Construction transitive explétive; Bez' préverbal

De Arbres

Cette fiche documente les occurrences de Bez', l'infinitif du verbe 'être' (ou de sa forme abrégée) devant un verbe fléchi. En (1), illustrée sous sa forme Bea.


(1) Bea vez d'ober war an douar patatez-mañ.
être R est à faire sur le terre patate-ci
litt. 'Il y en a à faire, sur cette terre à pommes de terre!'
> 'Il y a beaucoup de travail.' Le Berre & Le Dû (1999:44)


Dans quel contexte cette particule induit-elle un effet sémantique particulier?
Y-a-t-il des dialectes où cette particule produit obligatoirement un effet de verum focus du type 'Le fait est que...'?
Peut-elle être sémantiquement vide?
Est-elle restreinte à certaines configurations de discours?
Est-elle restreinte à certains environnements syntaxiques (présence du verbe 'être' en verbe lexical, présence de la particule aspectuelle 'bet', etc...)


Morphologie et variation dialectale

La réalisation morphologique de la particule préverbale varie actuellement de dialecte en dialecte, avec la réalisation de l'infinitif du verbe 'être': bezañ.

La carte 028 de Le Dû (2001), traduction du français Il y a, montre un bez' préverbal sur toute l'ère brittophone (la présence de réponses utilisant l'auxiliaire ober ('faire') suggère que le protocole demandait la traduction d'une tournure telle que il y a de la pluie). Les formes observées sont [bø], [be(z)], [bɛ], [bə], [bid], ou [bu(d/t)].

A noter que différentes formes peuvent manifestement être vivante au même lieu géographique. Pour Riec sur Belon, Le Dû (2001:§028; pt 134) donne [bə zo] alors que Mona Bouzeg y donne Boût oa.


(1) Boût 'oa avel gouez.
être y.avait vent fou
'Il y avait un vent fou.' Haut-cornouaillais (Rieg), Bouzeg (1986:35)

Distribution

Bez est toujours directement devant l'élément tensé, et plus précisément devant le rannig. Il apparaît le plus souvent comme le seul élément dans la zone pré-tensée, mais certains éléments peuvent l'y précéder. En (2), on voit le nom pivot d'une construction du faux sujet précéder bez' dans la zone pré-tensée. Le nom pivot est repris anaphoriquement par le pronom résomptif incorporé dans enno.


(2) Politikerezh ha broadelouriezh, bez' e pege Frañsez Kervella a-drovriad enno (...)
politique et nationalisme, BEZ R collait F.K. à-bras.le.corps dans.3PL
'Frañsez Kervella empoignait à bras-le-corps politique et nationalisme.'
standard, Denez (1993:13)


Bez se trouve en matrices comme en enchâssées, après le complémenteur ha (10, 11, 12). Bez se trouve encore après ha en interrogatives (13).

(10) Lavar din ha bez’ e teui.
dis à.1SG si bez R viendra
'Dis-moi s'il viendra.' cornouaillais, Trépos (2001:§592)


(11) N'ouzon ket ha bez’ e vo kreñv a-walh ar jadenn.
ne sais pas si bez R sera fort assez le chaine
'Je ne sais pas si la chaine sera assez forte.'
cornouaillais, Trépos (2001:§592)


(12) Me va-unan ne ouien ket ha bez’ e oa ac’hanon.
1SG reflex ne savais.1SG pas si bez R cop.3SG P.1SG
'Moi même je ne savais pas si c'était moi.'
Hemon, Mari-Vorgan p.64, cité par René Le Gléau (1973:75)


(13) Daoust ha bez’ e c'hallfec'h [...] kas ac'hanon davet an aotrou K?
Q bez R pourriez envoyer P.1SG à le monsieur K
'Pourriez-vous me mener à monsieur K?'
standard, Dupuy (2007:39)


Voir aussi, pour d'autre exemples toujours après ha:

en léonard, Kerrien (2000:8)
en breton central par le traducteur de Cosey, Hag ar menez a gano evidoc'h, Jonathan 2, p.29.

Motivation d'insertion

Le breton est une langue 'à verbe second', aussi appelée V2. Cela signifie que La position canonique du verbe tensé est la seconde position de phrase.

Parfois, l'élément qui précède le verbe fléchi est la forme (abrégée) du verbe 'être' à l'infinitif. Il est difficile de dire si cette particule (?) est insérée pour obtenir un ordre V2 ou si la structure informationnelle de la phrase l'exige.

Bez n'est ne peut pas être uniquement et dans tous les cas un item de dernier recours permettant de satisfaire V2, car devant le verbe 'emañ', qui est un des rares verbes à pouvoir être placé en initiale de phrase, on peut tout de même le trouver:


(1) Bez ema Perig o klask e vreur er hoad
bez est Perig P chercher son frère dans.le bois
'En ce moment, Perig est occupé à chercher son frère dans le bois.' cornouaillais, Trépos (2001:350)

Impact sémantique

Leclerc (1986) signale un effet emphatique "qui attire l'attention sur le verbe".

 Leclerc (1986:69)
 93. - Dans les temps simples, toutes les formes ordinaires et même les formes d'habitude [du verbe 'être'] peuvent être précédées 
 de l'infinitif bean toutes les fois que, pour attirer l'attention sur le verbe plutôt que sur le sujet ou sur l'attribut, 
 on veut le mettre en tête de la proposition: on a ainsi une sorte de conjugaison que l'on appelle 'emphatique'.
 
 bean e vin fur, /être je serai sage/, 'je serai sage'
 au lieu de:
 me a vo fur ou fur e vin.
 
 Leclerc (1986:75)
 Toutes les formes des temps simples de am eus, comme celles du verbe bean, peuvent être précédées de l'infinitif bean, 
 chaque fois que l'attention doit être attirée sur le verbe et non sur le pronom:
 
 bean am oa, /être à moi était/, 'j'avais'
 au lieu de:
 me am oa
 

verum focus

Le Gléau (1973:45), Trépos (2001:§440), Gros (1984:110), Bouzeg (1986:35), Favereau (1997:§443) Chalm (2008:212) notent tous ce qui semble un 'verum focus' sur le verbe lorsqu'il est précédé de bez.

 Le Gléau (1973:45): 
 "Originellement l'indicatif radical bez (ou l'infinitif apocope bez') signifie: 'effectivement, réellement'."


(13) Bez’ez eus tud hag a zo mat da stagañ
bez R y.a gens C R est bon P lier
'Il y a (vraiment) des gens qui sont fous à lier.' trégorrois, Gros (1984:110)


(14) - Ha gwir eo klañv ? - Ya, bez ez eo !
Q vrai est malade Oui, bez R est
'- Est-il vrai qu’il soit malade ?' '- Oui, il l’est réellement.' trégorrois, Gros (1984:110)


(15) Bez’ e vo pesked da goan.
bez R sera poissons P souper
'Il y aura du poisson à souper.' cornouaillais, Trépos (2001:§440)


Cependant, il est des cas où le 'verum focus' est difficilement postulable, par exemple dans le cas des questions (16).


(16)a. Bez’ zo ur wenodenn all?
bez est un sentier autre
'Il y a un autre sentier?' Kavell ar Bodhisattva, Jonathan 4, p.33.


(16)b. an arhant-se n'int ket deoh; bez ez int? Daoust m'emaint ganeoh.
le argent- ne sont pas à.vous être R sont malgré que sont avec.vous
'Cet argent ne vous appartient pas, n'est-ce pas? Bien que vous l'ayez (sur vous).'
Cornouaillais (bigouden), Bijer (2003:17).


  • Ha bez e c’helle ne zeuje ket ?
'Se pourrait-il (vraiment) qu’elle ne vienne pas ?', standard, Drezen (1990:82)


(1) Boût 'zo goulou.
être y.a lumière
'Il y a bien de la lumière.' Haut-cornouaillais (Rieg), Bouzeg (1986:35)

marqueur d'évidentialité

 Bottineau (200X:4) :
 "L’effet de sens le plus courant est une prise en charge assertive renforcée, 
 centrée sur le locuteur et potentiellement en conflit avec l’interprétant, 
 avec valeurs pragmatiques proches de celles de l’interrogation et de do dit 
 emphatique en anglais actuel."


La contradiction potentielle avec l'interprétant est illustrée aisément ci-dessous dans ce dialogue en sud cornouaillais:

(1)a. Tad Jeremie: Gwall-huñvreal 'peus graet ... N'emañ ket amañ!
mauvais-rêver as.2 fait ne est pas ici
'Tu as fait un cauchemar. Il n'est pas ici.'
(1)b. Jeremie: Met yao! bez' 'mañ a'h!
mais si est
'Mais si! il est là!' sud Cornouaille, An Orignal, p.30.

focalisation verbale

Trépos précise qu'en (17), la présence de bez met "l'accent non seulement sur l'actualité de le recherche, mais sur la présence de Perig dans le bois". On pourrait donc penser à une particule de focus sémantiquement vide, dont la fonction serait de transmettre l'effet de focus à son verbe associé. Cependant, on connait des langues comme le nupe qui ont une telle particule de focus (Kandybowicz 2008:37), et elles sont sémantiquement compatibles avec la négation. Or, Bez n'est pas compatible avec la négation.


(17) Bez' ema Perig o klask e vreur er hoad
bez est Perig P chercher POSS.3SGM frère dans.le bois
'En ce moment, Perig est occupé à chercher son frère dans le bois.'
Trépos (2001:§645)


(x) * Bez' n' ema ket Perig o klask e vreur er hoad
bez ne est pas Perig P chercher POSS.3SGM frère dans.le bois
'En ce moment, Perig n'est pas occupé à chercher son frère dans le bois.' M.Jouitteau [05.2009]

Relevés

Doublant le verbe 'être' et 'avoir'

Le Gléau (1973:45)dit de Bez qu'on "le trouve partout avec les formes verbales de l'indicatif et du conditionnel de bezañ [, être'] et endevout [,'avoir']."

La surreprésentation statistique de l'infinitif (réduit) de 'être' devant les verbes dont 'être' est la racine ('être', 'avoir') pourrait découler (au moins en partie) de cas de redoublement verbal (bez 'e vez... sur le mode de Gouzout a ouzon).


(1) Bez ez eus ur c'hategori tud ha n'ouzon ket pe o deus nosion eus un dra bennak pe d'o deus ket.
Bez R y.a un catégorie gens C ne sais.1SG pas ou 3PL ont notion P un chose quelconque ou NEG? 3PL ont pas
'Il y a une catégorie de personnes, je (ne) sais pas si ils ont une notion de quoi que ce soit.'
Léon, Mellouet & Pennec (2004:18)


(2) Bez' omp digemeret en eur zal vraz spontuz.
Bez sommes accueillis dans un salle grande terrible
'Nous sommes accueillis dans une salle terriblement grande.'
Bez' he-deus da vihanna, tri-ugent metr hed ha tregont metr lehed.
Bez R.3SGF a P1 moins trois-vingt mètre long et trente mètre large
'(En effet) Elle fait au moins 60m de long et 30 de large.'
Yves Miossec, Dreist ar mor bras, p.7


Dans certaines variétés, il semble que l'explétif soit entièrement réductible au doublement de la racine verbale. Dans kammdro an ankoù, du vannetais Loeiz Herrieu, la réduction de l'infinitif du verbe 'être' est bout et apparaît uniquement devant les verbes 'être' et 'avoir' . On trouve dans le texte de multiples occurrences de bout préverbal, devant 'être' au passé, présent et futur, ainsi que devant le verbe 'avoir', avec un sujet postverbal défini ou indéfini. Aucune occurrence de bout n'apparaît jamais devant un autre verbe. Dans le breton de Herrieu, la distribution de bout semble donc entièrement circonscrite aux cas de redoublement verbal.


(3) …un den kozh hag en deus graet e amzer soudard en Oriant, bout 'zo 50 vlez 'zo !
un homme vieux C R.3SGM a fait son temps soldat P Oriant être R.y.a 50 année R.y.a
'... un vieil homme qui a fait son service militaire à Lorient, il y a 50 ans!'
vannetais, Herrieu (1994:70)


(3) Tostennoù Kistinid ha glannoù ar Blaouezh ha bout am bo ar joa d'ho kwelet c'hoazh ur wezh?
buttes Kistinid et rives [art|le]] Blaouezh Q être R.1SG aurai le joie P 2PL voir encore un fois
'Buttes de Kistinid et rives du blaouezh (Blavet), est-ce que j'aurai encore une fois la joie de vous voir?'
vannetais, Herrieu (1994:215)


Devant d'autres verbes

verbes semi-auxiliaires

(3) Bez’ e c'helle an anv-verb, evel an holl anvioù-kadarn, beza rener pe renadenn [...]
bez R pouvait le nom-verbe comme le tous noms-fort, être sujet ou complément
'Le nom verbal pouvait, comme tous les noms, être sujet ou complément.' Fleuriot (2001:20)


(4) Ha Bez’e ouie ma zad kontañ ivez doare ar brezelioù a save (...) etre ar broioù hag an dud.
et bez R savait.3SG mon père conter aussi manière le guerres R montait entre le pays et le gens
'Et mon père savait raconter aussi la façon dont les guerres naissaient entre les pays et les gens.'
cornouaillais, Yann Bijer, Avel gornôg p. 137


(5) Bez’ e rankan lavared da genta n'am-eus ket greet nemed se.
bez R dois dire P premier ne R.1SG-ai pas fait seulement celà
'Je dois tout d'abord dire que je n'ai pas fait que celà.' F. Broudig, kenavo d'am labour, texte.

verbes lexicaux

Grégoire de Rostrenen (1738) présente cinq alternatives pur conjuguer un verbe en breton, l'une d'elle, la 'quatrième conjugaison', étant par insertion de Bez préverbal (Beza ez rañ un ty, [Bez-R-fais.1SG-un-maison], 'Je bâtis une maison' p.97). Il illustre un paradigme entier avec le verbe 'aimer' (Beza ez carañ, [Bez-R-aime.1SG], 'Je t'aime' p.179).


René Le Gléau, Pierre Trépos, Fañch Elies Abeozen, Visant Fave, Yann Bijer et Eugène Chalm citent tous des phrases avec Bez d'emphase devant des verbes lexicaux.


(6) Bez’ e kaver c’hoaz tier-soul e Breizh.
bez R trouve.IMP encore chaumières en Bretagne
'On trouve encore des chaumières en Bretagne.'
Trépos (2001:§440)


(7) Politikerezh ha broadelouriezh, bez' e pege Frañsez Kervella a-drovriad enno (...)
politique et nationalisme, BEZ R collait F.K. à-bras.le.corps P.3PL
'Frañsez Kervella empoignait à bras-le-corps politique et nationalisme.'
standard, Denez (1993:13)


(8) bez' ez eas Frañsez Kervella d'hen gwelout e 1938 (...)
BEZ R alla P IN voir P 1938
'Frañsez Kervella alla le voir en 1938.'
standard, Denez (1993:20)


(7) Bez’ e c'hounezas ur gaer a vrud ha karantez.
bez R gagna un belle de renommée et amour
'(le fait est qu') elle gagna affection et renommée.'
Fañch Elies Abeozen(1991:45)
(8) Bez’ e prenis eul leor d'am breur deh.
bez R achetai un livre à mon frère hier
'J'ai acheté un livre hier à mon frère.'
Fave (1998:51)
(9) Gwir e oa. Bez’e weled an ti gwenn.
vrai R était bez R voyait.IMP le maison blanche
'C'était vrai. On voyait la maison blanche.'
Hemon, An tri boulomig kalon aour:27, cité par Le Gléau (1973:45)
(10) a. Bez’ e lennan b. Lavar din ha bez' e teui.
bez R lis.1SG dis P.1SG si bez R viendras
'Je lis (effectivement)'/ 'Dis-moi si (effectivement) tu viens.' Chalm (2008:212)


  • Favereau (1997:§443) donne comme licites à Plougastell (citant Y. Gerven comme source), et en Poher: Bez e welez, 'tu vois', et bez' e lennan an anoñsoù ivez [bez R lis.1SG le annonces aussi, 'je lis les annonces aussi'].

Cependant, les données de Plougastell rapportées par Favereau semblent porter à question (cf. discussion sur forum kervarker).

Variation dialectale

dans la restriction à certains verbes

Les dialectes varient suivant les verbes avec lesquels on trouve Bez.


  • Hingant (1868:74) (du dialecte de Tréguier) semble considérer que l'option d'un Béz préverbal est restreint aux verbes bezañ, 'être', et kaoud, 'avoir'. (L'infinitif utilisé devant l'auxiliaire ober, 'faire' conjugué étant son propre infinitif).


  • Gros (1984:110) note que le Bez’ d’insistance est restreint en Trégorrois à trois verbes tensés: les verbes bezañ, 'être', kaoud, 'avoir' et gouzout, 'savoir'.


La question de la variation dialectale dans la possibilité d'avoir recours à bez est posée depuis longtemps par Steve Hewitt (1988, p.c. 2003). Une discussion intéressante existe à ce sujet sur le forum de kervarker.org. Steve Hewitt propose de tester la généralisation que bez préverbal est restreint dans tous les dialectes aux co-occurences avec 'être', 'avoir' et, "à l'ouest du Trégor", aux auxiliaires modaux (rankoud, galloud, dleoud...).

Au vu des données ci-dessus, puisque Bez devant un verbe lexical semble solidement attesté, on peut aménager la généralisation en proposant un continuum allant du Trégor ('être', 'avoir' et peut-être 'savoir'), puis, allant vers l'ouest, une acceptation des modaux pour finalement cerner les zones ou Bez peut-être pré-lexical.

Leclerc (1986:63, fn2) signale qu'en Léon, "l'infinitif beza, 'être', peut s'employer emphatiquement devant tous les verbes. : beza e karan, bez' e karan, /être j'aime/, 'j'aime'.


étudier la variation dialectale

Pour tester l'aire géographique de cette généralisation, se pose alors la question de ce qui est (et n'est pas) un auxiliaire modal:

gouzout, 'savoir', cité par Jules Gros en fait-il partie?
rankout, 'devoir', est cité par Hewitt comme n'étant pas licite en trégorrois avec Bez'. Ce verbe n'est-il pas un modal en trégorrois? Quelle évidence pourrions-nous trouver pour supporter cette hypothèse?
kavout, cité par Trépos, a-t-il une valeur modale en cornouaillais qu'il n'aurait pas éventuellement dans d'autres dialectes? Quelle évidence pourrions-nous trouver pour supporter cette hypothèse?
quand un dialecte n'a pas la possibilité d'avoir recours à bez pour un 'verum focus', quelle stratégie est employée?

Etant donné que le breton littéraire a Bez pré-lexical, il est aussi possible que la variation ne soit pas intrinsèquement géographique, mais la marque d'un niveau de langue.

Il y a une ressemblance certaine entre les verbes qui tolèrent Bez, et ceux qui peuvent se dédoubler pour remplir la zone préverbale. De dialecte en dialecte, se pourrait-il que les verbes devant lesquels on trouve bez soient les mêmes que ceux qui peuvent se prendre eux-même comme auxiliaires?

rannig associé

Le rannig associé à Bez/Bout varie selon les dialectes.

Pour Trépos (2001:§440) et Gros (1984:110), c'est le rannig e qui est associé à Bez, ainsi que la mutation mixte qu'il déclenche sur le verbe.

On trouve cependant cet explétif parfois associé au rannig a.

Lorsque le verbe de la phrase est bezañ, 'être', la variation est observable non seulement dans le rannig associé, mais aussi dans la forme du verbe ((ez) eus vs. (a) zo). En vannetais, Guillevic et Le Goff (1986:56) notent une alternance entre Bout e zou avaleu et Bout es avaleu ('Il y a des pommes').

Le Bozec (1933:6), un manuel scolaire de cours préparatoire, recommande "bez ez eus [qui] équivaut à beza 'zo, moins correct."


Horizons comparatifs

SADED (2010:207) cite des exemples en moyen breton devant les verbes tensés kaout, gouzout, dleout, kouezhañ, et gwelout.

La gradation dialectale que l'on constate dans la compatibilité de Bez' préverbal avec le verbe 'être', le verbe 'avoir', les modaux puis tous les verbes lexicaux, se retrouve avec un explétif préverbal à l'échelle typologique plus large entre les langues (Kayne 2006:23).

Bibliographie

description du phénomène

  • Le Bozec, 1933. Le français par le breton, méthode bilingue, cours préparatoire, E. Thomas (ed.), Guingamp.
  • de Rostrenen, G. 1738. Grammaire Françoise-Celtique ou Françoise-Bretonne qui contient tout ce qui est nécessaire pour apprendre par les Règles la langue celtique ou bretonne, Roazhon : Vatar, 1738. In-12 : XVI-192 p. ([réédition Alain Le Fournier, Brest], [réédition 2008 embannadurioù Al Lanv])
  • Gros, J. 1974. (réédition 1984)Le trésor du breton parlé III. Le style populaire. Brest: Emgleo Breiz - Brud Nevez.
  • Hewitt, Steve, 1988. 'Ur framm ewid diskriva syntax ar verb brezoneg / Un cadre pour la description de la syntaxe verbale du breton', La Bretagne Linguistique, 4:203-11.
  • Leclerc, Louis. 1986 [1906, 1911], Grammaire Bretonne du dialecte de Tréguier, 3ième édition, Ar Skol Vrezhoneg, Emgleo Breiz (précédentes Saint-Brieuc: Prud'homme).
  • Trépos, P. 2001 [1968, 1980, 1996], Grammaire bretonne, 1968 édition Simon, Rennes.- 1980 édition Ouest France, Rennes; 1996, 2001 édition Brud Nevez, Brest.
  • Wmffre, I. 1998. Central Breton. [= Languages of the World Materials 152] Unterschleißheim: Lincom Europa.

horizons comparatifs

  • Kandybowicz, J. 2008. The Grammar of Repetition, Nupe grammar at the syntax-phonology interface, John Benjamins Publishing Company.
  • Kayne, R. 2006. ‘Expletives, Datives, and the Tension between Morphology and Syntax’, ms. University of New York.

corpus

  • Fañch Elies-Abeozen 1991. traduction du Mabinogion, Mouladurioù Hor Yezh.
  • Miossec, Y. 1984, Dreist ar mor bras, Brud Nevez.
  • Hemon 1962, Mari-Vorgan, Al Liamm.