Différences entre les versions de « Argot »

De Arbres
m (Remplacement de texte — « colspan="10" » par « colspan="15" »)
(17 versions intermédiaires par le même utilisateur non affichées)
Ligne 1 : Ligne 1 :
L'argot est un [[niveau de langue]] qui marque une familiarité et une connivence entre interlocuteurs.
L''''argot''' est un [[niveau de langue]] qui marque une familiarité et une connivence entre interlocuteurs. Les règles de syntaxe sont typiquement préservées dans les parlers argotiques, qui sont marqués par des changements [[lexicaux]] importants. C'est une différence profonde avec les [[variations dialectales]], qui impactent la syntaxe de la langue. Cependant, les argots peuvent eux-mêmes montrer des variations dialectales. Elles en montrent typiquement entre générations.
Les règles de syntaxe sont typiquement préservées dans les parlers argotiques, qui sont marqués par des changements lexicaux importants. C'est une différence profonde avec les [[variations dialectales]].




En breton, on a surtout étudié les argots professionnels, marquant l'appartenance à un corps de métier (Ernault 1886, 1894, 1895, Flatrès 1985, Le Besco 1991, Lecoq 1991).
{| class="prettytable"
|(1)|| Emaoun || o || komañs || pakañ || anezho.
|-
||| [[emañ|suis]] || [[particule o|à]]<sup>[[4]]</sup> || [[komañs|commencer]] || [[pakañ|attraper]] || [[a|P]].[[pronom incorporé|eux]]
|-
||| colspan="15" | 'Je commence à dérailler.'
|-
|||||||colspan="15" | ''Léon'', [[Kervella (2009)|Kervella (2009]]:119)  
|}


Le breton argotique familier est documenté dans des ouvrages plus récents: [[Plourin (2000)]], [[Plourin (2003)|(2003)]], et [[Kervella (2003)]].


On commence à trouver des traces d'un argot urbain émergent (Leon & Roue 2006), avec des éléments de "[[gintueg]]" (verlan).
En breton, ce sont surtout les argots professionnels, qui marquent l'appartenance à un corps de métier, qui ont été étudiés, en particulier le langage '''chon''' des brodeurs de Pont L'Abbé ou le '''tunodo''' des couvreurs de Ker ar Roc'h (Ernault 1886, 1894, 1895, Flatrès 1985, Le Besco 1991, [[Lecocq (1991)|Lecocq 1991]]).


Le breton argotique familier est documenté dans des ouvrages plus récents comme [[Plourin (2000)|Plourin (2000]], [[Plourin (2003)|2003)]], et [[Kervella (2003)]]. On commence aussi à trouver des traces d'un argot urbain émergent ([[Leon & Roue (2006)|Leon & Roue 2006]]), avec des éléments de "[[gintueg]]" (verlan). Pour dépasser le niveau anecdotique, il manque cependant d'études de fond sur la vitalité de ces variétés.


== A ne pas confondre ==
 
== À ne pas confondre ==


=== argot et thèmes tabous ===
=== argot et thèmes tabous ===


Les thèmes tabous, érotiques ou scatologiques, favorisent l'usage de argot car l'expression du tabou est évidemment favorisé par une connivence entre locuteurs.  
Les [[thèmes tabous]], érotiques ou scatologiques, favorisent l'usage de l'argot car l'expression du tabou est évidemment favorisé par une connivence entre locuteurs. Cependant, si ces thèmes peuvent éventuellement favoriser l'usage de l'argot, ils n'y sont pas intrinsèquement liés. Au contraire, on peut même voir des phénomènes de compensation ou des jeux de contrastes qui privilégient un [[niveau de langue]] élevé dans l'expression des tabous (cf. ''J'ai joué je ne sais où jeu d'une drôle sorte, les boules entrent dans le trou et la queue reste à la porte'', Victor Hugo).  
Cependant, s'ils peuvent éventuellement les favoriser, ils n'y sont pas intrinsèquement liés. Au contraire, on voit même des phénomènes de compensation ou des jeux de contrastes qui favorisent un niveau de langue élevé (cf: ''J'ai joué je ne sais où jeu d'une drôle sorte, les boules entrent dans le trou et la queue reste à la porte'', Victor Hugo).  


Dans [[Menard (1995)]] et Le Menn (1999), recueils d'expressions érotiques ou scatologiques en breton, on trouve ainsi des expressions de niveaux stylistiques très différents.  
Dans les recueils d'expressions érotiques ou scatologiques en breton, on trouve ainsi des expressions de niveaux stylistiques très différents. On retiendra principalement le ''Glossaire cryptologique du breton'' de [[Ernault (1884-1902)]] édité dans [[Le Menn (1999)]], et le dictionnaire ''Alc'hwez Bras ar Baradoz Vihan'' de [[Menard (1995)]].


=== argot et tutoiement ===


=== argot et tutoiement ===
Le passage à un niveau parlé argotique n'est pas toujours signalé en breton par le [[tutoiement]], car l'usage des marques de seconde personne varie de dialecte en dialecte.


Le passage à un niveau parlé argotique n'est pas toujours signalé en breton par les [[tutoiement|oppositions tutoiement/vouvoiement]], car l'usage des marques de seconde personne varie de dialecte en dialecte.
== Bibliographie ==
== Bibliographie ==


* Ernault, E. 1895. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche (fin)', ''[[Revue Celtique]]'' XVI.
* Ernault, E. 1895. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche (fin)', ''[[Revue Celtique]]'' XVI.
* Ernault, E. 1894. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche', ''[[Revue Celtique]] XV.  
* Ernault, E. 1894. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche', ''[[Revue Celtique]] XV.  
* Ernault, E. 1886. 'Études bretonnes: I. L'individualisme dans le langage breton, II. Le breton et l'argot, III. Un cas de renforcement des consonnes, IV. Sur la chute des sons, u, w, v, f', ''[[Revue Celtique]] VII.  
* Ernault, E. 1886. 'Études bretonnes: I. L'individualisme dans le langage breton, II. Le breton et l'argot, III. Un cas de renforcement des consonnes, IV. Sur la chute des sons, u, w, v, f', ''[[Revue Celtique]] VII.  
* [[Ernault (1884-1902)|Ernault, Émile. 1884-1902]]. 'Glossaire cryptologique du breton', avec un additif et corrections et 2 suppléments, ''Kryptidia'', vol. II, III, VI, VIII, [https://ia700401.us.archive.org/6/items/GlossaireCryptologiqueDuBreton/bretonargot.pdf texte].
* Flatrès, Pierre. 1985. 'Lang Kouter (lankouta) - L'argot des tailleurs d'Elliant (Finistère)', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 1, CRBC.  
* Flatrès, Pierre. 1985. 'Lang Kouter (lankouta) - L'argot des tailleurs d'Elliant (Finistère)', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 1, CRBC.  
* [[Kervella (2003)|Kervella, Divi. 2003]]. ''Geriaoueg luc’hajoù ar brezhoneg'', Dastumad Teñzor ar brezhoneg, An Alarc'h.
 
* Le Besco, P. 1991. 'L’argot des maçons de la Forêt-Fouesnant', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 8, CRBC.  
* [[Kervella (2003)|Kervella, Divi. 2003]]. ''Geriaoueg luc'hajoù ar brezhoneg'', Dastumad Teñzor ar brezhoneg, An Alarc'h.
* Lecocq, J.-M. 1991. 'Les argots bretons, langages secrets professionnels en Basse-Bretagne', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 8, CRBC.  
 
* Le Besco, P. 1991. 'L'argot des maçons de la Forêt-Fouesnant', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 8, CRBC.  
 
* [[Lecocq (1991)|Lecocq, J.-M. 1991]]. 'Les argots bretons, langages secrets professionnels en Basse-Bretagne', ''[[La Bretagne Linguistique]]'' 8, CRBC.  
 
* [[Leon & Roue (2006)|Leon, Katell & Visant Roue 2006]]. ''Kit de Survie dans les banlieues bretonnes'', illustré par Nono, Embannadurioù an Amzer [éditions du temps].
* [[Leon & Roue (2006)|Leon, Katell & Visant Roue 2006]]. ''Kit de Survie dans les banlieues bretonnes'', illustré par Nono, Embannadurioù an Amzer [éditions du temps].
* [[Menard (1995)|Menard, Martial. 1995]]. ''Alc'hwez Bras ar Baradoz Vihan'', ''Geriahudur ar brezhoneg'', An Here.  
* [[Menard (1995)|Menard, Martial. 1995]]. ''Alc'hwez Bras ar Baradoz Vihan'', ''Geriahudur ar brezhoneg'', An Here.  
* Menn (Le) Gwennolé. 1999. ''Glossaire cryptologique breton d'Emile Ernault'', éd. Skol.  
 
* [[Le Menn (1999)|Menn (Le) Gwennolé. 1999]]. ''Glossaire cryptologique breton d'Emile Ernault'', éd. Skol.  
 
* [[Plourin (2003)|Plourin, J.Y. 2003]]. ''Initiation au breton familier et argotique'', 2ème éd. revue et augm., 270 p.
* [[Plourin (2003)|Plourin, J.Y. 2003]]. ''Initiation au breton familier et argotique'', 2ème éd. revue et augm., 270 p.
* [[Plourin (2000)|Plourin, J.Y. 2000]]. ''Initiation au breton familier et argotique'', 230 p., éd. Armeline.  
* [[Plourin (2000)|Plourin, J.Y. 2000]]. ''Initiation au breton familier et argotique'', 230 p., éd. Armeline.  


[[Category:articles|Categories]]
[[Category:articles|Categories]]

Version du 23 juin 2022 à 10:57

L'argot est un niveau de langue qui marque une familiarité et une connivence entre interlocuteurs. Les règles de syntaxe sont typiquement préservées dans les parlers argotiques, qui sont marqués par des changements lexicaux importants. C'est une différence profonde avec les variations dialectales, qui impactent la syntaxe de la langue. Cependant, les argots peuvent eux-mêmes montrer des variations dialectales. Elles en montrent typiquement entre générations.


(1) Emaoun o komañs pakañ anezho.
suis à4 commencer attraper P.eux
'Je commence à dérailler.'
Léon, Kervella (2009:119)


En breton, ce sont surtout les argots professionnels, qui marquent l'appartenance à un corps de métier, qui ont été étudiés, en particulier le langage chon des brodeurs de Pont L'Abbé ou le tunodo des couvreurs de Ker ar Roc'h (Ernault 1886, 1894, 1895, Flatrès 1985, Le Besco 1991, Lecocq 1991).

Le breton argotique familier est documenté dans des ouvrages plus récents comme Plourin (2000, 2003), et Kervella (2003). On commence aussi à trouver des traces d'un argot urbain émergent (Leon & Roue 2006), avec des éléments de "gintueg" (verlan). Pour dépasser le niveau anecdotique, il manque cependant d'études de fond sur la vitalité de ces variétés.


À ne pas confondre

argot et thèmes tabous

Les thèmes tabous, érotiques ou scatologiques, favorisent l'usage de l'argot car l'expression du tabou est évidemment favorisé par une connivence entre locuteurs. Cependant, si ces thèmes peuvent éventuellement favoriser l'usage de l'argot, ils n'y sont pas intrinsèquement liés. Au contraire, on peut même voir des phénomènes de compensation ou des jeux de contrastes qui privilégient un niveau de langue élevé dans l'expression des tabous (cf. J'ai joué je ne sais où jeu d'une drôle sorte, les boules entrent dans le trou et la queue reste à la porte, Victor Hugo).

Dans les recueils d'expressions érotiques ou scatologiques en breton, on trouve ainsi des expressions de niveaux stylistiques très différents. On retiendra principalement le Glossaire cryptologique du breton de Ernault (1884-1902) édité dans Le Menn (1999), et le dictionnaire Alc'hwez Bras ar Baradoz Vihan de Menard (1995).

argot et tutoiement

Le passage à un niveau parlé argotique n'est pas toujours signalé en breton par le tutoiement, car l'usage des marques de seconde personne varie de dialecte en dialecte.

Bibliographie

  • Ernault, E. 1895. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche (fin)', Revue Celtique XVI.
  • Ernault, E. 1894. 'Études bretonnes, IX. Sur l'argot de La Roche', Revue Celtique XV.
  • Ernault, E. 1886. 'Études bretonnes: I. L'individualisme dans le langage breton, II. Le breton et l'argot, III. Un cas de renforcement des consonnes, IV. Sur la chute des sons, u, w, v, f', Revue Celtique VII.
  • Ernault, Émile. 1884-1902. 'Glossaire cryptologique du breton', avec un additif et corrections et 2 suppléments, Kryptidia, vol. II, III, VI, VIII, texte.
  • Flatrès, Pierre. 1985. 'Lang Kouter (lankouta) - L'argot des tailleurs d'Elliant (Finistère)', La Bretagne Linguistique 1, CRBC.
  • Plourin, J.Y. 2003. Initiation au breton familier et argotique, 2ème éd. revue et augm., 270 p.