Anaphores et cataphores

De Arbres

Une anaphore est une expression qui n'a pas de référence indépendante. L'anaphore co-réfère avec un antécédent dans la même proposition, dans la même phrase ou ailleurs dans le discours.

Les anaphores sont assujetties aux conditions du liage (Condition A, Condition B, Condition C du liage).

Catégories et anaphores

On parle d' expression anaphorique de manière large car des catégories grammaticales très différentes peuvent montrer des propriétés anaphoriques.


anaphores pronominales

Les pronoms réfléchis, les pronoms objets proclitiques ou les déterminants possessifs sont des anaphores pronominales.


groupes nominaux anaphoriques

Il existe aussi en breton des DPs anaphoriques, syntagmes nominaux qui ont des propriétés anaphoriques (grâce à une structure contenant un pronom).


adverbes anaphoriques

Une classe d'adverbes, les adverbes anaphoriques spatiaux, sont anaphoriques en ce qu'ils ont besoin d'un antécédent (spatial) pour référer.

Ces adverbes anaphoriques spatiaux se retrouvent dans des expressions anaphoriques qui débordent le domaine spatial (kement-se, mod-se, an-dra-se...).

temps anaphorique

Le temps, lui aussi, peut être anaphorique quand ce n'est pas la morphologie flexionnelle qui permet l'ancrage temporel, mais le calcul par rapport à un antécédent qui est lui temporellement ancré.

Un exemple prototypique en breton est celui des infinitives narratives.

Cataphore

Une cataphore est une anaphore dont l'expression co-référente est située linéairement après elle. Une anaphore peut aussi référer avec un élément présent en contexte, ou réalisé par un geste.


(1) Kement-se n'eo ket debriñ mes krignat an hani eo.
autant- ne'est pas manger mais grignoter le celui est
'Cela n'est pas manger mais grignoter.'
Le Scorff, Ar Borgn (2011:57)


condition C du liage

Les cataphores sont filtrées par la condition C du liage. Hendrick (1990:124) pointe par exemple que contrairement aux cas de cataphores autorisés, le pronom vide sujet en (1) est en relation structurale de c-commande du nom propre Mona. En conséquence, suivant la condition C du liage, ce pronom sujet ne peut pas être interprété comme coréférent à Mona, sous peine d'agrammaticalité de la phrase.


(1) * Lavaret he deus [e]x [ e oar Monax ar respont ].
dit 3SGF a R4 sait Mona le réponse
'Elle a dit que Mona connaît la réponse', Standard, Hendrick (1990:124)


autre restriction

Hendrick (1990:125) pointe une autre restriction sur les cataphores que la condition C.

En (2) comme en (3), l'ordre des mots est VSO, verbe-sujet-objet. Le sujet pronominal ne peut pas précéder l'objet nom propre Yann. Le sujet nom propre peut précéder l'objet pronominal.


(2) * Dec'h e wele ex dad Yannx
hier R4 voyait son père Yann
'Sonx père voyait Yannx hier.' Standard, Hendrick (1990:125)


(3) Dec'h e wele Yannx ex dad.
hier R4 voyait son père Yann
'Yannx voyait sonx père hier.' Standard, Hendrick (1990:125)

étude de cas

Louis (2015:220) note une asymmétrie dans les relations anaphoriques autorisées dans les expressions kaout droug et ober droug. Ces faits mêlent structure informationnelle, expressions figées et relations anaphoriques.

Avec kaout droug, le sujet expérienceur peut être réalisé par un pronom ou un nom propre en matrices, mais pas par un nom propre en enchâssée.


(1) Eñ/Yann en deus droug d’e vrec’h.
il/Yann 3SGM a a mal à1'son1 bras
'Il/Yann a mal au bras.' Haut-vannetais, Louis (2015:220)


(2) ? Mari a gav geti en deus Yann droug d’e vrec’h.
Marie R1 trouve avec.elle 3SGM a Yann mal à1'son1 bras
'Marie a l’impression que Yann a mal au bras.' Haut-vannetais, Louis (2015:220)


A l'opposé, avec ober droug, l'expérienceur qui n'est pas le sujet ne peut pas être réalisé comme un nom propre en matrice, alors qu'il le peut en enchâssée. La cataphore semble donc interdite en (3), alors qu'elle est possible en enchâssée en (4).


(3) E vrec’h 'ra droug dezhoñ/?? da Yann.
son1 bras R fait mal à.lui/ à1 Yann
'Son bras lui fait mal.' Haut-vannetais, Louis (2015:220)


(4) Mari a gav geti e ra droug e vrec’h da Yann.
Marie R1 trouve avec.elle R fait mal son1 bras à1 Yann
'Marie a l’impression que Yann a mal au bras.' Haut-vannetais, Louis (2015:220)

Bibliographie

  • Fossard, Marion & Marie-José Béguelin (éds). 2014. Nouvelles perspectives sur l'anaphore, Points de vue linguistique, psycholinguistique et acquisitionnel, Sciences pour la communication. Vol. 111.
  • Heim, Irene. 1990. 'E-type pronouns and donkey anaphora', Linguistics and Philosophy 13 (2): 137-177.
  • Radford, A. 1997. Syntax, a Minimalist introduction, Cambridge University Press.
  • Zribi-Hertz, Anne. 1996. L'anaphore et les pronoms. Une introduction à la syntaxe générative, coll. Sens et structures, Presses Universitaires du Septentrion, Lille.