Différences entre les versions de « De-, di-, dis- »

De Arbres
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=== composition interne ===
=== dérivation ===


Selon [[Kervella (1947)|Kervella (1947]]:§880), le morphème ''de-'' est un composé dans les préfixes:
Selon [[Kervella (1947)|Kervella (1947]]:§880), le morphème ''de-'' est un composé dans les préfixes:
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: ''[[dar-]]'' (/'''de-'''[[ar-]]/)
: ''[[dar-]]'' (/'''de-'''[[ar-]]/)
: ''[[das-]]'' (/'''de-'''[[as-/az-]]/)
: ''[[das-]]'' (/'''de-'''[[as-/az-]]/)


== Syntaxe ==
== Syntaxe ==

Version du 6 septembre 2019 à 10:43

Le morphème de-, di- ou dis- préfixe les noms, les adjectifs ou les verbes et marque un rapprochement ou, de façon plus vague, un mouvement comme dans kan-ha-diskan 'chant-et-contre.chant'. Ce morphème semble aussi se trouver dans des composés sans notion de mouvement aucune.

Sa sémantique est donc floue, et se définit principalement en contraste avec le morphème privatif ou d'opposition di-, dis-, dont la sémantique est plus aisée à cerner.


(1) O tislavared kement-se, ar plah paour a grene. Trégorrois (Tréguier), Ar Moal (1902:12)
à4 pfx.dire autant.ça le femme pauvre a1 tremblait
'En disant cela, la pauvre femme tremblait.' (≠ en contredisant cela...)


Chalm (2008:w-217) donne: deredek 'accourir', degas 'apporter', degouezhout 'arriver', denesaat 'approcher', dezougen 'rapprocher en transportant'.


Morphologie

accentuation

Kervella (1947:§880) note que le préfixe de- ou di- n'est pas accentué. Il reconnaît donc ce préfixe dans les bisyllabiques du KLT accentués sur la seconde syllabe.


allomorphes

Sémantiquement, c'est ce même morphème que l'on trouve en initiale de distreiñ 'revenir' sur treiñ 'tourner'.


variation dialectale

La variation entre allomorphes est aussi dialectale. Le morphème de- est prononcé di- en dehors du vannetais en breton moderne (Kervella 1947:§880, Gros 1984:374), et dans certains mots comme:

(1) diabarzh, diavaez, diaraog, diadreñv, diabell, diamen, diagent, diadraoñv, diwarlerc'h, dindan


Selon le trégorrois Gros (1984:374), l'allomorphe de- marque la langue littéraire dans les mots degas (digas), degemenn (digemenn), degouezoud (digouezoud), deredeg (diredeg), etc…


mutations

Chalm (2008:w-217) signale que de- provoque une lénition sur sa racine. On trouve cependant des exceptions.


(1) Goude e vezont bloñset ha dibloñset tout evel-just.
après R sont tapé et -tapé tout bien.sur
'Après, ils sont meurtris bien sûr.' Léon, Mellouet & Pennec (2004:152).


dérivation

Selon Kervella (1947:§880), le morphème de- est un composé dans les préfixes:

dam- (/de-am-/)
dar- (/de-ar-/)
das- (/de-as-/az-/)

Syntaxe

base nominale

Kervella (1947:§880) donne aussi, devant un nom penn, dibenn et lost, dilost.


base adjectivale

(1) /ar vi'ɡa:le ma zo n ˌdivɛr 'bye/
Ar vugale-mañ zo eun diverr buhez.
le 1enfants-ci est un pfx1.court vie
'Ces enfants sont « tuants ».' (Ils vous abrègent la vie) Plozévet, Goyat (2012:278)


base verbale

sélection de l'auxiliaire

Les verbes de mouvement prennent normalement l'auxiliaire kaout, 'avoir', cependant, les dérivés de verbes de mouvements par préfixe, comme deredek, dilammat, dinijal sélectionnent l'auxiliaire bezañ, 'être' Kervella (1995:§213).


(1) adal m’en deus klevet ar c'heloù, ez eo deredet. Cornillet (2008:237)
depuis que4'3SGM a entendu le 5nouvelles R+C,4 est encourru
'Il s'est enfuit dès qu'il a entendu la nouvelle.'

base prépositionnelle

(2) /e-dijaro:k t-ənti /
e-diaraok d'an ti
à-pfx.avant de-le.maison
'devant la maison.' Groix, Ternes (1970:319)

Sémantique

avec la notion de mouvement

Selon Gros (1984:374), di- marque un "mouvement vers, un rapprochement". Helias (1986:14) donne la paire minimale degas 'apporter' sur kas 'envoyer'. Le morphème de- devant un verbe marque un mouvement de rapprochement. Effectivement, on ne peut pas forcer la lecture d'accompagnement avec le verbe kas 'envoyer' (1).


(1) Degaset meus ma gasketenn ganin.
* Kaset meus ma gasketenn ganin.
envoyé/amené ai est2 casquette avec.moi
'J'ai emmené ma casquette.' Plogoneg, kontañ kaoz (12/2017)


(2) kas, degas / dougen, dezougen
kemer, degemer / tarzhañ, dedarzhañ
gorren, diorren / berañ, deverañ
tostaat, dedostaat / nesaat, denesaat
ren, deren / tennañ, dedennañ
sevel, desevel / kemenn, degemenn
azezañ, diazezañ / redek, deredek Standard, Kervella (1947:§880)


Selon Kervella (1947:§880), c'est vers le locuteur que le rapprochement exprimé est orienté. Cependant, dans Dedennet eo gant an destenn 'Elle est attirée par le texte', le rapprochement n'est pas en référence à la position du locuteur, mais à celle du sujet du verbe.


sans notion de mouvement

La composante de mouvement dans le préfixe est à peser: quand la racine verbale ne dénote pas de mouvement, on voit que le préfixe de-, di- n'apporte pas seul ce sens, ni celui de rapprochement vers le référent du sujet.


(3) bremañ, avat, edo bras-disec'het...
maintenant cependant était grand-pfx.séché
'... elle était cependant maintenant complètement desséchée.' Standard, Kervella (1933:58)


(4) an defotadou beb sizun: sukr, holen, kafe… Léon (Plouzane), Briant-Cadiou (1998:13)
le pfx.faut.N.PL chaque semaine sucre, sel, café
'les produits de nécessité hebdomadaires : sucre, sel, café…'


(5) Gav ket nen aes boût dikriet.
1trouve pas on facile être pfx.crié
'On n'aime pas être critiqué.' Cornouaillais de l'Est (Riec), Bouzeg (1986:30)


(6) Dibonjour, plac'hik Penn-al-lenn !
pfx.bonjour fille.DIM tête-le-lac
'Bonjour, fillette de Penn-al-lenn' Chanson Pérennès (1938:248-9)


Diachronie

Kervella (1947:§880) donne une ancienne racine de forme te-. Il la postule dans les noms de saints et de lieux: S.Tegoneg, Tevenneg, Tenenan.

Deshayes (2003:36) propose, lui, que le préfixe de-, prononcé localement / di /, vient du vieux breton do- 'à, vers'. Il correspondrait au gallois dy-.

Horizons comparatifs

Press (1986:224) considère que le préfixe de- correspond au préfixe allemand her-. Selon Gros (1984:374), di- marque un "mouvement vers, un rapprochement, comme zu- en allemand dans zutun, zubringen, zuführen".

En gallo, Auffray (2007:intro) donne le préfixe d(e)- comme intensifieur, comme dans degouter.

A ne pas confondre

Le morphème de-, di-, dis- ne doit pas être confondu avec le morphème di-, dis- qui est sémantiquement plus facile à cerner car privatif.

Un autre morphème di-/(deiz-) apparaît devant les jours de la semaine comme dilun, dimeurzh...

Enfin, il existe un morphème div- du duel, comme dans divarr 'houe à deux dents'.