Différences entre les versions de « Le passé simple »

De Arbres
m (a déplacé Le passé simple vers Passé simple)
m (a déplacé Passé simple vers Le passé simple en écrasant sa redirection)
(Aucune différence)

Version du 10 mai 2011 à 08:57

(1) Kement a vall a oa warnañ da vont kuit ma lezas e holl zanvez war e lec'h.
autant P hâte R était sur.3SGM P1 aller ptc C laissa POSS.3SGM tout affaire sur POSS.3SGM suite
'Il était tellement pressé de partir qu'il a laissé toutes ses affaires.'
Kerne (Pleyben), ar Gow (1999:31)


Sémantique et emploi

Bottineau (2010:116):

 "Le passé simple, s’utilise dans les textes littéraires écrits 
 dans des contextes narratifs pour des évènements singuliers,
 visualisés perfectivement, enchaînés séquentiellement, 
 et disjoints de la diégèse interlocutive [...]"


Pour rappeler un savoir réputé partagé, le français peut utiliser un passé composé, un imparfait ou un présent de narration comme en (1). Ces choix sont inattestés en breton (Bottineau 2010:117).


(1) E 1986 e (tarzhas / *tarzhe) un dazloc’her e kreizenn nukleel Tchernobyl en Ukrania.
P 1986 R explosa / explosait un réacteur P centre nucléaire Tchernobyl P Ukraine
'En 1986 explosait un réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine..'
Bottineau (2010:117)


Le passé simple en breton supporte qu'une action perfective soit répétée sur un temps long.


(1) Lojañ-dilojañ a reas ar familh, ken na reas.
loger-di.loger R fit.3SG DET famille autant NEG fit.3SG
'La famille déménagea tant et tant (sans fin).' standard, Denez (1993:33)

Passé simple vs. passé composé

Le passé simple breton est attaché au style écrit, et le passé composé au style oral. Bottineau (2010) analyse cette différence en terme de prise en compte/effacement des marques de subjectivité du locuteur.


Bottineau (2010:118):

 En breton comme en français, le passé simple repère un évènement saillant 
 relativement à son environnement passé pris pour fond, alors que le passé composé
 repère un évènement saillant relativement à l’expérience présente du dialogue : 
 le premier fait abstraction de l’expérience du dire (ce qui s’accomode bien de l’écrit 
 et de l’absence du récepteur ciblé) alors que le second la met en valeur, d’où son 
 affinité avec l’oral dialogal et l’intersubjectivité immédiate.


Une hypothèse alternative à considérer est que la langue bretonne évolue, comme le français parlé, vers une perte massive du passé simple. Cette hypothèse prédit logiquement que le passé simple n'apparait quasiment plus que dans les contextes de l'écrit, et que, dans les contextes oraux, il est supplanté par un autre temps (le passé composé).

La différence des nuances de subjectivité notées par Bottineau (2010) entre le passé simple et le passé composé découlerait alors de cette évolution: le domaine de la parole objectivée, puisqu'associée à l'écrit, le serait donc au passé simple, et le domaine d'expression assumant une "présence" plus forte du locuteur serait associée au domaine de l'oral, et par association au passé composé.

Variations dialectales

Le Coadic (2010:31,33,38,40) signale de façon répétée que le paradigme du passé simple n'est pas présent en Goelo.


Terminologie

En breton, le passé simple est appelé amzer-dremenet strizh.


Bibliographie

Bottineau, D. 2010. 'Les temps du verbe breton : temps, aspect, modalité, interlocution, cognition, Des faits empiriques aux orientations théoriques', Catherine Douay (dir.), Système et chronologie, Presses Universitaires de Rennes, 110-129.