-adur

De Arbres

La finale en -adur est le résultat d'un suffixation en -ad suivie d'une suffixation en -ur. Les noms en -adur dénotent prototypiquement le résultat concret d'une action (sevel, sav- 'construire' > savadur 'bâtiment'), On trouve aussi des noms abstraits.


(1) Mat eo evit benn disadorn, be meus kod antre ar savadur.
bon est pour à samedi expl ai code entrée le bâtiment
'C'est bon pour samedi, j'ai le code d'entrée de l'immeuble.' Scaër/Bannalec, H. Gaudart (03/2017)


Favereau (1997:§144) donne daspunadur (avaloù) 'ramassis (de pommes)', gwalc'hadur 'lavure', houarnadur 'ferrure', rechetadur 'vomis', skubadur 'balayure', taoladur 'rebut'...

Helias (1986:13) donne skrivadur 'graphie' sur skrivañ 'écrire'.


Morphologie

composition

Les noms en -adur sont dérivés par une suffixation en -ad suivie d'une suffixation en -ur, qui est un suffixe exocentrique formant des noms masculins.

  • [[[ racine ]V/N -ad ]N -ur ]N.masc


Une suffixation consécutive en -où pluriel donne une finale en -adurioù (brezhonekadurioù, 'bretonnismes', Press 1986:232).

Une suffixation consécutive en -ezh donne une finale de nom en -adurezh (kizelladur 'sculpture (objet)' > kizelladurezh 'sculpture (art)', Vallée 1980:XIX).


genre

Les noms dérivés en -adur sont de genre masculin. Trépos (1968:§129) illustre avec freuzadur 'destruction', magadur 'nourriture'.

nombre

Les noms dérivés en -adur, comme ceux dérivés uniquement en -ur, prennent la forme -ioù du pluriel.


Syntax

argument externe

L'argument externe du verbe peut être amené par la préposition gant.

C'est évident dans le cas des ellipses du participe de ober, graet:

  • kanaouenn skrivet gant ub., kempennadurioù gant ub., sonaozadurioù gant ub...
'chanson composée par qq., arrangements par qq...'
  • kizelladurioù gant ub.
'gravures de/par qq.'


Ce doit être testé hors des contextes écrits de crédits artistiques.

Sémantique

On trouve logiquement dans la sémantique des noms en -adur les propriétés sémantiques du suffixe -ur, qui dénote le résultat d'actions concrètes. Ils peuvent donc désigner "soit l'action en elle-même, soit l'objet qui en est le terme" (Vallée 1980:XIX). Ils peuvent donc réaliser des noms concrets.


résultat concret d'action

Trépos (2001:75) donne des exemples de résultats d'une action (houarnadur 'tâche faite au linge par un fer à repasser').

Chalm (2008:W-213) donne aussi des exemples de résultats concrets d'une action:

  • berr 'court' > berradur 'résumé'
rann 'partie' > rannadur 'division'
kinklañ 'orner, parer' > kinkladur 'ornement'


Tous les noms concrets en -adur ne sont cependant pas des résultats d'une action. Pour le trégorrois à Perros-Guirrec, Konan (2017) donne forzhadur 'vagin'.


-adur vs. -erezh

Le résultat concret d'une action n'est pas le nom d'une action, aussi concrète soit-elle. Le Roux (1915:68) contraste ainsi les dérivations sur mein, meinadur 'partie empierrée de la route' et meinerez 'l'action d'empierrer considérée en elle-même' (cf. suffixe -erezh, -ereah).

Cependant, Le Gonidec donne le sens d'action comme celui de résultat de l'action. Dans Le Gonidec (1821), il stipule précisément que gwaskerezh a le même sens que gwaskadur.

(2) ar gwaskadur 'étouffement, compression, jus de fruit', Le Gonidec (1847), 'étreinte', Le Gonidec (1807:48)

ar gwaskadur 'action de presser, de fouler, d'opprimer, etc.', équivalent de gwaskerez, Le Gonidec (1821)


-aj vs. -adur

Selon Trepos (1956:51), le suffixe -aj est supplanté en vannetais et dans la région de Guingamp par le suffixe -adur.

(2) meskadur 'mélange', skubadur 'balayure', kignadur 'écorchure' (Vannetais, Guingamp)

mintinach 'besoins du matin' (Pouldreuzic), traouach 'choses banales', truach 'désastres'


nom abstrait

Les noms en -adur dénotent prototypiquement le résultat d'une action, mais on trouve des contre-exemples comme yezh 'langue' > yezhadur 'grammaire'.


(3) Evelato, seul goshoc'h an dud, seul suroc'h o yezhadur diemskiant.
cependant le.plus1 vieux.le.plus le 1gens le.plus1 sur.le.plus leur2 grammaire sans.se.science
'Cependant, plus les gens sont vieux et plus leur grammaire inconsciente est sure.' Madeg (2013:21)


Selon Favereau (1997:§144), les noms en -adur de sens abstrait sont la marque du néo-breton. Il donne an dreutadur 'l'amaigrissement'. Cela ne peut être entièrement vrai, car on trouve des finales en -adur en dehors du néo-breton.


(4) Peucheut tap't chifernadur? Cornouaillais de l'Est
N'ho peus ket tapet ur sifernadur? Equivalent standardisé
ne1'2PL avez pas attrapé un rhume
'Vous n'avez pas attrapé un rhume?' Bouzec & al. (2017:376)


(5) N'eus ket graet a devadur c'hoazh evit an hañv __ .
ne1'est pas fait de1 brûlure encore pour le été
'Il n'a pas encore fait chaud [, cet été].', Trégorrois (Prat, 1987), Konan (2017:66)


En (6), on voit dans une paire minimale les deux sens possibles de -adur sur la racine /gwask-/ de 'presser, opprimer'. A chaque fois, le sens abstrait est porté par une finale de genre féminin.

(6) gwaskadur 'jus (provenant d'une pression de fruit)' Trépos (2001:75), 'marc' Trepos (1956:52)

ar (g)waskadur 'étreinte', néo-breton, Favereau (1997:§144)


Cette évolution est à mettre en rapport avec la finale complexe de noms abstraits en -adurezh.

Diachronie

Selon Fleuriot (1964:357) suivi par Irslinger (2014:98), le suffixe ‑adur dérive du latin ‑atūra, f. et ‑atōrium, n. Il a donc changé de genre puisqu'il est masculin dans la langue moderne.

consulter Fleuriot (1964:357) pour une étymologie plus précise.


Horizons comparatifs

Vallée (1980:XIX) considère que cette finale correspond assez bien sémantiquement aux suffixes français -tion, -ture et parfois -ment (kizelladur 'sculpture', kelennadur 'instruction', kempennadur 'arrangement').


A ne pas confondre

Le nom plijadur 'plaisir' n'est plausiblement pas dérivé en -adur, car il est féminin. Les grammairiens breton traditionnels notent plijadur comme une exception (Le Bayon 1878:13, Trépos 1968:§129, etc.). Il ne s'agit pas dans plijadur du suffixe -adur.


(1) Eur blijadur eo bale d'an nevez-amzer... Léon, Seite & Stéphan (1957:103)
un 1plaisir est marcher à1'le nouveau-temps
'C'est un plaisir que de se promener au printemps.'