Bleud

De Arbres


Delanoy (2010) donne le haut vannetais bled f., 'farine', correspondant au KLT bleud.


Diachronie et horizons comparatifs

La reconstruction de la racine indo-européenne menant au sens 'farine' pose problème. L'accentuation des cognats présumés en balto-slavique montre que la racine finissait avec une consonne laryngée comme le proto-indo-européen * menH 'miette' (IEW:726). Les cognats sont le lituanien (baltique oriental) mìnti 'piétiner, broyer (le lin)', le russe (slave oriental) mjat 'pétrir, malaxer', ou le slovène (slave méridional) mánem 'Je hache (1SG présent)'. La consonne laryngée finale du proto-indo-européen n'est pas retrouvée en celtique (spécifiquement, la racine * mnHtro aurait dû donner le protoceltique ** mnātro-, Matasović 2009, qui cite LEIA M-36, GPC III: 2377, Delamarre 2001:216]], et Sims-Williams 2006:90f).

A partir du proto-indo-européen * menH 'miette' (IEW:726), Matasović (2009) propose deux racines proto-celtiques : * mantro- 'piétiner, broyer, moudre' et * menā 'farine' menant au vieil irlandais men [ā f]. Matasović (2009) note que le gallois mathru 'piétiner' souvent dérivé de la même racine pourrait être un verbe dérivé du nominatif d'un nom * mantro- (cf. gallois mathr [m], 'piétinement, bourbier'). Il mentionne en lien les toponymes gaulois Petro-mantalon (* man-tlo- < * mn-tlo-), et Mantua (Mantova en Italie du Nord). Matasović (2009) ajoute le gaulois * manto-, * mantalo- interprété comme 'route (terrassée par piétinement)'.

Une seconde racine proto-indo-européenne a été plus productive dans les langues celtiques, le verbe * melh2- 'moudre' (IEW: 716) aux cognat latin molo, Lituanien málti, et arménien malem. Ce verbe obtient le proto-celtique * mal-o-, * mel-o- 'moudre', et le radical de plusieurs conjugaisons de ce verbe en vieil irlandais. Dans la branche brittonique, * mal-o-, * mel-o- obtient le gallois malu, le vieux breton maletic glosant le participe passé latin contritum, le moyen breton malaff et le breton moderne malañ 'moudre' (KPV 470ff., GPC III: 2326f., Fleuriot (1964b:250, LIV 432f., Lewis & Pedersen (1937:381), LEIA M-32, Schrijver 1995: 81f., Hamp 1973:152).

Selon Matasović (2009), citant LEIA M-56, GPC I:284, Lewis & Pedersen (1937:54), Fleuriot (1964b:86), Deshayes (2003:115), De Bernardo Stempel (1999:293), Hamp (1973:15H), McCone (1996:52), le développement celtique qui obtient bleud 'farine' est passé du participe passé du verbe 'moudre' à un adjectif * mlh2to- 'mou, meuble' ou un adjectif dérivé * mlh2ti- (plus probablement l'adjectif dérivé * mlh2ti- car en absence de la loi de Dybo, on obtiendrait * mlato- de * mlh2to-). Matasović (2009) propose la racine adjectivale proto-celtique * mlāto/i- 'mou, meuble', menant au vieil irlandais mláith [i], au moyen gallois blawd [m], 'farine', au moyen cornique bles et au cornique blot 'farine', au vieux breton blot et au moyen breton bleud 'farine'.


Selon Delanoy (2010), le nom français blé "peut être d'origine celtique", sans doute à partir de la forme du haut vannetais bled (KLT bleud), mais il ne livre pas son raisonnement.

CNTRL rejette deux étymons celtiques pour les formes romanes de 'blé'. "L'étymon celtique * mlato 'farine', à rattacher à molitum, participe passé du latin molere 'moudre' (Jud 1929) fait difficulté du point de vue sémantique, l'évolution de sens normalement attendue étant 'céréale' > 'farine' et non l'inverse". L'étymon celtique * blavos - comme le latin flavus - n'ont pas la consonne -t- ou -d- qui peut obtenir les plus anciennes formes romanes comme bladum (contra Ulrich 1905:227; v. aussi ibid., t. 3, p. 260, note 1).

Bibliographie

  • Ulrich J. 1905. 'blef, blé', Zeitschrift für romanische Philologie 29, p. 227.
  • Ulrich J. xxxx. 'xxx', Zeitschrift für romanische Philologie 3, p. 260, note 1.
  • Jud, Jakob. 1929. 'xxx', Zeitschrift für romanische Philologie 49, 405-411.