-elezh
La finale en -elezh, assez rare, obtient des noms abstraits.
(1) | Siwazh, | re gaer | e oa evit padout | betek fin | ar beurbadelezh. | Morlaix, Herri (1982:40) | ||
malheureusement | trop1 beau | R4 était pour durer | jusqu.à fin | le complet1.dur.ée | ||||
'Malheureusement, c'était trop beau pour durer jusqu'à la fin de l'éternité.' |
Le Bayon (1878:14) donne padeleah 'durée', prinseleah 'principauté', priedeleah '(état de) mariage'.
Helias 1986:13) donne santèlèz 'saintenté', sur le nom sant 'saint'.
Trépos (2001:76) donne tadelez 'paternité'.
Morphologie
composition
La finale en -elezh est composée du suffixe adjectival -el (Vallée 1980:XVII, Favereau 1997:§158, Chalm 2008:W-214). Le second composant serait probablement le suffixe -ezh formant des noms à partir d'adjectifs (Favereau 1997:§168).
genre
Le Gonidec (1850:20,21:n°9) ignore la voyelle initiale et considère qu'il existe un suffixe -lez, pour lequel il donne kunvélez 'douceur', madélez 'bonté', padélez 'durée' et priedélez 'mariage' comme des noms féminins. Trépos (1968:§129) considère que -elez qu'il prend pour un suffixe est féminin. Il donne tadelez 'paternité'.
Kergoat (1976:124) utilise, au masculin donc, an teknikelezh 'la technique, les moyens techniques'.
nombre
Favereau (1997:§158) note que les noms formés en -elezh prennent un pluriel en -ioù.
productivité
Favereau (1997:§158) considère que -elezh est peu usité en dehors de la "tradition lexicographique héritée de Vallée".
variation dialectale
Au KLT -elezh correspond le vannetais -eleah.
Le vannetais Le Bayon (1878:14) donne madeleah, 'bonté', san̄teleah, 'sainteté' et ran̄teleah, 'royauté, royaume'. Favereau (1997:§158) donne madelezh, 'bonté'; santelezh, 'sainteté' et rouantelezh, 'royaume'.
Sémantique
Favereau (1997:§158) note que les noms formés en -elezh sont des noms abstraits.
-egezh vs. -elezh
Les noms à finale en -egezh ont une valeur morale (méta) qui n'est pas présente dans les finales en -elezh.
Vallée (1980:XVIII) contraste le suffixe -ek, que l'on retrouve dans les finales des noms en -egezh, qui dénotent "les qualités des personnes, les habitudes, les dispositions morales" avec le suffixe adjectival concurrent -el, qui apparaît dans les finales en -elezh des noms qui dénotent les "propriétés générales ou la nature des personnes et des choses".
(1) | dereadelezh | 'propriété des objets qui se conviennent' | dereadegezh | 'qualité des personnes convenables' | |||
tadelezh | 'paternité, qualité de père' | tadegezh | 'sentiment paternel, conscience de la qualité de père' | ||||
denelezh | 'humanité (qualité d'homme)' | denegezh | 'humanité (condition morale supérieure de l'homme)' | ||||
loenelezh | 'animalité (qualité d'animal)' | loenegezh | 'animalité (condition morale inférieure de l'animal)' | ||||
Vallée (1980:XVIII) |
Le Roux (1915:69) contraste douelez, 'divinité, état, nature divine' avec doue(e)gez, 'théisme', formé sur doueek 'qui a un Dieu', dérivé ensuite en dizouegez, 'athéisme', hollzouegez 'panthéisme', etc. Vallée traduit cependant 'divinité' par douegezh.
(2) | N'eus ket | a zoueegezh | ennout! | ||
ne'y.a pas | de1 dieu.sfx | dans.toi | |||
'Il n'y a pas de divinité en toi!' | Mirabeau, traduit par Vallée (1980:XVIII) |
Diachronie et horizons comparatifs
Le suffixe breton ‑(i)ezh, le moyen cornique ‑(y)eth et gallois ‑(i)aeth, dérivés du suffixe féminin proto-celtique *‑aktā > celtique insulaire *‑axtā, ont chacun développé différentes variantes à partir de suffixes qui appartenaient originellement à leur base, comme le suffixe adjectival ‑ol‑ → breton ‑el‑ezh, moyen cornique ‑ol‑eth, gallois ‑ol‑aeth (Irslinger 2014:85, qui renvoie à Pedersen 1909-1913, II:32 pour d’autres exemples incluant l’irlandais).
Bibliographie
Preder, éd. 1972b. 'KIS - E093-96: Al lostgerioù -el, -ek', Preder Kaier 159-160, Lavar 05, 68-78.