule dans les noms de saints et de lieux: S.Tegoneg, Tevenneg, Tenenan.
Deshayes (2003:36) propose, lui, que le préfixe de-, prononcé localement di, vient du vieux breton do-, 'à, vers'. Il correspondrait au gallois dy-.
Horizons comparatifs
Press (1986:224) considère que le préfixe de- correspond au préfixe allemand her-. Selon Gros (1984:374), di- marque un "mouvement vers, un rapprochement, comme zu- en allemand dans zutun, zubringen, zuführen".