Différences entre les versions de « Les inanimés »

De Arbres
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== Le proclitiques ''hen, hel, her'' et le trait inanimé ==
== ''hen, hel, her'', pronom neutre ==
 
=== ''hen'', ''hel'', ''her'' référant à un inanimé ===


Tous les dialectes ont, au moins dans des expressions archaïques ou gelées, la possibilité d'utiliser un proclitique objet ''(h)en, (h)el, (h)er'' pour référer à une entité inanimée.  
Tous les dialectes ont, au moins dans des expressions archaïques ou gelées, la possibilité d'utiliser un proclitique objet ''(h)en, (h)el, (h)er'' pour référer à une entité inanimée.  
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|||colspan="4" | 'Il est dur à comprendre parce qu'il ne fait que zézayer.' ||''Le Scorff'', [[Ar Borgn (2011)|Ar Borgn (2011]]:151)
|||colspan="4" | 'Il est dur à comprendre parce qu'il ne fait que zézayer.' ||''Le Scorff'', [[Ar Borgn (2011)|Ar Borgn (2011]]:151)
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== le proclitiques ''e'' et le trait inanimé ==
== le proclitiques ''e'' et le trait inanimé ==

Version du 15 janvier 2015 à 17:13

Le trait inanimé est le troisième trait du système de genre, aux côtés du masculin et du féminin.


Le trait inanimé est marqué en breton dans différents paradigmes:

le pronom relatif ar pezh, 'ce que, ce qui'
le pronom interrogatif petra, 'quoi, qu'est-ce que'
le pronom fort indépendant se, ze, abréviation de an dra-se, 'cette chose là'
le morphème clitique anaphorique -henn: evel-henn, 'comme cela', betek-henn, 'jusque là'

Il existe une variation quant à l'obligation du trait inanimé sur :

le pronom objet proclitique; hen, hel, her
le pronom objet proclitique; e

Le trait inanimé est entièrement absent des paradigmes suivants:

les pronoms incorporés (ces pronoms sont présents dans l'accord verbal, et come objet des prépositions, dont la préposition support comme a: ac'hanon, anezhi...)
les déterminants possessifs


Les pronoms neutres, dont le pronom météorologique, qui prennent des traits grammaticaux féminins (-i), ne sont pas des inanimés. Ils ne réfèrent pas à des entités inanimées (ce sont des explétifs et ils ne réfèrent pas).


Distribution de hen vs. e

Les pronoms proclitiques objets hen et e ne sont pas morphologiquement équivalents: le pronom hen est désambiguïsant par rapport à e.


- Le proclitique objet e, devant un verbe fléchi, peut éventuellement être confondu avec le rannig, d'autant plus que l'ellipse de l'objet est répandue en breton. Ce n'est aucunement le cas pour le proclitique hen. Le Gléau (1973:21) émet l'hypothèse que la forme hen supplante le proclitique objet e dans les contextes où l'objet est proclitique sur un verbe tensé, précisément pour éviter une confusion possible avec un rannig e.
- Le pronom proclitique objet hen n'a pas d'équivalent dans le paradigme des déterminants possessifs, qui ne contient que des pronoms référant indistinctement aux animés et non-animés. Le pronom proclitique objet hen est un trait distinctif des pronoms proclitiques objets par rapport à un paradigme qui lui ressemble, celui des déterminants possessifs. Le pronom proclitique objet e, lui, est morphologiquement indistinguable du déterminant possessif 3SG e. Il provoque uniformément une lénition sur le nom ou le verbe qui le suit.


Il est important de documenter les usages en prenant en compte les possibles différences entre proclitiques sur verbes tensés et non-tensés (infinitifs et participes). Hen est historiquement une forme réservée aux verbes tensés, qui s'est ensuite généralisée, de dialectes en dialectes, aux autres verbes.


hen, hel, her, pronom neutre

hen, hel, her référant à un inanimé

Tous les dialectes ont, au moins dans des expressions archaïques ou gelées, la possibilité d'utiliser un proclitique objet (h)en, (h)el, (h)er pour référer à une entité inanimée.


(1) Bez' ez eas Frañsez Kervella d'hen gwelout e 1938 (...)
BEZ R alla pour le.IN voir en 1938
'Frañsez Kervella alla le voir en 1938 (en contexte, un bâtiment).'
Standard, Denez (1993:20)


(2) Red eo beza greet anezhi evit her gouzoud.
obligé est être fait P.elle pour le.IN savoir
'Il faut l'avoir fait pour le savoir.' Léonard (Cléder), Seite (1998:41)


(3) D'ezhan em euz hel lavaret. / D'ezhi hel livirinn.
à.lui R.1SG a le dit à.elle le dirai
'Je le lui ai dit.' / 'Je le lui dirai.' Léon, Constantius (1900:69)


(4) M' henn anzava.
moi'le.IN avoue
'J'en conviens, je l'avoue.' Le Scorff, Ar Borgn (2011:27)


(5) ' Gaoja ket hon parland, ' ra ket met en chakat.
(ne) parle pas notre parlé (ne) fait pas mais le.IN mâcher
'Il ne parle pas notre langue, il ne fait que la mâcher, la torturer.'
Le Scorff, Ar Borgn (2011:75)


(6) Mar laret d'ein più e glasket, M'hellou rein d'oh tu er havet.
si dites à.moi qui R1 cherchez moi pourrai donner à.vous moyen le trouver
'Si vous me dites qui vous cherchez, Je pourrai vous aider à le découvrir.'
Vannetais, chanson Le marquis de Pontcallec (Le Mercier d'Erm 1926:68)


(7) m' ha punissou, té, pé n'ellein quet er gobér.
moi te punirai toi ou ne pourrai pas le faire
'Je te punirai, toi, ou je ne le pourrai pas.' Vannetais, Guillome (1836:32)


Le pronom proclitique inanimé n'est productif que dans la mesure où les dialectes ont gardé trace d'un paradigme d'objets proclitiques. Dans les variétés où les formes objet en préposition support anezhi sont utilisées, le proclitique inanimé reste présent dans les expressions figées.


(8) /min 'da:re / /min ˌtu:e 'ry / / min'ɛrɡɛz /
M’(h)en dare M’(h)en tou ruz M’(h)en argas.
moi le V moi le jure rouge moi le rejeter
'Je ne sais pas.', 'Je le jure tout rouge.', 'Je le rejette.', Plozévet, Goyat (2012:249)


Selon Gros (1984:207) la forme hen, comme les formes proclitiques en général, tend à disparaître ("Hen ne s'entend plus guère en trégorrois parlé que dans les proverbes, ayant été supplanté par anezañ"). Gros a cependant des usages productifs de hen, au moins sur des verbes infinitifs.


(9) Pep hini e-neus e benn... pa rank hen dougen.
chaque un a.3SG son tête quand doit le porter
'Chacun a sa tête (son avis, sa volonté)... puisqu'il doit la porter.'
('Chacun a son avis puisque chacun a une tête'.) Trégorrois, Gros (1984:207)


Le pronom hen, à travers les dialectes, peut toujours référer à un inanimé. Cela n'implique cependant pas que hen soit à proprement parler un pronom porteur du trait inanimé.


hen, hel, her référant à un animé

A travers les dialectes, le pronom hen peut-il aussi référer à des entités animées?


standard

Selon Le Gléau (1973:21) le proclitique hen, lorsque "strictement employé", renvoie à un inanimé par contraste avec e, humain. Cette formulation implique donc qu'il existe effectivement des emplois moins stricts. Le Gléau (1973:21) note des usages indifférenciés de e et hen dans Buhez ar Zent (1869).


Léon

On trouve en Léon des usages de hen pour un inanimé, mais aussi pour un animé, sur un infinitif comme sur un verbe fléchi.


(3) Prest oa da lezel al laeron d’hen lakat en noaz.
prêt était à laisser le voleur de'le mettre en nu
'Il était prêt à laisser le voleur le dépouiller.' Léonard (Plouharzel), Perrot (1912:726)


(4) ... hen lezjont da vont gant e hent.
le laisser à1 aller avec son route
'... Ils le laissèrent s'en aller.' Léonard (Plouharzel), Perrot (1912:726)


Dès Constantius (1900), on trouve la forme hel pour référer à un animé.


(6) N' hel lez ket da goueza en dienez.
ne' le laisse pas à1 tomber dans indigence
'Ne le laisse pas tomber dans l'indigence.' Léon, Constantius (1900:375)


trégorrois

Pour le trégorrois Leclerc (1986:§139, II), les formes hen et e s'utilisent toutes deux sur un verbe fléchi pour les animés.

Il est possible que pour Gros (1984:207), hen soit marqué pour un trait non-humain, car il peut éventuellement référer à un animal.


(3) Pep hini a anavez doare e loen pa rank hen bevañ.
chaque un R connait façon son bête quand doit le vivre.transitif
'Chacun connait le comportement de sa bête puisqu'il doit la nourrir.'
('Chacun connait midi à sa porte') Trégorrois, Gros (1984:207)


vannetais

Le dialecte vannetais a un usage productif des formes proclitiques (h)er, (h)en, (h)el qui peuvent aussi référer à des animés, même devant les verbes infinitifs.


(3) hag int o-daou d'en herzel ag ar Baradoez
et eux leur-deux de le chasser de le paradis
'... et ils le chassent (Mathurin) hors du paradis.'
Vannetais, Ar Meliner (2009:175)


(4) Stert eo er c'hompren kar ne ra ket 'met zeal.
difficile est le comprendre car ne fait pas seulement zézayer
'Il est dur à comprendre parce qu'il ne fait que zézayer.' Le Scorff, Ar Borgn (2011:151)

le proclitiques e et le trait inanimé

Le proclitique e est le pronom 3SG masculin, mais c'est aussi un pronom utilisé de façon plus large, dans une utilisation du masculin comme genre par défaut.

A travers les dialectes, le pronom e peut-il aussi référer à des entités inanimées?


standard

Toute référence à une entité inanimée n'utilise pas forcément hen en standard. Ar Barzhig, originaire de Kaouenneg (au sud de Lannion), parle vraisemblablement trégorrois mais écrit en langue standard. Il utilise hen, hel, her, mais laisse parfois échapper un pronom e en référence inanimée.


(1) ... pa zegouezhe din kouezhañ war ur vlevenn, un tamm taouarc'h pe un troad amprevan,
quand arrivait à.moi tomber sur un cheveu un morceau tourbe ou un pied insecte
hen lakaen a-gostez hep imor.
le.IN mettais de1-côté sans humeur
'Quand il m'arrivait de tomber sur un cheveu, un morceau de tourbe ou un insecte,
je le mettais de côté sans mauvaise humeur.'
Trégorrois (Kaouenneg), ar Barzhig (1976:22)


(2) d'ar mare-se eo an hini ez ae ar maouezed d'e laerezh. (an taouarc'h)
à le moment-ci est le N (est) R allait le femmes à le.IN voler (lele tourbe)
'C'est à ce moment là que les femmes allaient la voler (la tourbe).', Ar Barzhig (1976:27)


Pour le paradigme des objets de l'impératif, Kervella (1995:§429) traite comme équivalentes les formes Selouit se, Her selaouit et Selaouit-, 'Écoutez ça/le'.


Léon

(3) Na vir ket na rai vad neb a hell he ober.
ne1 empêche pas ne fera 1bien qui R1 peut le faire
'N'empêche point de faire le bien celui qui le peut.' Léon, Constantius (1900:388)


trégorrois

Pour le trégorrois Leclerc (1986:§139, II), l'emploi de hen "est de rigueur" pour l'inanimé, ce qui exclut e. Il donne un exemple avec un verbe fléchi.


(4) Me hen/*e goar.
moi le sais
'Je le sais.' Tréguier, Leclerc (1986:§139, II)


Bibliographie

  • Pennaod, G. 1969. 'Diwar-benn ar raganvioù-gour 3e un. gourel ha nepreizh ha raganvioù-diskouezhañ zo.', Preder Kaier 123-124.