-der, -ter
Le morphème -der, ou -ter, sert à former des noms abstraits à partir d'un adjectif.
(1) | Evid kelou | ar pellder | ez out bet | er gêr... | |||
pour nouvelles | le loin.sfx | R es été | dans.le foyer | ||||
'Pour la durée de temps que tu as été à la maison...' | |||||||
(le peu de temps) | Trégorrois, Gros (1984:360) |
Trépos (2001:76) donne kaleter, 'dureté'; gwander, 'infirmité' et sklerder, 'clarté'.
Goyat (2012:321) donne donder, 'profondeur', douster, 'douceur' et ruder, 'rougeur'.
Morphologie
L'allomorphe en -ter est obtenu par sandhi.
genre
Selon Le Bayon (1878:14), Kervella (1947:§838) ou Helias (1986:13), les noms dérivés en -der, -ter sont toujours masculins.
Kervella (1947:§838) précise cependant que la "langue orale" (sic) fournit des exceptions. En trégorrois en (2), teoder est féminin.
(2) | En deoder | d'ar wezenn-mañ | e oa e ziouharr. | ||||
dans.le1 épais.sfx | de'le arbres.SG-ci | R était son 2.jambe | |||||
'Ses jambes étaient de l'épaisseur de cet arbre-ci.' | Trégorrois, Gros (1984:360) |
Gros (1984:360) accepte ar bellder comme ar pellder, 'le loin (que c'est)'. Favereau (1997:§161) donne l'exception an1 dommder1 vras, 'la grande chaleur'.
Selon Merser (2011:13), les noms en -der qui sont féminins sont du dialecte du Léon.
nombre
Les noms dérivés en -der, -ter font leur pluriel en -où, -ioù (Kervella 1947:§838, Chalm 2008:W-214).
exocentricité
Le suffixe der, -ter est exocentrique: il s'affixe sur un adjectif et obtient un nom.
productivité
Gros (1984:360) considère que ce suffixe n'est plus productif en breton trégorrois.
variation dialectale
Selon Irslinger (2014:95), le suffixe –der,-ter forme des noms abstraits désadjectivaux dans les dialectes KLT du Nord, mais en vannetais, c'est le suffixe -ded, -ted, féminin, qui le remplace.
Sémantique
Selon Trépos (2001:76), le suffixe -der, -ter "marque une qualité".
-der vs. -ded
Le suffixe -der, -ter se distingue du suffixe -ded, -ted qui est réservé aux mots encore plus abstraits (Vallée 1980:XVII, Kervella 1947:§838, Chalm 2008:W-214).
(1) | uhelder un ti | / | uhelded ur spered | ||
haut.eur un maison | haut.eur un esprit | ||||
'la hauteur d'une maison / la hauteur d'un esprit.' | Standard, Kervella (1947:§838) |
(2) | Ar gwanderiou | a zeu eus | ar wanded. | ||
le faible.N.s | R vient de | le1 faible.N | |||
'Les infirmités qui viennent de la faiblesse.' | Le Roux (1915) citant Vallée, cité par Vallée (1980:XVII) |
Parfois, la différence de sens n'est pas flagrante. Sur l'adjectif tomm, 'chaud', on construit tommder et tommded, 'chaleur' (Helias 1986:13). Les noms en -der sont tous masculins. Les noms en -ded sont tous féminins.
Dans kaerderted, il semble que les deux suffixes se suivent.
(3) | pebéh | hardéhted! | ||||
quel | beauté | |||||
'Quelle beauté!' | Vannetais, Guillevic & Le Goff (1986:79) |
-der vs. -oni
Selon Le Roux (1915:68) citant Vallée, -der se prête moins bien au sens moral que -oni.
- kemeret brasoni ouz brasderiou e garg
- 'prendre de l'orgueil (grandeur dans l'esprit) des grandeurs (dans les choses) de sa charge'
- kemeret chouervoni ouz c'houervderiou ar vuez
- 'contracter de l'amertume (dans l'âme) des amertumes (des choses) de la vie.'
Diachronie
Le suffixe der, -ter est dérivé du proto-celtique *‑tero‑, m. (Irslinger 2014:95).
Le suffixe der, -ter fut occasionnellement traité comme féminin aux XVII° et XVIII° (Hemon 1975:27), mais il est toujours masculin en langue moderne.
Horizons comparatifs
Deshayes (2003:40) relève les suffixes -der en cornique et en gallois.
Bibliographie
- George, Ken. 1991. 'The noun suffixes ‑ter/‑der, ‑(y)ans and ‑neth in Cornish', Études Celtiques 29.203–13.