Différences entre les versions de « -ni, -oni »

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|(2)|| he dorn ||rouzet d'ar ||seizh amzer || ha kuilhet ||d'ar || gozhoni.
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|(1)|| kemerout || c'houerv'''oni'''|| ouz || c'houev'''der'''iou ||ar vuhez
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[[Morris Jones (1913)|Morris Jones (1913]]:232), [[Fleuriot (1964a)|Fleuriot (1964]]:355) et [[Zimmer (2000)|Zimmer (2000]]:408ff) ont proposé une [[grammaticalisation]] à partir de la seconde partie d'un composé avec le nom reconstruit pour 'action' *''gnīmu'', m. (apparenté au vieil irlandais ''gnim'', irlandais moderne ''gniomh'', m.).
[[Morris Jones (1913)|Morris Jones (1913]]:232), [[Fleuriot (1964a)|Fleuriot (1964]]:355) et [[Zimmer (2000)|Zimmer (2000]]:408ff) ont proposé une [[grammaticalisation]] à partir de la seconde partie d'un composé avec le nom reconstruit pour 'action' *''gnīmu'', m. (apparenté au vieil irlandais ''gnim'', irlandais moderne ''gniomh'', m.).
[[Irslinger (2014)|Irslinger (2014]]:87) pointe que cette hypothèse de grammaticalisation du nom signifiant 'action' ne dérive pas correctement la sémantique de ''kozhni'', 'vieillesse' ou ''glazni''. Elle ajoute qu’en [[vieux breton]], le suffixe est toujours réalisé en ''-ni'', alors que le nom pour 'action' y est attesté pour la forme ''-gnim'' (''im-guo-gnim'', 'entreprise, construction'). On trouve aussi le vieux gallois ''guor-gnim'', 'dur labeur' et le moyen gallois ''gnif'', 'travail, douleur'.
[[Irslinger (2014)|Irslinger (2014]]:87) pointe que cette hypothèse de grammaticalisation du nom signifiant 'action' ne dérive pas correctement la sémantique de ''kozhni'', 'vieillesse' ou ''glazni''. Elle ajoute qu'en [[vieux breton]], le suffixe est toujours réalisé en ''-ni'', alors que le nom pour 'action' y est attesté pour la forme ''-gnim'' (''im-guo-gnim'', 'entreprise, construction'). On trouve aussi le vieux gallois ''guor-gnim'', 'dur labeur' et le moyen gallois ''gnif'', 'travail, douleur'.


[[Pedersen (1909-1913)|Pedersen (1909–1913, II]]:18) et [[Irslinger (2014)|Irslinger (2014]]:87) proposent que les finales en ''‑ni'' et ''‑oni'' résultent d’extensions de ''‑n‑'' ou ''‑on‑'' par le suffixe de nom abstrait masculin ''[[-i (N.)|‑i]]''. Selon [[Zimmer (2000)|Zimmer (2000]]:444), ''‑oni'' est un conglomérat du suffixe pluriel ''[[-ien, -ion|‑(i)on]]'' avec le suffixe de nom abstrait masculin ''[[-i (N.)|‑i]]''. Ces hypothèses impliquent un changement dans le genre du suffixe.
[[Pedersen (1909-1913)|Pedersen (1909–1913, II]]:18) et [[Irslinger (2014)|Irslinger (2014]]:87) proposent que les finales en ''‑ni'' et ''‑oni'' résultent d'extensions de ''‑n‑'' ou ''‑on‑'' par le suffixe de nom abstrait masculin ''[[-i (N.)|‑i]]''. Selon [[Zimmer (2000)|Zimmer (2000]]:444), ''‑oni'' est un conglomérat du suffixe pluriel ''[[-ien, -ion|‑(i)on]]'' avec le suffixe de nom abstrait masculin ''[[-i (N.)|‑i]]''. Ces hypothèses impliquent un changement dans le genre du suffixe.





Version du 26 janvier 2023 à 17:04

Le suffixe -ni, ou -oni, sert à former des noms abstraits.


(1) Kê, lousdoni ar foeltr !
va sal.eté le foudre
'Va, saleté du diable !'
Haute-Cornouaille (Kergrist-Moëlou), Le Garrec (1901:116)


Trépos (2001:78) donne kozni 'vieillesse', c'hwervoni 'sentiment d'amertume'.

Helias (1986:13) donne kasoni 'haine au sens abstrait', sur kas haine'.

Favereau (1997:§185) donne sotoni 'bêtise' et viloni 'vilenie'.


Morphologie

variation dialectale

Favereau (1997:§183) donne pour 'vieillesse' la forme kozhni et la forme vannetaise kohoni. On trouve aussi kozhoni dans Ar Meliner (2009).


(2) he dorn rouzet d'ar seizh amzer ha kuilhet d'ar gozhoni.
son2 main rouss.i par le sept temps et rid.é par le 1viel.lesse
'[sa] main brunie par le vent et le soleil, et ridée par la vieillesse.'
Vannetais, Ar Meliner (2009:107)


genre

Les noms dérivés en -ni comme kozhni et krezni sont féminins (Kervella 1947:§839). Trépos (1968:§129) considère aussi que -ni, -oni est féminin. Il donne druzoni 'graisse'.



Le Gonidec (1850:20,21:n°10) donne -oni comme féminin. Selon Le Bayon (1878:14), les noms en -oni, féminins hors vannetais, sont de genre incertain en vannetais. Thibault (1914:175) note qu'à Cléguérec en Morbihan, druoni 'graisse' et kohoni 'vieillesse' sont féminins, mais er melkoni 'la mélancolie' est masculin.


composition

C'est ce suffixe -oni qu'on retrouve dans la finale en -oniezh.

Sémantique

composé déontique

Le Roux, cité par Vallée (1980:XVIII), pointe la dimension morale dans les composés en -oni, qu'il contraste avec le suffixe formateur de noms abstraits -der, -ter.


(1) kemerout c'houervoni ouz c'houevderiou ar vuhez
prend.re amer.t.sfx contre amer.t.sfx.s le 1vie
'contracter de l'amertume (dans l'âme) contre les amertumes (des choses) de la vie.'
Le Roux, cité dans Vallée (1980:XVIII)


-oni vs. -oniaj

Gros (1989:'brasoni') donne brasoni et brasoniaj. Le suffixe -oni réalise le nom abstrait de dimension morale, et le suffixe -aj obtient le comportement ou la relation qui en découle ('brasoni 'grandeur, orgueil' et brasoniaj 'un conflit d'orgueil, un conflit de prééminence').


-ijenn vs. -ni, vs. -oni

Selon Martin (1929:175), à la forme léonarde kozni correspond la forme vannetaise kouhoni, et la forme cornouaillaise (Scaër, Guiscriff, Gourin) kosijen.


-der vs. -oni

Selon Le Roux (1915:68) citant Vallée, -oni se prête mieux au sens moral que -der.

  • kemeret brasoni ouz brasderiou e garg
'prendre de l'orgueil (grandeur dans l'esprit) des grandeurs (dans les choses) de sa charge'
  • kemeret chouervoni ouz c'houervderiou ar vuez
'contracter de l'amertume (dans l'âme) des amertumes (des choses) de la vie.'


abstrait/ concret

Le terme druzoni, réfère au nom abstrait 'fertilité', mais aussi au nom concret 'graisse'.


(2) druz, 'gras, abondant, dru, humide, généreux, fertile'

=> druzoni, 'graisse, fertilité', Merser (2009)

Diachronie et horizons comparatifs

Les suffixes brittoniques *‑ni et *‑oni, distincts, sont tous deux passés du masculin au féminin (Irslinger 2014:95).

En cornique et en breton, le suffixe -ni a depuis longtemps perdu sa productivité, contrairement au gallois où le suffixe -ni est toujours vivant. Des noms abstraits gallois en -ni correspondent à des formations bretonnes en ‑oni (gallois noethni ~ breton noazhoni, 'nudité', Irslinger 2014:86).


Irslinger (2014:87) donne pour le breton :

vieux breton glethni < gl. gastrimargia, uentries ingluues, IX°.
moyen breton kozhni, kozhoni 'vieillesse' (XV°) < kozh 'vieux'
breton poazhni 'brûlure, cuisson' (XVIII°) < poazh 'cuit'


deux hypothèses de dérivation

Morris Jones (1913:232), Fleuriot (1964:355) et Zimmer (2000:408ff) ont proposé une grammaticalisation à partir de la seconde partie d'un composé avec le nom reconstruit pour 'action' *gnīmu, m. (apparenté au vieil irlandais gnim, irlandais moderne gniomh, m.). Irslinger (2014:87) pointe que cette hypothèse de grammaticalisation du nom signifiant 'action' ne dérive pas correctement la sémantique de kozhni, 'vieillesse' ou glazni. Elle ajoute qu'en vieux breton, le suffixe est toujours réalisé en -ni, alors que le nom pour 'action' y est attesté pour la forme -gnim (im-guo-gnim, 'entreprise, construction'). On trouve aussi le vieux gallois guor-gnim, 'dur labeur' et le moyen gallois gnif, 'travail, douleur'.

Pedersen (1909–1913, II:18) et Irslinger (2014:87) proposent que les finales en ‑ni et ‑oni résultent d'extensions de ‑n‑ ou ‑on‑ par le suffixe de nom abstrait masculin ‑i. Selon Zimmer (2000:444), ‑oni est un conglomérat du suffixe pluriel ‑(i)on avec le suffixe de nom abstrait masculin ‑i. Ces hypothèses impliquent un changement dans le genre du suffixe.