Différences entre les versions de « Les articles »

De Arbres
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|(4)|| Mè zèll ||dë gê _ poñnt.
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|| || [[pfi|1SG]] regarde ||[[da|P]] P '''ø''' pont
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| ||'Je regarde le pont.' ||||||colspan="4" |''Goelo'', [[Koadig (2010)|Koadig (2010]]:48)
| ||'Je regarde le pont.' ||||||''Goelo'', [[Koadig (2010)|Koadig (2010]]:48)
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Version du 22 mars 2011 à 10:12

Morphologie

La morphologie de l'article peut être de deux types: /a/ vs. /ə/.

Traditionnellement, cette alternance duale est considérée comme un marqueur de la définitude du nom qui les suit:


an ti, un ti
'la maison', 'une maison'


La distribution de la consonne associée (-n, -l, -r) dépend de règles phonologiques: cette consonne est /n/ devant /n, d, t, h/ ou une voyelle; /l/ avant /l/; et /r/ partout ailleurs.

Les articles ne portent jamais eux-même morphologiquement de marque de genre, ni de nombre. Par contre, leurs spécifications abstraites de genre et de nombre sont décelables dans le type de mutation consonantique qu'ils peuvent provoquer sur le nom qui les suit.


Accentuation

L'article indéfini est souvent traité comme la première syllabe du DP pour le système accentuel (Hemon 1995:§281).


 Gros (1984:178):
 
 En Trégor, eun, eur, eul ne forme qu'un seul mot avec le nom qui le suit et, 
 lorsque ce dernier n'a qu'une syllabe, l'accent tonique tombe sur l'article indéfini.
 
 eun ti, accentué: eun ti; 'une maison'
 eur harr, accentué: eur harr; 'une charrette'
 
 Cet accent tonique est encore plus fort lorsque l'article indéfini est employé 
 emphatiquement, avec un sens exclamatif, comme il l'est fréquemment en trégorrois parlé.
 
 Hennezh zo eur gwaz, me lavar dit!; 'C'en est un homme fort, celui-là, je t'assure!'
 [...]
 
 Avec les substantifs de plusieurs syllabes, c'est le substantif qui porte l'accent tonique.


On observe une variation dialectale dans cette accentuation. Tout d'abord, dans les dialectes comme le vannetais où l'accentuation n'est pas sur l'antépénultième mais en fin de groupe, on ne peut pas voir si l'article indéfini est ou non considéré comme faisant partie du groupe pour l'accent.

Dans la carte 202 de l'ALBB, on voit que l'accentuation de l'article devant le monosyllabique had/gad, 'lièvre' est très répandue hors de l'aire vannetaise, mais cependant pas systématique.

L'article défini n'est généralement pas accentué (Hemon 1995:§282).


Variation dialectale

Koadig (2010:25) note que pour certains locuteurs du Goelo, il n'existe qu'un seul paradigme d'articles, dont la consonne fluctue.


 "Tud 'zo ne lakaont kemm ebet etre ar gerioù-mell strizh hag ar re amstrizh 
 hag ober a reont koulz gant ër pe eur, ën pe eun, ë pe eu.
 
 Darn all a laka kemm evel m'eo merket e-barzh en Atlas Yezhoniel 
 met hep na vehe reizhiadek."
 

Dans certains de ses exemples, l'article semble même absent.


(4) Mè zèll dë gê _ poñnt.
1SG regarde P P ø pont
'Je regarde le pont.' Goelo, Koadig (2010:48)

Distribution

noms propres

Les noms propres de fonction sont précédés de l'article, sauf lorsqu'ils sont au vocatif ("en apostrophe", Hingant 1868:132).

'monsieur le recteur', ann aotrou person
'monseigneur l'évèque', ann otro 'n eskop
'madame', ann itron
Hingant (1868:132)


modification

Hingant (1868:132) note que les relatives restrictives complément du nom ne provoquent pas la disparition de l'article. La présence d'un adjectif modificateur n'a pas non plus d'impact.

ann tog plouz hoc'h euz gret d'in (*ø tog plouz hoc'h euz gret d'in)
'le chapeau de paille que vous m'avez fait'


Redoublement d'article

L'article défini est parfois doublé devant un adjectif superlatif. Il est possible qu'il s'agisse, dans les cas de doublement de l'article, d'une substantivisation de l'adjectif superlatif qui est ensuite placé en apposition du nom (cf. la maison, la plus grande du bourg).

Le trégorrois Leclerc (1986:130) signale et désapprouve cette forme de redoublement ("on dit moins bien en répétant").


(4) an ti (ar) brasañ er vourc'h
DET maison DET grande.le.plus dans.DET bourg
'la maison la plus vieille du bourg' bas-vannetais, Nicolas (2005:22).


(5) an hini1 (ar) goshañ
DET N DET vieux.le.plus
'la plus vieille' bas-vannetais, Nicolas (2005:22).


Ces redoublements existent en français (la maison la plus vieille), et sont comme en breton restreints aux superlatifs.

En contraste, des doublements du déterminant devant tout adjectif sont aussi documentés en hébreu, en arabe (Ouhalla 2009) ou en grec moderne.

Absence d'article

Certains noms apparaissent sans aucun déterminant dans des environnements syntaxiques particuliers.


indéfinis pluriels

Les indéfinis pluriels ne prennent pas d'article.


(2) Staga boutonou
attacher boutons
'litt. attacher des boutons.'
> 'faire trainer le travail (comme le tailleur est supposé faire)'
Le Berre & Le Dû (1999:41)


complément direct du nom

L'article n'apparait jamais lorsque le nom a un dépendant possesseur direct (état construit).

ø penn ma biz (*ar penn ma biz)
'l'extrémité de mon doigt'
ø moger al liorz (*ar voger al liorz)
'le mur du jardin'
ø tog Iann (*ann tog Iann)
'le chapeau de Iann'
Hingant (1868:132)


Les DPs démonstratifs sont analytiques en breton et débutent par un article défini, sauf lorsque suivis d'un complément direct du nom (Jouitteau 2010).

an dour-se
'cette eau'
ø dour-mañ lous ar gêr
DET eau-ci sale la ville
'l'eau sale de la ville'


(2) Roi fest ar vaz
donner fête DET bâton
'litt. donner la fête du bâton.' > 'frapper', Le Berre & Le Dû (1999:35)


noms nus

Les noms singuliers comptables sans déterminant sont des noms nus.


incorporation dans les expressions

Dans les expressions verbales, où le nom n'est pas comptable, ce sont plausiblement des noms incorporés à la tête verbale. Cette incorporation est uniquement sémantique, et non syntaxique, car le nom sans déterminant peut être antéposé à son verbe fléchi (4).


(1) Rei bronn d'ar bal
donner sein P DET pelle
'litt. donner le sein à la pelle.' > 'se la couler douce, faire une pause', Le Berre & Le Dû (1999:39)


(2) C'hoari troadig kamm. , c'hoari mouchig dall
jouer pied.DIM boiteux jouer bandeau.DIM aveugle
litt. 'jouer petit pied boiteux', 'jouer petit bandeau aveugle'
Le Berre & Le Dû (1999:105, 106)


(3) Bod e roas _ din ar porzhier.
abri R donna _ P.1SG DET portier
'Le portier m'offrit l'hospitalité.' Priel (1957:210), cité par Le Gléau (1973:17)


X pe Y

Ci-dessous, l'article n'apparait pas devant les noms pik et bran. La lecture semble être celle d'un indéfini singulier.


(3) Pik pe vran ne hwito ked da gonta.
pie ou1 corbeau NEG manquera NEG P1 conter
litt. 'Pie ou corbeau ne manquera pas de raconter.' > 'Quelqu'un vendra bien la mèche.'
Le Berre & Le Dû (1999:56)

Sémantique

Les articles sont des quantifieurs existentiels.

Terminologie

L'article défini est désigné par le terme breton ger mell strizh (SADED 2010), ou ger-mell strizh (Chalm 2008).

L'article indéfini est désigné par le terme breton ger mell amstrizh (SADED 2010), , ou ger-mell amstrizh (Chalm 2008)


Bibliographie

  • Abbott, Barbara, 2004. 'Definiteness and Indefiniteness', Laurence R. Horn & Gregory Ward (éds.), The handbook of pragmatics, Blackwell Publishing, 122-149.
  • German, G. 1986-7. 'Une description du déterminant défini an à St-Yvi en Cornouaille', La Bretagne Linguistique 3 : 157-168.
  • Hannahs, S.J. and Tallerman, M. 2006. 'At the interface: selection of the Welsh definite article'. Linguistics, 44(4), 781-816.
  • Jouitteau, M. 2010. 'A Breton dependent indefinite created by reduplication', presentation at the 6th Celtic Linguistics Conference, Dublin, 2010 sept. 11
  • Ouhalla, J. 2009. 'Variation and Change in Possessive noun Phrases: The Evolution of the Analytic Type and Loss of the Synthetic Type', In Brill’s Annual of Afroasiatic Languages and Linguistics 1, 311–337. texte
  • Williams, J.E.C. 2002. 'The article/demonstrative in Old Welsh and Modern Welsh', Hor Yezh 229: 33-40.