Plac'h

De Arbres

Le nom plac'h 'fille' est féminin malgré son absence de mutation après un article.


(1) Fichet e oa ar plac'h nevez?
apprêt.é R était le fille nouveau ?
'La mariée était bien habillée ?'
Léonard, Fave (1998:135)


Morphologie

variation et répartition dialectale

 carte 447:
 "Le mot plah (dont l'initiale reste intacte après l'article) a des sens différents selon les régions. Du sens de 'servante' dans le Léon (v. carte 449) au sens de 'fille en général', en trégier et cornouaillais, il passe en vannetais au sens de 'jeune fille, jolie fille, fille bien parée. Il remplace même un adjectif du sens de 'joli', 'beau'..."

La carte 449 montre en fait que pour traduire servante, des servantes, le nom plac'h, est donné dans toute la partie Ouest, Léon et ouest cornouaillais. Ailleurs, on trouve des formes de matez.

La carte 447 donne la traduction de fille, des filles (de sexe féminin), le nom plac'h, est très majoritaire. On lui trouve une concurrence en merc'h en Léon et en vannetais.

La carte 446 montre que pour traduire fille (dans le sens familial), le nom merc'h, est très majoritaire. Au début du XXe, on lui trouvait un concurrent ancien dans le nom plac'h.


mutations

sur le nom plac'h

Le nom féminin singulier plac'h ne mute pas après l'article, mais mute normalement après le préfixe gwall-, la préposition a1, les possessifs ou numéraux cardinaux (Kervella 1947:§153). En (2), la mutation sur l'adjectif kaer confirme le genre féminin de plac'h.


(2) Tregont vloaz a-raok e oa anezhi ur gaer a blac'h faro.
trente1 an avant R4 était P.elle un 1beau de1 fille fière
'Trente ans plus tôt, elle était un fier beau brin de fille.'
Abeozen (1986:39), cité dans Timm (1995:8)


sur l'adjectif

Selon Ernault (1897a:§8), plac'h fait barrière à la mutation d'un adjectif après lui.


(3) N'eo ket possupl, plac'h-kaezh-me !
ne1 est pas possible fille-cher-moi
'Ce n'est pas possible, ma pauvre !'
Léonard, Abeozen (1969:125)


Merser (1997:146) signale en Trégor les deux formes alternatives eur plac'h vihan et eur plac'h bihan. Effectivement, Gros alterne en mutant ou non l'adjectif.


(4) Ha c'hwi, ma flah bihan, ma 'ho pije gwelet an traou-ze...
et vous mon2 fille petit si 2PL 2.aurait v.u le choses.
'Et vous, ma petite fille, si vous aviez vu ces choses-là… '
Trégorrois, Gros (1984:23)


(5) Honnez na oa ket eur plah vrao, na tost ivez !
celle-là ne.R était pas un fille1 belle ni près aussi
'Ce n'était pas une jolie fille, ni près de l'être (elle était laide).'
Trégorrois, Gros (1984:161)


À Plougerneau, c'est aussi le cas pour plac'hig.


(6) Pese bugale o deus gwelet ar vaouez ha saludet ar plac'hig bian ?
quel.sorte enfant.s 3PL 3.a v.u le 1femme et salu.é le fill.ette petit
'Quels enfants ont vu la femme et salué la petite fille ?'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


(7) Ar plac'hig vian a neus lavaret ar vugale o deus gwelet ar vaouez.
le fill.ette 1petit R1 3.a d.it le 1enfant.s 3PL 3.a v.u le 1femme
'La fillette a dit que les enfants ont vu la femme.'
Léonard (Plougerneau), M-L.B (10/2018)


À travers les dialectes, on trouve des formes de l'adjectif mutées ou non après plac'h.


(8) Goudeze, setu mestrez an ti, eur plac'h koz, da lavarout…
après.ça voici maitr.esse le maison un fille vieux de1 dire
'Après ça, la maitresse de maison, une vieille femme, dit… '
Cornouaillais (Pleyben), Ar Floc'h (1950:157)


(9) Ar plac'h paour mañ neus tra.
le fille pauvre.ci 3.a chose
'… Cette pauvre fille n'a rien.'
Douarneniste, Hor Yezh (1983:120)


  • eur pez plah vraz
'une sapré grande fille'
Skragn (2002:23)

nombre

Le nom plac'h est singulier et, dans la plupart des dialectes, n'a pas de pluriel utilisable. Pour le sens 'fille' c'est le pluriel du nom merc'h, merc'hed, qui y supplée. Pour le sens 'servante', c'est le pluriel de matezh, mitizien, qui y supplée.

Pour le sens 'femmes', en marge de la carte 569 du NALBB (Le Dû 2001), on relève un pluriel ['pla:hat] à Plougrescant. C'est aussi le suffixe -ed que l'on trouve en Cornouaille de l'Est.


(1) zo plac'hed fin yè.
eux R1 est femme.s fin eux
'Elles, ce sont des finaudes.'
Cornouaillais (Scaër/Bannalec), H. Gaudart (09/2022)


dérivation

Deshayes (2003:'plac'h') donne avec le préfixe krenn-1 krennblac'h 'jeune fille'.


sandhi

Puisque plac'h finit par une consonne non-voisée, ce nom est susceptible de provoquer un sandhi (cf. trégorrois ma flac'h pihan 'ma petite fille', Konan 2017:265).


Sémantique

variation dialectale

Le nom plac'h peut signifier, dans des dialectes différents, 'fille', 'petite fille', 'servante' ou 'femme'.

Le nom plac'h dénote principalement une 'jeune personne de sexe féminin'. C'est le nom le plus relevé comme traduction de 'fille (de sexe féminin)' dans la carte 447 de l'ALBB.

Le nom plac'h est relevé deux fois, en zone littorale cornouaillaise et trégorroise, dans le sens de '(votre) fille' dans la carte 446 de l'ALBB. Dans ce sens familial, il est supplanté statistiquement par merc'h, qui est aussi soutenu par le breton standard.

Le nom plac'h dénote '(une) femme' en trégorrois et en breton central (carte 569 dans Le Dû 2001), où il concurrence maouez.

Le nom plac'h dénote aussi aussi une 'servante'. Cette dernière lecture est cependant cantonnée à l'Ouest du KLT dans la carte 449 de l'ALBB. Dans la pièce de théâtre léonarde Janedig ar Rouz d'Abeozen (1942:363), deux personnages sont notés Naig, Katell, plac'hed ostaleri.


Stylistique

Il est possible pour une locutrice de forcer une lecture déictique de ar plac'h.


(1) Ha fatiket ar plah !
et évanou.i le fille
'Et me voilà évanouie !'
Trégorrois, Gros (1984:161)


Diachronie

Deshayes (2003:'plac'h') donne une étymologie latine, pallaca 'concubine' par le latin populaire *placca. Se reporter à Kervella (2016:42) pour un résumé des hypothèses opposées.


Bibliographie

  • Kervella, Divi. 2016. 'Notennoù yezh. 173. Diwar-benn etimologiezh ar ger brezhonek plac'h', 41-44.