Eme

De Arbres

La préposition eme 'dit' sert à la parole rapportée. C'est une préposition évidentielle.


(1) N'eus forzh ! eme an ozac'h; gwelet a rankan hag ez eo gwir.
ne1 est importance dit le vieux voir R1 dois si R+C,4 est vrai
'Qu'importe ! dit l'homme; Je dois voir si c'est vrai.'
Léonard (Saint Pol de Léon), Milin (1924)


Morphologie

eme, emev-

La racine peut apparaître sous la forme augmentée emeve, emevezo. Châtelier (2016:203) propose que la forme longue sert à exprimer le temps futur ou passé. Cependant, l'argument est peu clair car ses propres traductions de ces formes peuvent être au présent.


mutation

La préposition eme induit une lénition sur l'initiale consonantique de son objet.


(2) Mat ar stal ! eme vap ar roue.
bon le affaire dit1 fils le roi
'Bien, dit le fils du roi.'
Léonard (Saint Pol de Léon), Milin (1922:401)


Les noms communs comme les noms propres peuvent muter.


(3) Echu eo, eme Ber.
fini est dit1 Pierre
'C'est fini, dit Pierre.'
Standard, Kervella (1995:§130)


(4) Ma, eme Vari, me ne ouzon ket ivez.
bah dit Mari moi ne1 sais pas aussi
'Bah, dit Marie, moi je ne sais pas non plus.'
Léonard, Lagadeg (2006:46)


accentuation et catégorie

Eme est accentué sur la dernière syllabe (Kervella 1995:§70). Cette propriété, entre autres, la distingue d'un verbe (contra An Here 1995).


  • Bol
'dit Paul'
Tréguier (Plougrescant), Le Dû (2012:38)


défectivité et répartition dialectale

Eme est défectif dans tous les dialectes, mais dans différentes mesures. À Cléguérec, "eme 'dit, disent', ne s'emploie guère qu'à la 3° personne du singulier et du pluriel de l'indicatif présent" (Thibault 1914:187). C'est aussi le cas en breton standard du XXIe.

Puisque le verbe est défectif dans tous les dialectes, chaque dialecte a des alternatives pour exprimer les évidentiels. À Cléguérec, Thibault (1914:187) donne /aldǫch hẅi/, /męšt-o-hẅi/ 'suivant vous, d'après vous, dites-vous'.


Syntaxe

distribution en incises

Selon Kervella, la préposition apparaît dans des structures d'incises.


(1) Ar c'hezeg, emezañ, n'o devije ket kroget, ma ne vijes ket bet aze.
le 5chevaux dit.il ne 3PL avait pas commenc.é si ne1 serais pas été
'Les chevaux, dit-il, n'auraient pas démarré si tu n'avais été présent.'
J. Riou, cité par Kervella (1995:§704)


Avec une ellipse de la copule, et étant donné son paradigme de pronoms incorporés proche du paradigme verbal, on croirait voir un verbe.


(2) Sorcérés tout émèzo.
sorcièr.erie tout dit.eux
'Pure sorcellerie, disaient-ils.'
Léonard pré-moderne (Lesneven), Burel (2012:34)


Diachronie et horizons comparatifs

Les cognats sont le gallois meddaf et le cornique medhaf 'dis-je'. Selon Ernault (1890a), "Le gallois ebe fi se conjugue exactement comme en breton eme ve. Le verbe armoricain eme(z) paraît donc le résultat d'une fusion entre deux mots restés distincts en gallois, medd et ebe, heb."


Bibliographie

  • Dottin, Georges. 1927. 'Le breton « emezan, dit-il »', Symbolis grammaticis in honorem Ioannis Rozwadowski, Cracovie.
  • Ledunois, Jean-Pierre. 2002. La préposition conjuguée en breton, thèse, Skol-Veur Roazhon, Atelier National de Reproduction des Thèses. (p. 287)