Genre

De Arbres

Le genre est une propriété grammaticale par laquelle les mots sont répartis dans différentes classes grammaticales.

Le système de genre en breton comporte un masculin et un féminin. Le système de genre comprend aussi le trait inanimé, beaucoup moins répandu.

Le genre masculin vs. féminin peut être marqué morphologiquement par un morphème dédié, mais il peut aussi être décelable dans la mutation consonantique déclenchée par cet élément sur un autre. On parle alors de système de traits abstraits.


En (1), le nom propre sujet Jañn-Mari n'est pas marqué morphologiquement pour le genre. Il déclenche cependant un morphème d'accord féminin sur l'auxiliaire kaout, 'avoir', révélant un trait abstrait de genre. Les déterminants ne sont pas marqués pour le genre, mais déclenchent une lénition sur le nom adjacent féminin et son adjectif. L'absence de lénition est donc un marquage du masculin. Les démonstratifs synthétiques sont aussi marqués pour le genre par un morphème lié dédié.


(1) Jañn-Mari he-devoa prenet eur bufed koz digand honnez.
Jeanne-Marie 3SGF avait acheté un buffet vieux d'avec celle.là
'Jeanne-Marie avait acheté un vieux buffet d'avec [à] celle-là.' Trégorrois, (Gros 1970:163).


Traits marqués morphologiquement

pronoms

Les pronoms forts indépendants comme les pronoms faibles marquent à la troisième personne les genres masculin et féminin.

On retrouve donc la distinction genrée dans tous les paradigmes formés par incorporation: les paradigmes des pronoms objet proclitiques ou des prépositions fléchies.

Les pronoms écho montrent aussi la distinction genrée.

déterminants

Les déterminants possessifs sont marqués pour le genre à la troisième personne du singulier. Ils y covarient, comme en anglais, avec le genre du possesseur et non du possédé.

adjectifs

Les adjectifs, à de rares exceptions près, sont invariables et ne portent normalement pas de morphème dédié aux marques de genre ou de nombre.

Le genre peut cependant apparaître marqué sur les adjectifs non par un morphème dédié, mais par le biais des mutations consonnantiques.

numéraux cardinaux

Les numéraux cardinaux 2, 3 et 4 marquent en breton une distinction masculin/féminin (Kervella 1995:§438).

verbes

Les verbes, fléchis ou non, ne s'accordent normalement pas en genre (contrairement au français qui montre un accord en genre sur les participes).

Seul le verbe kaout, 'avoir', montre un accord en genre dans certains dialectes.

Traits abstraits

Certains mots portent des traits abstraits de genre. Le genre n'est alors pas décelable sur leur morphologie propre, mais sur le type de mutation consonantique qu'ils peuvent provoquer.

C'est le cas des articles, ou des anaphores comme hini ou unan.

Un adjectif après unan révèle son trait abstrait de genre, qui déclenche une lénition s'il est féminin.


(5) Me m'bo unan vraz
moi 1SG aurai un grand
'J'en aurai une grande.', 'Je prendrai une grande.' Trégorrois, (Gros 1984:215).

Morphologie

Le suffixe du singulatif impose le genre féminin, même lorsque le nom massique sur lequel il s'est affixé est par ailleurs masculin.

Le cardinal 2, lorsqu'il apparaît comme un morphème du duel, varie, lui, selon le genre de la racine sur laquelle il s'affixe.

Variations

Les hésitations de genre marquent clairement les locuteurs non-natifs de la langue.

Cependant, on note des variations, sans doute dialectales, chez les locuteurs natifs aussi.

  • ur gañved
'un siècle'
ur bida, daou vida et ur vida, div vida
'une chèvre, deux chèvres'
ar brezel, div vrezel
'la guerre, deux guerres',
ur c'had, ur gad
'un lièvre'
div pe deir amzer, ou daou pe dri amzer
'deux ou trois moments', Plozévet, Goyat (2012:158)


Horizons comparatifs

Dans d'autres langues, le genre peut être marqué morphologiquement sur des éléments qui n'en portent pas en breton ou en français. En hébreu, le pronom d'adresse 'toi' est différent au masculin et au féminin.


(1) אני מדברת ברטונית, ומה אתך?
ani medaberet bretonit, ve-ma itax/itxa
Je parle.fem breton et-quoi toi.fem/toi.masc
'Je parle breton, et toi?' (une femme s'adresse à un homme ou à une femme)
Hébreu, Boneh 12/2013

Bibliographie

horizons comparatifs

  • Valelia Muni Toke (dir.) 2013. Féminin, masculin :la langue et le genre, Langues et cité, Bulletin de l’observatoire des pratiques linguistiques, pdf.
  • Baider, Fabienne, Edwige Khaznadar et Thérèse Moreau, 2007. 'Les enjeux de la parité linguistique', Nouvelles Questions Féministes, 26 :3, 4-13.
  • Khaznadar, Edwige. 2007. 'Le non-genre académique: doctrine de la domination masculine en France', Nouvelles Questions Féministes, 26 :3, 25-38.