Différences entre les versions de « Pronoms relatifs »

De Arbres
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Une tradition d'analyse représentée par [[Le Bayon (1878:24)]], Le Roux (1957[[Le Roux (1957:52)|:52)]], [[Fleuriot (1984b)]], et [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§578), a posé l'hypothèse que [[le rannig]] ''a'' est un pronom relatif.
Une tradition d'analyse représentée par Le Bayon (1878[[Le Bayon (1878:24)|:24]], Le Roux (1957[[Le Roux (1957:52)|:52)]], [[Fleuriot (1984b)]], et [[Favereau (1997)|Favereau (1997]]:§578), a posé l'hypothèse que [[le rannig]] ''a'' est un pronom relatif.


Cette hypothèse est maintenant largement abandonnée. Voir à ce propos [[Denez (1974)]], [[Stephens (1982)|Stephens (1982)]].
Cette hypothèse est maintenant largement abandonnée. Voir à ce propos [[Denez (1974)]], [[Stephens (1982)|Stephens (1982)]].

Version du 5 août 2014 à 10:33

Tous les dialectes du breton ont un pronom relatif inanimé: (ar) pezh (littéralement: 'le morceau', > 'ce que, ce qui').

Les choses se compliquent en ce qui concerne le pronom relatif animé.

Il existe un pronom relatif animé en bas-vannetais (an hini / an hani). Il est composé de l'article défini suivi du pronom anaphorique hini. En breton standard ou dans les autres dialectes, l'existence même du pronom relatif (animé) est une question en soi. Deux candidats existent: le pronom relatif pehini et le rannig a. Or, l'existence du premier dans les variétés parlées reste à prouver, et l'identification du second comme un pronom relatif est aujourd'hui largement abandonnée.


Ar pezh, 'ce que'

Le pronom relatif (ar) pezh, est la grammaticalisation du syntagme nominal qui signifie littéralement '(le) bout, morceau'. Il correspond au français ce que (Chalm 2008:§Q5).


(1) Al lodenn vrasañ deus an dud ne gomprenont ket ken ar pezhi a ganit _i .
le partie grand.plus de le gens ne comprennent pas plus le morceau R chantez
'La plupart des gens ne comprennent plus ce que vous chantez.'
Interview Annie Ebrel 04/2009, Le Poher Hebdo


(2) Matriona ne gomze ket eus ar pezh e oa tremenet _i .
Matriona ne1/sup> parlait pas de le morceau R était passé
'Matriona ne parlait pas de ce qui s'était passé.' Léonard/Standard, Ar Barzhig (1976:44)


ellipse

Le pronom relatif de l'objet, ar pezh, peut être élidé. Selon Favereau (1997:§579), cet emploi est "classique mais aujourd'hui assez rare".


(3) Sell a c'hoarvezo.
regarde R surviendra
'Considère ce qui surviendra.' Luzel, cité par Favereau (1997:§579)

An hini

Il existe un pronom relatif animé en bas-vannetais (an hini / an hani). Il est composé de l'article défini suivi pronom anaphorique hini. Les subordonnées avec le pronom relatif an hini / an hani ne nécessitent pas de pronom résomptif.


sujet

L'élément relativisé peut être le sujet de l'enchâssée. La forme zo (= zi) de la copule révèle la présence d'un sujet devant elle.


(1) [ ǝn dɛ͂n [ ǝnani zi:r vwatyr ] zi ʃom irvɔrh ]
an den an hani 'zo er voatur 'zo é chom er vourc'h
le homme le hini R est dans.le voiture R à rester dans.le bourg
‘L'homme qui est dans la voiture habite dans le bourg.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)


(2) [ ǝn dɛ͂n [ nɛ͂n jɛ agawizɔχ ] iʃɔminoriãt ]
an den an hani 'yae a-gaouizoc'h 'oa é chom en Oriant
le homme le hini R allait a-? était à rester dans Lorient
'L'homme qui allait à ? habitait Lorient.'
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)


(3) [ mǝ anawa mat ar vwes [ nɛ͂n zi ʃom akosti ]
Me 'anava mat ar vaouez an hani 'zo ' chom a-kostez.
moi connait bien le 1femme le hini est à rester à-côté
‘Je connais bien la femme qui habite à côté.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)

relativisation d'un PP

L'élément relativisé peut être un élément oblique comme l'argument de 'parler de X', komz diwar-benn X:


(4) [ ǝn dɛ͂n [ nani go͂zǝt ] zi ʃom itʃǝʃtǝnit ]
an den an hani 'gomzit 'zo é chom e Kistinid
le homme le hini R parlez R est à rester à Kistinid
‘L'homme dont vous parlez habite Kistinid.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)


(5) [ ǝnti [ nɛ͂ go͂zɛχtaɲ ] zǝ ilaɲ ǝr vɔrh
an ti an hani 'gomzec'h din 'zo e lein ar vourc'h
le maison le hini R parlez à.moi R est en haut le bourg
'La maison dont vous me parlez est en haut du bourg.'
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)

relativisation d'un oblique

En breton standard, cette structure serait typiquement réalisée comme une construction du faux sujet, avec un pronom résomptif réalisé comme le déterminant possessif de toenn, 'toit'. Ici, avec le pronom relatif an hani, aucune anaphore n'apparaît dans le corps de la relative. Une analyse alternative possible consiste à postuler une ellipse à partir du groupe prépositionnel an doenn (anezhañ).


(6) [ ǝnti [ nɛ͂n ɥe Ɉǝlǝ ǝn dɥɛn dyzǝ ] zo bras ]
an ti an hani 'vez gwelet an doenn duze 'zo bras.
le maison le hini R est vu le toit là.bas R est grand
‘La maison dont on voit le toit là-bas est grande.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)


(7) [ ǝn ti [ ǝnani ǝ ɥelã ǝn dwɛn ] zɔ bras ]
an ti an hani a welan an doenn zo bras.
le maison le hini R vois le toit R est grand
‘La maison dont je vois le toit est grande.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)


Un déterminant possessif coréférant avec la tête de la relative n'est pas illicite en soi:


(8) [ ǝn dɛ͂n [ ǝnani dwɛ kasǝd i vutik dǝ ras ] dɛs tʃømerǝt ur vutigaral ]
an den an hani 'doa kaset e voutik da raz 'deus kemeret ur voutik arall.
le homme le hini avait envoyé son boutique à ras a pris un boutique autre
‘L'homme qui avait démoli sa boutique en a pris une autre.’
Bas-vannetais, Nicolas (2005:48)

Pehini, pere

Les formes morphologiques pehini et pe re sont très vivantes en breton moderne sous une lecture interrogative, lorsqu'il s'agit d'interroger sur un ensemble (type 'lequel d'entre eux', 'lesquelles de ces pommes'). Elles sont aussi vivantes en interrogatifs de discours rapporté.


  • Ar famillou a glaske gouzoud diouz o bugale pere oa ar re a ouie ar gwella o hatekiz.
'Les familles cherchaient à savoir de leurs enfants qui étaient ceux qui savaient le mieux leur catéchisme.'
Léon, Lagadeg (2006:113)


L'usage de pehini et pere en tant que pronom relatif est plus discuté.

 Favereau (1997:§590)
 "Cette tradition syntaxique, liée au "breton de curé" (...) a été celle de tous les grammairiens prémodernes du XVII° et du XVIII° siècles comme Maunoir, Le Pelletier ou Grégoire (cf. Lambert 1976-77 / 282), puis elle fut systématiquement rejetée par les grammairiens "modernes", sauf rares exceptions (...). On trouve des parallèles en gallois (...) et Fleuriot la considérait comme indigène et non "française", comme on le suppose généralement. 


diachronie

moyen breton

Les pronoms relatifs pehini et pere sont documentés en breton au moins depuis 1519. Widmer (2012:37) en compte un usage quantitativement de plus en plus important dans les textes du Mirouer (1519), et jusqu'au début du breton moderne (Cathech., Cnf., Bell.).


  • poanyou an yffernn pere so aeternal,
'Les peines de l'enfer, qui sont éternelles', breton 1519, M.:2612, cité dans Widmer (2012:35)


Au début du breton moderne (Beach), les relativisations commencent à utiliser massivement le rannig a, et les pronoms pehini et pere lui semblent alors une "extension lexicale" optionnelle (Widmer 2012:37).

présence en breton moderne

De Rostrenen (1738:69-70) considère vivante en breton la forme pehini et son pluriel pere. Il note page 175-6 que ces formes peuvent être absentes lorsque le nom relativisé de troisième personne est au cas direct (nominatif ou accusatif). Il semble plutôt selon ses exemples que les substantifs indéfinis relativisés imposent le complémenteur ha(g).

Les formes relatives de pehini sont aussi citées par Hingant (1868:§70), et restent vivantes en poésie. Favereau (1997:§590, §591) en fournit quelques exemples.


  • Evit ober ganti traoù dous, Dre pehini en deus jouiset anezhi.
(1814) (TSG.:327-329), cité dans Menard (1995:§'amourous')

effet de contact ?

Le pronom relatif pehini ou son pluriel pere sont régulièrement signalés comme un phénomène restreint aux textes écrits qui sont notoirement influencés par le français.

 Stephens (1982:7)
 
 "Certain written sources, in particular some of the texts published in the latter period of Middle Breton and Early Modern Period, may not reflect the reality of the language of the day. Authors were, in most cases, strongly influenced by their knowledge of Latin and French grammmar.
 This is illustrated dramatically in the vocabulary, in the large number of French loan words and in the abundance of relative pronouns which, according to Hemon (1975:289) "never occur and probably never did occur in the spoken language". They are not used in Modern Literary Breton.
 

L'hypothèse d'une utilisation par contact de langues n'explique pas la généralisation notée par Widmer d'une recrudescence des utilisations de pehini et pere jusqu'au breton moderne précoce, et sa chute alors corrélée à l'utilisation du rannig a.

effet stylistique ?

Blanchard (2012), en introduction de Burel (2012), considère que l'emploi de pehini/pere marque stylistiquement un niveau de langue.

 p.24:
 "L'emploi de mots français, comme le pratique Burel, ou de relatives calquées sur le modèle français (avec une conjonction relative: "pehini/pere") constitue à l'époque [début du XX°] dans le domaine littéraire, en dehors du milieu bretoniste et régionaliste, un acte de distinction sociolinguistique hérité de périodes plus anciennes lors desquelles la langue française n'occupait qu'un champ restreint en Basse-Bretagne. 
 Si l'emprunt au français est l'une des caractéristique[s] de ce que l'on nomme le "breton de curé", il l'est également de la pratique littéraire mondaine dont la base aux 17° et 18° siècles repose sur une abondante métaphorisation permettant le passage du concret à l'abstrait et un glissement du religieux vers le profane, dans un jeu sociolinguistique de visite lexicale de la langue française à des fins de distanciation, parfois parodique, ou de connivence entre connaisseurs de ce système de détournement."

'a gement'

Favereau (1997:§584) signale l'usage de a gement comme "relatif d'insistance".


(1) N'eus mann ebet ' gemen ' interes 'neze!
ne'y.a zéro aucun C intéresse P.eux
'Il n'y a rien qui les intéresse!' Favereau (1997:§584)


Cette grammaticalisation contenant kement, 'autant', est à mettre en relation avec les propriétés anaphoriques de kement:

(2) N'eus ket met an dud dall / kement a ra skwer fall!

'Il n'y a que les gens aveugles qui donnent le (un tel) mauvais exemple'.
Favereau (1997:§584)

Le rannig

Une tradition d'analyse représentée par Le Bayon (1878:24, Le Roux (1957:52), Fleuriot (1984b), et Favereau (1997:§578), a posé l'hypothèse que le rannig a est un pronom relatif.

Cette hypothèse est maintenant largement abandonnée. Voir à ce propos Denez (1974), Stephens (1982).

 Stephens (1982:13):
 
 "In Breton [...], the particles can no longer be regarded as either a relative pronoun, in the case of a, nor a complementizer, in the case of e. 
 Denez (1973-4) argued convincingly that the verbal particles in Breton are not used to indicate complementation of any kind."

Bibliographie

  • Denez, P. 1973/4. 'A structural approach to Breton grammar. The so-called relative pronoun of Breton'. Studia Celtica 8/9, Cardiff: University of Wales Press. 251-267.
  • Fleuriot, L. 1984b. 'Notes sur certaines particules relatives en brittonique', Etudes celtiques t.21:230-233.
  • Widmer, Paul. 2012. 'A so and so in Middle and Early Modern Breton: a quantitative approach', Hor Yezh 270, 31-39.