Ordres à focus préverbal

De Arbres

Domaine tensé

Dans une proposition tensée, un élément focalisé peut être antéposé et remplir la zone préverbale.

Cet élément peut être un DP sujet ou objet, ou encore un PP ou un VP comme en (1).


(1) [VPC'hoarzhin ] a rank an nen ober _ evit disoñjal poanioù ar bed-mañ [...]
rire R doit 3SG faire (rire) pour oublier peines Det. monde-là
'On doit RIRE pour oublier les peines de ce monde...' Al Liamm (346:127)


On peut repérer le site d'extraction du XP antéposé dans le reste de la phrase, comme en (1) la position objet de ober, 'faire'. On distingue ces constructions de mouvement de focalisation de celles dites 'du faux sujet', où le site d'extraction est rempli par un pronom résomptif.

On distingue aussi ces constructions des mouvements de têtes, car l'extraction peut être opérée sur une longue distance.


Focalisation en infinitives

Après 'nemet', la focalisation par mouvement sans résomption est possible en proposition infinitives.

(8) N' eus nemet [VP mont gant red an istor] d' ober _
NEG COP seulement aller P cours Det histoire P faire
'Suivre le cours de l'histoire est la seule chose à faire.' Al Liamm (347:123)


Horizon comparatif

Les langues diffèrent dans leurs stratégies de focalisation. Le breton fait partie des langues qui ont un recours massif au mouvement préverbal pour signaler le focus ou le topique de la phrase.

D'autres langues ont un recours plus général au marquage prosodique. En français, les stratégies de focalisation sont par exemple radicalement différentes de celles du breton. En ce qui concerne le sujet focal, c'est même exactement l'inverse: la grammaire du français impose que le sujet, lorsqu'il est focalisé, évite surtout la zone préverbale (Lambrecht 1986, 1994:22). En (9)a., la phrase est malformée car le marquage focal prosodique est en zone préverbale. Pour éviter cette configuration, le locuteur multiplie les domaines propositionnels et place les marques focales prosodiques dans le domaine postverbal de chacun (notez qu'alors, le verbe 'avoir' ne signifie pas 'posséder', et que la relative n'est ni appositive, ni restrictive, révélant une structure de dernier recours).


(9) a. #?? MA VOITURE est en PANNE .
b. J'ai MA VOITURE qui est en PANNE français oral Lambrecht (1994:22)
'Ma c'harr-tan zo sac'het.'

références

  • Lambrecht, Knud. 1986. Topic, focus, and the grammar of spoken French, PhD. dissertation: University of California, Berkeley.
  • Lambrecht, Knud. 1994. Information structure and sentence form; Topic, focus and the mental representations of discourse referents, Cambridge Studies in linguistics 71. [réédition 1998]